Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20060308

Dossier : T‑1313‑05

Référence : 2006 CF 297

Ottawa (Ontario), le 8 mars 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE KELEN

 

ENTRE :

EUGENE ESQUEGA, BRIAN KING, GWENDOLINE KING, HUGH KING SR., RITA KING, WAYNE KING, LAWRENCE SHONIAS et OWEN BARRY

 

demandeurs

 

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

  • [1] Le défendeur a présenté une requête :

1.  pour que soit rendue une ordonnance radiant les demandes de jugement déclaratoire fondées sur l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.‑U.) (la Charte), en ce qui a trait à l’article 75 de la Loi sur les Indiens, L.R.C. 1985, ch. I‑5;

 

2.  subsidiairement, pour que soit rendue, en application du paragraphe 18.4(2) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7, une ordonnance prescrivant que les parties de l’avis de demande se rapportant à l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés soient instruites comme s’il s’agissait d’une action;

 

3.  subsidiairement encore, pour que soit rendue, conformément à l’article 8 des Règles des Cours fédérales, une ordonnance modifiant l’ordonnance de la Cour rendue le 6 septembre 2005, afin que soit prorogé le délai de signification et de dépôt des affidavits et des pièces du défendeur jusqu’à 30 jours après la date de l’ordonnance qui sera rendue dans cette requête;

 

4.  pour que soit rendue, conformément à l’article 151 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, une ordonnance déclarant confidentiels le rapport d’enquête de Larry Dyck et le rapport de recommandation de Christine Aubin contenus dans le dossier de la Cour.

 

Les faits

 

  • [2] La procédure d’origine est une demande de contrôle judiciaire du décret 2005‑1289 en date du 28 juin 2005 qui annulait l’élection du 8 novembre 2004 des neuf conseillers de la bande de la Première nation de Gull Bay (la bande) conformément à l’article 79 de la Loi sur les Indiens, au motif que trois d’entre eux ne pouvaient pas, selon le paragraphe 75(1), être candidats à l’élection parce qu’ils ne résidaient pas dans la réserve lors de leur mise en candidature. Les demandeurs sont huit des neuf conseillers de la bande dûment élus, soumis aux dispositions de la Loi sur les Indiens et du Règlement sur les élections au sein des bandes d’Indiens, C.R.C., ch. 952 (le Règlement sur les élections).

 

L’appel formé contre l’élection

 

  • [3] Après l’élection, trois membres de la bande ont déposé, conformément à l’alinéa 12(1)c) du Règlement sur les élections, des « appels à l’égard de l’élection », dans lesquels ils allèguent que sept candidats élus étaient inéligibles à la charge de conseiller parce qu’ils ne résidaient pas dans la réserve ainsi que l’exige le paragraphe 75(1) de la Loi sur les Indiens. En application de l’article 13 du Règlement sur les élections, le directeur de l’administration des bandes, au ministère des Affaires indiennes et du Nord (le MAIN), a engagé le 25 février 2005 une tierce partie indépendante pour qu’elle vérifie si les conseillers ainsi récusés résidaient ou non dans la réserve. Dans un rapport daté du 26 avril 2005, l’enquêteur concluait que trois des demandeurs, Rita King, Gwendoline King et Brian King, ne résidaient pas dans la réserve au moment de leurs mises en candidature. En application de l’alinéa 14c) du Règlement sur les élections, le ministre a recommandé que le gouverneur en conseil annule l’élection.

 

La décision contestée

 

  • [4] Le 28 juin 2005, par le décret 2005‑1289, le gouverneur en conseil annulait l’élection des neuf conseillers de la bande de la Première nation de Gull Bay. Le 28 juillet 2005, les demandeurs déposaient une demande de contrôle judiciaire à l’encontre de cette décision. L’avis de demande sollicitait un redressement, notamment sous la forme d’un jugement déclaratoire, rendu en application de l’article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982 et portant que l’article 75 de la Loi sur les Indiens est invalide dans la mesure où il est incompatible avec l’article 15 de la Charte. Le 4 janvier 2006, les demandeurs déposaient et signifiaient un avis de question constitutionnelle au procureur général du Canada et à tous les procureurs généraux des provinces, conformément à l’article 57 de la Loi sur les Cours fédérales.

 

L’injonction interlocutoire

 

[5]  Le 10 août 2005, le juge François Lemieux, de la Cour, accordait aux demandeurs en attendant la décision finale sur la demande de contrôle judiciaire, une injonction interlocutoire qui interdisait à la Première nation de Gull Bay de tenir l’élection partielle devant avoir lieu le 12 août 2005, et qui réintégrait dans leur charge les neuf conseillers de la bande dûment élus le 8 novembre 2004. Voir la décision Première nation de Gull Bay c. Canada (Procureur général), 2005 CF 1097.

 

L’urgence

 

  • [6] Les demandeurs ont été élus pour occuper leur charge durant deux ans, et la prochaine élection du chef et du conseil de la Première nation de Gull Bay doit avoir lieu en novembre 2006. L’élection du prochain conseil de la bande de Gull Bay rendra théorique la demande de contrôle judiciaire si une décision concernant cette demande n’est pas rendue d’ici là. Reconnaissant la nécessité d’accélérer l’audition de la demande avant qu’elle devienne théorique, le juge Lemieux a ordonné qu’elle ait lieu rapidement et rendu une ordonnance de mise au rôle par consentement des parties le 6 septembre 2005. Ainsi qu’ils devaient le faire, les demandeurs ont signifié et déposé leurs affidavits le 5 octobre 2005, dans les 30 jours suivant l’ordonnance de mise au rôle. Le défendeur n’a pas déposé ses affidavits dans les 30 jours suivants comme il devait le faire. Il a plutôt déposé le 4 novembre 2005 un « projet » d’avis de requête. Le défendeur a déposé son avis de requête le 12 décembre 2005.

 

Les textes législatifs applicables

 

[7]  Les textes intéressant la requête sont les suivants :

1.  la Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.‑U.);

 

2.  la Loi sur les Indiens, L.R.C. 1985, ch. I‑5;

 

3.  le Règlement sur les élections au sein des bandes d’Indiens, C.R.C., ch. 952;

 

4.  la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7;

 

5.  les Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106.

 

 

Les extraits applicables de ces textes sont reproduits à l’appendice « A ».

 

Les points litigieux

 

  • [8] Les points litigieux sont les suivants :

1.  Les redressements sollicités par le défendeur sont‑ils chose jugée ou constituent‑ils un abus de la procédure de la Cour?

 

2.  La Cour devrait‑elle rendre une ordonnance radiant les demandes de jugement déclaratoire présentées par les demandeurs en application de l’article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982 en ce qui a trait à l’article 75 de la Loi sur les Indiens et à l’article 15 de la Charte?

 

3.  Subsidiairement, la Cour devrait‑elle rendre une ordonnance prescrivant que les parties de l’avis de demande se rapportant à l’article 15 de la Charte soient instruites comme s’il s’agissait d’une action?

 

4.  La Cour devrait‑elle rendre une ordonnance modifiant l’ordonnance qu’elle a rendue le 6 septembre 2005, afin que soit prorogé le délai de signification et de dépôt des affidavits et des pièces du défendeur?

