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Date: 19990707


Dossier: T-1435-91

ENTRE


GAYLE KATHLEEN HORII,


demanderesse,


et


SA MAJESTÉ LA REINE,

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA,

LE COMMISSAIRE DU SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA,

LE SOUS-COMMISSAIRE DU SERVICE

CORRECTIONNEL DU CANADA (PACIFIQUE),

LE DIRECTEUR DE L'ÉTABLISSEMENT DE MATSQUI ET

LE DIRECTEUR DE L'ÉTABLISSEMENT DE FERNDALE,

     défendeurs.



MOTIFS DE L"ORDONNANCE


LE JUGE TEITELBAUM

[1]      Il s'agit d'une requête que le procureur général du Canada défendeur a présentée en vue d'obtenir une ordonnance radiant la déclaration modifiée de la demanderesse conformément à la règle 221 des Règles de la Cour fédérale (1998).

[2]      La règle 221 prévoit ce qui suit :

221. (1) À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d'un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas :
a) qu'il ne révèle aucune cause d'action ou de défense valable;
b) qu'il n'est pas pertinent ou qu'il est redondant;
c) qu'il est scandaleux, frivole ou vexatoire;
d) qu'il risque de nuire à l'instruction équitable de l'action ou de la retarder;
e) qu'il diverge d'un acte de procédure antérieur;
f) qu'il constitue autrement un abus de procédure.
Elle peut aussi ordonner que l'action soit rejetée ou qu'un jugement soit enregistré en conséquence.
(2) Aucune preuve n'est admissible dans le cadre d'une requête invoquant le motif visé à l'alinéa (1)a).

[3]      Dans la requête en radiation, en invoquant les motifs à l'appui de la requête, le défendeur énumère tous les motifs mentionnés dans la règle.

[4]      J'ai entendu les observations orales des parties et j'ai décidé de rejeter la requête en radiation, les dépens devant suivre l'issue de la cause.

[5]      Il est de droit constant qu'une requête en radiation devrait uniquement être accueillie s'il est clair et évident que le demandeur n'aura pas gain de cause à l'égard des questions soulevées dans la déclaration.

[6]      Le seul motif sérieux invoqué par le défendeur à l'appui de la présente requête est que toute l'affaire dont la Cour est saisie n'a plus qu'un intérêt théorique.

[7]      Le 7 avril 1986, la demanderesse a été condamnée à l'emprisonnement à perpétuité sans être admissible à la libération conditionnelle pour une période de dix ans, après avoir été déclarée coupable d'un meurtre au deuxième degré.

[8]      Dans son action, la demanderesse allègue qu'il a été porté atteinte aux droits qui lui sont reconnus par les articles 12, 15 et 28 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) et sollicite une réparation à cet égard conformément au paragraphe 24(1) de la Charte.

[9]      Au mois de mars 1993, la demanderesse a été libérée. La libération conditionnelle totale lui a maintenant été accordée.

[10]      Je suis convaincu que les questions que la demanderesse a soulevées dans sa déclaration n'ont pas qu'un intérêt théorique uniquement parce que la demanderesse ne risque plus d'être réincarcérée puisqu'elle bénéficie d'une libération conditionnelle totale.

[11]      La question de savoir où la demanderesse serait incarcérée si les autorités correctionnelles décidaient de suspendre la libération conditionnelle par suite d'une présumée violation des conditions de la libération conditionnelle se pose encore pour la demanderesse. La question de savoir si la libération conditionnelle sera suspendue est peut-être conjecturale, mais la demanderesse ne devrait pas avoir à attendre que cet événement se produise pour qu'il soit statué sur les droits qui lui sont reconnus par la Charte.

[12]      Dans l'arrêt Horii c. Sa Majesté la Reine et al.1, où les mêmes parties étaient en cause, Monsieur le juge Hugessen, qui parlait au nom de la Cour d'appel en statuant sur une demande d'injonction interlocutoire, a conclu qu'à ce moment-là, il existait une question sérieuse à trancher. Je suis convaincu qu'il n'a pas encore été statué sur cette question.

[13]      À la page 5 des motifs du jugement, en examinant la question du préjudice qui peut être subi dans l'avenir, Monsieur le juge Hugessen dit ceci :

[...] Le fait que le préjudice que l'on tente d'éviter se situe dans le futur ne le rend pas conjectural pour autant. L'auteur d'une demande d'injonction n'a pas besoin d'attendre de subir le préjudice avant de demander le redressement. En fait, une injonction interlocutoire vise principalement à empêcher la menace de préjudice de se réaliser. Le critère est la vraisemblance du préjudice et non son caractère futur.

[14]      Je ne puis donc pas conclure qu'il est clair et évident que les questions de présumée discrimination dont la demanderesse allègue avoir été victime ne se poseront pas de nouveau.

[15]      Étant donné que les questions fondées sur la Charte que la demanderesse a soulevées dans la déclaration modifiée intéressent fortement l'intérêt public, je ne crois pas que la déclaration modifiée doive être radiée.


     " Max M. Teitelbaum "

     Juge

Traduction certifiée conforme


L. Parenteau, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU GREFFE :      T-1435-91

    

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Gayle Kathleen Horii c. Sa Majesté la Reine et al.
LIEU DE L'AUDIENCE :      VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

DATE DE L'AUDIENCE :      le lundi 5 juillet 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE du juge Teitelbaum en date du 5 juillet 1999


ONT COMPARU :

John Conroy      pour la demanderesse

Curtis Workun      pour les défendeurs


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Conroy & Company      pour la demanderesse

Avocats

2459, rue Pauline

Abbotsford (Colombie-Britannique)

V2S 3S1

Morris Rosenberg      pour les défendeurs

Sous-procureur général du Canada     

Ottawa (Ontario)

__________________

     1      (5 septembre 1991) A-841-91 (C.A.F.)

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