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Date : 20011217

Dossier : T-1711-01

Référence neutre : 2001 CFPI 1387

ENTRE :

                                Mme MICHELINE CLAIRE MONFORTON ET

                                       M. NELSON PHILIP MONFORTON

                                                                                                                    demandeurs

                                                                 et

                      AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

                                                                                                                  défenderesse

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE BLAIS

[1]                 Par leur requête fondée sur l'article 369 et l'alinéa 30(1)b) des Règles de la Cour fédérale (1998), les demandeurs cherchent à obtenir :

1.        Une ordonnance enjoignant à la GRC d'assurer la supervision et le respect de la décision rendue en vertu la présente requête ex parte;

2.        Le pouvoir d'empêcher/une injonction

pour empêcher l'ADRC de mettre fin aux enregistrements et d'enlever les caméras de surveillance installées le 28 octobre 2000 à la résidence des demandeurs située au 65, avenue James Lewis, Stittsville (Ontario);


3.        Le pouvoir d'interdire/une interdiction

a)        pour interdire à l'ADRC d'affecter tout personnel additionnel à l'affaire Monforton et enjoindre à l'ADRC d'aviser, par voie électronique, tous ses employés et l'administration d'Ottawa possédant des fichiers ou des dossiers électroniques, de la correspondance ou des dossiers relativement à cette affaire, qu'ils doivent signaler qu'ils détiennent ces documents, isoler ces derniers et les envoyer à une seule personne contact désignée, à un endroit précis de l'ADRC. Endroits connus :

-          Bureau des services fiscaux d'Ottawa, situé au 333, avenue Laurier Ouest;

-          Bureau régional du Nord de l'Ontario situé au 2405, boul. Saint-Laurent;

-          Administration centrale située au 25 MacArthur Road;

-          Direction de la sécurité située au 25, rue Nicholas;

b)        pour que la GRC récupère tous les fichiers se rapportant à Mme Micheline Claire Monforton et à l'affaire Monforton afin de protéger leur contenu et prévenir toute divulgation future;

4.        Le pouvoir d'enjoindre l'accomplissement d'un devoir/un mandamus

a)        pour que l'ADRC divulgue et fournisse à la GRC les renseignements pertinents sur les contribuables que les demandeurs soupçonnent d'être les auteurs des actes criminels perpétrés à l'endroit de la fonctionnaire de l'ADRC, Mme Micheline Monforton, de sa famille et de leur propriété;

b)        pour que la GRC récupère les sommaires de comptes des contribuables, l'information sur les endroits où des visites aux clients ont été effectuées, les dates des échanges, les mesures entreprises dans le but de présenter ces renseignements à la police d'Ottawa pour qu'il y ait examen de ceux-ci et enquête;

c)        pour que la GRC présente ces renseignements à la police d'Ottawa, organe neutre dans la présente affaire, afin d'assurer l'impartialité de la présentation des renseignements pour que la police connaisse les faits pertinents et qu'une enquête impartiale soit menée sur les actes criminels commis, qui constituent des infractions en vertu du Code criminel; et


5.        Le pouvoir d'enjoindre l'accomplissement d'un devoir/un mandamus

pour que l'ADRC fournisse à l'employée Mme Micheline Claire Monforton et aux membres de sa famille l'aide juridique prévue au Manuel des finances et de l'administration (chapitre 26, articles 77, 78, 79 et 80) pour que l'avis de demande/la demande de contrôle judiciaire soit examiné dans une instance gérée à titre d'instance à gestion spéciale, conformément aux articles 384 et 385 des Règles de la Cour fédérale (1998).

LES FAITS PERTINENTS

[2]                 La demanderesse Mme Micheline Monforton est une employée de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (l'ADRC).

[3]                 À la fin de 1999, après qu'elle eut rapporté un incendie à la résidence Monforton, la demanderesse Mme Micheline Monforton a présenté une demande de protection.

[4]                 Quelques mesures de sécurité ont été prises. On a, entre autres, installé des caméras vidéo à la résidence de la demanderesse et affecté un gardien de sécurité à la surveillance de la propriété pendant un certain temps.