 

5.  La Cour devrait‑elle rendre une ordonnance déclarant confidentiels le rapport d’enquête de Larry Dyck et le rapport de recommandation de Christine Aubin?

 

Analyse

 

Point n° 1 :   Les redressements sollicités par le défendeur sont‑ils chose jugée ou constituent‑ils un abus de la procédure de la Cour?

 

 

  • [9] Selon les demandeurs, la requête du défendeur pour que soit radiée une partie de la demande, ou subsidiairement pour que soit prorogé le délai de dépôt de ses affidavits ou pour que soit converti en action l’argument fondé sur la Charte sont chose jugée puisque le juge Lemieux a déjà statué sur ces aspects dans des ordonnances datées du 10 août 2005 et du 6 septembre 2005 (voir l’arrêt Angle c. Canada (Ministre du Revenu national – M.R.N.), [1975] 2 R.C.S. 248.). Les demandeurs font valoir que chacun des trois redressements demandés dans la requête constitue un abus de la procédure de la Cour.

 

  • [10] Selon les demandeurs, le juge Lemieux a décidé, par ses ordonnances, qu’ils avaient des arguments apparemment très fondés qu’il convenait d’étudier dans une procédure de contrôle judiciaire et non dans une action, et que le défendeur ne devrait pas bénéficier d’un délai additionnel pour déposer ses affidavits. Par son ordonnance rendue le 10 août 2005 dans l’affaire Première nation de Gull Bay c. Canada, susmentionnée, le juge Lemieux écrivait aux paragraphes 23 et 28 que les demandeurs avaient produit un solide commencement de preuve selon lequel le décret 2005‑1289 était invalide, mais il ne s’est pas prononcé expressément sur la valeur de l’argument fondé sur la Charte :

¶ 23   À mon avis, l’avocate des demandeurs a produit un solide commencement de preuve selon lequel le décret est invalide pour les motifs avancés devant la Cour.

 

[...]

 

¶ 28   Je suis également d’avis que les points d’interprétation de la législation soulevés par l’avocate des demandeurs font intervenir deux importantes questions préliminaires : le gouverneur en conseil peut‑il, en vertu de l’alinéa 97c) de la Loi, annuler l’élection de candidats éligibles? et la notion de « résidence » a‑t‑elle été validement appliquée. Je ne m’exprime pas sur la pertinence du point soulevé au regard de la Charte, puisque c’est un point sur lequel on n’a pas insisté devant moi.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

Le juge Lemieux ne s’est pas prononcé sur la pertinence de l’argument fondé sur la Charte, et cet aspect n’est pas chose jugée. Il est loisible au défendeur de présenter sa requête visant à faire radier de l’avis de demande l’argument fondé sur la Charte s’il croit que cet argument n’a aucune chance d’être retenu.

 

  • [11] Le défendeur peut aussi, en application de l’article 8 des Règles des Cours fédérales, présenter sa requête en prorogation du délai de dépôt de ses affidavits. L’ordonnance de mise au rôle rendue par le juge Lemieux le 6 septembre 2005 n’empêche pas une partie de s’adresser à la Cour pour obtenir la prorogation ou l’abrègement d’un délai si elle a une bonne raison de le faire. Je récuse l’argument selon lequel, en vertu de la décision Martin c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration)(1999), 162 F.T.R. 127 (1re inst.), le défendeur ne pouvait solliciter une prorogation du délai qu’en interjetant appel de l’ordonnance de mise au rôle rendue par la Cour le 6 septembre 2005.

 

  • [12] Finalement, dans la décision Première nation de Gull Bay c. Canada, précitée, le juge Lemieux n’a pas statué sur une requête visant à convertir en action la demande de contrôle judiciaire.

 

  • [13] Par conséquent, il n’a pas été statué auparavant sur les redressements sollicités par le défendeur dans sa requête, et lesdits redressements ne sont pas chose jugée. Ils ne constituent pas non plus un abus de la procédure de la Cour du fait qu’ils seraient chose jugée.

 

Point n° 2 :  La Cour devrait‑elle rendre une ordonnance radiant les demandes de jugement déclaratoire présentées par les demandeurs en application de l’article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982 en ce qui a trait à l’article 75 de la Loi sur les Indiens et à l’article 15 de la Charte?

 

  • [14] À l’appui de sa requête en radiation, le défendeur dit que les redressements sollicités par les demandeurs selon l’article 15 de la Charte constituent un abus de la procédure, qu’ils sont scandaleux, frivoles et vexatoires et qu’ils sont manifestement irréguliers au point de n’avoir aucune chance d’être retenus. Plus précisément :

a)   les demandeurs n’ont pas l’intérêt requis pour solliciter un jugement déclaratoire selon la Charte;

 

b)   les demandeurs n’ont pas produit une preuve suffisante au soutien de leur argument fondé sur la Charte;

 

c)   le jugement déclaratoire au titre de la Charte ne saurait offrir la réparation souhaitée.

 

  • [15] Les Règles des Cours fédérales ne renferment aucune disposition conférant à la Cour le pouvoir de radier tout ou partie d’un avis de demande. Dans l’arrêt David Bull Laboratories (Canada) Inc. c. Pharmacia Inc.(1994), 176 N.R. 48 (C.A.F.), le juge Strayer, de la Cour d’appel fédérale, écrivait au paragraphe 15 que la Cour possède le pouvoir inhérent de « rejeter sommairement un avis de requête qui est manifestement irrégulier au point de n’avoir aucune chance d’être accueilli ».

 

  • a) Intérêt pour agir

[16]  Selon le défendeur, les demandeurs n’ont pas l’intérêt requis pour prétendre que l’article 75 de la Loi sur les Indiens est discriminatoire à leur endroit, et cela parce que chacun des demandeurs a déposé un affidavit attestant qu’il résidait dans la réserve à l’époque pertinente. La position adoptée par le défendeur ne s’accorde pas avec le décret, lequel annulait l’élection parce que le défendeur avait déclaré que trois des demandeurs ne résidaient pas dans la réserve à l’époque pertinente. Pour ce motif, les demandeurs ont manifestement l’intérêt requis pour plaider la discrimination.

 

b)  Caractère suffisant de la preuve dans le contexte de la Charte

  • [17] Dans l’arrêt MacKay c. Manitoba, [1989] 2 R.C.S. 357, le juge Cory écrivait que les décisions relatives à la Charte ne doivent pas être rendues dans un vide factuel, qu’un fondement factuel insuffisant peut être fatal à des demandes de redressement et que, dans les circonstances qui le justifient, la connaissance d’office pourrait suppléer à l’insuffisance de la preuve présentée à la Cour. Le juge Cory s’exprimait ainsi, aux paragraphes 9, 19 et 20 :

¶ 9 Les décisions relatives à la Charte ne doivent pas être rendues dans un vide factuel. Essayer de le faire banaliserait la Charte et produirait inévitablement des opinions mal motivées. […]

 

[...]

 

¶ 19 [...] Il est bien possible qu’on puisse prendre connaissance d’office de certains faits sociaux d’ordre général mentionnés par les appelants, mais il y a ici une absence totale de fondement factuel à l’appui de leurs allégations.

