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Date : 20060621

  Dossier : T-560-05

Référence : 2006 CF 789

Ottawa (Ontario), le 21 juin 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MOSLEY

 

ENTRE :

PFIZER CANADA INC. et

WARNER-LAMBERT COMPANY, LLC

 

  demanderesses

et

 

 

LE MINISTRE DE LA SANTÉ et NOVOPHARM LIMITED

 

  défendeurs

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

  • [1] Novopharm Limited a présenté deux requêtes connexes découlant d’une procédure prise en application du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité). Les requêtes ont été entendues conjointement à Toronto, le 12 juin 2006. Dans la première, présentée en vertu de l’article 51 des Règles des Cours fédérales (les Règles), Novopharm porte en appel la décision de la protonotaire ordonnant la radiation d’un affidavit du dossier et, dans la deuxième, elle demande, en vertu de l’article 312 des Règles, l’autorisation de déposer et de signifier ce même affidavit.

 

  • [2] Dans les procédures sous-jacentes, les demanderesses, ci-après Pfizer, sollicitent une ordonnance interdisant au ministre de délivrer un avis de conformité (AC) à Novopharm pour ses comprimés de 10, 20, 40 et 80 mg d’atorvastatine calcique, que Pfizer compare à ses comprimés d’atorvastatine calcique commercialisés sous le nom de Lipitor. Pfizer a inscrit le brevet canadien no 2,021,546 (le brevet 546) concernant le Lipitor au registre des brevets. L’avis d’allégation et l’énoncé détaillé de Novopharm indiquent notamment que les revendications pertinentes du brevet 546 sont invalides.

 

  • [3] Le 19 août 2005, Pfizer a signifié ses affidavits conformément à l’article 306 des Règles. Le 15 décembre 2005, Novopharm a répondu en signifiant ses affidavits en vertu de l’article 307 des Règles. Pfizer a demandé, dans une requête présentée le 1er février 2006, l’autorisation de déposer et de signifier des affidavits de réplique en application de l’article 312 des Règles. L’autorisation a été accordée par la protonotaire Milczynski dans son ordonnance en date du 3 mars 2006. Il y était indiqué que Novopharm pouvait déposer et signifier une contre-preuve en réponse aux affidavits de réplique de Pfizer, qui ont été déposés et signifiés le 7 mars 2006.

 

  • [4] Le 17 mars 2006, Novopharm a déposé et signifié des affidavits de contre-preuve, notamment l’affidavit du Dr James M. Brophy, souscrit le 10 mars 2006. L’affidavit de ce dernier porte sur l’objet d’un article dont il est co-auteur et qui a été publié dans le numéro de janvier 2006 du Journal canadien de cardiologie. L’article est joint à l’affidavit à titre d’annexe. Deux autres affidavits soumis par Novopharm en contre-preuve renvoient également à l’article du Dr Brophy et le renferment en annexe.

 

  • [5] Le 30 mars 2006, Pfizer a présenté une requête visant à obtenir une ordonnance de radiation de l’affidavit du DBrophy. Par ordonnance en date du 24 avril 2006, le protonotaire Lafrenière a accueilli la requête de Pfizer, concluant que l’affidavit ne constituait pas une contre-preuve admissible et qu’il n’était pas visé par l’ordonnance rendue le 3 mars 2006 par la protonotaire Milczynski. C’est cette décision qui fait l’objet de l’appel de Novopharm fondé sur l’article 51 des Règles. Si cet appel était rejeté, Novopharm sollicite, en vertu de l’article 312 des Règles, l’autorisation de déposer et de signifier l’affidavit du Dr Brophy comme preuve complémentaire.

 

  • [6] Les contre-interrogatoires sur les affidavits soumis par les deux parties sont en grande partie terminés. Le contre-interrogatoire du Dr Brophy est prévu pour le 5 juillet 2006, sous réserve de l’issue de la présente procédure. L’audition de la demande relative à l’AC est prévue pour novembre 2006.

 

QUESTIONS EN LITIGE

 

  • [7] Novopharm a soulevé plusieurs questions en ce qui concerne la décision du protonotaire Lafrenière sur l’appel fondé sur l’article 51. Ces questions se résument à la question de savoir si le protonotaire a commis une erreur en tranchant la requête plutôt qu’en laissant au juge qui entend la demande le soin de se prononcer et si, en rendant sa décision, il a commis une erreur en concluant que l’affidavit du Dr Brophy était une contre-preuve inadmissible et n’était pas visé par l’ordonnance de la protonotaire Milczynski en date du 3 mars.

