Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20030520

Dossier : T-2048-01

Référence neutre : 2003 CFPI 635

ENTRE :

SELLADURAI PREMAKUMARAN

et NESAMALAR PREMAKUMARAN

                                                                                                                                                   demandeurs

et

SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                               défenderesse

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

[1]                 Les présents motifs intéressent surtout la requête de la défenderesse en radiation d'une déclaration nouvellement modifiée et, accessoirement, la requête des demandeurs en directives générales, encore que non précisées, et en jugement par défaut sur les dommages-intérêts, le reste du jugement déclaratoire demandé devant être renvoyé à procès, outre une ordonnance déniant à la Couronne, généralement encore une fois, toute prorogation de délai. J'exposerai d'abord certains faits.


LES FAITS

[2]                 Les demandeurs, qui agissent pour eux-mêmes, ont immigré au Canada en 1998 depuis l'Angleterre. Le 16 novembre 2001, ils ont déposé une déclaration visant notamment à faire condamner la Couronne à des dommages-intérêts pour de présumées affirmations frauduleuses faites par des représentants de la Couronne durant la procédure d'immigration, pour un système de points d'admission qui était trompeur, pour la communication de renseignements faux en matière d'immigration et pour l'utilisation de fausses annonces sur les possibilités d'emploi au Canada. La déclaration initiale comportait de nombreuses lacunes, mais si l'on en faisait une lecture générale en énonçant plusieurs hypothèses, il semblerait qu'ils n'ont pas trouvé au Canada la vie qu'ils espéraient y trouver et qu'ils ont donc subi un préjudice non précisé.

[3]                 La déclaration a été, dans une grande mesure, radiée, mais avec autorisation de la modifier, par une ordonnance du 23 janvier 2002, qui faisait expressément état de diverses imperfections. L'ordonnance indiquait que, si la déclaration était considérablement modifiée, elle pourrait à la fois se conformer aux Règles de la Cour fédérale et révéler une ou deux causes d'action valables.


[4]                 Les demandeurs ont produit le 16 février 2002 une déclaration modifiée. La Couronne a exprimé l'avis que la déclaration modifiée n'était pas conforme à l'ordonnance accommodante du 23 janvier 2002. L'avocat de la Couronne a formulé des critiques utiles et suggéré la production d'une déclaration de nouveau modifiée, puisque non seulement il restait encore du temps à l'intérieur duquel procéder à la modification en conformité avec l'ordonnance, mais encore aucune défense n'avait été produite, rendant ainsi possible la modification de plein droit prévue par la règle 200. Les demandeurs ont produit le 18 mars 2002 une deuxième « déclaration modifiée » , que j'appellerai la déclaration nouvellement modifiée.

[5]                 Comme je l'ai indiqué, les présents motifs résultent de deux requêtes. La première requête, chronologiquement, est celle de la défenderesse, qui voudrait que soit radiée la déclaration nouvellement modifiée. La deuxième est la réponse des demandeurs à la requête de la Couronne, réponse prenant la forme d'une requête en directives, ainsi qu'en jugement par défaut leur accordant des dommages-intérêts, mais avec tenue d'un procès sur le reste du redressement demandé, et avec demande à la Cour pour qu'elle refuse à la défenderesse toute autre prorogation de délai. Les pièces accompagnant la requête des demandeurs sont très nombreuses et largement hors de propos à ce stade, mais l'exposé des faits et du droit des demandeurs concerne quant à lui la requête de la défenderesse en radiation de la déclaration nouvellement modifiée.

[6]                 À la suite d'une interrogation ultérieure de la Cour, l'avocat de la défenderesse a produit une lettre qui tenait lieu de réponse à la requête des demandeurs. Dans cette réponse, l'avocat de la Couronne propose que la requête de la défenderesse en radiation soit instruite d'abord, et que la requête des demandeurs ne soit examinée que si cela était nécessaire, car si à ce stade la déclaration nouvellement modifiée devait être radiée, alors la requête des demandeurs perdrait tout intérêt pratique.


EXAMEN

[7]                 L'argument de la défenderesse, c'est que la forme et le contenu de la déclaration nouvellement modifiée, aujourd'hui un acte de procédure de 15 pages alors qu'il n'en comportait que quatre auparavant, sont tels que la défenderesse n'est pas en mesure de produire une défense valable et cohérente. Certes, la déclaration nouvellement modifiée n'est pas facile à lire. Elle renferme certains détails additionnels nécessaires, mais elle est maintenant encombrée d'éléments de preuve, dont beaucoup sont hors de propos à ce stade et vont à l'encontre de la règle selon laquelle une déclaration doit renfermer un exposé précis de faits substantiels progressant d'une manière logique vers des conclusions pratiques. La simple énonciation de conclusions ne suffit pas à constituer des faits substantiels, car elles ne donnent pas une idée juste et suffisante de la position d'une partie. En fonction des circonstances, la notion de faits substantiels admet une certaine liberté d'action. Ce point avait été souligné par le grand chancelier Selbourne dans l'arrêt Millington c. Loring (1880) 6 QBD 190, à la page 194. Dans cette affaire, s'exprimant sur l'équivalent de notre règle 174, selon laquelle tout acte de procédure contient un exposé concis des faits substantiels sur lesquels la partie se fonde, il écrivait :

[Traduction] Si ces mots, « faits substantiels » , doivent se limiter aux aspects qui sont essentiels à la cause d'action, c'est-à-dire aux faits qui doivent être prouvés afin d'établir l'existence de la cause d'action, alors sans aucun doute les faits exposés dans ce paragraphe n'ont pas été validement plaidés. Mais, à mon avis, les mots en question ne sont pas limités de la sorte et ils doivent être réputés englober les faits que la partie plaidante est fondée à prouver au procès.