 

¶ 20   Un contexte factuel est d’une importance fondamentale dans le présent pourvoi. On ne prétend pas que c’est l’objet visé par la loi qui viole la Charte, mais ses conséquences. Si les conséquences préjudiciables ne sont pas établies, il ne peut y avoir de violation de la Charte ni même de cause. Le fondement factuel n’est donc pas une simple formalité qui peut être ignorée et, bien au contraire, son absence est fatale à la thèse présentée par les appelants.

 

 

  • [18] J’ai déjà conclu que certains faits permettaient au juge des demandes de dire que les demandeurs ont l’intérêt requis pour solliciter un jugement déclaratoire. J’examinerai donc maintenant si les demandeurs ont produit une preuve suffisante pour éventuellement étayer les trois volets du critère exposé par le juge Iacobucci dans l’arrêt Law c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration ), [1999] 1 R.C.S. 497, et pour établir une violation du droit conféré aux demandeurs par l’article 15 de la Charte.

 

  • [19] Dans l’arrêt Law, le juge Iacobucci écrivait au paragraphe 88 que la Cour doit dire si une loi contestée établit entre le demandeur et d’autres personnes une différence de traitement fondée sur un motif énuméré ou analogue, et si la loi en question a un objet ou un effet discriminatoire au sens de la garantie d’égalité :

¶ 88  […]

 

(2) La démarche que la Cour a adoptée et qu’elle applique régulièrement relativement à l’interprétation du paragraphe 15(1) repose sur trois questions primordiales :

 

(A) la loi a‑t‑elle pour objet ou pour effet d’imposer une différence de traitement entre le demandeur et d’autres personnes?

 

(B) la différence de traitement est‑elle fondée sur un ou plusieurs des motifs énumérés ou des motifs analogues?

 

(C) la loi en question a‑t‑elle un objet ou un effet discriminatoires au sens de la garantie d’égalité?

 

  • [20] Lors de l’audition de la requête, le défendeur a reconnu que les demandeurs étaient soumis à une différence de traitement fondée sur le motif analogue de l’« autochtonité‑lieu de résidence ». Le défendeur partage l’avis des demandeurs selon lequel l’arrêt de la Cour suprême du Canada Corbiere c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), [1999] 2 R.C.S. 203, permet d’affirmer que l’autochtonité‑lieu de résidence est un motif analogue aux motifs énumérés de discrimination dont parle le paragraphe 15(1) de la Charte. S’exprimant pour les juges majoritaires, les juges McLachlin et Bastarache écrivaient au paragraphe 10 que l’autochtonité‑lieu de résidence sera toujours un motif analogue lorsque la Cour procédera à un examen au regard de l’article 15 de la Charte :

¶ 10   Si les motifs du juge L’Heureux‑Dubé visent à faire dépendre du contexte l’existence même des motifs énumérés et des motifs analogues, nous devons, avec égards, exprimer notre désaccord. Si le motif de l’« autochtonité‑lieu de résidence » doit constituer un motif analogue (et nous convenons avec le juge L’Heureux‑Dubé que ce devrait être le cas), il doit alors constituer un indicateur permanent de discrimination législative potentielle, que la contestation vise un crédit d’impôt gouvernemental, un droit de vote ou un régime de pension. Ceci étant établi, nous passons maintenant à la troisième étape de l’analyse, soit la question de savoir si, de par son objet ou ses effets, la distinction est source de discrimination à la lumière des faits.

[Non souligné dans l’original.]

 

 

 

  • [21] Dans l’arrêt Corbiere, la Cour suprême a jugé que le paragraphe 77(1) de la Loi sur les Indiensest l’assise des décisions gouvernementales fondées sur le motif de l’autochtonité‑lieu de résidence. L’article 75 de la Loi sur les Indiens renferme lui aussi une condition de résidence et sert de fondement aux décisions gouvernementales prises en vertu de l’article 79. Puisque la décision contestée en l’espèce est un décret fondé sur un constat de mise en candidature de personnes inéligibles selon l’article 75, il serait loisible au juge des demandes de dire que c’est une décision fondée sur le motif analogue de l’autochtonité‑lieu de résidence.

 

  • [22] Le troisième volet du critère exposé dans l’arrêt Law est le suivant :

[…] la loi en question a‑t‑elle un objet ou un effet discriminatoires au sens de la garantie d’égalité?

 

 

  • [23] Pour savoir si la distinction établie entre les demandeurs hors réserve et les membres de la bande vivant dans la réserve est discriminatoire, le juge des demandes prendra notamment en considération les facteurs contextuels exposés par M. le juge Iacobucci dans l’arrêt Law, au paragraphe 88 :

¶ 88 [...] 

 

(A) La préexistence d’un désavantage, de stéréotypes, de préjugés ou de vulnérabilité subis par la personne ou le groupe en cause. Les effets d’une loi par rapport à l’objectif important du par. 15(1) pour ce qui est de la protection des personnes et des groupes qui sont vulnérables, défavorisés ou qui sont membres de « minorités distinctes et isolées » , doivent toujours constituer une considération majeure. Bien que l’appartenance du demandeur à un ou plusieurs groupes historiquement favorisés ou défavorisés ne signifie pas, en soi, qu’il y a ait eu atteinte à un droit, la présence de ces facteurs préexistants portera à conclure qu’il y a eu violation du par. 15(1).

 

(B) La correspondance, ou l’absence de correspondance, entre le ou les motifs sur lesquels l’allégation est fondée et les besoins, les capacités ou la situation propres au demandeur ou à d’autres personnes. Bien que le simple fait que les dispositions législatives contestées tiennent compte des caractéristiques et de la situation personnelles du demandeur ne suffira pas nécessairement pour faire rejeter une allégation fondée sur le par. 15(1), il sera généralement plus difficile de démontrer l’existence de discrimination lorsque la loi prend en considération la situation véritable du demandeur d’une manière qui respecte sa valeur en tant qu’être humain ou que membre de la société canadienne, et il sera moins difficile de le faire lorsque la loi fait abstraction de la situation véritable du demandeur.

 

(C) L’objet ou l’effet d’amélioration de la loi contestée eu égard à une personne ou un groupe défavorisés dans la société. Un objet ou un effet d’amélioration conforme à l’objet du par. 15(1) de la Charte ne portera vraisemblablement pas atteinte à la dignité humaine de personnes favorisées lorsque l’exclusion de ces dernières correspond en grande partie aux besoins plus grands ou à la situation différente propres au groupe défavorisé visé par les dispositions législatives. Ce facteur a une plus grande pertinence lorsque l’allégation fondée sur le par. 15(1) est faite par un membre favorisé de la société.

 

et

 

(D) La nature et l’étendue du droit touché par la loi contestée. Plus les effets des dispositions législatives sont graves et localisés pour le groupe touché, plus il est probable que la différence de traitement à la source de ces effets soit discriminatoire au sens du par. 15(1).

 

[Non souligné dans l’original.]

 

  • [24] Il m’est impossible de dire que les demandeurs n’ont produit aucune preuve se rapportant à l’effet éventuellement discriminatoire de la disposition législative contestée. Les demandeurs ont déposé les affidavits suivants dans la présente affaire :

a)  11 affidavits déposés le 3 août 2005 à l’appui de leur requête en injonction interlocutoire présentée au juge Lemieux le 8 août 2005, requête qu’il a accordée;

 

b)  21 affidavits déposés le 5 octobre 2005 à l’appui de leur avis de demande de contrôle judiciaire;

 

c)  un affidavit déposé le 30 novembre 2005 par le chef Wilfred King au soutien de leur requête présentée le 5 décembre 2005 devant la protonotaire Milczynski, et qui indiquait la date de la requête dont la Cour est actuellement saisie.

