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     T-2376-96

OTTAWA (ONTARIO), LE 27 JUIN 1997

EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE JOYAL

         AFFAIRE INTÉRESSANT les articles 38 et 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13                 
         ET l'appel d'une décision rendue pour le compte du registraire des marques de commerce en date du 27 août 1996                 

ENTRE :

     PAUL R. HASKETT,

     appelant,

     (demandeur),

ET :

     QUEENSWEAR INTERNATIONAL LTD./LTÉE,

     intimée

     (opposante).

     J U G E M E N T

     L'appel d'une décision rendue pour le compte du registraire des marques de commerce en date du 27 août 1996 est par la présente accueilli.

     L-Marcel Joyal

    

     J U G E

Traduction certifiée conforme :

                 C. Bélanger, LL.L.

     T-2376-96

         AFFAIRE INTÉRESSANT les articles 38 et 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13                 
         ET l'appel d'une décision rendue pour le compte du registraire des marques de commerce en date du 27 août 1996                 

ENTRE :

     PAUL R. HASKETT,

     appelant,

     (demandeur),

ET :

     QUEENSWEAR INTERNATIONAL LTD./LTÉE,

     intimée

     (opposante).

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE JOYAL

     Dans le présent appel, l'appelant cherche à faire infirmer la décision par laquelle l'agent d'audience en matière de marques de commerce a refusé sa demande d'enregistrement nE 651,177 de la marque de commerce BAFFIN ISLAND BEACH CLUB ESTABLISHED 20?? en vue de son utilisation en liaison avec les marchandises suivantes :

     des vêtements, savoir des pantalons, des culottes, des jupes, des survêtements, des T-shirts, des chandails, des vestes, des costumes de bain, de sur-maillots, des chapeaux, des ceintures, des chaussures, des sandales, des chaussettes; des sacs fourre-tout, des paniers; des serviettes de plage, des parapluies, des chaises, des tables, des ballons de plage, des verres, des plateaux; des lunettes de soleil; des huiles et lotions de bronzage, des écrans solaires.         

     Pour toute personne qui connaît un peu la géographie canadienne, un simple coup d'oeil à cette marque en fait ressortir le caractère bizarre, fantaisiste et humoristique. D'une certaine façon, des marchandises telles que des ballons de plage, des serviettes de plage et des costumes de bain ne sont pas aisément associables à l'île de Baffin, pas plus qu'un touriste ne serait tenté d'y visiter un club sur plage.

     Néanmoins, l'intimée, Queenswear International Ltd./Ltée, a déposé une opposition à la demande pour les motifs suivants :

1.      La marque crée de la confusion avec la marque de commerce BAFFIN BAY, enregistrée par l'opposante (intimée) le 27 janvier 1978, sous le nE 225,655, en liaison avec des marchandises essentiellement identiques, savoir : des vêtements pour hommes, femmes et enfants, consistant en chandails, pantalons, vestes d'extérieur, pardessus, imperméables et ensembles.
2.      Le requérant (appelant) n'a pas droit à l'enregistrement du fait de cette confusion.
3.      La marque projetée n'est pas distinctive.
4.      La demande n'est pas conforme aux exigences de l'article 30 de la Loi sur les marques de commerce (la Loi) et, plus particulièrement, à l'alinéa 30e), étant donné que le requérant n'entend pas utiliser la marque de commerce au Canada en liaison avec ses marchandises.

     L'agent d'audience a plus tard traité de la question du caractère enregistrable de la marque projetée et, pour le compte du registraire des marques de commerce, elle a refusé la demande. L'agent d'audience a invoqué deux motifs principaux : premièrement, elle doutait que le requérant respectait l'alinéa 30e) de la Loi et, deuxièmement, elle n'était pas convaincue qu'il s'était acquitté de son fardeau légal de prouver qu'il n'y avait aucune possibilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce en cause.

     Ainsi qu'il est bien établi, dans le cadre d'un appel interjeté en vertu de l'article 56 de la Loi il s'agit normalement d'examiner si la décision du registraire est bien fondée, s'il a omis d'agir judiciairement ou s'il a commis une erreur manifeste. Sinon, sa décision ne peut être traitée à la légère et un poids considérable doit y être accordé. Toutefois, comme c'est souvent le cas, en vertu du paragraphe 56(5), des éléments de preuve additionnels sont présentés à l'étape de l'appel, ce qui fait en sorte que l'instance prend la tournure d'un procès de novo.

