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                                                                                                                      Date: 20000616

                                                                                                         Dossier: IMM-1084-99

OTTAWA (Ontario), le 16e jour de juin 2000

EN PRÉSENCE DU JUGE MacKAY

ENTRE:

                                              THURAIRASA PONNUSAMY

                                               (alias RASA PONNUSAMY),

                                                                                                                             demandeur,

                                                                    - et -

              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                                                                                              défendeur.

VU la demande de contrôle judiciaire et la demande d'obtention d'ordonnance d'annulation déposées à l'encontre de la décision rendue le 15 février 1999 par la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, par laquelle cette dernière a annulé le sursis d'exécution de la mesure d'expulsion, a rejeté l'appel du demandeur et a ordonné qu'une mesure de renvoi en vigueur soit exécutée aussitôt que possible,

LA COUR,

APRÈS avoir entendu l'avocat du demandeur et l'avocat du ministre défendeur à Toronto le 9 novembre 1999, pris l'affaire en délibéré et examiné les observations présentées oralement et par écrit,


                                                     O R D O N N A N C E

ORDONNE CE QUI SUIT :

            La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

     (signé) W. Andrew MacKay       

JUGE

Traduction certifiée conforme

                                     

Ghislaine Poitras, LL.L.


                                                                                                                      Date: 20000616

                                                                                                         Dossier: IMM-1084-99

ENTRE:

                                              THURAIRASA PONNUSAMY

                                               (alias RASA PONNUSAMY),

                                                                                                                             demandeur,

                                                                    - et -

              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                                                                                              défendeur.

                                            MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE MacKAY

[1]         La Cour est saisie d'une demande visant le contrôle judiciaire et l'annulation de la décision rendue le 15 février 1999 par la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission ou la Section d'appel), par laquelle cette dernière a annulé le sursis d'exécution d'une mesure antérieure d'expulsion et rejeté l'appel du demandeur. La Cour a entendu les avocats du demandeur et du ministre le 9 novembre 1999 à Toronto, date à laquelle elle a pris l'affaire en délibéré.

[2]         Dans son avis de demande, le demandeur invoque les motifs suivants à l'appui de sa demande de contrôle judiciaire :


[TRADUCTION]

1.              La décision a été rendue illégalement car, dans le déroulement de l'audience, le tribunal n'a pas respecté les droits fondamentaux du demandeur et les principes de justice naturelle.

2.              Compte tenu de la preuve dont disposait le tribunal, la décision est manifestement déraisonnable au point de constituer une erreur de droit.

3.              Le Tribunal a perdu compétence et a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte d'éléments de preuve, en prenant en considération des éléments de preuve non pertinents, en interprétant erronément des éléments de preuve, en tirant des conclusions de fait erronées sans tenir compte de la preuve déposée devant lui et en ne parvenant pas à une bonne compréhension de celle-ci.

4.              Subsidiairement, ces erreurs en matière de preuve constituent, cumulativement, une erreur de droit.

5.              Les autres motifs que l'avocat pourra invoquer avec l'autorisation de la Cour.

[3]         En bref, les motifs invoqués au soutien de la demande de contrôle judiciaire peuvent être regroupés en deux grandes catégories : ceux qui relèvent (a) de la question de savoir si le demandeur a été suffisamment informé de la nature de l'audience devant le tribunal et (b) de la question de savoir si la Commission a bien compris des éléments de preuve présentés devant elle et si elle a tiré des conclusions de faits abusives ou arbitraires sans égard à la preuve dont elle disposait.

Contexte


[4]         Le demandeur, citoyen du Sri Lanka, fait l'objet d'une mesure de renvoi prise le 13 décembre 1993. La Section d'appel a ordonné, le 6 mars 1996, qu'il soit sursis à l'exécution de la mesure. Le sursis a fait l'objet d'examens et de prolongations périodiques, la dernière prolongation ayant été ordonnée le 21 novembre 1997. Le demandeur a reçu avis qu'un examen de l'ordonnance de sursis aurait lieu le 20 janvier 1999. Après remise, l'examen oral s'est tenu le 15 février 1999, et il a mené à une ordonnance d'annulation du sursis et au rejet de l'appel du demandeur. C'est cette décision qui est visée par la présente demande.

