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                                                                                                                                 Date : 20050221

                                                                                                                    Dossier : IMM-3019-04

                                                                                                                  Référence : 2005 CF 271

ENTRE :

                                             JOSE JULIAN RODRIGUEZ QUIROA

                                     MIRIAM DEROSARIO PORTILLO FAJARDO

                                                                                                                                        demandeurs

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PHELAN

LE CONTEXTE

[1]                Les demandeurs, qui sont conjoints de fait et originaires du Guatemala, se sont vu refuser la qualité de réfugié au sens de la Convention et celle de personne à protéger par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (SPR). La SPR a conclu qu'il y avait un certain nombre d'éléments qui discréditaient le témoignage des demandeurs et mettaient en question la fiabilité de certains documents.

[2]                Les demandeurs avaient fondé leur demande sur les motifs suivants : comme la demanderesse avait le même nom que le président - « Portillo » - et était originaire de la ville de Zacapa, tout comme le président, un certain nombre de groupes les persécutaient, groupes qui étaient tous des opposants politiques du président.


[3]                À part la similitude des noms - celui du président est Portillo Cabrera, tandis que celui de la demanderesse est Portillo Fajardo - celle-ci dit que son père est un opposant au gouvernement actuel et que, pour cette raison, il a été agressé et menacé.

[4]                La SPR a examiné la déposition relative aux différentes attaques et menaces et a noté des anomalies et des déclarations contradictoires. La SPR a conclu que les allégations n'étaient ni plausibles, ni crédibles. La demande du demandeur était liée à celle de la demanderesse.

[5]                Les demandeurs soulèvent deux questions :

- 1 -      La SPR a-t-elle fait erreur lorsqu'elle a évalué la crédibilité des demandeurs ou statué sur elle?

- 2 -      Les erreurs de traduction alléguées ou les interruptions du commissaire ont-elles privé les demandeurs d'une audience équitable?

ANALYSE

[6]                Le droit est bien fixé : les conclusions de fait ne sont rejetées que si elles sont manifestement déraisonnables ou que si le décideur les a tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il disposait (alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales).


[7]                La SPR était bien consciente de la similitude des noms et du fait que la demanderesse était originaire de la même ville que le président Portillo Cabrera. Elle a aussi gardé à l'esprit les activités politiques de son père (voir à la page 1 des motifs de la SPR). La SPR a aussi pris bonne note du fait que le reste de la famille de la demanderesse continuait à habiter au Guatemala.

[8]                Il a été prétendu que le rapport de police et d'autres documents, sur lesquels elle s'est appuyée dans son examen pour montrer certaines contradictions dans la déposition des demandeurs, contenaient des erreurs mineures; cependant, ces erreurs, à supposer qu'elles existent et qu'elles soient prises une par une ou dans leur ensemble, n'ont pas entaché l'évaluation générale de la SPR, qui a conclu à l'insuffisance de preuves quant au risque auquel seraient exposés personnellement les demandeurs.

[9]                Les demandeurs disent que certaines erreurs de traduction ont empêché la SPR d'apprécier correctement les faits. Le défendeur dit que si tel était le cas, les demandeurs ont renoncé à leurs droits en ne se plaignant pas de la mauvaise qualité de la traduction lors de l'audience.

[10]            À mon humble avis, il n'y a pas de règle stricte selon laquelle il faut s'opposer à la mauvaise qualité de la traduction au moment même où elle est faite. Si la partie concernée connaît suffisament le français ou l'anglais pour repérer les erreurs de traduction, il est possible que la formulation immédiate d'une opposition s'impose - encore que, dans un tel cas, se poserait la question de savoir s'il était nécessaire de faire intervenir un interprète. Cependant, si l'on suppose que l'on a recours aux services d'un interprète parce que la partie concernée ne dispose pas de cette capacité linguistique, obliger celle-ci à s'opposer sur-le-champ aux erreurs de traduction rendrait son droit à la traduction dénué de sens.


[11]            Les demandeurs ont produit la copie du procès-verbal accompagnée des corrections qu'ils estiment nécessaires. J'ai examiné cette « version corrigée » , et je ne vois aucune raison de conclure que les demandeurs ont été privés d'une audience équitable en raison d'erreurs de traduction.

[12]            Les demandeurs disent qu'ils ont été privés d'une audience équitable parce que le commissaire s'est arrogé le rôle d'interrogateur et que, en pratique, il est « descendu dans l'arène » .

[13]            Ni les commissaires de la SPR, ni les juges, ne sont tenus de siéger dans un silence monacal tout au long des instances. Il est plus que légitime de la part d'un commissaire de poser des questions afin d'éclaircir une déposition ou d'aborder des questions qui sont pertinentes quant aux points sur lesquels la SPR est appelée à statuer. Il y a une procédure applicable et le commissaire doit adopter le ton et le comportement indiqués afin de ne pas donner l'impression qu'il a arrêté ses conclusions de manière prématurée.

[14]            Ayant examiné le procès-verbal, il est certain que le commissaire a posé de nombreuses questions, mais apparemment pas de manière agressive. Il semble qu'elles étaient destinées à d'obtenir des réponses aux questions pertinentes, mais le commissaire ne s'en est pas pris à la crédibilité des demandeurs.

[15]            Il est important de signaler que les demandeurs étaient représentés par un avocat - qui avait vraisemblablement une longue expérience du droit de l'immigration - qui n'a pas élevé d'objections à l'encontre de l'interrogatoire ou du ton de l'interrogateur. Ne pas élever d'objections n'est pas nécessairement concluant; cependant, cette inaction, vue de concert avec l'examen des deux versions du procès-verbal, montre que rien ne justifie l'intervention de la Cour sur cette question.


[16]            Pour ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Aucune question ne sera certifiée.

                                                                                                                           « Michael L. Phelan »         

Juge

Traduction certifiée conforme

François Brunet, LL.B., B.C.L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                             

DOSSIER :                                                     IMM-3019-04

INTITULÉ :                                                    JOSE JULIAN RODRIGUEZ QUIROA et MIRIAM DELROSARIO PORTILLO FAJARDO c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 27 JANVIER 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               LE JUGE PHELAN

DATE DES MOTIFS :                                   LE 21 FÉVRIER 2005

COMPARUTIONS:

Michael Koraman                                POUR LES DEMANDEURS

Marcel Larouche                                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Otis & Korman

Toronto (Ontario)                                              POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)                                               POUR LE DÉFENDEUR

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