 

  • [8] La norme de contrôle applicable pour réviser la décision d’un protonotaire est énoncée dans Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425, 149 N.R. 273 (C.A.F.), et clarifiée dans Merck & Co. c. Apotex Inc., [2004] 2 C.F. 459, 200 3 CAF 488. Novopharm concède que sa requête ne soulève pas une question ayant une influence déterminante sur l’issue du principal. En conséquence, la décision discrétionnaire du protonotaire Lafrenière ne peut être révisée de nouveau que s’il y a eu erreur flagrante, en ce sens que sa décision est fondée sur de mauvais principes ou une mauvaise appréciation des faits : Z.I. Pompey Industrie c. ECU-Line N.V. [2003] 1 R.C.S. 450, à la page 461, 2003 CSC 27.

 

  • [9] En ce qui concerne la requête présentée en application de l’article 312 des Règles, il convient de déterminer si la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire en autorisant Novopharm à déposer l’affidavit du Dr Brophy. À cet égard, il faut également déterminer si Novopharm aurait dû demander l’autorisation prévue au paragraphe 84(2), puisque neuf des dix déposants ont déjà été contre-interrogés.

 

ANALYSE

 

  Le protonotaire a-t-il commis une erreur en rendant une décision interlocutoire sur l’admissibilité de l’affidavit?

 

  • [10] Novopharm fait valoir que le protonotaire Lafrenière aurait dû laisser au juge qui entend la demande le soin de trancher la question relative à la radiation de l’affidavit du Dr Brophy parce qu’aucune circonstance particulière, telle que la preuve manifeste d’un préjudice pour Pfizer, ne justifiait la radiation d’un affidavit par suite d’une requête interlocutoire dans le cadre d’un contrôle judiciaire : Bande de Sawridge c. Canada, [2000] A.C.F. no 192 (C.F.) (QL).

 

  • [11] Pfizer reconnaît que, selon la règle générale, c’est le juge qui entend la demande qui apprécie l’admissibilité d’un affidavit. Toutefois, cette règle comporte des exceptions bien établies comme dans le cas où une partie doit obtenir une autorisation pour faire admettre des éléments de preuve et où la Cour estime qu’il est manifeste que ceux-ci sont inadmissibles : Ginter c. Canada (Procureur général) (1999), 178 F.T.R. 156, à la page 158 (C.F.1re  inst.). Pfizer affirme en outre que la réticence de la Cour à déclarer certains éléments de preuve inadmissibles lors d’une audience où aucune requête interlocutoire n’a été présentée fait ressortir la nécessité de demander la radiation d’éléments de preuve à l’étape préliminaire : Novartis A.G. c. Apotex Inc. (2001), 212 F.T.R. 161, 2001 C.F.P.I. 1129 (C.F.1re inst.) [Novartis].

 

  • [12] Selon l’argument de Pfizer, Novopharm devait demander en l’espèce l’autorisation de la Cour pour produire des éléments de preuve complémentaires. À ces fins, elle aurait pu présenter une requête suivant l’article 312 des Règles, mais elle ne l’a pas encore fait. Dans son ordonnance du 3 mars, la protonotaire Milczynski a autorisé Novopharm à déposer une contre-preuve en réponse aux affidavits présentés par Pfizer suivant l’article 312 des Règles. L’affidavit du Dr Brophy ne constituait pas une contre-preuve admissible, mais un élément de preuve nouveau qui n’était pas visé par l’ordonnance du 3 mars et il avait donc, à juste titre, fait l’objet d’une requête interlocutoire en radiation : AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (2000), 190 F.T.R. 264, au paragraphe 15 (C.F.1re inst.) [AB Hassle].

 

  • [13] Je ne crois pas que Novartis énonce le principe pour lequel Pfizer l’a citée. Dans cette affaire, le juge Blais a conclu, dans le cadre d’une audience concernant un AC, que l’objection à la présentation d’une nouvelle antériorité dans l’un des affidavits de la défenderesse aurait due être soulevée par voie de requête interlocutoire. Toutefois, cette décision a été rendue dans le contexte de l’historique procédural particulier de cette affaire. Deux ans plus tôt, la Cour avait accordé aux demanderesses l’autorisation de répondre à la nouvelle antériorité introduite par Apotex en déposant des affidavits. Lors de l’audience, les demanderesses avaient tenté de tirer parti d’une décision rendue entre-temps par la Cour d’appel selon laquelle un avis d'allégation suffisant devait contenir une liste complète des antériorités que la seconde personne entend invoquer. C’est dans ce contexte que le juge Blais a conclu que le fait de soulever l’objection lors de l’audience était inéquitable pour la défenderesse puisqu’elle a été menée à croire que sa preuve ne serait pas remise en cause.