[5]         L'ordonnance de sursis qui faisait l'objet de l'examen, ainsi que les modifications qui y avaient été apportées jusqu'au 21 novembre 1997, était conditionnel. L'ordonnance modifiée comportait les conditions suivantes, aux termes desquelles le demandeur devait :

[TRADUCTION]

-                faire des efforts raisonnables pour suivre des cours d'anglais langue seconde (ALS) et, tous les six mois, informer la Section d'appel de l'immigration par écrit du cours suivi, du nom de l'établissement qui le donne et de la fréquence des classes, en étayant son rapport de pièces justificatives;

-                continuer à suivre des séances de psychothérapie avec M. Kingsley Ratnanather; les rapports semestriels de celui-ci devront comprendre l'évaluation de l'état du demandeur et des progrès réalisés ainsi que le pronostic du thérapeute;

-                produire un rapport écrit au gestionnaire régional, Appels de l'immigration, C.P. 6479, succursale A, Toronto (Ontario) M5W 1X3;

-                signaler tout changement d'adresse au Centre d'immigration Canada et à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, Section d'appel, dans les soixante-douze heures suivant le changement;

-                faire des efforts raisonnables pour chercher et conserver un emploi à plein temps et signaler SANS DÉLAI tout changement d'emploi;

entreprendre ou poursuivre une psychothérapie ou des séances de counselling.

NOTE : SI VOUS RETIREZ VOTRE CONSENTEMENT À CETTE CONDITION, VOUS DEVEZ PRÉSENTER SANS DÉLAI UNE DEMANDE À LA SECTION D'APPEL DE L'IMMIGRATION AFIN DE LA FAIRE SUPPRIMER.

faire des efforts raisonnables pour que votre alcoolisme ne fasse pas en sorte que vous vous conduisiez de façon dangereuse pour vous-même ou pour autrui;

-                ne pas sciemment vous mettre en rapport avec des personnes ayant un casier judiciaire ou se livrant à des activités criminelles;

-                ne pas être propriétaire ou en possession d'armes offensives ou d'imitations de telles armes;


-                respecter l'ordre public et bien se conduire.

[6]         L'examen du sursis a eu lieu le 15 février 1999, et le demandeur a comparu seul, sans être représenté par avocat. Le demandeur a témoigné qu'il travaillait six jours par semaine à la Paramount Paper Converters, et qu'il était sur appel le septième jour. Selon son témoignage, accepté par le tribunal, il pouvait, dans une période de deux semaines, faire jusqu'à soixante ou quatre-vingt heures de surtemps. Le tribunal a conclu que la condition du maintien d'un emploi à temps plein était remplie. Il a conclu également au respect de la condition relative à l'alcoolisme, car le demandeur a témoigné qu'il n'avait pas consommé d'alcool au cours des trois dernières années. Il a jugé, toutefois, que le demandeur n'avait pas respecté certaines autres conditions, plus particulièrement : (a) il n'avait pas produit les rapports exigés, (b) il n'avait pas poursuivi sa psychothérapie et ses séances de counselling, (c) il n'avait pas fourni à la Section d'appel les rapports semestriels de sa thérapie auprès de M. Ratnanather, (d) il ne s'était pas raisonnablement efforcé de suivre des cours d'ALS et (e) il n'avait pas respecté la condition relative au respect de l'ordre public et à la bonne conduite.

Question I : Insuffisance de l'avis


[7]         Le demandeur soutient que le tribunal a illégalement rendu sa décision et, plus particulièrement, qu'elle n'a pas été rendue conformément au processus en deux temps qui, selon lui, est exigé par la loi et la jurisprudence. Selon moi, le tribunal a suivi le processus prévu par la loi, et il était légitimement habilité à rejeter l'appel du demandeur et à annuler le sursis au moment où il l'a fait. La procédure d'appel dont il est question en l'espèce est régie par l'article 74 de la Loi sur l'immigration[1], lequel énonce ce qui suit :

74. (1) Where the Appeal Division allows an appeal made pursuant to section 70, it shall quash the removal order or conditional removal order that was made against the appellant and may

74. (1) Si elle fait droit à un appel interjeté dans le cadre de l'article 70, la section d'appel annule la mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel et peut_:

(a) make any other removal order or conditional removal order that should have been made; or

a) soit lui substituer celle qui aurait dû être prise;

(b) in the case of an appellant other than a permanent resident, direct that the appellant be examined as a person seeking admission at a port of entry.

b) soit ordonner, sauf s'il s'agit d'un résident permanent, que l'appelant fasse l'objet d'un interrogatoire comme s'il demandait l'admission à un point d'entrée.

