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                                                                                                                                            Date: 20000623

                                                                                                                                        Dossier: T-981-00

Ottawa (Ontario), le 23 juin 2000

DEVANT : MONSIEUR LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                     demandeur

et

L'ORGANISATION NATIONALE DES REPRÉSENTANTES ET

REPRÉSENTANTS INDIENS ET INUITS EN SANTÉ COMMUNAUTAIRE

                                                                                                                                               défenderesse

ORDONNANCE

LE JUGE PELLETIER

ATTENDU que les parties ont réglé une plainte et que le règlement a été approuvé par la Commission canadienne des droits de la personne, comme le prévoit l'article 48 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la Loi);

ATTENDU que les parties veulent que le règlement soit assimilé à une ordonnance de la Cour fédérale, comme le prévoit le paragraphe 48(3), et qu'elles ont présenté une demande sur consentement à cette fin; et


ATTENDU que, par une ordonnance en date du 15 juin 2000, les parties ont été dispensées de l'obligation d'observer les règles 305 à 316 inclusivement des Règles de la Cour fédérale (1998) et que le règlement de la demande sur la base de prétentions écrites a été autorisé;

IL EST PAR LES PRÉSENTES ORDONNÉ que le règlement final conclu entre Sa Majesté et l'ONRRIISC (et les annexes y afférentes), lequel a été signé le 26 avril 2000 et est joint à la présente ordonnance, soit par les présentes assimilé à une ordonnance de cette cour, pour être exécuté contre les parties conformément à ses conditions.

             « J.D. Denis Pelletier »             

Juge

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.


                                                                                                                                            Date: 20000623

                                                                                                                                        Dossier: T-981-00

Ottawa (Ontario), le 23 juin 2000

DEVANT : MONSIEUR LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                     demandeur

et

L'ORGANISATION NATIONALE DES REPRÉSENTANTES ET

REPRÉSENTANTS INDIENS ET INUITS EN SANTÉ COMMUNAUTAIRE

                                                                                                                                               défenderesse

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE PELLETIER

[1]         La Loi canadienne sur les droits de la personne (la Loi) prévoit que certains règlements peuvent être assimilés à des ordonnances de la Cour fédérale et être exécutés comme tels. Cependant, la Loi ne prévoit pas les modalités y afférentes si ce n'est qu'il est prévu que la chose se fait par requête ( « on application » dans la version anglaise). Les Règles ne traitent pas du règlement sommaire d'une demande sur consentement des parties. Les parties ici en cause ont proposé une solution à ce problème, et la Cour est prête à adopter cette solution.


[2]         En 1992, l'Organisation nationale des représentantes et représentants Indiens et Inuits en santé communautaire a déposé une plainte dans laquelle elle alléguait que le Conseil du Trésor du Canada se livrait à des actes de discrimination salariale fondée sur le sexe. En 1997, la plainte a été renvoyée à un tribunal pour décision. Les parties ont convenu que la plainte serait assujettie à la médiation et elles sont arrivées à un règlement. Elles ont signé un règlement qui a été approuvé par la Commission canadienne des droits de la personne. Les parties déclarent maintenant qu'elles veulent que le règlement soit assimilé à une ordonnance de la Cour fédérale et qu'il soit exécuté comme tel.

[3]         Ce genre de mesure est prévu par la Loi, qui est ainsi libellée :


48. (1) Les parties qui conviennent d'un règlement à toute étape postérieure au dépôt de la plainte, mais avant le début de l'audience d'un tribunal des droits de la personne, en présentent les conditions à l'approbation de la Commission.

(2) Dans le cas prévu au paragraphe (1), la Commission certifie sa décision et la communique aux parties.

(3) Le règlement approuvé par la Commission peut, par requête d'une partie ou de la Commission à la Cour fédérale, être assimilé à une ordonnance de cette juridiction et être exécuté comme telle.

48. (1) When, at any stage after the filing of a complaint and before the commencement of a hearing before a Human Rights Tribunal in respect thereof, a settlement is agreed on by the parties, the terms of the settlement shall be referred to the Commission for approval or rejection.

(2) If the Commission approves or rejects the terms of a settlement referred to in subsection (1), it shall so certify and notify the parties.

(3) A settlement approved under this section may, for the purpose of enforcement, be made an order of the Federal Court on application to that Court by the Commission or a party to the settlement.



[4]         Il s'agit de déterminer la procédure à suivre pour arriver au résultat prévu par le législateur. L'emploi de l'expression « on application » figurant dans la version anglaise du paragraphe 48(3) laisse entendre que le document introductif d'instance approprié est un avis de demande. Malheureusement, il n'existe aucune disposition prévoyant le règlement sommaire de demandes alors qu'il existe une procédure permettant de statuer sur les requêtes sur la base de prétentions écrites. Pour remédier à cette lacune, les demandeurs ont présenté une requête dans laquelle ils sollicitent une ordonnance portant que l'affaire doit être réglée comme s'il s'agissait d'une requête présentée conformément à la règle 369.

