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Date : 20060421

Dossier : T-11-02

Référence : 2006 CF 511

Ottawa (Ontario), le 21 avril 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BEAUDRY

 

 

ENTRE :

446203 BC LTD. faisant affaire sous le nom de

ISLAND SKILL DEVELOPMENT CENTRE

demanderesse

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

représentée par

DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES CANADA

défenderesse

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Introduction

[1]               Il s’agit d’une action intentée par Island Skill Development Centre (ISDC) contre Développement des ressources humaines Canada (DRHC) conformément à l’article 17 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, pour rupture de contrat.

 

 

II.        Question

[2]               Des obligations contractuelles liaient-elles DRHC après le terme des accords de mai 1999 (tels qu’ils ont été modifiés)?

 

III.       Contexte

[3]               ISDC est une société constituée en vertu du droit de la province de la Colombie‑Britannique. La présidente, unique actionnaire et directrice de la société, ainsi que son âme dirigeante, est Susanna Blackburn, une travailleuse sociale ayant obtenu sa maîtrise en travail social à Toronto en 1986.

 

[4]               En mai 1999, DRHC a signé deux accords de contribution avec ISDC. Conformément à l’un des accords, ISDC a reçu des fonds en échange de la prestation de services d’aide à l’emploi [traduction] « de première ligne » à des Canadiens sans emploi. Conformément à l’autre accord, ISDC a reçu des fonds en échange de la prestation de [traduction] « services spécialisés » ou de [traduction] « services assistés d’aide à l’emploi à des Canadiens sans emploi ».  

 

[5]               Ces accords ont été conclus en application de la Loi sur l’assurance‑emploi, L.C. 1996, ch. 23, partie II, « Prestations d’emploi et service national de placement » (articles 56 à 65.2), et du Règlement sur l’assurance‑emploi, DORS/96-332, articles 58 et 59.

 

[6]               Auparavant, dans le cadre d’un accord de coentreprise avec la province de la Colombie‑Britannique (la province), DRHC a publié une Demande de proposition (DP) le 11 décembre 1998 afin de trouver des fournisseurs de services de première ligne, notamment des services distincts de recherche d’emploi et un service d’aide à l’emploi. Il était entendu que DRHC et la province concluraient des contrats distincts avec le candidat choisi. 

 

[7]               Le 15 janvier 1999, DRHC a publié un appel de propositions pour la prestation de [traduction] « services assistés » pour les clients de l’assurance‑emploi.  

 

[8]               ISDC a été le soumissionnaire retenu tant pour la DP que pour l’appel de propositions. Chaque soumission comportait une proposition de frais administratifs proportionnels au prix contractuel. Ainsi, ISDC a signé deux contrats avec DRHC (contrat no N44655-4 (services de première ligne) et contrat no N45862-5 (services spécialisés)) et un avec la province (contrat nC2000/3713).

 

[9]               La demanderesse prétend que le terme de la proposition, si elle était acceptée, devait être de trois ans, le contrat devant être renouvelé annuellement dans la mesure où on y apportait les ajustements nécessaires et où les trois conditions suivantes étaient remplies :

  • rendement du projet;
  • fonds disponibles;
  • résultats de l’Entente sur le développement du marché du travail (EDMT).

 

[10]           DRHC, la seule poursuivie dans la présente action, soutient que le terme des deux accords signés était de dix mois, prolongé à 13 mois (jusqu’au 30 juin 2000), comme en avaient convenu les deux parties dans des modifications, sans qu’il y ait obligation de sa part de renouveler chaque accord. En conséquence, DRHC nie que les accords devaient être renouvelés chaque année selon exactement les mêmes modalités si les trois conditions ci‑dessus étaient remplies comme l’avance ISDC. 

 

[11]           Avant le 30 juin 2000, les parties ont entamé des négociations avec DRHC et la province au sujet des accords de contribution pour des services de première ligne devant durer 12 mois et entrer en vigueur le 1er juillet 2000.

 

[12]           ISDC a soumis à DRHC une proposition de nouvel accord de contribution pour des services de première ligne accompagnée d’une demande officielle.

 

[13]           La proposition comportait un budget comprenant un élément de profit puisqu’il avait été payé par le passé. DRHC a procédé à une évaluation interne et a jugé que certains frais administratifs, qui constituaient des éléments de profit, devaient être enlevés. ISDC a présenté un budget révisé. Finalement, DRHC a avisé ISDC que le seul poste budgétaire qu’il ne pouvait accepter était celui intitulé [traduction] « Supervision et gestion du projet », lequel représentait 33 400 $ du budget total de 741 220 $. 

 

[14]           ISDC a répondu qu’elle ne pouvait mettre en œuvre un projet sans frais administratifs et a cessé de fournir ses services à la fin de juin 2000.