Lord Selbourne expliquait ensuite, à l'aide d'exemples, l'idée selon laquelle des faits substantiels comprenaient les faits qu'une partie est fondée à prouver au procès. Cependant, nulle part ne donne-t-on à entendre que des faits substantiels ou des détails vont jusqu'à englober la preuve, et c'est certainement ce qui ressort de notre règle 174, que j'exposerai en temps et lieu.

[8]         Dans l'affaire Cercast Inc. c. Shellcast Foundries Inc., [1973] C.F. 28 (C.F. 1re inst.), Monsieur le juge Walsh avait fait observer que les détails devraient se suffire à eux-mêmes, sans qu'il faille faire des preuves à l'appui.

[9]                 Les plaideurs profanes, et même certains professionnels parmi nous, auront parfois du mal à faire la distinction entre les détails et la preuve. En règle générale, les détails servent à expliquer ce qu'une partie va tenter de prouver contre l'autre : la manière dont une partie entend prouver ses prétentions relève de la preuve. Le juge McQuaid, s'exprimant pour la Cour dans l'arrêt Kay Aviation b.v. c. Rofe (2001), 202 D.L.R. (4th) 683, à la page 687 (C.A. Î.-P.-É.), écrivait [traduction] « Il n'est pas toujours facile, dans le contexte d'actes de procédure, de faire la distinction entre ce qui constitue des "faits substantiels", des "preuves" et des "détails" » . Puis il reprenait les propos du protonotaire Sandler dans l'affaire Copland c. Commodore Business Machines Ltd. (1985), 52 O.R. (2d) 586 (C.S.), à la page 588 :

[Traduction] Les faits substantiels doivent être plaidés; les preuves n'ont pas à l'être. Entre la notion de « faits substantiels » et la notion de « preuves » , il y a la notion de « détails » . Il s'agit d'éléments additionnels d'information, ou de données, qui étoffent les « faits substantiels » , mais ils ne sont pas détaillés au point d'équivaloir à des « preuves » .

Puis il faisait observer ensuite qu'il était :


[Traduction] ... nécessaire, dans tout genre d'action, de déterminer le niveau minimum de divulgation des faits substantiels requise pour un acte de procédure donné, afin de voir si l'acte de procédure est ou n'est pas régulier. Ce n'est nullement une tâche facile, et c'est une entreprise qui requiert une bonne dose de sens commun. Il faut aussi garder constamment à l'esprit l'objet et la fonction des actes de procédure dans les procès modernes. Il est souvent difficile de faire la différence, et d'expliquer cette différence, entre les faits substantiels, les détails et les preuves.

Ici, le protonotaire Sandler fait ressortir la difficulté de faire la différence, et d'expliquer la différence, entre des faits substantiels, des détails et des preuves. Je mentionnerais l'affaire Evans c. Canada (1986), 4 F.T.R. 247 (C.F. 1re inst.), un jugement de Monsieur le juge Strayer (tel était alors son titre), qui apporte une assistance pratique. Dans cette affaire, qui, comme la présente affaire, renfermait des allégations de traitement préjudiciable, le juge Strayer avait fait observer que la déclaration était inusitée parce qu'elle exposait des preuves au lieu de faire un exposé concis des faits substantiels, ainsi que l'exigeait la règle 408 à l'époque, et ainsi que l'exige aujourd'hui la règle 174, qui prévoit ce qui suit :

Tout acte de procédure contient un exposé concis des faits substantiels sur lesquels la partie se fonde; il ne comprend pas les moyens de preuve à l'appui de ces faits.

Every pleading shall contain a concise statement of the material facts on which the party relies, but shall not include evidence by which those facts are to be proved.


Dans l'affaire Evans, le juge Strayer avait radié la déclaration, mais avait autorisé son auteur à la modifier. Il disait que le demandeur devrait exposer clairement la nature des activités reprochées, préciser qui commettait les actes, quand et où ils étaient commis, et s'il s'agissait d'actes négligents ou intentionnels. Dans l'examen de la déclaration nouvellement modifiée, j'ai gardé à l'esprit à la fois la notion générale exprimée dans la règle 174 et la jurisprudence qui s'y rapporte, de même que certaines notions applicables additionnelles.