(2) Where the Appeal Division disposes of an appeal by directing that execution of a removal order or conditional removal order be stayed, the person concerned shall be allowed to come into or remain in Canada under such terms and conditions as the Appeal Division may determine and the Appeal Division shall review the case from time to time as it considers necessary or advisable.

(2) En cas de sursis d'exécution de la mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel, l'appelant est autorisé à entrer ou à demeurer au Canada aux éventuelles conditions fixées par la section d'appel. Celle-ci réexamine le cas en tant que de besoin.

(3) Where the Appeal Division has disposed of an appeal by directing that execution of a removal order or conditional removal order be stayed, the Appeal Division may, at any time,

(3) Dans le cas visé au paragraphe (2), la section d'appel peut, à tout moment_:

(a) amend any terms and conditions imposed under subsection (2) or impose new terms and conditions; or

a) modifier les conditions imposées ou en imposer de nouvelles;

(b) cancel its direction staying the execution of the order and

b) annuler son ordre de surseoir à l'exécution de la mesure, et parallèlement_:

(i) dismiss the appeal and direct that the order be executed as soon as reasonably practicable, or

(i) soit rejeter l'appel et ordonner l'exécution dès que les circonstances le permettent,

(ii) allow the appeal and take any other action that it might have taken pursuant to subsection (1).

(ii) soit procéder conformément au paragraphe (1).


[8]         Selon le demandeur, la jurisprudence élaborée par notre Cour exige que l'examen d'un sursis ou des modifications à y apporter suive un processus en deux temps, la première étape consistant, pour la Section d'appel, à déterminer, sous le régime du paragraphe 74(2), si elle examinera la modification des conditions du sursis ou l'annulation de celui-ci, et la seconde - celle de la modification ou de l'annulation - ne pouvant être entreprise que si la première a eu lieu. Il s'agit, en fin de compte, de donner à la personne dont le sursis est en jeu, un avis suffisant de la possibilité que le sursis soit modifié ou annulé.


[9]         À l'appui de cet argument, le demandeur cite Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c. Lewis[2] et Stocking c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[3]. À mon avis, aucune de ces décisions n'est déterminante pour ce qui est de la présente espèce. Dans Lewis, le demandeur était partie à un appel et bénéficiait d'un sursis. Le ministre avait demandé, sous le régime des Règles de 1981 de la Commission d'appel de l'immigration (procédures d'appel), une ordonnance rejetant l'appel et prescrivant l'exécution immédiate de la mesure d'expulsion. La Cour d'appel a jugé que les paragraphes 76(2) et (3) (à présent 74(2) et (3)) établissaient un processus en deux étapes. Sur requête du ministre, la Section d'appel doit d'abord décider si elle examinera l'appel et l'ordonnance de sursis et, le cas échéant, elle procède alors à l'examen. Dans Stocking, le ministre avait demandé le modification des conditions du sursis octroyé à l'appelant. La Section d'appel avait avisé ce dernier qu'une audience serait tenue pour [TRADUCTION] « s'assurer que les conditions imposées ont été respectées » . Il n'était pas contesté que l'appelant avait rempli toutes les conditions prévues par l'ordonnance de sursis. À l'audience, la Section d'appel a décidé de sa propre initiative d'examiner le sursis et de l'annuler et de rejeter l'appel. Le juge Nadon a conclu, à l'issue du contrôle judiciaire, que la Section d'appel pouvait, en en donnant un avis suffisant, examiner la conduite de l'appelant et rendre une telle ordonnance. Il a toutefois estimé que lorsque l'avis donné ne concerne que l'examen du respect des conditions et que ce respect est établi, la décision d'annuler le sursis et de rejeter l'appel ne peut être maintenue.