 

  • [25] Les affidavits des demandeurs mentionnent que de nombreux logements sis sur la réserve numéro 55 de Gull River ont été jugés inhabitables et que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien fournit aux membres de la bande des chambres au Ramada Inn et à l’hôtel Prince Arthur, à Thunder Bay. Les maisons sont inhabitables pour une foule de raisons, notamment les moisissures, l’absence d’eau courante, l’absence d’électricité et la mauvaise qualité des égouts. Le mécontentement dans la réserve s’est manifesté par des incendies à répétition, des introductions par effraction et des actes de vandalisme commis aux bureaux de la bande et au poste de police. L’affidavit de Franco Crupi, établi le 28 juillet 2005, mentionne qu’environ 400 membres de la Première nation de Gull Bay vivent dans la réserve, occupant quelque 83 maisons, dont beaucoup sont contaminées par des moisissures ou ne répondent pas aux normes et pourraient être déclarées inhabitables. Environ 40 résidents de la réserve vivent actuellement au Ramada Inn et à l’hôtel Prince Arthur, parce que les logements sont fortement contaminés par des moisissures. Les frais d’hôtel sont d’environ 80 000 à 100 000 $ par mois.

 

  • [26] La crise du logement qui sévit dans la réserve est, semble‑t‑il, d’une importance cruciale pour les demandeurs. La disposition législative contestée, qui a pour effet d’annuler l’élection des demandeurs, empêcherait les membres hors réserve de la bande qui ont été élus au conseil de s’attaquer à la pénurie de logements, et c’est notamment à cause de cette pénurie que tant de membres de la bande vivent en dehors de la réserve. Si les membres hors réserve ne peuvent pas participer à l’administration de la bande en devenant des conseillers, ils n’auront sans doute pas la possibilité de s’attaquer à la crise du logement, un aspect auquel ils ont toutes les raisons de s’intéresser.

 

  • [27] Les affidavits des demandeurs concernent la nature et l’étendue de l’intérêt en cause, à savoir l’exclusion de leur participation à l’administration de la bande. Ainsi, l’affidavit établi le 29 juillet 2005 par Eugene Esquega mentionne, aux paragraphes 11, 12, 15 et 19, que des services importants destinés aux membres de la bande ont été réduits ou supprimés par suite du décret 2005‑1289 :

[traduction]

11.  Quand je siège au conseil de la Première nation de Gull Bay, je travaille dans l’équipe spéciale en tant que directeur du logement et des infrastructures, avec Edmond King, qui a travaillé durant de nombreuses années pour la Société canadienne d’hypothèques et de logement (la SCHL).

 

12.  Je me suis consacré durant deux ans et demi à toutes les formalités et négociations nécessaires pour procurer de nouveaux logements à la population de la réserve n° 55 de Gull River, et aucun objectif n’a encore été atteint, en raison des appels relatifs à l’élection, ainsi que des difficultés rencontrées avec le MAIN et avec des gestionnaires de l’extérieur.

 

[...]

 

15.  L’actuelle liste de logements de la Première nation de Gull Bay montre qu’il faut environ quatre‑vingt‑dix (90) logements pour réduire l’important surpeuplement des logements actuels de la réserve, pour réintégrer les quelque quarante (40) membres de la réserve qui vivent en ce moment au Ramada Inn et à l’hôtel Prince Arthur de Thunder Bay et pour loger les membres hors réserve qui voudraient revenir dans la réserve n° 55 de Gull River.

 

[...]

 

19.  Le chef et le conseil, destitués par le décret 2005‑1289, assistent régulièrement aux réunions et s’emploient de concert et avec résolution à achever les travaux d’habitation, de traitement des eaux, d’amélioration de l’approvisionnement en électricité et d’établissement de programmes de santé, ainsi qu’à établir un plan stratégique de développement économique et autres projets nécessaires pour remédier aux mauvaises conditions de vie de la réserve n° 55 de Gull River.

 

  • [28] Quel que soit le poids qui sera donné à cette preuve par le juge des demandes, on ne saurait dire à ce stade que les demandeurs n’ont produit aucune preuve susceptible d’établir une discrimination.

 

  • [29] Je suis également d’avis que cet examen au titre de l’article 15 est sans doute l’une des circonstances envisagées par le juge Cory dans l’arrêt MacKay c. Manitoba, précité, où la Cour peut prendre connaissance d’office des faits susceptibles de suppléer à l’insuffisance des affidavits. Le désavantage historique subi par les membres hors réserve d’une bande auxquels est nié le droit de participer à l’administration de la bande est bien connu en droit, tout comme l’importance de l’intérêt en cause. La Cour suprême du Canada s’est penchée sur ces deux facteurs dans l’arrêt Corbiere c. Canada, précité. Les juges McLachlin et Bastarache écrivaient ce qui suit, au paragraphe 17 :

¶ 17 Appliquant les facteurs énoncés dans Law qui sont pertinents en l’espèce -- la pré‑existence d’un désavantage ainsi que la correspondance du droit touché et son importance --, nous concluons que la réponse à cette question est affirmative. La distinction reprochée perpétue le désavantage historique vécu par les membres hors réserve des bandes indiennes en les privant de leur droit de voter et de participer à l’administration de leur bande. Ces personnes ont des intérêts importants à faire valoir en ce qui concerne l’administration de la bande, ce que la distinction les empêche de faire. Ils sont copropriétaires de l’actif de la bande. Qu’ils y vivent ou non, la réserve est leur territoire et celui de leurs enfants. En tant que membres de la bande ils sont représentés par le conseil de la bande auprès de la communauté en général, tant au sein des organisations autochtones que dans le cadre des négociations avec le gouvernement. Bien qu’il existe des sujets d’intérêt purement local qui ne touchent pas aussi directement les intérêts des membres hors réserve des bandes indiennes, la privation complète de leur droit de voter et de participer à l’administration de leur bande a pour effet de les traiter comme des individus moins dignes de reconnaissance et n’ayant pas droit aux mêmes avantages et ce, non pas parce que leur situation justifie ce traitement, mais uniquement parce qu’ils vivent à l’extérieur de la réserve. L’importance du droit touché ressort des conclusions de la Commission royale sur les peuples autochtones, Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones (1996), vol. 1, Un passé, un avenir, aux pp. 147 à 206. La Commission royale écrit ceci dans le vol. 4, Perspectives et réalités, à la p. 586 :

 

Tout au long des audiences, les autochtones ont rappelé à la Commission qu’il est essentiel pour eux de préserver et d’enrichir leur identité culturelle quand ils vivent en milieu urbain. L’identité autochtone est l’essence de l’existence des peuples autochtones. La préservation de cette identité est donc un objectif fondamental et valorisant pour les autochtones citadins.

 

Et à la p. 525 :

De plus, les autochtones citadins associent l’identité culturelle à la notion d’assise territoriale ou de territoire ancestral. Pour nombre d’entre eux, ces deux concepts sont indissociables. [. . .] Il est important pour les autochtones citadins de pouvoir s’identifier à un lieu ancestral, en raison des rituels, des cérémonies et des traditions qui y sont associés, des gens qui y vivent, du sentiment d’appartenance, du lien avec une communauté ancestrale et de la possibilité d’accéder à la famille, à la communauté et aux anciens.