[10]            Pour commencer, « les règles de plaidoiries sont conçues pour garantir que les parties au procès sont suffisamment informées des arguments qu'elles devront produire et qu'elles ne seront pas prises au dépourvu. » (Keleher c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), (1989) 26 F.T.R. 161 (C.F. 1re inst.), à la page 178). Monsieur le juge Stone avait renforcé cette notion dans l'arrêt Weatherall c. Canada (Procureur général), (1988) 86 N.R. 168 (C.A.F.), à la page 174 en se référant à deux autorités : Williston and Rolls, The Law of Civil Procedure, volume 2, Toronto, Butterworths, 1970, à la page 637, et Esso Petroleum Co. Ltd. c. Southport Corporation [1956] A.C. 218 (H.L.), à la page 241 :

[Traduction] Il est élémentaire que deux des principales fonctions des actes de procédure consistent à [traduction] « définir avec clarté et précision la question débattue par les parties au litige » et à [traduction] « faire connaître de façon loyale à la partie opposée l'argumentation qu'elle devra produire, de façon à lui permettre d'orienter sa preuve en fonction des actes de procédure » .

Dans l'arrêt Weatherall, le juge Stone avait réduit à deux propositions l'essentiel de la jurisprudence : d'abord, la controverse doit être définie clairement et avec précision dans un acte de procédure, et, deuxièmement, l'acte de procédure doit être rédigé d'une manière qui donne un avis suffisant des arguments à faire valoir de telle sorte que la partie adverse puisse orienter sa preuve vers les points voulus.

[11]            J'ai gardé à l'esprit le point de vue des demandeurs selon lequel leur cas est sans précédent et constitue une première dans l'histoire du monde juridique (page 2 de l'avis de requête). Je ne suis pas persuadé du caractère inédit de leur réclamation, mais là n'est pas la question, car, s'il existe une cause d'action valable, adéquatement fondée en droit, la nouveauté n'entre pas en ligne de compte : voir l'affaire Jane Doe c. Metro Toronto (Municipality) Commissioners of Police (1990), 72 D.L.R. (4th) 580 (H.C. Ont.), à la page 583. À cette acceptation du caractère inédit d'une réclamation, j'ajouterais qu'une cause d'action valable peut reposer sur des règles manifestement en évolution.

[12]            La notion de réclamation inédite, exposée dans l'affaire Metro Toronto, s'accompagne d'autres principes que j'ai jugé utile de garder à l'esprit et qui sont importants lorsqu'on examine une déclaration dans le contexte d'une requête visant à la faire radier :

[Traduction]

(1)            Les actes de procédure doivent révéler une cause d'action fondée en droit. Dans la mesure où ce critère est rempli, le caractère inédit de la cause d'action est sans importance : voir Johnson c. Adamson (1981), 128 D.L.R. (3d) 470, 34 O.R. (2d) 236, 18 C.C.L.T. 282 (C.A.).

(2)           Lorsqu'on se demande s'il existe une cause d'action, les faits substantiels plaidés doivent être tenus pour avérés. Cependant, ce principe ne s'applique pas lorsque les faits allégués sont fondés sur des hypothèses ou des conjectures qu'il est impossible de prouver : voir Operation Dismantle Inc. c. Canada (1985), 18 D.L.R. (4th) 481, [1985] 1 R.C.S. 441, 13 C.R.R. 287.

(3)           Si les faits, tenus pour avérés, révèlent une cause d'action valable, c'est-à-dire une cause d'action présentant des chances de succès, alors l'action peut aller de l'avant : voir l'arrêt Operation Dismantle Inc., précité.

(4)           La déclaration doit être interprétée aussi généreusement que possible, afin de suppléer aux insuffisances de la forme des allégations, par suite des lacunes de la rédaction : voir l'arrêt Operation Dismantle Inc., précité.

(Pages 583 et 584)


Dans l'affaire Metro Toronto, la Cour d'appel de l'Ontario s'était référée à l'arrêt Operation Dismantle pour la notion selon laquelle, si une action a des chances de réussir, alors elle peut aller de l'avant. Cependant, j'exprimerais le critère en des termes plus précis : pour radier une action, c'est-à-dire pour refuser à un plaideur le droit d'en référer à la justice, il doit être clair, évident et indubitable qu'il n'obtiendra pas gain de cause et, s'il n'est pas évident que l'action est vouée à l'échec, elle doit pouvoir aller de l'avant : voir par exemple la décision rendue par le juge Hugessen dans l'affaire Martel c. Omeasoo et la Bande indienne de Samson, une décision non publiée du 28 novembre 2000, numéro du greffe T-2391-88, et les précédents sur lesquels repose cette notion, par exemple l'arrêt Hunt c. Carey Canada Inc., [1990] 2 R.C.S. 959, à la page 972, l'arrêt Operation Dismantle, [1985] 1 R.C.S. 441, à la page 449 et l'arrêt Canada (Procureur général) c. Inuit Tapirisat of Canada, [1980] 2 R.C.S. 735, à la page 740.


