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     Date : 19980403

     Dossier : IMM-1798-97

ENTRE :

     DARYOOSH SOLHJOU MEHRABANI,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE ROTHSTEIN

[1]      Le requérant est citoyen de l"Iran. À titre de superviseur d"une équipe cycliste, il a participé à une collecte de fonds à l"intention des nécessiteux. Il y a eu un grand écart entre les sommes amassées et celles annoncées par les responsables de la fédération cycliste.

[2]      Le requérant a parlé à un inspecteur du ministère des Finances à ce sujet. Cet inspecteur faisait enquête sur des activités de malversation dans lesquelles trempaient des personnes haut placées en Iran et il croyait que l"écart remarqué pour l"activité cycliste faisait partie de ces malversations.

[3]      Les deux factions principales en Iran, le groupe Rafsanjani et le groupe Khamenei, se sont affrontées sur cette question des malversations, chacun accusant l"autre d"en être l"auteur.

[4]      Le requérant a été cité à comparaître pour donner des renseignements quant à l"écart remarqué pour l"activité cycliste. Après que le requérant eut témoigné, le président de l"association cycliste a tenté d"imposer le silence au requérant en lui laissant entendre qu"il pourrait être tué. L"inspecteur des finances a été tué dans des circonstances douteuses. Le requérant a témoigné avoir reçu d"autres menaces.

[5]      Le requérant a été à nouveau cité à comparaître et à témoigner relativement aux malversations, mais il craignait désormais pour sa vie. À la même période, il devait se rendre en Europe avec son équipe cycliste. Il a décidé de faire le voyage avec l"équipe cycliste et de ne pas témoigner. Après le voyage avec l"équipe cycliste, le requérant est venu au Canada et a demandé le statut de réfugié au sens de la Convention.

[6]      Le requérant fonde sa demande de statut de réfugié sur ses opinions politiques. Dans sa décision du 7 avril 1997, le tribunal de la Commission de l"immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande. Le tribunal a conclu que le requérant pouvait bien avoir besoin de protection, mais qu"il ne correspondait pas à la définition de réfugié au sens de la Convention. Le tribunal a affirmé que les auteurs des malversations dont le requérant avait peur ne cherchaient pas à lui causer du tort en raison de ses opinions politiques, mais plutôt parce qu"il possède des éléments de preuve contre eux quant à leurs activités criminelles.

[7]      Le tribunal a considéré important le témoignage selon lequel l"État avait pris des mesures contre certains auteurs de malversations, soit qu"il en avait exécuté certains et qu"il en avait emprisonné d"autres. Le tribunal a conclu que ce témoignage établissait que dénoncer la corruption n"était pas considéré comme une contestation du pouvoir gouvernemental. Le tribunal a conclu que le lien nécessaire entre le scandale des malversations et les opinions politiques n"avait pas été établi.

[8]      Les faits de l"espèce ressemblent à ceux de l"affaire Mousavi-Samani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration), dossier IMM-4674-96, 30 septembre 1997. Au paragraphe 11 de ses motifs, le juge Heald affirme :

             À mon avis, il était également raisonnable pour la Commission de conclure que les requérants n'avaient pas établi l'existence d'un lien avec un motif énuméré dans la Convention. La conclusion de la Commission selon laquelle les actes des requérants ne constituaient pas la contestation du pouvoir du régime iranien de gouverner était une conclusion raisonnable compte tenu du dossier. Telle est aussi ma conclusion parce que celle de la Commission reposait sur ses conclusions de fait selon lesquelles l'État avait pris d'énergiques mesures contre certains des agents corrompus, dénonçant ainsi publiquement la corruption.                 

Je dois en arriver à la même conclusion. En l"espèce, le tribunal a aussi conclu que les mesures prises par l"État contre les auteurs de malversations démontraient que la connaissance et les actions du requérant en cause ne constituent pas une contestation du pouvoir du régime iranien. Vu la preuve déposée devant le tribunal, il était loisible à ce dernier de tirer la conclusion qu"il a tirée.

[9]      L"avocat du requérant a indiqué d"autres éléments de preuve qui donnent à penser que le requérant pourrait subir un préjudice s"il retournait en Iran. Bien que cela puisse être le cas, le requérant n"en doit pas moins démontrer qu"un tel préjudice est lié à ses opinions politiques, ou à l"un des autres motifs mentionnés dans la définition de réfugié au sens de la Convention. Il n"y est pas parvenu.

[10]      Le tribunal a bien rédigé ses motifs. Il a cité les dispositions légales pertinentes et son analyse et sa conclusion sont, selon moi, inattaquables. Mais, par ailleurs, il s"agissait clairement d"une affaire difficile et frustrante pour le tribunal, comme ses motifs le laissent transparaître. La Cour aussi considère qu"il s"agit d"une affaire difficile et frustrante.

[11]      Rien ne met en doute la crédibilité du requérant, et les motifs du tribunal indiquent que le requérant pourrait bien avoir besoin de protection, bien que ce ne soit pas pour un motif reconnu par la Convention. Je m"attends très sincèrement à ce que l"intimé examine la question conformément aux dispositions légales applicables en matière de considérations d"ordre humanitaire et quant au risque de préjudice que le requérant court s"il doit retourner en Iran.

[12]      Le contrôle judiciaire est rejeté. La délivrance de l"ordonnance est suspendue pendant sept jours pour permettre aux parties de soumettre une question à la certification, si elles le désirent.

     " Marshall Rothstein "

     ________________________________

     Juge

Toronto (Ontario)

3 avril 1998

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DE DOSSIER :                          IMM-1798-97
INTITULÉ DE LA CAUSE :                  DARYOOSH SOLHJOU MEHRABANI
                                 c.
                                 LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION
DATE DE L'AUDIENCE :                      2 AVRIL 1998
LIEU DE L'AUDIENCE :                      TORONTO (ONTARIO)
MOTIFS DE L"ORDONNANCE PRONONCÉS PAR :      LE JUGE ROTHSTEIN
DATE :                              3 AVRIL 1998

ONT COMPARU :

M. Peter J. Reiner                          pour le requérant
Mme Sally Thomas                          pour l'intimé

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:

Peter J. Reiner                          pour le requérant

Barrister & Solicitor

2200 Yonge Street

Suite 601

Toronto, Ontario

M4C 2C6

M. George Thomson                          pour l'intimé

Sous-procureur général

du Canada

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Date : 19980403

     Dossier : IMM-1798-97

Entre :

DARYOOSH SOLHJOU

MEHRABANI,

     requérant,

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L"IMMIGRATION,

     intimé.

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     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

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