 

[15]           ISDC réclame des dommages-intérêts pour rupture de contrat et soutient que DRHC avait l’obligation contractuelle découlant des deux accords signés en mai 1999 de payer des frais administratifs équivalant à 8 % du montant net de chaque accord ainsi que l’obligation de renouveler les accords pour une deuxième et une troisième année.

 

IV.       Observations des parties

A.        La demanderesse

[16]           DRHC a l’obligation de renouveler ses contrats comme il en était convenu en mai 1999. DRHC n’a pas le pouvoir discrétionnaire de renouveler ou non les contrats et DRHC n’est pas libre d’ajouter au moment du renouvellement des nouvelles conditions qu’elle juge souhaitables, dans la mesure où les trois conditions suivantes sont remplies : 

·        rendement du projet;

·        fonds disponibles;

·        résultats de l’Entente sur le développement du marché du travail (EDMT).

Puisque DRHC a reconnu que les trois conditions avaient été remplies, il est tenu de conclure de nouveaux contrats pour d’autres termes, totalisant au maximum 36 mois. En d’autres mots, DRHC est tenu de signer deux nouveaux contrats d’un an avec ISDC, l’un pour la période s’étendant du 1er juillet 2000 au 30 juin 2001 et l’autre pour la période s’étendant du 1er juillet 2001 au 30 juin 2002. 

 

[17]           En s’appuyant sur les témoignages de Susanna Blackburn, de Marsha Weaver et de Peter Davey ainsi que sur une note au dossier datée du 31 mars 2000 (pièce P-3A, onglet 42) de J.A. Brown, un directeur de DRHC à l’époque, ISDC soutient que le terme des contrats était de trois années, les petits ajustements nécessaires étant apportés annuellement à chaque contrat.

 

[18]            Selon la demanderesse, le contrat (pour les services de première ligne) ne confère pas à la défenderesse le pouvoir discrétionnaire de renouveler ou non comme le prévoit la DP. En conséquence, DRHC était tenu de le renouveler si les trois conditions étaient remplies.

 

[19]           ISDC souligne avec insistance que, si le contrat est ambigu, il doit être interprété en faveur de la demanderesse, conformément à la règle contra proferentem.

 

[20]           Pendant les 13 mois d’existence des contrats, DRHC a payé les frais administratifs de 8 % sans les contester.

 

[21]           Au cours de la période de négociations en 2000, ISDC a soumis huit budgets afin de satisfaire aux exigences de DRHC. Néanmoins, DRHC a refusé de payer les frais administratifs que, selon la demanderesse, DRHC était tenu de payer. Tous les principaux changements aux budgets proposés ont été apportés à la demande d’un représentant de DRHC. 

 

[22]           ISDC réclame 1 000 000 $ de la défenderesse pour perte de revenu, frais d’occupation de locaux, perte d’investissements de capitaux et autres pertes décrites en détail dans la deuxième déclaration modifiée aux paragraphes 32, 33 et 34. Le détail de certaines des pertes se trouve dans l’opinion écrite d’expert et le témoignage de M. Selman. 

 

[23]           ISDC renvoie la Cour à The Law of Contract in Canada, par G.H.L. Fridman, 4e édition. La demanderesse fait également référence à Banque Manuvie du Canada c. Conlin, [1996] 3 R.C.S. 415.

 

B.         La défenderesse

[24]           DRHC nie qu’il y a eu rupture de contrat. Le dossier contractuel n’est pas ambigu et ne prévoit pas l’obligation de renouveler.

 

[25]           Selon les accords signés entre les parties, DRHC a accepté de payer à ISDC un élément de profit sous la forme de frais administratifs. DRHC affirme que cette clause contrevenait à la politique du Conseil du Trésor et aux modalités connexes de DRHC approuvées par le Conseil du Trésor. DRHC prétend également qu’à l’époque, il n’appliquait pas strictement cette politique.

 

[26]           En janvier 2000, un rapport de vérification constatant des problèmes dans la gestion des subventions et contributions à DRHC a été rendu public. Il est devenu clair lors de la révision des accords que donner à ISDC un profit de 8 % sous la forme de frais administratifs avait été une erreur.

 

[27]           Les contrats avec DRHC prenaient fin le 30 juin 2000 et la demanderesse était au courant. Lors des négociations pour le nouveau contrat s’étendant de juillet 2000 à juin 2001, ISDC a été informée que DRHC ne paierait aucun élément de profit. 

 

[28]           DRHC s’oppose à ce qu’une preuve extrinsèque soit employée pour interpréter les contrats signés par les deux parties parce que les modalités du contrat ne sont pas ambiguës. La Cour a entendu la preuve extrinsèque sous réserve et ses observations se trouvent dans la section Analyse. La défenderesse affirme que, dans le cas où le dossier contractuel serait ambigu, la preuve extrinsèque pertinente établit qu’il n’existe aucune obligation de renouveler.