[13]            En l'espèce, la défenderesse dit que non seulement la déclaration nouvellement modifiée ne révèle aucune cause d'action valable, mais qu'elle constitue aussi un abus de procédure et qu'elle est scandaleuse, futile ou vexatoire. Une procédure futile englobe une procédure si manifestement mauvaise qu'elle ne requiert aucun argument véritable pour convaincre le tribunal qu'elle est mauvaise, et il peut s'agir d'une procédure qui atteste la mauvaise foi. Les procédures futiles et vexatoires sont celles qui sont introduites par un demandeur qui n'est pas de bonne foi, et ce sont des procédures qui ne donneront aucun résultat pratique. Les mots « futile » et « vexatoire » qualifient une réclamation à l'évidence indéfendable, et ils englobent les instances qui constituent un abus de procédure. Une action abusive quant à elle est une instance qui détourne ou pervertit une procédure de la Cour et, encore une fois, c'est une action qui ne peut conduire à aucun résultat possible. Pour d'autres explications et précédents se rapportant à cette proposition, voir l'affaire Larden c. Canada, [1998] 145 F.T.R. 140 (C.F. 1re inst.). Lorsqu'on affirme qu'une action est scandaleuse, frivole et vexatoire ou qu'elle constitue un abus de procédure, selon la règle 221(1)c) et f), le critère à appliquer pour sa radiation est aussi rigoureux, voire plus rigoureux, que celui qu'il convient d'appliquer selon la règle 221(1)a) pour savoir si un acte de procédure révèle ou non une cause d'action valable : voir par exemple l'affaire Waterside Ocean Navigation Co. c. International Navigation Ltd., [1977] 2 C.F. 257, à la page 259 (C.F. 1re inst.), une décision du juge en chef adjoint Thurlow.

[14]            Le simple fait que la déclaration puisse renfermer un contenu pléthorique ne justifie pas la radiation : voir l'affaire Radil Bros. Fishing Co. c. Canada (Ministère des Pêches et des Océans, Région du Pacifique), 2002 CFPI 1237, une décision non publiée du 28 novembre 2002, numéro du greffe T-82-99, au paragraphe 17, jugement confirmé en appel le 6 mai 2003.

[15]            En l'espèce, devant l'argument d'absence d'une cause d'action valable, j'ai ignoré, comme je le devais, la preuve par affidavit. Je dois même tenir pour avérés tous les faits plaidés dans la déclaration nouvellement modifiée, sauf dans la mesure où ils reposent sur des hypothèses ou des conjectures (voir l'arrêt Metro Toronto (Municipality) Commissioners of Police (précité), et l'arrêt Operation Dismantle [précité], à la page 455), et sauf lorsque les faits plaidés sont manifestement ridicules ou impossibles à démontrer (voir l'affaire Martel Building Ltd. c. Canada (1994), 71 F.T.R. 281 (C.F. 1re inst.), à la page 284).


[16]            J'ai considéré attentivement la déclaration nouvellement modifiée et, comme je l'ai dit, je l'ai considérée à la lumière de la jurisprudence applicable, que j'ai, pour l'essentiel, évoquée plus haut. J'ai pris en compte le fait que l'acte de procédure n'a pas été rédigé par des avocats, mais par des plaideurs profanes. Ayant tout cela à l'esprit, j'ai tenté de voir si la déclaration nouvellement modifiée renfermait le minimum requis pour qu'une réclamation ressortisse aux tribunaux, et, durant cet examen, j'ai rejeté les éléments qui sont manifestement des preuves, par opposition à des détails, et qui n'ont pas leur place dans un acte de procédure.

[17]            Par leur déclaration nouvellement modifiée, les demandeurs réclament réparation pour préjudice moral, manque à gagner et perte de 1 000 000 $ d'épargne, enfin pour divers frais d'immigration et de subsistance totalisant 125 000 $. Les demandeurs voudraient aussi des dommages-intérêts non spécifiés, pour déni de leurs droits fondamentaux, tensions inutiles et temps perdu par eux loin de leur famille. Les demandeurs réclament en outre « des excuses publiques » . Les excuses forcées sont considérées comme une humiliation injuste et sont loin d'avoir la valeur d'excuses librement faites : voir La Reine c. Northwest Territories Power Corp. (C.S.T.N.-O.), [1990] N.W.T.R. 125 (C.S. T.N.-O.), aux pages 131 et 132. La Cour d'appel fédérale faisait remarquer dans l'arrêt Ranjit Perera c. La Reine, [1998] 3 C.F. 381 (C.A.F.), que le fait d'exiger une lettre d'excuses contreviendrait à l'alinéa 2b) de la Charte et que ce redressement pouvait être accordé s'il pouvait se justifier selon l'article premier de la Charte, et la partie de la déclaration où des excuses sont demandées devrait donc subsister.