[Non souligné dans l’original.]

 

  • [30] Pour ces motifs, il m’est impossible de conclure que la demande portant sur le point de savoir si l’article 75 de la Loi sur les Indiens « a un objet ou un effet qui est discriminatoire au sens de la garantie d’égalité » est dépourvue de toute chance d’être accueillie. Ce seuil, dans une requête en radiation, n’est pas celui de la prépondérance de la preuve, lequel sera requis pour que les demandeurs obtiennent gain de cause durant l’instruction de leur demande au fond. C’est au juge qui entendra la demande qu’il appartiendra de décider si ce seuil est atteint.

 

  • c) Le jugement déclaratoire n’accordera pas la réparation souhaitée

 

  • [31] Selon le défendeur, les demandeurs voudraient que le décret soit déclaré invalide, ce qui aurait pour effet de rétablir les résultats de l’élection du 8 novembre 2004 de la Première nation de Gull Bay. Toutefois, si les demandeurs réussissent à obtenir un jugement déclaratoire portant que l’article 75 de la Loi sur les Indiens est incompatible avec l’article 15 de la Charte, un tel jugement mettra en doute la validité de toute élection conduite en vertu des dispositions de la Loi sur les Indiens et du Règlement sur les élections, y compris la validité de l’élection tenue au sein de la bande de Gull Bay.

 

  • [32] Je ne partage pas cet avis. La réparation accordée par la Cour conformément à l’article 52 de la Loi constitutionnelle n’est pas claire au point de rendre nulles toutes les élections du genre. De plus, la nature de la réparation recherchée par les demandeurs, en l’occurrence un jugement déclaratoire d’invalidité rendu en vertu de l’article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982, n’intéresse pas la question de savoir si la demande de redressement présentée par les demandeurs n’a aucune chance d’être accueillie. Selon moi, la question de savoir quelle réparation s’impose pour corriger la violation d’un droit garanti par l’article 15 de la Charte est une question qui ressortit à la compétence du juge appelé à statuer sur le bien‑fondé de la demande de contrôle judiciaire. Il n’appartient pas au juge des requêtes à ce stade de priver les demandeurs d’une décision sur le bien‑fondé de leur question constitutionnelle au motif qu’ils pourraient avoir formulé d’une manière incomplète la réparation qu’ils sollicitent dans leur avis de demande.

 

  • [33] Dans ces conditions, il m’est impossible d’affirmer que le paragraphe de l’avis de demande où est sollicité un jugement déclaratoire au regard de l’article 75 de la Loi sur les Indiens entre dans les circonstances exceptionnelles évoquées dans l’arrêt David Bull, précité, de telle sorte qu’il soit « manifestement irrégulier au point de n’avoir aucune chance d’être accueilli ». La Cour n’accordera donc pas au défendeur sa requête en radiation.

 

Point n° 3 :  Subsidiairement, la Cour devrait‑elle rendre une ordonnance prescrivant que les parties de l’avis de demande se rapportant à l’article 15 de la Charte soient instruites comme s’il s’agissait d’une action?

 

  • [34] Au soutien de sa requête visant à convertir en action la demande de jugement déclaratoire présentée par les demandeurs en vertu de la Charte, le défendeur affirme ce qui suit :

a)  les affidavits ne sauraient établir d’une manière satisfaisante les faits pouvant donner lieu à un examen selon l’article 15 de la Charte, ou à la réparation qui s’impose en application de l’article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982;

 

b)  la décision de la Cour pourrait se répercuter sur les Premières nations partout au Canada qui conduisent l’élection de leurs chefs et de leurs conseillers en conformité avec la Loi sur les Indiens et le Règlement sur les élections au sein des bandes d’Indiens.

 

 

a)  Les affidavits ne permettent pas à la Cour de statuer par contrôle judiciaire sur une question relevant de la Charte

 

 

[35]  Selon le défendeur, une preuve d’expert pourrait être nécessaire pour que la Cour réponde à la question constitutionnelle, et la Cour voudra entendre les témoins et évaluer leur crédibilité au cas où leurs témoignages seraient contradictoires.

 

  • [36] Les demandeurs s’appuient sur la décision rendue par la Cour dans l’affaire Bande Neskonlith c.. Canada (Procureur général) (1997), 136 F.T.R. 202 (1re inst.), où la juge Barbara Reed avait rejeté une requête visant à transformer en action une procédure de contrôle judiciaire, dans une affaire complexe où la Cour devait définir des droits ancestraux au sens de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Selon les demandeurs, lorsque des affidavits suffisent à la Cour pour résoudre les points complexes en litige, il n’est pas nécessaire que l’instance se déroule sous la forme d’une action. Dans la décision Bande Neskonlith, la juge Reed écrivait ce qui suit, au paragraphe 15 :

[…] Je suis persuadée que, si quelqu’un doit subir un préjudice du fait de la non‑présentation des éléments de preuve détaillés au sujet des droits ancestraux en litige, ce sont les requérants. S’ils désirent procéder en fonction des pièces déjà versées au dossier, on ne devrait pas leur imposer la tenue d’un procès.

 

  • [37] Dans la décision Agustawestland International Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2005 C.F. 1640, j’examinais le droit se rapportant aux requêtes en conversion de procédure. La règle générale est que les demandes de contrôle judiciaire soient instruites en tant que requêtes, afin qu’elles puissent être jugées « à bref délai et selon une procédure sommaire ». Une requête en conversion de procédure est une exception à la règle générale, exception qui ne peut être autorisée que dans les circonstances les plus évidentes. Deuxièmement, une requête en conversion de procédure ne devrait être admise que lorsque les faits ne peuvent être établis ou appréciés d’une manière satisfaisante au moyen d’affidavits.

 

  • [38] En l’espèce, les demandeurs ont un besoin éminent de voir leur demande jugée « à bref délai et selon une procédure sommaire ». De plus, en l’espèce, nul ne prétend que les faits ne peuvent pas être établis ou appréciés d’une manière satisfaisante au moyen d’affidavits.

 

  • [39] Le procureur général voudrait que la demande soit instruite en tant qu’action pour que la Cour soit apte à mesurer son incidence sur les Premières nations partout au Canada. Sans doute le procureur général souhaite‑t‑il que cette importante question soit décidée dans une action, mais les demandeurs ont le droit d’aller de l’avant par contrôle judiciaire.

 

Point n° 4 :  La Cour devrait‑elle rendre une ordonnance modifiant l’ordonnance qu’elle a rendue le 6 septembre 2005, afin que soit prorogé le délai de signification et de dépôt des affidavits et des pièces du défendeur?

