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     T-2570-96

MONTRÉAL (QUÉBEC), CE 13e JOUR DE JUIN 1997

EN PRÉSENCE DE ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE

ENTRE:

     JAVED AHMAD

NAHEED SURRYA AHMAD

TAHIRA PARVEEN CHAUDHRY

KHUSH B.R. CHAUDHRY

     Requérants

     ET

     LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

     Intimé

     ORDONNANCE

     La requête de l'intimé et celle des requérants sont rejetées.

     Richard Morneau

     Protonotaire

     T-2570-96

ENTRE:

     JAVED AHMAD

NAHEED SURRYA AHMAD

TAHIRA PARVEEN CHAUDHRY

KHUSH B.R. CHAUDHRY

     Requérants

     ET

     LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

     Intimé

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ME RICHARD MORNEAU,

PROTONOTAIRE:

     La Cour est saisie de deux requêtes qui visent toutes deux la présence de documents inclus par les requérants à leur dossier de la règle 1606 des Règles de la Cour fédérale (les règles) déposé dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire que les requérants ont logée le 22 novembre 1996 à l'encontre d'une demande péremptoire de production de documents que l'intimé a fait parvenir au comptable des requérants le 25 octobre 1996 en vertu de l'article 231.2 de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e supp.) ch. 1, telle que modifiée.

     De façon chronologique, la première de ces requêtes a été logée par l'intimé aux fins d'obtenir la radiation au dossier des requérants de documents aux motifs, d'une part, que lesdits documents ont été introduits audit dossier sans l'appui d'affidavits et, d'autre part, que les requérants n'avaient soumis en preuve à ce jour aucune allégation pouvant supporter la pertinence ou l'utilité des mêmes documents en vue du débat au fond qui se tiendra sur la demande de contrôle des requérants.

     La deuxième requête à l'étude est portée par les requérants et vise par le biais de deux affidavits à introduire à leur dossier les mêmes documents dont l'intimé recherche la radiation.

     Il m'apparaît que la requête des requérants est venue en réaction à celle de l'intimé et rien au dossier de la Cour indique que ceux-ci auraient cherché à s'amender si cela n'avait été de la requête de l'intimé.

     Les documents formant l'objet du contentieux se trouvent décrits comme suit par l'intimé:

         .      aux pages 68 à 85 du Dossier des requérants, un extrait du Manuel des opérations de la division des enquêtes spéciales du ministère du Revenu national;         
         .      aux pages 86 à 135, un mémoire en faits et en droit, non daté, apparemment déposé auprès de l'Ontario Court of Justice (general division) Region of Peel dans la cause intitulée Her Majesty the Queen and Javed Ahmad and Naheed Ahmad;         
         .      aux pages 136 et 137, une sommation adressée à Javed Ahmad en sa qualité d'administrateur de la compagnie Importations Madni Inc.;         
         .      aux pages 138 à 157, des extraits de témoignages apparemment rendus devant the Ontario Court (general division), le 16 novembre 1995, à Brampton, en Ontario, dans la cause intitulée Her Majesty the Queen vs Javed Ahmad and Naheed Ahmad;         

Analyse

     Il m'appert que les deux requêtes à l'étude doivent être rejetées.

     Quant à la requête de l'intimé, même si elle n'a pas été soumise sous ce chef, il m'appert que c'est en vertu de la juridiction inhérente de cette Cour telle qu'appliquée par le juge Strayer dans l'arrêt Bull (David) Laboratories (Canada) Inc. v. Pharmacia Inc. et al. (1994), 176 N.R. 48, aux pages 54-5 (l'affaire Pharmacia) qu'elle doit être abordée. Je pense que les enseignements qui s'y dégagent s'appliquent à notre étude même si ici l'intimé ne vise qu'une radiation partielle du dossier des requérants et non pas la radiation entière de la demande de contrôle. Je dirais même que l'affaire Pharmacia s'applique ici d'autant plus, donc a fortiori, vu qu'on ne vise à radier que quelques documents.

     Dans l'affaire Pharmacia, le juge Strayer a permis que l'on recherche la radiation en matière de contrôle judiciaire uniquement dans des cas exceptionnels. Voici comment la Cour s'y est exprimée en pages 54-5:

         This is not to say that there is no jurisdiction in this court either inherent or through rule 5 by analogy to other rules, to dismiss in summary manner a notice of motion which is so clearly improper as to be bereft of any possibility of success. (See e.g. Cyanamid Agricultural de Puerto Rico Inc. v. Commissioner of Patents (1983), 74 C.P.R. (2d) 133 (F.C.T.D.); and the discussion in Vancouver Island Peace Society et al. v. Canada (Minister of National Defence) et al., [1994] 1 F.C. 102; 64 F.T.R. 127, at 120-121 F.C. (T.D.)). Such cases must be very exceptional and cannot include cases such as the present where there is simply a debatable issue as to the adequacy of the allegation in the notice of motion.         
         (mes soulignés)         

     C'est ce même raisonnement qu'a suivi le juge Nadon de cette Cour dans une décision du 13 août 1996 (Tom Pac Inc. c. Kem-A-Trix (Lubricants) Inc., dossier T-1238-96, en page 5).

