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Date : 20020917

Dossier : IMM-5791-01

Référence neutre : 2002 CFPI 982

Toronto (Ontario), le mardi 17 septembre 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL

ENTRE :

                              VITALIY PETLYUCHENKO

                                                                                          demandeur

                                                  - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                           défendeur

        MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]    Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire visant la décision de la Section du statut de réfugié (SSR) en date du 2 août 2001 par laquelle le demandeur s'est vu refuser le statut de réfugié au sens de la Convention.


[2]    Le demandeur est un revendicateur juif du statut de réfugié. Il est originaire de l'Ukraine et a introduit sa demande sur la base d'une crainte fondée de persécution antisémite. Pour rejeter sa demande, la SSR a conclu qu'il n'y a pas suffisamment de preuve crédible ou digne de foi. Particulièrement, le tribunal a conclu que le revendicateur n'a pas prouvé qu'il est Juif.

[3]    Afin de prouver son origine ethnique juive, le demandeur a fourni des copies de ses documents d'identité ukrainiens. La SSR a conclu que les copies étaient de piètre qualité. La SSR a interrogé le demandeur sur la raison pour laquelle il n'a pas apporté les originaux avec lui au Canada et le demandeur a répondu qu'il ne savait pas qu'on vérifierait sa nationalité. Le demandeur a également fourni une preuve documentaire selon laquelle il ne pouvait obtenir les originaux à partir du Canada parce que ceux-ci ne peuvent pas être envoyés de l'Ukraine par courrier. La SSR n'a pas accepté cette explication. Pour parvenir à cette conclusion, la SSR s'est référée au fait qu'il y avait un accès facile à de faux documents en provenance de l'ex-Union soviétique. En conséquence, la SSR a décidé de fait que les copies des documents d'identité présentées par le demandeur n'étaient pas admissibles.

[4]    Jusque-là, je n'ai trouvé aucune erreur de la part de la SSR. Le refus de la SSR d'accepter les copies de documents d'identité place le demandeur dans la situation où sans preuve documentaire, il a la charge de prouver autrement son origine ethnique. Dans ce cas, la preuve peut être tirée du témoignage du demandeur, si ce témoignage est jugé crédible.


[5]                Le problème, en l'espèce, est que la SSR n'a pas cru le témoignage du demandeur parce qu'il ne correspondait pas à ce à quoi elle s'attendait. Ainsi, la clef de la décision objet de contrôle judiciaire est la norme que la SSR a appliquée en rejetant le témoignage du demandeur, ce qu'elle a fait sans avoir vraiment abouti à une conclusion précise sur la crédibilité.

[6]                Deux questions portant sur le témoignage ont été énoncées dans le passage suivant des motifs de la SSR, aux pages 2 et 3 :

Par ailleurs, le revendicateur a donné un témoignage incohérent d'un point de vue historique. En effet, il a affirmé s'être rendu à la Synagogue 10 à 12 fois avant l'effondrement de l'Union soviétique. Selon certains document consultés (Pièce R-1, Dossier d'information de la SSR sur l'Ukraine, points 1.2 - 1.7 et point 3.1.), telle activité est invraisemblable. Le revendicateur n'avait non plus aucune idée du nombre de Juifs victimes de l'Holocauste. Le tribunal a été surpris par ce détail d'autant plus que la mère du revendicateur aurait insisté pour que ses documents fassent mention de son ethnicité (Juive) et qu'elle aurait maintenu certaines traditions juives. Considérant toute l'importance que le revendicateur dit attacher à sa nationalité/religion malgré la persécution dont il prétend avoir fait l'objet, le tribunal se serait attendu à ce que le revendicateur démontre une meilleure connaissance de la plus importante persécution de toute l'histoire du peuple juif.

Le revendicateur semble également avoir une connaissance extrêmement limitée des coutumes et des traditions juives. [Non souligné dans l'original.]

[7]               Durant l'audience, le Document « 3.1 » auquel la SSR s'est référée avait été fourni par l'avocat du défendeur. À mon avis, ce document ne fournit pas une preuve claire susceptible de justifier la conclusion de la SSR selon laquelle l'activité en question était « invraisemblable » .


[8]               En outre, je trouve difficile à comprendre comment un test de connaissance sur un fait unique comme le « nombre de Juifs victimes de l'Holocauste » puisse servir à mettre en doute le témoignage du demandeur, qui autrement n'a pas été contesté. Il est admis que, dans une situation comme celle de la présente affaire où la SSR dit effectivement que le demandeur ment, la SSR doit donner les raisons qui l'ont poussée à tirer cette conclusion. À mon avis, la décision de la SSR ne satisfait pas à cette exigence. Conclure qu'une déclaration est « invraisemblable » , ou se dire « surpris » , sans fournir la preuve détaillée sur laquelle on s'appuie, n'est pas suffisant.

[9]               Par conséquent, je conclus que la décision est fondée sur une erreur en droit.

                            ORDONNANCE

            En conséquence, j'annule la décision de la SSR et renvoie l'affaire devant un tribunal autrement composé.

« Douglas R. Campbell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Jean Maurice Djossou, LL.D.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                   IMM-5791-01

INTITULÉ :                                                   VITALIY PETLYUCHENKO

demandeur

- et-

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

défendeur

                                                            

DATE DE L'AUDIENCE :              Le mardi 17 septembre 2002

LIEU DE L'AUDIENCE :                            Toronto (Ontario)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                  LE JUGE CAMPBELL          

DATE DES MOTIFS :                                 Le mardi 17 septembre 2002

COMPARUTIONS :                                    M. Peter Woloshyn

Pour le demandeur

M. Robert Bafaro

                                               Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :    M. Peter Woloshyn

Yallen Associates

204, rue St.George, 3e étage

Toronto ( Ontario)

M5R 2N5

Pour le demandeur

                                                                                                           

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Pour le défendeur


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Date : 20020917

                                                       Dossier :IMM-5791-01

Entre :

VITALIY PETLYUCHENKO

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                                     

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET

ORDONNANCE

                                                                     


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