[18]            Les demandeurs sollicitent également ce que l'on pourrait appeler un jugement déclaratoire concernant la procédure d'immigration, la reconnaissance générale de titres conférés à l'étranger et d'habiletés acquises à l'étranger, « au niveau fédéral et au niveau provincial, et la bonne gestion des fonctionnaires du Haut Commissariat à Londres » . Ce jugement déclaratoire, bien que sans doute altruiste, d'autant qu'il ne procurerait aucun avantage direct aux demandeurs, comporte aussi des sous-entendus politiques et effleure peut-être les compétences provinciales, ou devrait être demandé par contrôle judiciaire comme cela est prévu aux paragraphes 18(1) et (3) de la Loi sur la Cour fédérale. Cependant, il s'agit d'un contenu excédentaire, qui peut demeurer.

[19]            Les plaintes exposées dans la déclaration nouvellement modifiée, et qui sont émaillées d'abondants éléments de preuve, peuvent être résumées ainsi :

(i)                    la Couronne, par des annonces fausses et par les déclarations du Haut Commissaire du Canada à Londres, a sciemment, avec insouciance et négligemment trompé les demandeurs et les a amenés à croire que leurs qualités, leurs aptitudes, leurs connaissances et leur maîtrise de la langue anglaise seraient très prisées au Canada;

(ii)                  les demandeurs, au moment de leur immigration, ont été encouragés à rompre leurs liens avec l'Angleterre, notamment à vendre leur maison, un conseil qui, disent-ils, s'est révélé mauvais;

(iii)                 la Couronne, encore une fois par l'entremise du Haut Commissaire du Canada à Londres, a induit les demandeurs en erreur sur les possibilités commerciales existant au Canada;

(iv)              le Haut Commissaire du Canada à Londres a induit les demandeurs en erreur sur la qualité de vie qu'ils pouvaient espérer au Canada, notamment sur l'absence de toute discrimination;

(v)                  les déclarations trompeuses faites au nom de la Couronne ont été faites sciemment et intentionnellement;

(vi)              la Couronne a utilisé un système de points trompeur et frauduleux pour frauder les immigrants, ce qui, dans le cas particulier des demandeurs, constituait un abus et « une manière de nous priver délibérément de notre avenir » ;


(vii)              les droits conférés aux demandeurs par la Charte ont été déniés, mais aucune disposition particulière de la Charte n'est mentionnée;

(viii)            la défenderesse a obtenu un gain financier grâce aux droits payés par les demandeurs, et les demandeurs ont subi « une grave perte financière qui a déclenché chez eux stress et mauvaise santé » , et les ennuis de santé des demandeurs sont ensuite énumérés.

Selon la défenderesse, en exposant ainsi toutes ces plaintes, les demandeurs sont allés au-delà du champ et de l'intention de l'ordonnance requérant une modification. Cependant, je dois garder à l'esprit que, aucune défense n'ayant encore été produite, les demandeurs ont le droit, selon la règle 200, de modifier leur déclaration.

[20]            L'une des difficultés que pose la déclaration nouvellement modifiée est qu'il ne s'agit pas d'une narration conférant à l'action une portée bien définie. Elle ne semble pas non plus avancer vers une conclusion distincte et définie. En définitive, et en partie à cause de l'insertion d'éléments de preuve, ce qui rompt le flux narratif de la déclaration nouvellement modifiée, celle-ci ne contribue pas à définir le champ de l'action ni à mener vers une conclusion définie et un résultat pratique.


[21]            Les paragraphes 2 à 6 de la déclaration initiale, qui n'étaient pas explicites et manquaient de particularisation, ont été radiés par l'ordonnance du 23 janvier 2002, avec autorisation de modification. Ces paragraphes sont maintenant reproduits en partie dans les paragraphes 3, 4 et 5 de la déclaration nouvellement modifiée. Tels qu'ils sont reformulés, ils décrivent les circonstances dans lesquelles les demandeurs ont obtenu leur admission au Canada et dans lesquelles le Haut Commissariat du Canada, Grosvenor Street, Londres, Angleterre, les a trompés sciemment en les amenant à croire certaines choses. Il y a peut-être surabondance dans les paragraphes 3, 4 et 5, mais rien qui soit répréhensible ou qui soit susceptible de générer un embrouillement pouvant entraver la réponse : les trois paragraphes donnent d'ailleurs un avis global équitable de la cause d'action en expliquant la position des demandeurs et en affirmant qu'on les a sciemment induits en erreur.

[22]            Le paragraphe 6 parle d'une campagne de publicité d'après laquelle le Canada était en quête d'immigrants professionnels qualifiés. L'endroit exact où est apparue la publicité relève des précisions que la défenderesse pourrait par ailleurs obtenir au moyen d'une ordonnance de production de détails afin de répondre à la prétendue fausse déclaration dont parle le paragraphe 5. Le paragraphe 6 peut subsister.

[23]            Le paragraphe 7 commence par établir que les demandeurs, se fiant à l'annonce publicitaire, se sont présentés au Haut Commissariat du Canada à Londres. Puis, au lieu de dire simplement que les demandeurs ont été induits en erreur, le paragraphe reproduit mot pour mot les déclarations inexactes faites aux demandeurs par le Haut Commissariat du Canada. Ces deux exemples pourraient être soit des détails, soit des éléments de preuve :

[Traduction]

Si le Canada a besoin de vous, votre présente description d'emploi figurera sur la liste des professions.