[5]         Toutefois, l'examen de la version française de la disposition en question fait ressortir un point de vue différent. En effet, dans la version française, le législateur emploie le mot « requête » alors que dans la version anglaise, il emploie le mot « application » . Or, le mot « requête » se traduit habituellement en anglais par « motion » , alors que le mot « application » se traduit habituellement en français par « demande » . Ainsi :



16(2) La Commission canadienne des droits de la personne peut_:

a) faire des recommandations d'ordre général, relatives aux objectifs souhaitables pour les programmes, biens ou arrangements visés au paragraphe (1);

b) sur demande, prêter son concours à l'adoption ou à la mise en oeuvre des programmes, plans ou arrangements visés au paragraphe (1)

...

(17)(2) La Commission peut, par avis écrit à l'auteur de la demande visée au paragraphe (1), approuver le programme si elle estime que celui-ci convient aux besoins particuliers des personnes atteintes d'une déficience.

...17(4) Dans le cas où elle décide de refuser la demande présentée en vertu du paragraphe (1), la Commission envoie à son auteur un avis exposant les motifs du refus.

...

27(2) Dans une catégorie de cas donnés, la Commission peut, sur demande ou de sa propre initiative, décider de préciser, par ordonnance, les limites et les modalités de l'application de la présente loi.

...

43(2.2) Sur demande ex parte, un juge de la Cour fédérale peut, s'il est convaincu, sur la foi d'une dénonciation sous serment, qu'il y a des motifs raisonnables de croire à la présence dans des locaux d'éléments de preuve utiles à l'enquête, signer un mandat autorisant, sous réserve des conditions éventuellement fixées, l'enquêteur qui y est nommé à perquisitionner dans ces locaux.

16(2) The Canadian Human Rights Commission, may

(a) make general recommendations concerning desirable objectives for special programs, plans or arrangements referred to in subsection (1); and

(b) on application, give such advice and assistance with respect to the adoption or carrying out of a special program, plan or arrangement referred to in subsection (1) as will serve to aid in the achievement of the objectives the program, plan or arrangement was designed to achieve.

...

17(2) The Commission may, by written notice to a person making an application pursuant to subsection (1), approve the plan if the Commission is satisfied that the plan is appropriate for meeting the needs of persons arising from a disability.

...

17(4) When the Commission decides not to grant an application made pursuant to subsection (1), it shall send a written notice of its decision to the applicant setting out the reasons for its decision.

...

27(2) The Commission may, on application or on its own initiative, by order, issue a guideline setting out the extent to which and the manner in which, in the opinion of the Commission, any provision of this Act applies in a class of cases described in the guideline

...

43(2.2) Where on ex parte application a judge of the Federal Court is satisfied by information on oath that there are reasonable grounds to believe that there is in any premises any evidence relevant to the investigation of a complaint, the judge may issue a warrant under the judge's hand authorizing the investigator named therein to enter and search those premises for any such evidence subject to such conditions as may be specified in the warrant.


[6]         Si l'on compare ces dispositions, on remarque que l'expression « application » se traduit presque toujours par « demande » , ce qui correspond à l'usage, dans les Règles de la Cour fédérale (1998) :


2 « _demande_ » "application"

« _demande_ » Instance visée à la règle 300. (application)

2 « _requête_ » Document par lequel une personne demande à la Cour de se prévaloir des présentes règles ou de les faire appliquer. (motion)

2 "application" « _demande_ »

"application" means a proceeding referred to in rule 300. (demande)

2 "motion" « _requête_ »

"motion" means a request to the Court under, or to enforce, these Rules. (requête)



[7]         Il est donc important de noter qu'au paragraphe 48(3), l'expression « upon application » est rendue par l'expression « par requête » , ce qui laisse entendre qu'une demande visant à assimiler un règlement à une ordonnance peut être présentée par voie de requête plutôt que par voie de demande. En vertu de l'article 13 de la Loi sur les langues officielles, les deux versions d'un texte ont également force de loi ou même valeur.


13. Tous les textes qui sont établis, imprimés, publiés ou déposés sous le régime de la présente partie dans les deux langues officielles le sont simultanément, les deux versions ayant également force de loi ou même valeur.

13. Any journal, record, Act of Parliament, instrument, document, rule, order, regulation, treaty, convention, agreement, notice, advertisement or other matter referred to in this Part that is made, enacted, printed, published or tabled in both official languages shall be made, enacted, printed, published or tabled simultaneously in both languages, and both language versions are equally authoritative.


[8]         Étant donné que les deux versions des textes ont force de loi ou même valeur, on ne saurait régler un conflit apparent en retenant une version plutôt que l'autre. Il faut interpréter les deux versions en réglant les différences d'une façon qui est conforme à chaque version : Driedger on the Construction of Statutes, 3e édition, p. 215 et suivantes.