     Dans la présente affaire, les aspects que le ministre du Revenu national cherche à corriger par le biais de cette requête ne représentent pas dans les circonstances des aspects qui, advenant même que le ministre du Revenu national puisse avoir raison, peuvent être vus comme incorrects et inacceptables au point d'intervenir dans le processus d'une demande de contrôle judiciaire (voir les propos du juge Strayer dans l'affaire Pharmacia, supra, aux pages 54-5). Toute demande de radiation dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire doit être exceptionnelle, et ce, afin de favoriser un des objectifs premiers de telle demande, soit d'amener cette demande au mérite le plus rapidement possible.

     Tel que le mentionnait le juge Strayer dans l'affaire Pharmacia:

         ... [T]he focus in judicial review is on moving the application along to the hearing stage as quickly as possible. This ensures that objections to the originating notice can be dealt with promptly in the context of consideration of the merits of the case.         

     (Voir également les arrêts Merck Frosst Canada Inc. et al. v. Minister of National Health and Welfare et al. (1994), 58 C.P.R. (3d) 245, à la page 248, et Glaxo Wellcome Inc. et al. v. Minister of National Health and Welfare et al., jugement inédit de cette Cour, 6 septembre 1996, dossier T-793-96.)

     L'intimé a déposé son dossier de la règle 1607 le 18 février 1997. Je pense que c'est dans le cadre de son mémoire contenu audit dossier que l'intimé devait se contenter de soutenir les points relevés par sa requête. Il ne l'a pas fait et je pense que c'est là un signe évident que l'on peut s'engager sur le fond du débat sans s'arrêter en chemin pour procéder à l'élimination de certains documents.

     Quant à la requête des requérants, il est acquis que ces derniers connaissaient au moment du dépôt de leur demande de contrôle judiciaire l'existence des documents qu'ils cherchent maintenant à soumettre par affidavits. Le procureur présent de ces derniers a soumis en plaidoirie qu'on devait attribuer à un simple oubli du procureur d'antan des requérants le fait que ces documents n'avaient pas été soumis par affidavits au moment du dépôt de la demande de contrôle, le tout tel que l'exige la règle 1603.

     Cette tardivité des requérants à agir les force maintenant à présenter leur requête en vertu de la règle 303 qui permet à la Cour d'autoriser la rectification recherchée si elle est d'avis que celle-ci est, somme toute, pertinente ou utile afin de déterminer réellement les questions en litige.

     Or, ici, je ne crois pas que les documents dont les requérants cherchent à légitimiser la présence soient d'une utilité telle que sans leur présence assurée et reconnue, la Cour au mérite soit restreinte dans son analyse des questions de fond soulevées par les requérants.

     Les requérants cherchent principalement à obtenir au mérite que la Cour déclare que la demande de production de documents émise par l'intimé contrevient, en raison de procédures criminelles parallèles impliquant présentement certains des requérants, à leur droit au silence tel que garanti par la Charte. Ce même droit au silence s'appliquerait quant au futur. Le procureur des requérants soutenant à cet égard que ces derniers pourraient faire l'objet de poursuites de nature criminelle en vertu même de la Loi de l'impôt sur le revenu, supra.

     Quant aux procédures criminelles parallèles, l'affidavit soumis par les requérants en appui à leur demande de contrôle réfère déjà amplement à cette situation (voir les paragraphes 3, 4 et 21 de l'affidavit de Sydney Feldhammer déposé le 22 novembre 1996); situation que l'intimé ne cherche nullement à contredire. Tout document additionnel sur ce point est à mon avis superflu.

     Quant à d'éventuelles poursuites sous la Loi de l'impôt sur le revenu, la preuve présentement au dossier laisse à mon avis au stade de l'hypothèse une telle éventualité.

     À tout hasard, les documents que les requérants visent à ce titre, soit une sommation et un manuel interne de l'intimé, n'avancent en rien la réalité du débat à tenir.

     Enfin, il faut ici distinguer la situation de celle présente dans l'arrêt Alan Tyler v. The Minister of National Revenue (1990), 91 DTC 5022, où là il était établi sur la base d'un passé récent que les autorités policières et fiscales étaient susceptibles de s'échanger de l'information obtenue du contribuable. Une telle preuve n'est pas présente en l'espèce.

     Richard Morneau

     Protonotaire

Montréal (Québec)

le 13 juin 1997


             T-2570-96

JAVED AHMAD

NAHEED SURRYA AHMAD

TAHIRA PARVEEN CHAUDHRY

KHUSH B.R. CHAUDHRY

             Requérants

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

             Intimé

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     NOMS DES AVOCATS ET DES PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU DOSSIER DE LA COUR:

INTITULÉ DE LA CAUSE:

T-2570-96

JAVED AHMAD

NAHEED SURRYA AHMAD

TAHIRA PARVEEN CHAUDHRY

KHUSH B.R. CHAUDHRY

     Requérants

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

     Intimé

LIEU DE L'AUDIENCE:Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE:le 9 juin 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR:Me Richard Morneau, protonotaire

DATE DES MOTIFS DE L'ORDONNANCE:le 13 juin 1997

COMPARUTIONS:

Me Sébastien Rheault pour les requérants

Me Maria Grazia Bittichesu pour l'intimé

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Sébastien Rheault pour les requérants

Sweibel Novek

Montréal (Québec)

Me George Thomson pour l'intimé

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

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