Si votre présente description d'emploi correspond à notre liste des professions, alors le Canada a besoin de votre spécialité.


Ces deux passages tendent à établir ou à effectuer le travail de surface afin de montrer comment sera prouvée l'accusation de tromperie, mais ils constituent aussi des détails en ce sens qu'un défendeur voudrait probablement obtenir des précisions à leur sujet en produisant une requête pour détails. De plus, puisque les demandeurs allèguent plus loin une fraude, ce paragraphe s'accorde avec la nécessité d'une particularisation complète lorsqu'une fraude est alléguée. Le paragraphe 7 peut donc être maintenu.

[24]            Les paragraphes 8 à 14 de la déclaration nouvellement modifiée renferment d'autres affirmations particulières dont les demandeurs disent qu'elles sont déclarations inexactes, c'est-à-dire fausses ou trompeuses. Les demandeurs ont déjà fait valoir que le Haut Commissariat du Canada à Londres les a sciemment induits en erreur. Cette cause d'action qui prend la forme d'une déclaration inexacte faite par négligence est assez large pour englober des causes d'action qui pourraient être exposées comme preuve aux paragraphes 8 à 14. Il vaut mieux laisser cette preuve à l'interrogatoire préalable, durant lequel elle pourra être explorée comme il convient, car elle va au-delà des détails. Les paragraphes 8 à 14 sont radiés.

[25]            Le paragraphe 15 dit que les demandeurs ont découvert qu'une affirmation sur les droits de traitement des dossiers d'immigration, affirmation figurant dans un guide d'autoévaluation, est fausse et trompeuse. Il contient ensuite une citation, qui manifestement participe d'une preuve. Il renferme l'affirmation selon laquelle les demandeurs n'avaient reçu aucun des avantages mentionnés. La citation du paragraphe 15 est radiée. Le reste peut subsister.


[26]            Les paragraphes 16 et 17 sont purement des éléments de preuve qui pourraient, au mieux, servir à étayer un argument antérieur de déclarations inexactes faites par négligence, mais qui contient aussi des allégations hors de propos, relatives à la visite de centres d'emploi en Alberta et en Ontario et au chiffre de 3 482 demandes d'emploi. Ces paragraphes sont radiés.

[27]            Le paragraphe 18 fait état des espoirs que les demandeurs avaient caressés après avoir entendu ce que le Haut Commissariat du Canada à Londres avait à leur dire. Les espoirs et les impressions que les demandeurs ont pu avoir après avoir parlé avec le Haut Commissariat du Canada à Londres sont purement des éléments de preuve. Le paragraphe 18 est radié.

[28]            Le paragraphe 19 fait état de la discrimination que les demandeurs ont connu au Canada, contrairement à la situation qu'ils croyaient y trouver. Dans la mesure où les incidents décrits au paragraphe 19 sont pertinents, il s'agit là encore de purs éléments de preuve. Le paragraphe 19 est radié.


[29]            Le paragraphe 20 dit que les demandeurs croient que le ministère de l'Immigration avait intentionnellement et sciemment induit en erreur les travailleurs professionnels qualifiés. Puis il expose les points faibles du Haut Commissariat du Canada à Londres, qui, selon les demandeurs, n'a aucune idée de la situation que trouvent les immigrants qui arrivent au Canada. Les demandeurs croient qu'ils auraient dû être avertis. Toutefois, aucune obligation de la part de la Couronne n'est alléguée. Cet aspect est quelque chose qui pourrait être explorée par la Couronne à la faveur d'interrogatoires préalables, et il constitue des éléments de preuve que les demandeurs seraient sans doute en mesure d'utiliser au procès. Toutefois, le contenu du paragraphe 20 ne participe ni de faits substantiels ni de détails. Le paragraphe 20 est radié.


[30]            Le paragraphe 21 commence par ce qui est probablement un fait substantiel, le fait que le système canadien d'immigration utilise frauduleusement et négligemment un système de points qui est trompeur, dans le dessein de frauder. Le paragraphe passe ensuite à la preuve documentaire, à l'expérience des demandeurs au Canada, à l'effet général d'un système de points d'immigration qui est trompeur à l'égard des immigrants professionnellement qualifiés et à une allégation non précisée selon laquelle la défenderesse a contrevenu à la Charte canadienne des droits et libertés, et il conclut que le ministère de l'Immigration se sert des immigrants professionnellement qualifiés comme de « vaches à lait » . Le paragraphe 21 revient ensuite sur les difficultés qu'ont connues les demandeurs, notamment l'absence d'emploi dans leurs domaines, et il conclut que, tandis que la Couronne a tiré un avantage financier dans le traitement du dossier d'immigration des demandeurs, les demandeurs ont quant à eux subi préjudice financier, tension nerveuse et ennuis de santé. La quasi-totalité du paragraphe pourrait à première vue participer d'éléments de preuve, mais il renferme des accusations de fraude et de négligence par l'utilisation d'un système de points trompeur, avec intention de frauder, et il conclut par un moyen fondé sur le préjudice financier, la tension nerveuse et les ennuis de santé. La seconde vue est que ce qui est exposé ne participe pas d'éléments de preuve, mais constitue soit des détails d'une fraude, car les accusations de fraude doivent être expressément plaidées, soit des faits, des matières et des circonstances sur lesquelles s'appuient les demandeurs au soutien de l'allégation. La pratique normale est que l'on devrait d'abord expliquer les actes prétendument frauduleux, pour ensuite affirmer que ces actes ont été commis frauduleusement : voir par exemple R. Rica Gold Washing Co. (1879) 11 Ch. D. 36, à la page 33 (F.A.), ainsi que l'indique Odgers on High Court Pleading and Practice, Sweet & Maxwell, 22e édition, 1991, à la page 138 :

