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Date : 20001120


Dossier : IMM-3939-99


ENTRE :

     BERNARD DILIP MAZUMDER

     demandeur


     et


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur



     MOTIFS DE JUGEMENT


LE JUGE DAWSON


[1]      Le 29 juin 1999, Anabela Pereira, une agente des visas au consulat général du Canada à Hong Kong, a rejeté la demande de M. Mazumder pour obtenir la résidence permanente au Canada. M. Mazumder demande le contrôle judiciaire de cette décision de l'agente des visas.

LES FAITS

[2]      M. Mazumder, un citoyen du Bangladesh, est âgé de 34 ans. Il demande la résidence permanente au Canada dans la catégorie des immigrants indépendants, sa profession visée étant celle de directeur financier, Classification nationale des professions (CNP) 0111 et, subsidiairement, celle de comptable, CNP 1111.

[3]      L'agente des visas constate que M. Mazumder a obtenu un baccalauréat en commerce et une maîtrise en commerce (gestion), chacun de ces programmes de deux ans ayant été réalisé à l'Université de Dhaka au Bangladesh. La demande de M. Mazumder, ainsi que ses références, confirme qu'il travaille depuis 1992 pour le programme de développement social de l'Église du Bangladesh, une organisation à but non lucratif qui s'occupe des pauvres au Bangladesh. M. Mazumder y détient le poste de chef comptable et directeur financier. Dans sa demande, M. Mazumder a aussi présenté un certificat indiquant qu'il avait complété des mini-cours et des ateliers de développement en gestion, ainsi que dans le domaine des relations entre sexes.

[4]      Mme Pereira a reçu M. Mazumder en entrevue le 28 juin 1999.

[5]      Dans sa lettre de rejet, l'agente des visas indique qu'elle a évalué M. Mazumder pour la profession de teneur de livre (CNP 1231.0) et qu'elle lui a accordé 61 points d'appréciation. Ce nombre de points n'est pas suffisant pour obtenir un visa et l'agente des visas était d'avis qu'il reflétait bien les chances de M. Mazumder de réussir son installation au Canada.

[6]      Dans sa lettre de rejet, l'agente des visas déclare aussi qu'elle a évalué M. Mazumder pour la profession de comptable, mais qu'elle n'était pas convaincue qu'il répondait aux conditions d'accès à cette profession. Au sujet de la profession de directeur financier, elle déclare ceci :

     [traduction]
     J'ai aussi examiné les conditions d'accès pour la profession de DIRECTEUR FINANCIER (CNP 0111), qui est une des professions visées. On y trouve ceci :
     - un diplôme d'études universitaires ou collégiales en administration des affaires, en économie, en commerce ou dans un domaine connexe

    

     ou

     - la réussite d'un programme de formation interne ou d'un autre programme en gestion;

ajoutant que M. Mazumder ne satisfaisait pas à ces conditions d'accès.

[7]      Ceci va dans le même sens que les observations de l'agente des visas inscrites dans ses notes STIDI, où l'on trouve ceci :

     [traduction]
     J'AI AUSSI EXAMINÉ LES CONDITIONS D'ACCÈS POUR LA PROFESSION DE DIRECTEUR FINANCIER, CNP 0111, UNE DES PROFESSIONS VISÉES PAR L'IMMIGRANT ÉVENTUEL. PARMI CES CONDITIONS ON TROUVE :
     * UN DIPLÔME D'ÉTUDES UNIVERSITAIRES OU COLLÉGIALES EN ADMINISTRATION DES AFFAIRES, EN ÉCONOMIE, EN COMMERCE OU DANS UN DOMAINE CONNEXE
     OU
     *LA RÉUSSITE D'UN PROGRAMME DE FORMATION INTERNE OU D'UN AUTRE PROGRAMME EN GESTION.
     JE NE SUIS PAS CONVAINCUE QUE L'IMMIGRANT ÉVENTUEL SATISFAIT AUX CONDITIONS D'ACCÈS AUX PROFESSIONS VISÉES.

[8]      Dans l'affidavit qu'elle a souscrit à l'encontre de la demande de M. Mazumder, l'agente des visas déclare ceci :

     [traduction]     
     8.... Pour 1111.1 et 1111.2, j'ai énoncé dans mes notes STIDI les motifs permettant de conclure que le demandeur ne pouvait satisfaire à toutes les exigences. Pour CNP 0111, même si le demandeur a présenté un certificat du Centre de formation en gestion, je n'étais pas convaincue que la réussite de ce programme de deux semaines était l'équivalent d'un programme en gestion selon les exigences de la CNP pour cette profession.

LA QUESTION EN LITIGE

[1]      Bien que M. Mazumder ait soulevé un certain nombre de questions portant sur l'évaluation de l'agente des visas, il y en a une qui permet selon moi de trancher cette demande. Il s'agit de savoir si l'agente des visas a commis une erreur ouvrant droit au contrôle en considérant que la réussite d'un programme de formation interne ou d'un autre programme en gestion était une exigence impérative pour détenir les fonctions de directeur financier, CNP 0111.