 

[29]           DRHC ajoute que si des dommages-intérêts doivent être accordés à la demanderesse, ils doivent être limités à deux mois, comme le stipule la clause de résiliation du contrat. À titre subsidiaire, prétend-il, si la Cour juge que la clause de résiliation ne s’applique pas en l’espèce, les dommages‑intérêts doivent alors être limités à deux ans selon l’opinion écrite et le témoignage d’expert de M. McKay.

 

[30]           DRHC produit de la jurisprudence à l’appui de ses observations.

 

V.        Analyse

            Des obligations contractuelles liaient-elles DRHC après le terme des accords de mai 1999 (tels qu’ils ont été modifiés)?

 

A.        Sur quelle période s’étendaient les accords signés entre les parties en mai 1999 ou quelle était leur durée?

[31]           DRHC a signé deux accords de contribution avec ISDC en mai 1999. Dans le cadre des accords pour les [traduction] « services de première ligne » et les [traduction] « services spécialisés », la demanderesse a reçu des fonds en échange de services d’aide à l’emploi aux Canadiens sans emploi (pièce P-3A, onglets 3 et 6).

 

[32]           L’accord pour les [traduction] « services de première ligne » avec DRHC a été financé à 55 % par DRHC et à 45 % par la province à partir d’un budget commun. La province a signé un accord distinct avec ISDC pour les [traduction] « services de première ligne » (pièce P-3A, onglet 9).

 

[33]           Les accords pour les [traduction] « services de première ligne » et les [traduction] « services spécialisés » entre DRHC et ISDC duraient dix mois, prenant fin le 31 mars 2000. Les parties ont conclu deux accords modifiés distincts pour prolonger les accords jusqu’au 30 juin 2000. Il y a également eu deux accords modifiés distincts ne concernant pas la durée des accords.

 

[34]           La défenderesse convient que, dans les deux accords ([traduction] « services de première ligne » et [traduction] « services spécialisés »), DRHC a accepté de payer à ISDC, en tant que partie du poste budgétaire [traduction] « frais de coordination du projet », un élément de profit (des frais administratifs correspondant à 8 % du montant net du contrat). Il a également accepté de payer à ISDC, en tant que partie des postes budgétaires [traduction] « frais d’équipement » et [traduction] « frais de laboratoire informatique », des frais de location pour l’utilisation de l’équipement existant d’ISDC. Ces frais étaient inclus dans le [traduction] « montant net du contrat » servant à calculer les frais administratifs de 8 %. 

 

[35]           La durée du contrat prolongé pour les [traduction] « services de première ligne » se trouve dans la pièce P-3A, onglet 5, page 1 (boîte 100 : dossier numéro N44655-4, boîtes : 23 et 24 [traduction] « du 1999-06-01 au 2000-06-30 »). Quant à celle de l’accord prolongé pour les [traduction] « services spécialisés », elle se trouve dans la pièce P-3A, onglet 8 (boîte 100 : dossier numéro N45862-5, boîtes 23 et 24 [traduction] « du 1999-06-01 au 2000-06-30 »).

 

[36]           En présence d’indications aussi claires dans le dossier contractuel, la Cour n’a d’autre choix que de statuer que la durée des contrats est celle mentionnée au paragraphe précédent et que les contrats prenaient fin le 30 juin 2000.

 

B.         Des obligations juridiques lient-elles DRHC à ISDC après le 30 juin 2000?

[37]           Pour répondre à cette question, la Cour doit examiner les accords écrits ainsi que le contexte factuel dans lequel ils ont été rédigés. Selon la preuve, quel était le contexte connu des parties à la date du contrat ou avant? (Delisle c. Bulman Group Ltd. (1991), 54 B.C.L.R. (2d) 343)

 

[38]           À la page 345 de la décision Delisle, la juge Ryan a écrit au paragraphe 2 :

[traduction

En examinant le cadre factuel, la Cour ne doit pas considérer les négociations antérieures des parties comme un outil d’interprétation du contrat écrit. Les témoignages de vive voix concernant l’intention des parties sont inadmissibles dans l’interprétation d’un contrat écrit. […]

 

 

[39]           En l’espèce, DRHC et la province ont publié une Demande de proposition (DP) le 11 décembre 1998 (pièce P-3A, onglet 1), afin de trouver des fournisseurs de services de première ligne. Il était entendu qu’ils concluraient des contrats distincts avec le candidat choisi. Le 15 janvier 1999, DRHC a publié un appel de propositions pour la prestation de [traduction] « services assistés » ou pour un [traduction] « contrat de services spécialisés ». ISDC a été le soumissionnaire retenu tant pour la DP que pour l’appel de propositions. Par la suite, trois contrats ont été signés (voir le paragraphe [8] ci-dessus).