[Traduction] Chacune des parties doit exposer l'intégralité de ses arguments. Elle doit plaider tous les faits sur lesquels elle entend se fonder, sans quoi elle ne pourra pas strictement témoigner au procès.

Odgers évoque ensuite l'affaire Wrights c. Cooke [1908] 1 Ch. D. 789, à la page 799, pour affirmer que [traduction] « ... les demandeurs ne sont pas fondés à un redressement au procès, sauf à l'égard de ce qui est allégué dans les actes de procédure, et prouvé au procès » . J'ai des doutes sur la manière dont la fraude est exposée et plaidée au paragraphe 21, mais, tout bien considéré, ce paragraphe devrait subsister parce qu'il énonce des détails que les demandeurs tenteront de prouver au procès lorsqu'ils arriveront à ce qu'ils croient pouvoir qualifier de fraude intentionnelle. Le paragraphe 21 devrait subsister. Cependant, les demandeurs doivent garder à l'esprit que plaider la fraude présente des risques, car les dépens adjugés contre qui plaide la fraude et n'obtient pas gain de cause sont souvent majorés en conséquence.


[31]            Dans l'examen du paragraphe 22, j'ai gardé à l'esprit que la déclaration nouvellement modifiée a été rédigée par des plaideurs profanes et que je devrais vérifier si elle renferme les conditions minimales d'une réclamation susceptible d'action en justice. Au paragraphe 22, les demandeurs disent que, en conséquence des déclarations inexactes et de la fausse publicité de la Couronne, ainsi qu'en raison du manque de prudence de la Couronne (je donne ici à ces mots une interprétation aussi large que possible), les demandeurs, qui sont des professionnels qualifiés, sont aujourd'hui en fait des préposés au nettoyage et des gardiens d'immeubles. Puis le paragraphe 22 fait état du niveau d'études des demandeurs, de leur emploi antérieur, de leur emploi actuel et de leur situation après leur arrivée au Canada. Tous ces éléments, dans la mesure où il s'agit de faits substantiels, ont été plaidés auparavant dans la déclaration nouvellement modifiée. Le paragraphe 22 n'ajoute rien en dehors de la preuve. Il est lui aussi radié.

[32]            Le paragraphe 23 (je paraphrase ici ce paragraphe) indique que les demandeurs sont arrivés au Canada avec des sommes à investir, mais qu'ils doivent aujourd'hui utiliser ces sommes pour survivre. Il s'agit là sans doute d'éléments de preuve. Ce n'est pas une cause d'action qui a une quelconque chance de réussir. Le paragraphe est radié en tant qu'argument futile.

[33]            Aux paragraphes 1 et 2 de la déclaration nouvellement modifiée, les demandeurs veulent obtenir réparation, entre autres choses, pour souffrances morales et tensions inutiles. Les souffrances morales et les tensions inutiles ne sont pas en elles-mêmes des causes d'action, mais elles participent d'une forme de préjudice psychologique. Pour qu'un demandeur réussisse dans ce genre d'argument, les tribunaux insistent sur la preuve de symptômes physiques ou d'une forme quelconque de problèmes psychiatriques reconnaissables, tels que la dépression morbide : voir par exemple Linden on Canadian Tort Law, édition 1993, Butterworths, à la page 367. Nous en arrivons au paragraphe 24 de la déclaration nouvellement modifiée.

[34]            Le paragraphe 24 mentionne que les demandeurs sont arrivés au Canada en bonne santé, mais qu'aujourd'hui ils ont une santé chancelante, et le paragraphe donne ensuite des détails. Il en ressort que ce que les demandeurs allèguent sans doute, c'est le délit d'infliction d'un choc nerveux, une cause d'action examinée par le juge Noël (sa fonction à l'époque) dans l'affaire Boothman c. Canada, (1993) 63 F.T.R. 48 (C.F. 1re inst.). À la page 68, il expose les conditions de ce quasi-délit, en faisant siennes les conditions exposées dans l'affaire Timmermans c. Buelow (1984), 38 C.C.L.T. 136 (H.C. Ont.), à la page 140. Il s'agit des conditions suivantes : d'abord, un acte manifeste du défendeur; deuxièmement, une intention du défendeur; troisièmement, des circonstances qui conduiraient une personne raisonnable dans la position du défendeur à prévoir, comme probabilité raisonnable, l'effet de l'acte sur les demandeurs; et quatrièmement, un préjudice réel allant au-delà de la perturbation affective. Le paragraphe 24 est un cas limite. On pourrait dire qu'il participe de la preuve. Je crois qu'en réalité, il expose des détails qui, considérés en même temps que d'autres parties conservées de la déclaration nouvellement modifiée, pourraient contribuer à établir la responsabilité quasi délictuelle de la Couronne et, dans une certaine mesure, les dommages-intérêts spéciaux que les demandeurs recherchent au paragraphe 1. Le paragraphe 24 devrait être maintenu.