 

  • [40] Le 6 septembre 2005, le juge Lemieux a ordonné au défendeur de déposer ses affidavits dans les trente jours suivant le dépôt des affidavits des demandeurs. Cela signifie que le défendeur devait déposer ses affidavits au plus tard le 4 novembre 2005. Il a plutôt déposé une requête sous forme d’ébauche. Les affidavits du défendeur n’ont donc pas été déposés, et le défendeur voudrait une prorogation de trente jours pour le dépôt des affidavits. Les demandeurs acceptent cette prorogation, mais insistent pour que la Cour prenne des mesures pour empêcher tout retard additionnel. Selon l’ordonnance de mise au rôle rendue par le juge Lemieux, les contre‑interrogatoires sur les affidavits devaient se dérouler dans les vingt jours suivant la signification des affidavits du défendeur. À l’audience, j’ai informé le défendeur que le délai de trente jours commencerait à courir le 1er mars 2006 de telle sorte que ses affidavits devaient être déposés au plus tard le 30 mars 2006. Les demandeurs demandent aussi à la Cour d’imposer un échéancier à l’intérieur duquel devront être présentées toutes les requêtes résultant des contre‑interrogatoires. Je crois qu’un délai de vingt jours à compter de la date de réception de la transcription des contre‑interrogatoires est un délai raisonnable pour toutes les requêtes qui résulteront des contre‑interrogatoires. Ce délai est compatible avec celui qu’a ordonné le juge Lemieux.

 

Point n° 5 :  La Cour devrait‑elle rendre une ordonnance déclarant confidentiels le rapport d’enquête de Larry Dyck et le rapport de recommandation de Christine Aubin?

 

  • [41] À l’appui de sa requête pour que soit déclaré confidentiels le rapport d’enquête de Larry Dyck et le rapport de recommandation de Christine Aubin, le défendeur dit que leur confidentialité est nécessaire :

a)  pour prévenir la divulgation de renseignements personnels;

 

b)  pour préserver la relation confidentielle entre les enquêteurs et les enquêtés.

 

 

  • [42] Les demandeurs ne s’opposent pas à l’ordonnance sollicitée par le défendeur en application de l’article 151 des Règles des Cours fédérales.

 

  • [43] Je suis convaincu que les circonstances de la présente affaire justifient une ordonnance de confidentialité. Les parties sont convenues de rédiger, quant à la forme et au contenu, l’ordonnance requise pour présentation à la Cour. La Cour rendra cette ordonnance sous la réserve que les demandeurs pourront consulter lesdits rapports aux fins du présent litige.

 

Les dépens

 

  • [44] Pour les motifs susmentionnés, les deux requêtes principales étaient infondées et ont contrarié l’ordonnance rendue le 10 août 2005 par M. le juge Lemieux, selon laquelle l’audition de la demande de contrôle judiciaire devait être accélérée. Le juge Lemieux a aussi ordonné que les avocats des parties se consultent et proposent à la Cour une ordonnance de mise au rôle, laquelle a été rendue par le juge Lemieux le 6 septembre 2005. Je comprends les raisons pour lesquelles le procureur général aurait préféré que cette importante contestation fondée sur la Charte se déroule comme une action, mais les deux requêtes n’en restent pas moins infondées.

 

  • [45] Les demandeurs soutiennent que ces requêtes constituent un abus de la procédure et une tentative du procureur général de différer la contestation constitutionnelle jusqu’après l’élection de novembre 2006, rendant ainsi la demande théorique. Je ne suis pas disposé à tirer une telle conclusion. En revanche, les demandeurs ont droit à leurs dépens, payables sur‑le‑champ. Le juge Lemieux a adjugé les dépens partie‑partie aux demandeurs, quelle que soit l’issue de la cause, selon le barème de la colonne IV du tarif B des Règles des Cours fédérales. Je suivrai les indications du juge Lemieux, mais fixerai les dépens à une somme forfaitaire.

 

  • [46] D’après l’ordonnance de la protonotaire Milczynski datée du 7 décembre 2005, qui traitait de divers aspects de la requête en radiation et de la requête en conversion de procédure, les dépens devaient être établis à la suite de l’audience tenue devant moi. Je suis d’avis que la requête présentée à la protonotaire Milczynski ne fut nécessaire que parce que le procureur général du Canada a présenté la requête en radiation et la requête en conversion de procédure. Les dépens seront donc adjugés aux demandeurs pour la requête présentée à la protonotaire Milczynski, selon la même formule que la requête en radiation et la requête en conversion de procédure.

 

  • [47] La requête en confidentialité a été agréée par les demandeurs, et une requête présentée oralement à la Cour n’aurait pas été nécessaire. De même, la requête en prorogation du délai de dépôt des affidavits du défendeur n’a été nécessaire que parce que les deux requêtes principales ont été rejetées. Il m’est donc impossible de dire, comme le voudrait le défendeur, que les deux parties ont obtenu gain de cause dans la requête que j’ai devant moi.

 

  • [48] Je fixerai à la somme forfaitaire de 5 000 $ les honoraires des avocats pour la requête en radiation et la requête en conversion de procédure, en me servant pour cela du barème IV, et à la somme forfaitaire de 2 500 $ la requête présentée à la protonotaire Milczynski.

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.  La requête présentée par le défendeur pour obtenir une ordonnance radiant, dans l’avis de demande, les demandes de jugement déclaratoire fondées sur l’article 15 de la Charte canadienne est rejetée;

  1. La requête présentée subsidiairement par le défendeur pour obtenir une ordonnance prescrivant que les parties de l’avis de demande se rapportant à l’article 15 de la Charte canadienne soient instruites comme s’il s’agissait d’une action est rejetée;

  2. Le délai de signification et de dépôt des affidavits et pièces du défendeur est prorogé jusqu’au 30 mars 2006;

  3. Les parties auront vingt jours à compter de la date de réception de chaque transcription des contre‑interrogatoires pour présenter toute requête résultant de tel ou tel d’entre eux;

  4. La Cour rendra, conformément à l’article 151 des Règles des Cours fédérales, une ordonnance déclarant confidentiels le rapport d’enquête de Larry Dyck et le rapport de recommandation de Christine Aubin contenus dans le dossier de la Cour. Cette ordonnance sera rédigée selon la forme et le contenu décidés par les parties;

  5. Les dépens de ces requêtes et ceux de la requête présentée à la protonotaire Milczynski sont adjugés aux demandeurs, pour la somme forfaitaire totale de 7 500 $, payable sur‑le‑champ.

 

« Michael A. Kelen »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


APPENDICE « A »

 

1.   Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.‑U.)

 

Droits à l’égalité

 

Égalité devant la loi, égalité de bénéfice et protection égale de la loi

 

Equality Rights

 

Equality before and under law and equal protection and benefit of law

 

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

 

15. (1) Every individual is equal before and under the law and has the right to the equal protection and equal benefit of the law without discrimination and, in particular, without discrimination based on race, national or ethnic origin, colour, religion, sex, age or mental or physical disability.

 

Programmes de promotion sociale

 

(2) Le paragraphe (1) n’a pas pour effet d’interdire les lois, programmes ou activités destinés à améliorer la situation d’individus ou de groupes défavorisés, notamment du fait de leur race, de leur origine nationale ou ethnique, de leur couleur, de leur religion, de leur sexe, de leur âge ou de leurs déficiences mentales ou physiques.

 

Affirmative action programs

 

(2) Subsection (1) does not preclude any law, program or activity that has as its object the amelioration of conditions of disadvantaged individuals or groups including those that are disadvantaged because of race, national or ethnic origin, colour, religion, sex, age or mental or physical disability.