[10]       Je suis d'avis qu'en l'espèce le processus prévu par la loi a été observé. Il ne s'agissait pas d'un examen demandé par le ministre. La décision d'effectuer des examens périodiques datait du prononcé initial de l'ordonnance de sursis, et la Section d'appel avait établi un calendrier de ces examens. Selon moi, le demandeur était donc suffisamment informé que l'audience porterait sur le respect des conditions du sursis accordé relativement à la mesure d'expulsion. Le demandeur a reçu signification d'un avis de comparution. Il s'était présenté à de tels examens auparavant, et il n'est pas concevable qu'une personne raisonnable n'aurait pas su, dans ce cas, quel était l'objet de ces examens. Le demandeur était informé, au moins depuis la dernière prolongation du sursis au mois de novembre 1997, que l'examen avait pour but d'examiner s'il avait observé les conditions du sursis. À mon avis, la Section d'appel a agi dans les limites du pouvoir qui lui était conféré par les paragraphes 74(2) et (3) de la Loi et, ce faisant, elle a donné au demandeur un avis suffisant de l'objet de l'examen.

[11]       Le demandeur prétend en outre que la Commission a contrevenu aux principes de justice naturelle parce qu'elle ne l'a pas avisé des conséquences possibles de l'audience, lesquelles pouvaient comprendre l'annulation du sursis et le rejet de son appel. Il fait valoir qu'à l'audience il n'a nullement compris quelle pouvait être l'issue finale de l'examen oral. À l'appui de son affirmation, il se rapporte à la transcription suivante de l'examen oral, préparée par un assistant juridique assermenté du cabinet de son avocat :

[TRADUCTION]

[La Commission] : Monsieur, je commence réellement à me demander si vous saisissez la gravité de la question que j'ai à trancher. Il ne s'agit pas de déterminer si vous pouvez parrainer la venue au Canada d'une fiancée. La situation sur laquelle je dois me prononcer est celle-ci : vous faites l'objet d'une mesure d'expulsion exécutoire dont l'exécution a été suspendue à certaines conditions, et il appert que vous n'avez pas vraiment respecté certaines de ces conditions. Vous avez également eu des démêlés avec la justice, alors qu'on vous a enjoint de respecter l'ordre public et de bien vous conduire. Alors, je vous donne la possibilité de me faire savoir si vous avez quoi que ce soit à dire à ce sujet.

[Le demandeur] :      Je me conduirai bien au Canada. C'est tout ce que je veux dire.

[La Commission] : Voulez-vous ajouter autre chose?

[Le demandeur] :      Non.


[12]       Je suis d'avis que le demandeur a été suffisamment informé de la possibilité que la Section d'appel puisse annuler le sursis et rejeter son appel. Plusieurs raisons m'ont amené à cette conclusion. Premièrement, il ne s'agissait pas du premier examen de l'ordonnance de sursis auquel le demandeur comparaissait. Le demandeur avait reçu avis de la tenue de l'examen oral. Ensuite, l'ordonnance de sursis le visant comportait des conditions auxquelles il devait se conformer. Il s'agissait d'un examen périodique, et la prolongation du sursis dépendait du respect des conditions. À l'audience, le commissaire a encore informé le demandeur de la gravité de la situation et lui a offert l'occasion de présenter d'autres observations. Enfin, même si j'avais la conviction que le demandeur n'était pas conscient des conséquences possibles de l'examen, ce serait simplement reconnaître son ignorance de la loi, un motif qui ne permet pas à la Cour d'intervenir lorsque la Section d'appel n'a pas excédé les pouvoirs conférés par l'article 74 de la Loi.

Question II : Conclusions au sujet du respect des conditions du sursis


[13]       Le demandeur soutient que la Commission a commis cinq erreurs concernant la question du respect des conditions de l'ordonnance de sursis. Premièrement, la Commission a jugé que le demandeur n'avait pas fait rapport au gestionnaire régional, Appels de l'immigration, comme il en avait l'obligation, alors que, selon le demandeur, il n'avait pas été avisé des dates où il devait faire rapport. Deuxièmement, la Commission aurait commis une erreur de droit en recevant la déposition d'un témoin non assermenté, savoir l'avocat représentant le ministre défendeur. Troisièmement, la Commission s'est méprise sur le témoignage du demandeur et a erronément conclu qu'il n'avait pas respecté la condition du sursis relative aux visites à son conseiller. Quatrièmement, le demandeur conteste la conclusion tirée par la Commission quant à son étude de l'anglais langue seconde. Cinquièmement et finalement, la Commission aurait tiré une conclusion de fait abusive et arbitraire non fondée sur la preuve lorsqu'elle a déterminé qu'il n'avait pas respecté l'ordre public - une autre condition de l'ordonnance de sursis - et, plus particulièrement, lorsqu'elle a déterminé que le demandeur [TRADUCTION] « était associé à des accusations de voies de fait et de violence » .

