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     Date: 19980323

     Dossier: T-10-98

Entre :

     M. PIERRE JOLI-COEUR, RETRAITÉ

     2025, rue Brûlant

     Sillery (Québec)

     G1T 1G1

     Partie demanderesse

     - et -

     SA MAJESTÉ LA REINE

     Partie défenderesse

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD :

[1]      La requête de la défenderesse, basée sur la Règle 419(1)a) des Règles de la Cour fédérale, vise à faire radier la déclaration du demandeur, au motif qu'elle ne révèle aucune cause raisonnable d'action.

[2]      Il appert que l'action du demandeur résulte fondamentalement d'une décision administrative du ministre du Revenu national prise en vertu de l'article 224.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e supplément), c. 1, telle que modifiée. Cette disposition se lit comme suit:

         ARTICLE 224.1:      Recouvrement par voie de déduction ou de compensation.                 
             Lorsqu'une personne est endettée envers Sa Majesté, en vertu de la présente loi ou en vertu d'une loi d'une province avec laquelle le ministre des Finances a conclu un accord en vue de recouvrer les impôts payables à la province en vertu de cette loi, le ministre peut exiger la retenue par voie de déduction ou de compensation d'un tel montant qu'il peut spécifier sur tout montant qui peut être ou qui peut devenir payable à cette personne par Sa Majesté du chef du Canada.                 

[3]      En effet, après avoir indiqué aux paragraphes 1 et 2 de la déclaration qu'il reçoit mensuellement, du ministère de la Sécurité du revenu, au titre d'allocation au conjoint, la somme de 515,32 $, le demandeur allègue, au paragraphe 3, la décision du ministre du Revenu national prise en vertu de l'article 224.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Ce paragraphe 3 précise que le ou vers le 31 octobre 1997, le ministre du Revenu national a exigé la retenue de cette allocation mensuelle au conjoint jusqu'à concurrence de 50 718,30 $, par voie de compensation d'une dette fiscale du demandeur. Les seuls autres paragraphes de la déclaration, soient les paragraphes 4, 5, 6 et 7, sont essentiellement liés à cette décision du ministre du Revenu national que constitue sa demande péremptoire faite en vertu de l'article 224.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu. En effet, le paragraphe 4 indique qu'effectivement le ministre de la Sécurité du revenu a, depuis, retenu les sommes par ailleurs dues au demandeur; le paragraphe 5 comporte la simple allégation que les sommes visées par la demande péremptoire ne peuvent, de par leur nature, faire l'objet de compensation; le paragraphe 6 ajoute que la dette fiscale alléguée dans la demande péremptoire est inexistante, parce que prescrite; et enfin, le paragraphe 7 précise que "cette situation" cause un préjudice au demandeur.

[4]      Les remèdes par la suite demandés dans les conclusions de la déclaration doivent donc nécessairement être reliés à la décision ou la demande péremptoire du ministre du Revenu national. La première de ces conclusions est de l'essence d'un mandamus et, de l'aveu même du procureur du demandeur, constitue le simple résultat de l'obtention des jugements déclaratoires requis dans les deux conclusions suivantes. Ces jugements déclaratoires visent manifestement à faire annuler la décision ou la demande péremptoire en raison de l'illégalité de la compensation statutaire effectuée et de la prescription des dettes fiscales visées par celle-ci. Enfin, avant de requérir les dépens, le demandeur demande des dommages et intérêts, demande qu'aucun allégué de la déclaration ne permet de relier à autre chose qu'à la décision ou demande péremptoire concernée.

[5]      Or, à l'exception des dommages et intérêts et des dépens, les remèdes demandés dans l'action sont tous des remèdes prévus à l'alinéa 18(1)a) de la Loi sur la Cour fédérale, remèdes qui ne peuvent être obtenus, comme le prescrit le paragraphe 18(3), que par présentation d'une demande de contrôle judiciaire. Par ailleurs, aucune faute pouvant donner ouverture aux dommages et intérêts réclamés n'est alléguée par le demandeur1 et la conclusion quant aux dépens est purement accessoire.

[6]      En conséquence, je dois conclure que la déclaration du demandeur ne révèle aucune cause raisonnable d'action et elle doit donc être radiée avec dépens.

                            

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 23 mars 1998


__________________

1      Voir les affaires Sultan Allibhai c. Sa Majesté la Reine (8 novembre 1996), T-354-96 (C.F., 1re instance); Piché c. Canada (25 janvier 1996), T-1672-95 (C.F., 1re instance); Kibale c. Canada (8 février 1994), A-1486-92 (C.A.F.) et Canada c. Saskatchewan Wheat Pool, [1983] 1 R.C.S. 205.

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