 

[…]

 

[…]

 

PARTIE VII

PART VII

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

 

GENERAL

 

Primauté de la Constitution du Canada

 

52. (1) La Constitution du Canada est la loi suprême du Canada; elle rend inopérantes les dispositions incompatibles de toute autre règle de droit.

 

Primacy of Constitution of Canada

 

52. (1) The Constitution of Canada is the supreme law of Canada, and any law that is inconsistent with the provisions of the Constitution is, to the extent of the inconsistency, of no force or effect.

 

 


2.  Loi sur les Indiens, L.R.C. 1985, ch. I‑5

 

ÉLECTION DES CHEFS ET DES CONSEILS DE BANDE

 

ELECTIONS OF CHIEFS AND BAND COUNCILS

 

[...]

 

[...]

 

Éligibilité

 

75. (1) Seul un électeur résidant dans une section électorale peut être présenté au poste de conseiller pour représenter cette section au conseil de la bande.

 

Eligibility

 

75. (1) No person other than an elector who resides in an electoral section may be nominated for the office of councillor to represent that section on the council of the band.

 

Présentation de candidats

 

(2) Nul ne peut être candidat à une élection au poste de chef ou de conseiller d’une bande, à moins que sa candidature ne soit proposée et appuyée par des personnes habiles elles‑mêmes à être présentées.

 

Nomination

 

(2) No person may be a candidate for election as chief or councillor of a band unless his nomination is moved and seconded by persons who are themselves eligible to be nominated.

 

Le gouverneur en conseil peut annuler une élection

 

Governor in Council may set aside election

 

[...]

 

[...]

 

79. Le gouverneur en conseil peut rejeter l’élection du chef ou d’un des conseillers d’une bande sur le rapport du ministre où ce dernier se dit convaincu, selon le cas :

 

79. The Governor in Council may set aside the election of a chief or councillor of a band on the report of the Minister that he is satisfied that

 

a) qu’il y a eu des manoeuvres frauduleuses à l’égard de cette élection;

 

(a) there was corrupt practice in connection with the election;

 

b) qu’il s’est produit une infraction à la présente loi pouvant influer sur le résultat de l’élection;

 

(b) there was a contravention of this Act that might have affected the result of the election; or

 

c) qu’une personne présentée comme candidat à l’élection ne possédait pas les qualités requises.

 

(c) a person nominated to be a candidate in the election was ineligible to be a candidate.

 

 

 


3.  Règlement sur les élections au sein des bandes d’Indiens, C.R.C., ch. 952

 

DÉFINITION DE «RÉSIDENCE» AUX FINS DE DÉTERMINER SI UNE PERSONNE EST HABILE À VOTER

 

DEFINITION OF RESIDENCE FOR THE PURPOSE OF DETERMINING THE ELIGIBILITY OF VOTERS

 

3. Les règles suivantes déterminent l’interprétation de l’expression « réside ordinairement » en ce qui concerne la résidence d’un électeur dans une réserve qui est, aux fins de vote, divisée en plus d’une section électorale :

 

3. The following rules apply to the interpretation of the words "ordinarily resident" in respect of the residency of an elector on a reserve consisting of more than one electoral section:

 

a) sous réserve des autres dispositions du présent article, la question de savoir où une personne réside ou résidait ordinairement à une époque déterminée ou pendant une période de temps déterminée doit être élucidée en se référant à toutes les circonstances du cas;

 

(a) subject to the other provisions of this section, the question as to where a person is or was ordinarily resident at any material time or during any material period shall be determined by reference to all the facts of the case;

 

b) le lieu de la résidence ordinaire d’une personne est en général l’endroit qui a toujours été ou qu’elle a adopté comme étant le lieu de son habitation ou de son domicile, où elle entend revenir lorsqu’elle s’en absente et, en particulier, lorsqu’une personne couche habituellement dans un endroit et mange ou travaille dans un autre endroit, le lieu de sa résidence ordinaire est celui où la personne couche;

 

(b) the place of ordinary residence of a person is, generally, that place which has always been, or which he has adopted as, the place of his habitation or home, whereto, when away therefrom, he intends to return and, specifically, where a person usually sleeps in one place and has his meals or is employed in another place, the place of his ordinary residence is where that person sleeps;

 

c) une personne ne peut avoir qu’un seul lieu de résidence ordinaire, et elle ne peut le perdre sans en acquérir un autre;

 

(c) a person can have one place of ordinary residence only, and he shall retain such place of ordinary residence until another is acquired;

 

d) l’absence temporaire du lieu de résidence ordinaire n’entraîne ni la perte ni le changement du lieu de résidence ordinaire. DORS/2000‑391, art. 2.

 

(d) temporary absence from a place of ordinary residence does not cause a loss or change of place of ordinary residence. SOR/2000‑391, s. 2.

 

[...]

 

[...]

 

APPELS À L’ÉGARD DE L’ÉLECTION

 

12. (1) Si, dans les quarante‑cinq jours suivant une élection, un candidat ou un électeur a des motifs raisonnables de croire :

 

ELECTION APPEALS

 

12. (1) Within 45 days after an election, a candidate or elector who believes that

 

a) qu’il y a eu manoeuvre corruptrice en rapport avec une élection,

 

(a) there was corrupt practice in connection with the election,

 

b) qu’il y a eu violation de la Loi ou du présent règlement qui puisse porter atteinte au résultat d’une élection, ou

 

(b) there was a violation of the Act or these Regulations that might have affected the result of the election, or

 

c) qu’une personne présentée comme candidat à une élection était inéligible,

 

(c) a person nominated to be a candidate in the election was ineligible to be a candidate,

 

il peut interjeter appel en faisant parvenir au sous‑ministre adjoint, par courrier recommandé, les détails de ces motifs au moyen d’un affidavit en bonne et due forme.

 

may lodge an appeal by forwarding by registered mail to the Assistant Deputy Minister particulars thereof duly verified by affidavit.

 

(2) Lorsqu’un appel est interjeté au titre du paragraphe (1), le sous‑ministre adjoint fait parvenir, par courrier recommandé, une copie du document introductif d’appel et des pièces à l’appui au président d’élection et à chacun des candidats de la section électorale visée par l’appel.

 

(2) Where an appeal is lodged under subsection (1), the Assistant Deputy Minister shall forward, by registered mail, a copy of the appeal and all supporting documents to the electoral officer and to each candidate in the electoral section in respect of which the appeal was lodged.

 

(3) Tout candidat peut, dans un délai de 14 jours après réception de la copie de l’appel, envoyer au sous‑ministre adjoint, par courrier recommandé, une réponse par écrit aux détails spécifiés dans l’appel, et toutes les pièces s’y rapportant dûment certifiées sous serment.

 

(3) Any candidate may, within 14 days of the receipt of the copy of the appeal, forward to the Assistant Deputy Minister by registered mail a written answer to the particulars set out in the appeal together with any supporting documents relating thereto duly verified by affidavit.

 

(4) Tous les détails et toutes les pièces déposés conformément au présent article constitueront et formeront le dossier. DORS/85‑409, art. 4(A); DORS/2000‑391, art. 11.

 

(4) All particulars and documents filed in accordance with the provisions of this section shall constitute and form the record.