[9]         En l'espèce, l'examen des divers cas où les mots « on application » sont employés dans la version anglaise montre que ces mots sont employés dans le sens des mots « upon request » et non dans un sens technique. Ainsi, en vertu du paragraphe 16(2), la Commission peut « on application » (sur demande) prêter son concours à certains programmes. À coup sûr, le mot « application » n'est pas employé dans un sens technique en pareil cas, étant donné qu'il n'est pas sensé de parler d'une procédure par voie d'avis de demande dans ce contexte. Il en va de même pour le paragraphe 17(2), qui permet à la Commission « on application or on its own initiative » (sur demande ou de sa propre initiative) de préciser les limites et les modalités de l'application de la Loi. Cela étant, l'emploi du mot « application » au paragraphe 48(3) peut être interprété comme se rapportant au fait de demander à la Cour fédérale d'agir, plutôt que comme visant à préciser le moyen procédural précis à employer.

[10]       Cette interprétation est conforme à la version française. Harrap's French-English Anglais-Français Standard Dictionary London 1994 définit le mot « requête » comme suit : « request, suit, petition » , ce qui a le même sens que le fait de présenter une requête. Par conséquent, il n'y a pas lieu d'interpréter les mots « upon application » figurant au paragraphe 48(3) comme signifiant « au moyen d'un avis de demande » . En matière sommaire, il est plus conforme à la pratique de procéder par voie de requête, ce qui est fort heureusement conforme à la version française du paragraphe 48(3). Par conséquent, il serait possible de demander à la Cour d'assimiler un règlement à l'une de ses ordonnances en présentant une requête avec affidavit à l'appui et, sur requête de la partie requérante, l'affaire pourrait être réglée sur la base des documents sans comparution des parties.

[11]       Ce n'est pas ce qui a été fait en l'espèce, mais la règle 57 prévoit qu'un document introductif d'instance ne doit pas être annulé simplement parce qu'un autre document introductif d'instance aurait dû être utilisé. La demande doit donc être examinée au fond.


[12]       Puisqu'elles ont engagé l'instance au moyen d'une demande, les parties cherchent à être dispensées de l'obligation d'observer toutes les mesures procédurales qui s'appliquent en pareil cas puisque la demande a été présentée sur consentement. Elles présentent donc une requête conformément à la règle 4 et cherchent à être dispensées de l'obligation d'observer les règles 305 à 316 inclusivement et à obtenir le règlement de la demande sur dossier.

[13]       La règle 4 est la règle des lacunes, qui permet à la Cour de remédier à toute lacune des Règles par analogie avec les Règles elles-mêmes ou avec les règles de procédure qui s'appliquent dans la province à laquelle le litige est le plus étroitement lié. La partie 5 ne prévoit pas le règlement sommaire sur consentement. Étant donné qu'il n'existe aucune question litigieuse entre les parties, il n'y a logiquement pas lieu d'obliger les parties à préparer et à déposer des dossiers et à demander la tenue d'une audience, uniquement en vue de présenter au juge présidant l'audience une ordonnance sur consentement. La règle 369 qui traite des requêtes peut être utilisée par analogie en vue de permettre le règlement d'une demande sur la base de documents seulement.

[14]       J'ai minutieusement examiné l'affaire et j'ai pris connaissance du règlement; je suis convaincu que la procédure adoptée par les parties permet à la Cour de leur accorder l'ordonnance qu'elles demandent. Je rendrai donc une ordonnance dispensant les parties de l'obligation d'observer les règles 305 à 316 des Règles de la Cour fédérale (1998), et autorisant le règlement sur dossier de l'avis de demande déposé dans le dossier T-981-00.


ORDONNANCE

Il est par les présentes ordonné ce qui suit :

1-          Les parties sont par les présentes dispensées de l'obligation d'observer les règles 305 à 316 inclusivement des Règles de la Cour fédérale (1998), à l'égard de l'avis de demande déposé dans le dossier T-981-00.

2-          L'avis de demande déposé dans le dossier T-981-00 peut être réglé sur la base de prétentions écrites comme s'il s'agissait d'une requête assujettie à la règle 369 des Règles de la Cour fédérale (1998).

          « J.D. Denis Pelletier »           

Juge

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                   T-981-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :                 Le procureur général du Canada c. l'Organisation nationale des représentantes et représentants Indiens et Inuits en santé communautaire

AFFAIRE ENTENDUE SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE du juge Pelletier en date du 23 juin 2000

ONT COMPARU :

Morris Rosenberg                                   

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)                                                               pour le demandeur

Kathleen Mahoney                                                            pour l'Organisation nationale des

Calgary (Alberta)                                                               représentantes et représentants Indiens et Inuits en santé communautaire, défenderesse

Fiona Keith                                                                        pour la Commission canadienne

Ottawa (Ontario)                                                               des droits de la personne, défenderesse

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