[14]       Je suis d'avis que la Commission n'a pas commis d'erreur en concluant que le demandeur n'avait pas respecté l'ordre de faire rapport périodiquement au gestionnaire régional, Appels de l'immigration. Contrairement aux précédentes ordonnances de sursis, l'ordonnance de novembre 1997 n'énonçait pas de date pour la transmission des rapports. Le demandeur a également dit à l'audience devant la Commission, qu'il n'avait pas reçu copie de cette ordonnance modifiée; il a toutefois reconnu avoir été mis au courant de ses termes, à l'audience, en novembre 1997. La Commission a conclu que le demandeur avait reçu signification par courrier de l'ordonnance et qu'il ne s'était jamais renseigné auprès de la Commission ou du ministère au sujet de son obligation de faire rapport. Toutes les ordonnances de sursis antérieures comportaient une obligation de faire rapport, et l'ordonnance datée du 21 février 1997, qui précédait la dernière prolongation de novembre 1997, renfermait la disposition suivante :

[TRADUCTION]

-                faire rapport par courrier, au gestionnaire, Appels de l'immigration, [...] sur les formules fournies par la Section d'appel, le 30 mars 1997 et, par la suite, à tous les six mois, aux dates suivantes :

30 septembre 1997                                  30 mars 1997

30 septembre 1998                                  30 mars 1998

30 septembre 1999                                  30 mars 1999

30 septembre 2000


[15]       Cette ordonnance de sursis antérieure, de février 1997, prévoyait des dates de remise de rapport excédant la période en cause en l'espèce. Compte tenu de ce qui précède, je suis d'avis qu'il était raisonnable pour la Commission de conclure que le demandeur ne s'était pas conformé à l'exigence de faire rapport. Le demandeur avait été informé que ces rapports étaient obligatoires, et il n'en a transmis aucun entre novembre 1997 et janvier 1999, ni aux dates établies dans l'ordonnance de février 1997 ni à d'autres dates, pas plus qu'il n'a fait l'effort de s'informer des dates auxquelles il devait présenter le rapport, à tous les six mois ou autrement.

[16]       Le demandeur prétend que la Commission a commis une erreur justifiant révision en recevant le témoignage de l'avocat du ministre alors que celui-ci n'avait pas été assermenté. La Commission a écrit, dans ses motifs du 15 février 1999 :

[TRADUCTION]

L'avocat du ministre défendeur a témoignéque le ministère avait reçu des rapports jusqu'au 30 septembre 1997, mais qu'aucun ne lui était parvenu depuis. Par conséquent, les rapports du 30 mars 1998 et du 30 septembre 1998 n'avaient pas été faits. [Non souligné dans l'original]

En tant qu'organisme administratif, la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié n'exerce que les pouvoirs qui lui sont conférés par le législateur. En matière de preuve, les pouvoirs de la Section d'appel sont énoncés au paragraphe 69.4(3) de la Loi sur l'immigration, lequel est ainsi conçu :


(3) The Appeal Division has, as regards the attendance, swearing and examination of witnesses, the production and inspection of documents, the enforcement of its orders and other matters necessary or proper for the due exercise of its jurisdiction, all such powers, rights and privileges as are vested in a superior court of record and, without limiting the generality of the foregoing, may

(3) La section d'appel a, pour la comparution, la prestation de serment et l'interrogatoire des témoins, ainsi que pour la production et l'examen des pièces, l'exécution de ses ordonnances et toute autre question relevant de sa compétence, les attributions d'une cour supérieure d'archives. Elle peut notamment_:

(a) issue a summons to any person requiring that person to appear at the time and place mentioned therein to testify with respect to all matters within that person's knowledge relative to a subject-matter before the Division and to bring and produce any document, book or paper that the person has or controls relative to that subject-matter;

a) par citation adressée aux personnes ayant connaissance de faits se rapportant à l'affaire dont elle est saisie, leur enjoindre de comparaître comme témoins aux date, heure et lieu indiqués et d'apporter et de produire tous documents, livres ou pièces, utiles à l'affaire, dont elles ont la possession ou la responsabilité;

(b) administer oaths and examine any person on oath; and

b) faire prêter serment et interroger sous serment;

(c) during a hearing, receive such additional evidence as it may consider credible or trustworthy and necessary for dealing with the subject-matter before it.

c) recevoir, en cours d'audition, les éléments de preuve supplémentaires qu'elle estime utiles, crédibles et dignes de foi.


[17]       Le législateur, à l'alinéa 69.4(3)c), a accordé à la Section d'appel un pouvoir discrétionnaire passablement étendu en matière d'audition d'éléments de preuve qu'elle estime « utiles, crédibles et dignes de foi » . Habituellement, l'avocat d'une partie ne témoigne pas, en particulier lorsqu'il n'est pas assermenté. Cette pratique, selon moi, s'applique à la preuve devant un tribunal administratif. En l'espèce, toutefois, le « témoignage » présenté ne consistait qu'en une affirmation sur les antécédents du demandeur relativement au respect des conditions, lesquels antécédents ressortaient du dossier. Si la Commission a erronément considéré cette affirmation comme un témoignage, l'erreur n'a pas porté à conséquence. Le demandeur lui-même a déclaré sous serment qu'il n'avait pas remis les rapports exigés. Les faits exposés par l'avocat n'étaient pas litigieux et ils figuraient dans le dossier du demandeur. La Cour n'intervient pas lorsque les décisions de la Section d'appel ne reposent pas sur des erreurs de fait importantes.

[18]       Quant aux trois erreurs de fait dont fait état le demandeur, elles peuvent être examinées ensemble. Je suis d'avis que la Commission pouvait raisonnablement conclure que le demandeur n'avait pas respecté les conditions de l'ordonnance de sursis, lesquelles lui imposaient notamment (a) de suivre des séances de counselling et de transmettre les rapports de son conseiller, (b) de suivre des cours d'anglais langue seconde et (c) de respecter l'ordre public et de bien se conduire. La Commission disposait d'éléments de preuve étayant chacune de ses conclusions quant au non-respect des conditions. On ne peut donc considérer que ces conclusions sont abusives, arbitraires ou sans lien avec la preuve et, par conséquent, la Cour ne peut intervenir.

Conclusion


[19]       J'estime, après examen des observations des parties, de la décision de la Commission et du dossier de l'affaire, que la Commission s'est acquittée de son obligation d'agir équitablement et qu'elle a respecté les principes de justice naturelle en informant suffisamment le demandeur de la nature de l'audience pour laquelle il avait reçu une assignation et en lui ménageant une possibilité suffisante de défendre son dossier. Je suis également d'avis que les éléments de preuve validement présentés à la Commission pouvaient raisonnablement fonder les conclusions de fait qu'elle a tirées à l'audience. Il n'y a donc pas lieu que la Cour intervienne.

[20]       Pour ces motifs, la Cour rejette la demande de contrôle judiciaire et d'annulation de la décision.

     (signé) W. Andrew MacKay       

JUGE

OTTAWA (Ontario)

16 juin 2000

Traduction certifiée conforme

                                     

Ghislaine Poitras, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                 IMM-1084-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :    Thurairasa Ponnusamy c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :         Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                   le 9 novembre 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE MacKay

RENDUS LE :                          16 juin 2000

ONT COMPARU :

M. Lorne Waldman                                           pour le demandeur

M. Toby Hoffmann                                            pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Waldman, Jackman and Associates                    pour le demandeur

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                    pour le défendeur



     [1] L.R.C. (1985), ch. I-2. et ses modifications.

     [2] [1988] J.C.F. no 121, 87 N.R. 192 (C.A.).

     [3] [1998] J.C.F. no 993, 153 F.T.R. 198 (1re inst.).

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