ANALYSE

[2]      Voici, pour l'essentiel, les conditions d'accès à la profession de directeur financier telles qu'elles sont décrites à la CNP :

     ·      un diplôme d'études universitaires ou collégiales en administration des affaires, en économie, en commerce ou dans un domaine connexe
         ou
         la réussite d'un programme de formation interne ou d'un autre programme en gestion sont habituellement exigés.

[3]      Il faut noter ici que la réussite d'un programme de formation interne ou d'un autre programme en gestion est « habituellement exigée » .

[4]      Me rapportant à la décision de l'agente des visas, je ne trouve rien dans la lettre de rejet ou dans les notes STIDI indiquant que l'agente des visas considérait que la réussite d'un programme en gestion est une exigence habituelle. Rien n'indique que l'agente des visas a examiné la signification de l'expression « habituellement exigée » . Ma lecture de l'affidavit de l'agente des visas m'indique qu'elle a mis fin à son analyse après avoir constaté que la réussite d'un programme de deux semaines ne pouvait être l'équivalent d'un programme en gestion, « selon les exigences de la CNP pour cette profession » .

[5]      Par conséquent, je suis convaincue que l'agente des visas a considéré que la réussite d'un programme en gestion était une exigence impérative.

[6]      Au nom du ministre, on a soutenu que l'agente des visas pouvait traiter cette condition comme une exigence impérative.

[7]      Dans Karathanos c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 3 Imm. L.R. (3d) 106 (1re Inst.), le juge Sharlow, alors à la Section de première instance, a longuement examiné la signification de l'expression « habituellement exigée » .

[8]      Le juge Sharlow a conclu que pour les fins du facteur études et formation de l'annexe I du Règlement sur l'immigration de 1978, l'expression « habituellement exigée » dans la description des exigences relatives aux études pour une profession doit être interprétée comme signifiant « toujours exigée » , à cause de la nature automatique du nombre de points attribués pour le facteur études et formation.

[9]      Il fallait donc distinguer cette interprétation de celle de l'expression « habituellement exigée » dans l'évaluation des conditions d'accès à la profession que l'on trouve dans la CNP et qui servent à déterminer le nombre de points à accorder pour le facteur demande professionnelle. En évaluant un demandeur pour les fins du facteur demande professionnelle, l'expression « habituellement exigée » s'applique à quelque chose que les employeurs exigent habituellement, mais pas nécessairement.

[10]      En l'instance, on a soutenu au nom du ministre que la réussite d'un programme de formation en gestion est une exigence portant sur les études et la formation.

[11]      Je ne partage pas cet avis. Dans son affidavit, l'agente des visas déclare que : [traduction] « J'étais convaincue que même si le demandeur semblait avoir fait les études nécessaires pour répondre aux exigences des professions visées dans le cadre du facteur études et formation, il ne répondait pas par ailleurs à toutes les exigences de CNP 0111... » . Ceci fait ressortir, contrairement à ce qu'avance le ministre, que c'est dans le contexte de l'évaluation de la demande professionnelle en vertu de l'annexe I du Règlement sur l'immigration de 1978 que l'agente des visas a conclu que M. Mazumder ne répondait pas aux conditions d'accès à la profession de directeur financier.

[12]      Ce faisant, l'agente des visas a commis une erreur ouvrant droit au contrôle en n'examinant pas correctement l'expression « habituellement exigée » et en ne cherchant pas à déterminer si la demande de M. Mazumder comportait des éléments qui pourraient compenser le fait qu'il ne satisfaisait pas à cette exigence habituelle.

[13]      Pour ce motif, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et la demande de résidence permanente de M. Mazumder dans le cadre de la profession visée de directeur financier est renvoyée pour nouvel examen par un autre agent des visas. On ne m'a soumis aucune question à certifier.

     Eleanor R. Dawson

     Juge

Ottawa (Ontario)

Le 20 novembre 2000


Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



No DU GREFFE :              IMM-3939-99
INTITULÉ DE LA CAUSE :          BERNARD DILIP MAZUMDER c. Le Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration


LIEU DE L'AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 19 septembre 2000

MOTIFS DE JUGEMENT DE Mme le juge Dawson


EN DATE DU :              20 NOVEMBRE 2000



ONT COMPARU

M. Ian Wong                              POUR LE DEMANDEUR


M. Martin Anderson                          POUR LE DÉFENDEUR



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

M. Ian Wong                              POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada






Date : 20001120


Dossier : IMM-3939-99

Ottawa (Ontario), le lundi 20 novembre 2000

EN PRÉSENCE DE :      Mme le juge Dawson


ENTRE :

     BERNARD DILIP MAZUMDER

     demandeur


     et


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur


     JUGEMENT


     IL EST ORDONNÉ QUE :


     La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La question est renvoyée pour nouvel examen par un autre agent des visas.

     Eleanor R. Dawson

     Juge

Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.

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