[5]                 Une enquête a aussi été menée au sujet de différents incidents rapportés par la demanderesse Mme Micheline Monforton.

[6]                 À la suite de l'enquête, les fonctionnaires de l'ADRC ont été en contact avec la police d'Ottawa, qui a aussi enquêté sur différents incidents rapportés par la demanderesse Mme Micheline Monforton.

[7]                 Il existe une politique à l'ADRC concernant les affaires relatives à la sécurité, entre autres les cas d'employés qui reçoivent des menaces, sont victimes d'abus et sont traqués.

[8]                 Il est clair que la politique en question ne propose pas seulement une interaction entre l'ADRC et le service de police, mais rend cette interaction obligatoire.

[9]                 L'ADRC a retenu les services d'un consultant en sécurité professionnel, M. André Chartrand, pour qu'il évalue si la sécurité de la demanderesse Mme Micheline Monforton, ou de sa famille, était menacée en raison de son emploi à l'ADRC.

[10]            Se fondant sur l'analyse contenue au rapport de M. Chartrand, l'ADRC a conclu que ni la demanderesse Mme Micheline Monforton ni sa famille n'étaient menacées en raison du travail de la demanderesse à l'ADRC.


[11]            Conformément à la recommandation du consultant M. Chartrand, l'ADRC a cessé, à partir du 25 septembre 2001, la surveillance par caméras vidéo de la résidence de la demanderesse et a demandé la permission à la demanderesse d'entrer dans sa propriété pour enlever lesdites caméras vidéo qui n'étaient plus opérationnelles. Les caméras vidéo appartiennent à l'ADRC.

[12]            Les demandeurs ont refusé de donner accès à leur propriété aux représentants de l'ADRC pour leur permettre d'enlever les caméras.

ANALYSE

[13]            Étant donné le nombre de réparations de nature différente réclamées par les demandeurs, je les examinerai chacune séparément.

[14]            Concernant la première réparation, pour que soit rendue une ordonnance enjoignant à la GRC d'assurer la supervision et le respect de la présente décision, je ne vois ni raison ni preuve justifiant l'intervention de la GRC puisque la demanderesse n'a fourni aucune preuve indiquant que la défenderesse ne se conformerait pas aux ordonnances que la Cour pourrait rendre.

[15]            Pour ce qui est de la demande visant à faire interdire à l'ADRC de mettre fin aux enregistrements et d'enlever les caméras de surveillance installées sur les lieux, la preuve produite par les parties montre que les caméras vidéo ne sont plus opérationnelles et qu'il n'y a plus d'enregistrements depuis le 25 septembre 2001.

[16]            La défenderesse a aussi mentionné que les caméras vidéo lui appartiennent. Par conséquent, c'est sans hésitation que je conclus que la défenderesse et ses employés doivent être autorisés à enlever physiquement les caméras vidéo de la propriété des demandeurs.

[17]            Les demandeurs n'ont fourni aucune preuve susceptible de justifier le maintien de l'enregistrement par les caméras vidéo.

[18]            En ce qui concerne la demande visant à faire interdire à l'ADRC d'affecter tout personnel additionnel à l'affaire Monforton, la défenderesse a démontré que l'enquête au sujet de l'incident rapporté par la demanderesse Mme Micheline Monforton est terminée. La seule affaire toujours pendante est la demande de contrôle judiciaire introduite par les demandeurs. Je ne pense pas que la Cour ait compétence pour décider quel employé de l'ADRC devrait pouvoir aider l'avocat de la défenderesse relativement à cette demande ou à toute autre étape de la procédure qui y serait liée.


[19]            Au sujet de la demande d'ordonnance pour enjoindre à l'ADRC d'aviser, par voie électronique, tous ses employés et l'administration d'Ottawa possédant des fichiers ou des dossiers électroniques, de la correspondance ou des dossiers relativement à l'affaire Monforton, qu'ils doivent isoler ces derniers et les envoyer à une seule personne contact désignée, à un endroit précis de l'ADRC, les demandeurs n'ont présenté aucun élément de preuve justifiant cette demande. À mon avis, c'est la défenderesse qui est responsable de la gestion de l'agence et, pour être franc, je ne comprends pas d'où vient cette demande. Les demandeurs sont, néanmoins, en droit de présenter une telle demande s'ils désirent avoir accès à un renseignement précis, comme le prévoient les lois et les règlements en vigueur.