     Au sujet du premier motif de refus, des éléments de preuve additionnels ont été déposés pour convaincre la présente Cour que, peu importe les doutes que le registraire peut avoir eu à l'égard du respect de l'alinéa 30e), ceux-ci ne sont plus justifiés. L'appelant a déposé comme pièce un échantillon de T-shirt sur lequel figure la marque de commerce imprimée dans un dessin complexe ainsi que les mots " Naturals by Cameo ", qui sont simplement le nom de l'entreprise qui a préparé l'échantillon, et non celui d'un utilisateur enregistré ou un titulaire de licence.

     Pour ce qui est du deuxième motif de refus, celui du fardeau imposé au requérant de prouver qu'il n'y aurait aucune possibilité raisonnable de confusion avec la marque de commerce enregistrée BAFFIN BAY, l'agent d'audience a eu tout à fait raison de décider que le fardeau de respecter les dispositions de la Loi incombait presque exclusivement au requérant, que les marchandises visées par les deux marques sont essentiellement les mêmes et que la marque de l'opposante est employée largement au Canada et est devenue très connue.

     En appel, l'appelant a ajouté de nombreux éléments de preuve à l'appui de sa cause. En voici une énumération :

1.      Le seul mot commun aux deux marques est BAFFIN, et, comme pour les noms géographiques en général, le champ de la protection accordée par la marque de commerce est quelque peu limité.
2.      Les dossiers d'enregistrement des sociétés révèlent un certain nombre d'emplois des mots BAFFIN, BAFFIN BAY et BAFFIN ISLAND. Le nom de quelque 25 sociétés semblables peut y être trouvé.
3.      Comme marque de commerce, le mot BAFFIN se retrouve dans huit enregistrements du registre des marques de commerce, et vise des marchandises telles que des bottes d'hiver, des oeuvres d'art et des services artistiques, des desserts surgelés et une multitude de gammes de vêtements.

     Dans ces circonstances, les yeux et l'esprit d'un observateur occasionnel ne sont pas attirés par le nom géographique BAFFIN ou BAFFIN BAy ou BAFFIN ISLAND, mais par BAFFIN ISLAND BEACH CLUB ESTABLISHED 20??. À mon avis, le caractère bizarre ou humoristique est très évident pour la personne raisonnable, cette fiction juridique qui correspond à Monsieur et Madame Tout le Monde. Pour une personne tout à fait ignorante de la géographie canadienne ou souffrant d'une certaine forme de déficience intellectuelle, ce caractère pourrait ne pas être évident mais ce n'est pas le cas en l'espèce. Le critère de confusion concerne la possibilité " raisonnable ".

     Si, d'après la preuve qui lui avait été présentée, l'agent d'audience pouvait conclure que l'appelant ne s'était pas acquitté de son fardeau de réfuter la possibilité raisonnable de confusion, la présente Cour, avec égards et sur la foi des éléments de preuve additionnels, peut tirer une conclusion différente. Par conséquent, sans donner à croire que l'état du registre est déterminant dans les cas de " confusion ", je suis convaincu que l'appelant s'est maintenant acquitté de son fardeau.

     Dans les circonstances, je suis d'avis d'accueillir l'appel.

     L-Marcel Joyal

    

     J U G E

O T T A W A (Ontario)

27 juin 1997.

Traduction certifiée conforme :

                 C. Bélanger, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :              T-2376-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :          PAUL R. HASKETT c. QUEENSWEAR INTERNATIONAL LTD.
LIEU DE L'AUDIENCE :          Ottawa (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :          7 mai 1997

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR MONSIEUR LE JUGE JOYAL

EN DATE DU :              27 juin 1997

ONT COMPARU :

Me Nicholas Fyfe              POUR L'APPELANT
Me John Miller              POUR L'INTIMÉE

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Smart & Bigger              POUR L'APPELANT

Ottawa (Ontario)

Swabey, Ogilvy, Renault          POUR L'INTIMÉE

Ottawa (Ontario)

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