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Date : 20041216

Dossier : T-1660-04

Référence : 2004 CF 1750

ENTRE :

                                                                GARY GOPHER

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

LE CHEF BRIAN MOCCASIN, LE CONSEIL DE BANDE DE LA PREMIÈRE NATION SAULTEAUX et STANLEY MOCCASIN

                                                                                                                                          défendeurs

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE HARRINGTON

[1]                Gary Gopher a été élu au conseil de bande de la Première nation Saulteaux. Il a prétendument été révoqué lors d'une réunion du conseil de bande tenue le 1er septembre 2004, et une élection partielle destinée à le remplacer devait avoir lieu le 29 septembre 2004. Il a présenté une demande de contrôle judiciaire de cette décision et, en attendant une décision au fond sur cette demande, il a sollicité une injonction à l'encontre de la tenue de l'élection partielle, et une déclaration selon laquelle il demeure membre du conseil de bande jusqu'à ce que la Cour en ordonne autrement.

[2]                Deux sortes d'injonctions peuvent être prononcées au cours d'une procédure. La première est une injonction provisoire, généralement accordée en l'absence de la partie adverse, telle injonction étant valide pendant une durée maximale de 14 jours (article 374 des Règles). Lorsque j'ai été saisi à l'origine de cette affaire, en tant que juge des requêtes, j'ai refusé de l'instruire en l'absence de la partie adverse. Les défendeurs ont par la suite reçu notification de la procédure, mais ils n'ont pas comparu. J'ai été persuadé que M. Gopher avait exposé de bons arguments, mais j'ai accordé une injonction provisoire, qui a expiré le 12 octobre 2004.

[3]                M. Gopher a par la suite dûment sollicité la deuxième injonction, l'injonction interlocutoire. Il y a eu des retards de planification imputables aux défendeurs, mais les défendeurs ont maintenant nommé un avocat qui a comparu. À l'audience tenue hier, j'ai accordé l'injonction interlocutoire jusqu'à ce que la demande de contrôle judiciaire de la décision du conseil de bande soit jugée au fond.

[4]                J'ai été influencé par le fait que les élections à la Première nation Saulteaux sont régies par sa loi sur les élections selon les coutumes de la bande, la Band Custom Election Act. Voici l'article 7 de cette Loi :

[traduction] Une assemblée ainsi convoquée peut procéder à la modification des coutumes de la bande ou à la révocation des élus, à condition qu'au moins 100 électeurs soient présents à l'assemblée. Si au moins 100 électeurs sont présents à l'assemblée, une résolution peut être adoptée à la majorité simple.

Moins de 100 électeurs étaient présents à l'assemblée.


[5]                Les principes généraux applicables à un jugement interlocutoire sont bien établis. Ainsi que nous l'enseignent des précédents tels que l'arrêt RJR-Macdonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, le demandeur doit remplir un triple critère. Il doit prouver qu'il y a une question sérieuse à trancher, qu'il subira un préjudice irréparable si le redressement n'est pas accordé, enfin que l'équilibre des inconvénients milite en sa faveur.

[6]                Le seuil à atteindre pour le premier volet du critère est assez faible. Sauf l'existence de pures questions de droit, il y a une question sérieuse à trancher si l'affaire ne semble pas frivole ou vexatoire. À mon avis, M. Gopher a certainement soulevé une question sérieuse. Les défendeurs ont fait observer que la loi sur les élections selon les coutumes de la bande prévoit un mécanisme d'appel. Cependant, il me semble que le mécanisme d'appel se limite aux assemblées qui au départ ont été dûment constituées. Par exemple, si au moins 100 électeurs avaient été présents à l'assemblée, alors il semble que le recours de M. Gopher aurait été un appel, non une demande de contrôle judiciaire.

[7]                S'agissant du préjudice irréparable, la Loi prévoit un mandat de deux ans, renouvelable une fois. Un membre du conseil doit alors attendre au moins deux ans avant d'être de nouveau éligible. Ainsi, étant donné la nature temporelle du poste, je n'ai aucune difficulté à dire que M. Gopher subira un préjudice irréparable si la décision contestée se révèle erronée.

[8]                De même, je suis d'avis que l'équilibre des inconvénients milite en faveur de M. Gopher.

[9]                Cela ne veut pas dire que M. Gopher aura gain de cause lorsque sa demande de contrôle judiciaire sera jugée au fond. Les défendeurs font observer à juste titre qu'il y a des ambiguïtés dans la loi sur les élections selon les coutumes de la bande, ambiguïtés qui pourraient être résolues par la preuve des événements passés. À l'invitation de la Cour, les parties ont demandé ensemble que l'affaire soit considérée comme une instance à gestion spéciale. Espérons qu'un calendrier pourra être établi de telle sorte que la demande puisse être instruite au fond dans les meilleurs délais.

[10]            M. Gopher a souscrit l'engagement habituel relatif aux dommages-intérêts lorsque l'injonction provisoire a été accordée, et il a renouvelé cet engagement aux fins de l'injonction interlocutoire, ce qui devrait disposer des inquiétudes causées aux défendeurs par le fait que j'ai ordonné que M. Gopher reçoive le traitement attaché à sa charge jusqu'à ce que la Cour en décide autrement.

« Sean Harrington »

                                                                                                     Juge                           

Ottawa (Ontario)

le 16 décembre 2004

Traduction certifiée conforme

D. Laberge, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                     T-1660-04

INTITULÉ :                    GARY GOPHER

ET

LE CHEF BRIAN MOCCASIN, LE CONSEIL DE BANDE DE LA PREMIÈRE NATION SAULTEAUX et STANLEY MOCCASIN

LIEU DE L'AUDIENCE :                            OTTAWA (ONTARIO)

VIA TÉLÉCONFÉRENCE :                        SASKATOON (SASKATCHEWAN)

DATE DE L'AUDIENCE :                          LE 15 DÉCEMBRE 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :             LE JUGE HARRINGTON

DATE DES MOTIFS : LE 16 DÉCEMBRE 2004

COMPARUTIONS :

Anthony Merchant                                           POUR LE DEMANDEUR

John Kwok                                                     POUR LES DÉFENDEURS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Merchant Law Group                                      POUR LE DEMANDEUR

Regina (Saskatchewan)

Kwok Law Office                                           POUR LES DÉFENDEURS

Saskatoon (Saskatchewan)


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