[35]            Les conséquences juridiques découlant de faits peuvent être présentées dans l'argumentation. Cependant, rien n'empêche que de telles conclusions soient exposées dans l'acte de procédure lui-même, mais, dans le même ordre d'idées, donner le résultat en l'exposant dans un acte de procédure relève davantage d'une commodité, car la partie n'est pas liée ni restreinte par ce qui a été énoncé : voir l'arrêt Maple Leaf Lumber Co. c. Canada, (1983) 52 N.R. 206, aux pages 216 et 217 (C.A.F.), autorisation de pourvoi refusée (1984) 8 D.L.R. (4th) 676n.

[36]            Au paragraphe 25, les demandeurs exposent les résultats juridiques censés découler « des faits substantiels » exposés dans la déclaration nouvellement modifiée. La règle générale est assurément que l'on doit plaider les faits substantiels sur lesquels reposent les conclusions de droit, encore qu'il ne soit pas nécessaire que le résultat soit indiqué. Les trois premières sections du paragraphe 25 entrent peut-être dans la catégorie des résultats qui découlent de ce qui est énoncé dans la déclaration nouvellement modifiée, mais ce n'est pas le cas des sections restantes. Les trois premières sections du paragraphe 25, appelées xii, xiii et xiv, peuvent subsister. Le reste du paragraphe 25 est radié car il n'attribue rien à une cause d'action raisonnable qui ait une quelconque chance de succès.

[37]            Le paragraphe 26 énonce encore une fois le résultat des faits substantiels que les demandeurs ont plaidés. Le paragraphe 26 peut subsister.

Redressement additionnel recherché par les demandeurs


[38]            Les demandeurs voudraient des directives, mais ne précisent pas la nature de ces directives. C'est une requête trop vague pour qu'on lui donne suite. Cependant, le refus actuel n'empêche pas les demandeurs de solliciter des directives spécifiques ultérieurement, étant entendu qu'il appartient à la Cour d'aider les plaideurs à résoudre ensemble leur litige, mais non pas de conduire un plaideur par-delà les étapes fondamentales du procès.

[39]            S'agissant d'un jugement par défaut accordant pour dommages-intérêts, les demandeurs ne disposent pas d'arguments aussi sérieux qu'ils aimeraient le croire. De fait, ils ont peut-être manqué de peu de voir leur action radiée, car la déclaration nouvellement modifiée, même dans sa forme actuelle, et bien qu'elle ne constitue pas un abus, constituera pour la Couronne une difficulté à surmonter lorsqu'il s'agira pour elle de la comprendre clairement et d'y répondre intelligemment.

[40]            Les prorogations de délai sont accordés telles qu'elles sont demandées. Les délais fixés dans les règles doivent être pris au sérieux et il convient de ne pas abuser de la liberté d'en demander la prorogation, mais rien n'indique que la Couronne doit être censurée dans la présente instance. Aucune ordonnance générale ne sera rendue refusant à la Couronne des prorogations de délai pour l'avenir.

CONCLUSION

[41]            Les demandeurs auront 21 jours pour produire et signifier une troisième déclaration modifiée, qui devra être conforme en tous points aux présents motifs. Le délai habituel de production d'une défense commencera à courir contre la défenderesse à la date de sa signification.

[42]            Le succès étant partagé, les dépens suivront l'issue de la cause.

          « John A. Hargrave »          

                   Protonotaire

Vancouver (Colombie-Britannique)

le 20 mai 2003

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                    COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

REQUÊTE JUGÉE SUR PIÈCES, SANS LA COMPARUTION DES PARTIES

DOSSIER :                                                  T-2048-01

INTITULÉ :                                                 Selladurai Premakumaran et Nesamalar Premakumaran c. Sa Majesté la Reine

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :         le protonotaire Hargrave

DATE DES MOTIFS :                               le 20 mai 2003

OBSERVATIONS ÉCRITES :                

Selladurai et Nesamalar Premakumaran                                           DEMANDEURS

Kerry A Franklin                                                                               POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Selladurai et Nesamalar Premakumaran                                           DEMANDEURS, en leur

Edmonton (Alberta)                                                                           propre nom

Morris A Rosenberg                                                                          POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

Ministère de la Justice

Edmonton (Alberta)


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.