 

  • [14] L’affaire AB Hassle est plus pertinente. Le juge MacKay y a confirmé la décision du protonotaire de radier un affidavit non conforme à l’ordonnance de la Cour. La défenderesse avait obtenu, sur consentement, l’autorisation de déposer une contre-preuve relative à la question de l’absence de contrefaçon seulement. Selon la preuve dont disposait le protonotaire, l’affidavit contesté concernait la validité et non l’absence de contrefaçon. Au paragraphe 15, le juge MacKay a indiqué que, en l’absence de circonstances exceptionnelles autorisant une dérogation aux dispositions de l’ordonnance de la Cour, il faut respecter les conditions de cette ordonnance.

 

  • [15] Adoptant l’approche du juge MacKay, je conclus que, si l’affidavit du Dr Brophy n’était donc pas visé par l’autorisation accordée par la protonotaire Milczynski dans son ordonnance du 3 mars, le protonotaire Lafrenière n’a pas commis d’erreur de principe en traitant de la question de l’admissibilité par voie d’ordonnance interlocutoire, plutôt qu’en laissant au juge qui entend la demande le soin d’examiner la question lors de l’audience. Il reste à déterminer si, en concluant que l’affidavit ne constituait pas une contre-preuve admissible, le protonotaire Lafrenière a commis une erreur flagrante en interprétant mal les faits ou en appliquant les mauvais principes.

 

L’affidavit du Dr Brophy constituait-il une contre-preuve inadmissible?

 

  • [16] De nombreux éléments de preuve ont été déposés en l’espèce avant que la protonotaire Milczynski ne soit saisie de l’affaire. Pfizer a déposé 11 affidavits conformément à l’article 306 des Règles. Le 15 décembre 2006, Novopharm a déposé, à titre de réponse, 10 affidavits. Le 1er février 2006, Pfizer a présenté une requête sollicitant l’autorisation de déposer et de signifier six affidavits de réplique, reconnaissant que, si sa requête était accueillie, Novopharm devrait également obtenir le droit de déposer et de signifier une contre-preuve.

 

  • [17] Dans sa décision, la protonotaire Milczynski a conclu qu’il n’était pas nécessaire d’analyser les parties des affidavits que Novopharm avait ou n’avait pas contesté. Elle ne s’est donc pas penchée sur les objections de Novopharm à certains des éléments de preuve produits en réplique par Pfizer. Adoptant une approche large et structurée, elle a conclu que l’ensemble de la preuve répondait aux critères dont la Cour doit tenir compte pour déterminer si elle peut exercer son pouvoir discrétionnaire prévu à l’article 312 des Règles, à savoir que la preuve complémentaire ira dans le sens des intérêts de la justice, qu’elle aidera la Cour à rendre sa décision finale et qu’elle ne causera pas de préjudice grave à la partie adverse : Abbott Laboratories c. Canada (Ministre de la Santé) (2003), 29 C.P.R. (4th) 450, 2003 CF 1512.

 

  • [18] La protonotaire Milczynski a souligné que le juge qui entend la demande ne préside habituellement pas la présentation des éléments de preuve et que la Cour estimerait utile d’avoir, dans le dossier, toute la preuve pertinente à un moment donné avant le début de l’audition de la demande. En outre, aucun élément de preuve n’avait été soumis concernant un préjudice pour Novopharm. Dans la mesure où l’ordonnance sollicitée autoriserait également Novopharm à déposer une contre-preuve en réponse, la protonotaire a conclu que [traduction] « Novopharm aura le dernier mot. »

 

  • [19] Novopharm fait valoir qu’elle n’aurait pas eu le dernier mot si sa contre-preuve produite en réponse avait été examinée selon les mêmes normes que la réponse de Pfizer. Voici les motifs rendus par le protonotaire Lafrenière dans sa décision sur l’inadmissibilité de la contre-preuve constituée par l’affidavit du Dr Brophy :

[traduction] L’affidavit du Dr Brophy ne constitue manifestement pas une contre-preuve à la réplique des demanderesses, ni en sa forme ni en son fond. Le Dr Brophy ne fait que réaffirmer certaines conclusions d’un article, paru en janvier 2006 et dont il est l’auteur, et passe en revue ses habitudes d’ordonnance dans sa pratique clinique, sans se reporter à la réplique des demanderesses. En l’espèce, l’affidavit du DBrophy n’est conforme ni à la lettre ni à l’esprit de l’ordonnance de la protonotaire Milczynski en date du 3 mars 2006. De plus, le fait que les demanderesses n’ont pas demandé la radiation des affidavits de deux autres déposants soumis par Novopharm, qui y avaient joint l’article du Dr Brophy, n’a pas pour effet de les empêcher de s’opposer à la preuve directe de celui-ci. Comme je suis d’accord pour l’essentiel avec les arguments présentés par les demanderesses aux paragraphes 16 à 22 de leurs observations écrites, je suis convaincu que la Cour doit intervenir à ce stade pour empêcher la présentation d’éléments de preuve manifestement inadmissibles.