[20]            En ce qui a trait à la demande visant à ce que la GRC récupère tous les dossiers se rapportant aux demandeurs afin de protéger leur contenu et prévenir toute divulgation future, une fois encore les demandeurs n'ont présenté aucun élément de preuve démontrant que des renseignements ou de la documentation pertinente sont menacés, ont été détruits d'une façon quelconque ou irrégulièrement divulgués. Si les demandeurs désirent avoir accès à un renseignement précis, ils doivent suivre la filière normale, conformément à ce qui est prévu aux lois et aux règlements.

[21]            Concernant la demande d'ordonnance visant à enjoindre à l'ADRC de divulguer et de fournir à la GRC les renseignements pertinents sur les contribuables que les demandeurs soupçonnent d'être les auteurs des actes criminels perpétrés à l'endroit de la fonctionnaire de l'ADRC ou des demandeurs et de leur famille, c'est sans hésitation que je conclus, à la lumière de la documentation soumise à la Cour, que la demanderesse Mme Micheline Monforton est entièrement consciente des limites fixées par la Loi de l'impôt sur le revenu au sujet des renseignements personnels des contribuables que l'ADRC peut divulguer.

[22]            La preuve démontre aussi que la défenderesse a informé les demandeurs qu'elle ne croit pas qu'ils soient en danger et que la divulgation future de renseignements concernant des contribuables soit appropriée.


[23]            Au sujet de la demande d'ordonnance pour enjoindre à la GRC de présenter les renseignements à la police d'Ottawa, les demandeurs doivent savoir que la GRC n'est pas une partie dans la présente instance et que la Cour ne possède ni la compétence ni de raison justifiant une telle ordonnance. Je conviens avec la défenderesse que si la police d'Ottawa avait besoin d'un renseignement de la défenderesse, elle chercherait à l'obtenir en suivant la filière normale, conformément à ce qui est prévu par la loi.

[24]            Finalement, concernant la dernière demande par laquelle les demandeurs veulent obtenir une aide juridique pour eux et les membres de leur famille, la Cour n'a, une fois de plus, pas compétence pour obliger la défenderesse à fournir un tel service.

[25]            La preuve produite par la défenderesse montre qu'il existe une politique interne à l'ADRC selon laquelle une aide juridique peut être fournie aux employés dans certaines circonstances déterminées. La position adoptée par la défenderesse est que le service n'est pas disponible dans les circonstances présentes. Je comprends que les demandeurs ont la possibilité de porter en appel la décision de l'ADRC ou, peut-être, de déposer une demande de contrôle judiciaire relativement à une telle décision, mais la Cour n'a pas compétence pour forcer la défenderesse à modifier sa décision.

[26]            Par conséquent, je suis d'avis que les demandeurs n'ont produit aucun élément de preuve à l'appui de la présente requête.


                                                               O R D O N N A N C E

LA COUR ORDONNE :

-          La requête des demandeurs est rejetée avec dépens payables à la défenderesse;

-          La défenderesse aura le droit d'entrer dans la propriété des demandeurs, située au 65, avenue James Lewis, Stittsville (Ontario), moyennant un préavis de 48 heures aux demandeurs, et les représentants de la défenderesse pourront enlever physiquement les caméras de surveillance vidéo et en reprendre possession.

« Pierre BLAIS »

Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 17 décembre 2001

Traduction certifiée conforme

Sandra Douyon-de Azevedo, LL.B.


COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                              T-1711-11

INTITULÉ :                                             Mme MICHELINE CLAIRE MONFORTON ET AUTRE c. AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS ET ORDONNANCE :                 MONSIEUR LE JUGE BLAIS

DATE :                                                   Le 17 décembre 2001

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Mme Micheline C. Monforton                               POUR LES DEMANDEURS

M. Nelson Monforton

M. Derek Rasmussen                                           POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mme Micheline C. Monforton                               POUR LES DEMANDEURS

M. Nelson Monforton

M. Morris Rosenberg                                           POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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