 

13. (1) Le Ministre peut, si les faits allégués ne lui paraissent pas suffisants pour décider de la validité de l’élection faisant l’objet de la plainte, conduire une enquête aussi approfondie qu’il le juge nécessaire et de la manière qu’il juge convenable.

 

13. (1) The Minister may, if the material that has been filed is not adequate for deciding the validity of the election complained of, conduct such further investigation into the matter as he deems necessary, in such manner as he deems expedient.

 

(2) Cette enquête peut être tenue par le Ministre ou par toute personne qu’il désigne à cette fin.

 

(2) Such investigation may be held by the Minister or by any person designated by the Minister for the purpose.

 

(3) Lorsque le Ministre désigne une personne pour tenir une telle enquête, cette personne doit présenter un rapport détaillé de l’enquête à l’examen du Ministre.

 

(3) Where the Minister designates a person to hold such an investigation, that person shall submit a detailed report of the investigation to the Minister for his consideration.

 

14. Lorsqu’il y a lieu de croire

 

14. Where it appears that

 

a) qu’il y a eu manoeuvre corruptrice à l’égard d’une élection,

 

(a) there was corrupt practice in connection with an election,

 

b) qu’il y a eu violation de la Loi ou du présent règlement qui puisse porter atteinte au résultat d’une élection, ou

 

(b) there was a violation of the Act or these Regulations that might have affected the result of an election, or

 

c) qu’une personne présentée comme candidat à une élection était inadmissible à la candidature,

 

(c) a person nominated to be a candidate in an election was ineligible to be a candidate,

 

le Ministre doit alors faire rapport au gouverneur en conseil.

 

the Minister shall report to the Governor in Council accordingly.

 

 

 

4.   Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7

 

Procédure sommaire d’audition

 

18.4 (1) Sous réserve du paragraphe (2), la Cour fédérale statue à bref délai et selon une procédure sommaire sur les demandes et les renvois qui lui sont présentés dans le cadre des articles 18.1 à 18.3.

 

Hearings in summary way

 

18.4 (1) Subject to subsection (2), an application or reference to the Federal Court under any of sections 18.1 to 18.3 shall be heard and determined without delay and in a summary way.

 

Exception

 

(2) Elle peut, si elle l’estime indiqué, ordonner qu’une demande de contrôle judiciaire soit instruite comme s’il s’agissait d’une action.

 

Exception

 

(2) The Federal Court may, if it considers it appropriate, direct that an application for judicial review be treated and proceeded with as an action.

 

[...]

 

[...]

 

Questions constitutionnelles

 

57. (1) Les lois fédérales ou provinciales ou leurs textes d’application, dont la validité, l’applicabilité ou l’effet, sur le plan constitutionnel, est en cause devant la Cour d’appel fédérale ou la Cour fédérale ou un office fédéral, sauf s’il s’agit d’un tribunal militaire au sens de la Loi sur la défense nationale, ne peuvent être déclarés invalides, inapplicables ou sans effet, à moins que le procureur général du Canada et ceux des provinces n’aient été avisés conformément au paragraphe (2).

 

Constitutional questions

 

57. (1) If the constitutional validity, applicability or operability of an Act of Parliament or of the legislature of a province, or of regulations made under such an Act, is in question before the Federal Court of Appeal or the Federal Court or a federal board, commission or other tribunal, other than a service tribunal within the meaning of the National Defence Act, the Act or regulation shall not be judged to be invalid, inapplicable or inoperable unless notice has been served on the Attorney General of Canada and the attorney general of each province in accordance with subsection (2).

 

Formule et délai de l’avis

 

(2) L’avis est, sauf ordonnance contraire de la Cour d’appel fédérale ou de la Cour fédérale ou de l’office fédéral en cause, signifié au moins dix jours avant la date à laquelle la question constitutionnelle qui en fait l’objet doit être débattue.

 

Time of notice

 

(2) The notice must be served at least 10 days before the day on which the constitutional question is to be argued, unless the Federal Court of Appeal or the Federal Court or the federal board, commission or other tribunal, as the case may be, orders otherwise.

 

 

 

Appel et contrôle judiciaire

 

(3) Les avis d’appel et de demande de contrôle judiciaire portant sur une question constitutionnelle sont à signifier au procureur général du Canada et à ceux des provinces.

 

Notice of appeal or application for judicial review

 

(3) The Attorney General of Canada and the attorney general of each province are entitled to notice of any appeal or application for judicial review made in respect of the constitutional question.

 

Droit des procureurs généraux d’être entendus

 

(4) Le procureur général à qui un avis visé aux paragraphes (1) ou (3) est signifié peut présenter une preuve et des observations à la Cour d’appel fédérale ou à la Cour fédérale et à l’office fédéral en cause, à l’égard de la question constitutionnelle en litige.

 

Right to be heard

 

(4) The Attorney General of Canada and the attorney general of each province are entitled to adduce evidence and make submissions to the Federal Court of Appeal or the Federal Court or the federal board, commission or other tribunal, as the case may be, in respect of the constitutional question.

 

Droit d’appel

 

(5) Le procureur général qui présente des observations est réputé partie à l’instance aux fins d’un appel portant sur la question constitutionnelle.

 

Appeal

 

(5) If the Attorney General of Canada or the attorney general of a province makes submissions, that attorney general is deemed to be a party to the proceedings for the purpose of any appeal in respect of the constitutional question.

 

 

 

5.  Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106

 

Délai prorogé ou abrégé

 

Extension or abridgement

 

8. (1) La Cour peut, sur requête, proroger ou abréger tout délai prévu par les présentes règles ou fixé par ordonnance.

 

8. (1) On motion, the Court may extend or abridge a period provided by these Rules or fixed by an order.

 

Moment de la présentation de la requête

 

When motion may be brought

 

(2) La requête visant la prorogation d’un délai peut être présentée avant ou après l’expiration du délai.

 

(2) A motion for an extension of time may be brought before or after the end of the period sought to be extended.

 

[...]

 

[...]

 

DÉPÔT DE DOCUMENTS CONFIDENTIELS

 

FILING OF CONFIDENTIAL MATERIAL

 

Requête en confidentialité

 

Motion for order of confidentiality

 

151. (1) La Cour peut, sur requête, ordonner que des documents ou éléments matériels qui seront déposés soient considérés comme confidentiels.

 

151. (1) On motion, the Court may order that material to be filed shall be treated as confidential.

 

Circonstances justifiant la confidentialité

 

(2) Avant de rendre une ordonnance en application du paragraphe (1), la Cour doit être convaincue de la nécessité de considérer les documents ou éléments matériels comme confidentiels, étant donné l’intérêt du public à la publicité des débats judiciaires.

Demonstrated need for confidentiality

 

(2) Before making an order under subsection (1), the Court must be satisfied that the material should be treated as confidential, notwithstanding the public interest in open and accessible court proceedings.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :  T‑1313‑05

 

 

INTITULÉ :  EUGENE ESQUEGA ET AUTRES

  c.

  LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :  OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :  LE 28 FÉVRIER 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE 

ET ORDONNANCE :  LE JUGE KELEN

 

DATE DES MOTIFS :  LE 8 MARS 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Chantelle J. Bryson

 

  POUR LES DEMANDEURS

Michael Peirce

Joanna Hill

 

  POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Chantelle J. Bryson

Buset & Partners

Thunder Bay (Ontario)

 

  POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

  POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.