 

 

  • [20] Le renvoi par le protonotaire Lafrenière aux paragraphes 16 à 22 des observations écrites de Pfizer n’ajoute rien à ses motifs. Pfizer avait fait valoir pour l’essentiel que l’affidavit du Dr Brophy ne constitue pas une réponse, ni de prime abord ni en son fond, aux affidavits de réponse de Pfizer et n’est donc pas visé par l’ordonnance de la protonotaire Milczynski. Pfizer n’a présenté aucun élément de preuve ni aucune observation écrite visant à démontrer qu’elle subirait un préjudice grave du fait de la réception de l’affidavit.

 

  • [21] Pfizer n’a pas contesté deux autres affidavits de contre-preuve déposés par Novopharm qui renvoient à l’article du Dr Brophy et le renferment en annexe. Novopharm allègue qu’il aurait fallu empêcher Pfizer de contester l’affidavit du Dr Brophy pour ce seul motif. Le protonotaire Lafrenière a rejeté, à bon droit, cet argument au motif que le défaut de s’opposer aux autres affidavits n’avait pas pour effet d’empêcher Pfizer de s’opposer à la preuve directe du Dr Brophy.

 

  • [22] Novopharm soutient que, si la décision du protonotaire était interprétée comme signifiant que les affidavits de contre-preuve doivent expressément indiquer que le déposant a passé en revue la preuve déposée en réplique et qu’il y répond par les observations de son affidavit, cela équivaudrait au triomphe de la forme sur le fond. Bien que cette façon de rédiger constitue une pratique habituelle et utile pour la préparation de tels affidavits, aucune règle de droit n’énonce qu’un affidavit, de prime abord, doit renvoyer à la preuve précédente et identifier précisément les aspects contestés pour constituer une réplique ou une contre-preuve admissible. De tels vices de forme, si c’est ce qu’ils sont, ne devraient pas rendre inadmissible un affidavit qui constitue par ailleurs, selon une juste interprétation, une réponse à la preuve déposée par la partie adverse.

 

  • [23] Exception faite des vices de forme contestés, il ressort des motifs du protonotaire Lafrenière qu’il a également conclu que l’affidavit du Dr Brophy ne répondait pas, sur le fond, à la réplique déposée par Pfizer. J’estime que, ce faisant, le protonotaire s’est fondé sur une appréciation erronée des faits et a commis une erreur flagrante. À mon avis, l’affidavit constitue une réponse à la réplique de Pfizer en ce qui a trait à l’une des questions soulevées dans la procédure relative à l’AC et n’aurait pas dû être radié du dossier.

 

  • [24] Les éléments de preuve complémentaires que Pfizer a été autorisée à déposer et à signifier par ordonnance rendue le 3 mars concernait une vaste gamme de questions, y compris l’allégation de Novopharm portant que le brevet contesté était invalide pour cause d’évidence. Dans sa réplique à cette allégation, Pfizer voulait invoquer notamment le succès commercial de son produit à titre de deuxième signe indicateur d’innovation. Dans plusieurs des affidavits de réplique présentés par Pfizer, les déposants allèguent que le succès du Lipitor, si l’on en juge par la pratique des médecins prescripteurs qui le choisissent comme statine de premier recours, était dû à son innocuité et à son efficacité supérieures démontrées.

 

  • [25] Pour l’essentiel, l’affidavit du Dr Brophy indique que des facteurs autres que la preuve scientifique peuvent expliquer le plus grand nombre de prescriptions de Lipitor. En fait, le Dr Brophy laisse entendre que c’est le marketing et non la science qui a été le principal facteur de succès du Lipitor puisque les essais cliniques aléatoires établissant son innocuité et son efficacité n’avaient pas été effectués à l’époque où le médicament s’est imposé de plus en plus sur le marché. À mon avis, il s’agit d’une preuve factuelle qui répond manifestement à la preuve présentée en réplique par Pfizer sur cette question et qui serait utile à la Cour pour apprécier la valeur de la preuve relative au succès commercial.

 

  • [26] Pfizer soutient que l’exclusion de l’affidavit du Dr Brophy ne causera pas de tort à Novopharm parce que les deux autres affidavits que cette dernière a déposés en contre-preuve y renvoient et le renferment en annexe et que Pfizer ne s’y est pas opposée. Toutefois, j’estime, à la lecture de l’affidavit, que ce dernier constitue davantage qu’une simple reformulation des conclusions de l’étude du Dr Brophy approuvée par des collègues. Il s’agit en fait d’une explication claire des raisons pour lesquelles l’étude a été effectuée et de sa signification. Cette explication serait utile au juge qui entend la demande.

 

  • [27] Je suis d’accord pour affirmer que, lorsqu’une preuve par affidavit n’est manifestement pas visée par l’ordonnance de la Cour en vertu de laquelle une partie entend la déposer, comme dans la décision AB Hassle, il n’est pas nécessaire de démontrer le préjudice pour la partie adverse qui en demande la production. La partie qui dépose la preuve doit se conformer à l’ordonnance sauf si, comme l’a indiqué le juge MacKay, des circonstances particulières justifient une dérogation au processus déjà établi. Lorsque, comme je l’ai conclu en l’espèce, la preuve est visée par la portée de l’ordonnance, elle ne doit pas être exclue à moins qu’un préjudice grave soit démontré. Pfizer n’en a démontré aucun. En outre, comme le contre-interrogatoire du DBrophy est déjà prévu pour le 5 juillet, la réception de son affidavit n’occasionnerait pas de retard.

 

  • [28] Les parties aux procédures en matière d’AC ont l’inquiétante tendance à déposer un nombre de plus en plus élevé d’éléments de preuve et à solliciter l’autorisation de déposer des preuves complémentaires en réplique, en contre-preuve et même, d’après ce que je constate, en réplique à la contre-preuve. Je ne veux pas encourager cette tendance par ma décision. Si j’avais relevé un quelconque motif me permettant de conclure que Novopharm tentait de scinder sa cause ou qu’on pouvait raisonnablement s’attendre à ce qu’elle désigne le Dr Brophy comme témoin potentiel avant la publication de son article paru en janvier, j’aurais refusé d’intervenir. Toutefois, l’audition de la présente requête m’ayant convaincu que ce n’était pas le cas, j’estime qu’il serait injuste de priver Novopharm de l’occasion de déposer cette preuve pertinente et de s’y appuyer.

 

  • [29] En conséquence, je suis convaincu que l’appel interjeté par Novopharm à l’encontre de la décision du 24 avril 2006 devrait être accueilli et, après nouvel examen de l’affaire, que la requête en radiation de l’affidavit du Dr Brophy présentée par Pfizer devrait être rejetée. L’affidavit sera conservé au dossier.

 

  • [30] En raison de ma décision sur la requête en appel, je n’ai pas à me prononcer sur la requête sollicitant, en vertu de l’article 312 des Règles, l’autorisation de déposer et de signifier l’affidavit du Dr Brophy comme preuve complémentaire. Cependant, je dois indiquer, au profit de toute procédure subséquente en cette matière, que, si j’avais conclu que la décision du 24 avril 2006 ne constituait pas une « erreur flagrante », j’aurais exercé le pouvoir discrétionnaire que me confère l’article 312 des Règles pour autoriser le dépôt et la signification de l’affidavit du Dr Brophy pour les motifs invoqués par la protonotaire Milczynski dans son ordonnance du 3 mars, à savoir que la preuve complémentaire irait dans le sens des intérêts de la justice, qu’elle aiderait la Cour à rendre sa décision finale et qu’elle ne causerait pas de préjudice grave à la partie adverse.

 

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la requête présentée en vertu de l’article 51 des Règles des Cours fédérales et que l’appel de l’ordonnance rendue par le protonotaire le 24 avril 2006 soient accueillies. Après nouvel examen de l’affaire, la requête en radiation de l’affidavit du Dr James M. Brophy, souscrit le 10 mars 2006, présentée par les demanderesses est rejetée.

 

« Richard G. Mosley »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christine Gendreau, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :  T-560-05

 

INTITULÉ :  PFIZER CANADA INC. ET

  WARNER-LAMBERT COMPANY, LLC

  c.

  LE MINISTRE DE LA SANTÉ ET

  NOVOPHARM LIMITED

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :  LE 12 JUIN 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :  LE JUGE MOSLEY

 

DATE DES MOTIFS :  LE 21 JUIN 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Grant Worden

Damien McCotter

 

POUR LES DEMANDERESSES

Jonathan Stainsby

Andy Radhakant

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Grant Warden

Damien Mccotter

Torys LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDERESSES

Jonathan Stainsby

Andy Radhakant

Heenan Blaikie

Toronto (Ontario)

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

 

 

 

 

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