 

[40]           La demanderesse soutient que les accords de mai 1999 comprenaient l’obligation pour DRHC de renouveler chaque accord pour d’autres termes, totalisant au maximum 36 mois – en d’autres mots, deux futurs contrats d’un an : l’un pour une deuxième année et l’autre pour une troisième année, une obligation contractuelle subsistant donc après la fin des accords le 30 juin 2000. 

 

[41]           Cette prétention entre en contradiction tant avec les connaissances que la demanderesse a reconnu avoir au moment des accords de mai 1999 qu’avec les modalités des contrats.

 

[42]           La preuve montre que la demanderesse savait que la politique de DRHC limitait la durée des contrats de services d’aide à l’emploi à un maximum de 52 semaines (témoignage de Marsha Weaver lors de l’interrogatoire principal).

 

[43]           Quant au terme du contrat pour les [traduction] « services de première ligne » (pièce P‑3A, onglets 3 et 5), non seulement il est prévu qu’il prend fin le 30 juin 2000, mais dans l’[traduction] « Annexe A – Document joint », qui fait partie du contrat, sous le titre [traduction] « II PROPOSITION FAISANT PARTIE INTÉGRANTE DU CONTRAT / RENVOIS CONTENUS AU DOSSIER », le paragraphe B est rédigé ainsi :

[traduction

B.         Tous les renvois présentés dans l’annexe A et dans l’annexe D faisant partie du présent accord comprennent les documents suivants qui se trouvent dans le dossier de l’accord :

           R2 DEMANDE DE PROPOSITIONS – SERVICES DE PREMIÈRE LIGNE […]

 

Sous le titre [traduction] « III MODÈLE TRANSITIONNEL – ENTENTE SUR LE DÉVELOPPEMENT DU MARCHÉ DU TRAVAIL (EDMT) », le paragraphe C est rédigé ainsi :

[traduction

C.        ACCORD DE PRINCIPE

Comme le prévoit la DP (R2), DRHC accepte en principe de financer le projet pendant au maximum trois ans; cependant, les accords ne sont signés que pour une année à la fois et le renouvellement se fera sous réserve du rendement du projet, de la disponibilité des fonds et des résultats de l’EDMT. [Non souligné dans l’original.]

 

[44]           La Cour comprend que ce document fait référence à la DP (pièce P-3A, onglet 1, page 3, [traduction] « RÉSUMÉ »). Le dernier paragraphe de la section [traduction] « 1. RÉSUMÉ DES EXIGENCES » stipule :

[traduction

Il est prévu que les contrats dureront un an et entreront en vigueur au plus tard le 1er juin 1999. La province peut, à sa seule discrétion, renouveler son contrat pour d’autres termes, totalisant au maximum 36 mois, à condition qu’elle dispose de fonds suffisants et que le rendement du fournisseur soit satisfaisant. La Commission peut, à sa seule discrétion, renouveler son contrat pour d’autres termes, totalisant au maximum 36 mois, à condition qu’elle dispose de fonds suffisants et que le rendement du coordonnateur soit satisfaisant. [En l’espèce, « Commission » correspond à DRHC.] [Non souligné dans l’original.]

 

[45]           Étant donné la preuve aussi claire et convaincante contenue dans le contrat et la DP, la Cour est convaincue que DRHC n’avait aucune obligation contractuelle envers ISDC après le 30 juin 2000. Les mots [traduction] « à sa seule discrétion » contredisent l’allégation de la demanderesse selon laquelle DRHC était tenue de renouveler le contrat pour d’autres termes, totalisant au maximum 36 mois. Des clauses semblables à celles mentionnées ci‑dessus se trouvent également dans le contrat pour les [traduction] « services spécialisés ».

 

[46]           En conséquence, la Cour n’a d’autre choix que de faire droit à l’objection soulevée par la défenderesse relativement à l’admission de la preuve extrinsèque produite par la demanderesse, laquelle consiste en les témoignages de Mme Blackburn et de Mme Weaver au sujet de l’interprétation du dossier contractuel.

 

[47]           Au cas où la Cour aurait tort sur cette question et même si elle devait prendre en compte cette preuve extrinsèque, la Cour est d’avis que la preuve extrinsèque ne soutient pas l’interprétation de la demanderesse selon laquelle le dossier contractuel de mai 1999 donnait lieu à une obligation de la part de DRHC envers ISDC après le 30 juin 2000. 

 

[48]           La Cour doit mentionner qu’elle a apprécié l’honnêteté et la franchise de Mme Blackburn et de Mme Weaver. Mme Blackburn a affirmé dans son témoignage que, lors de la rencontre obligatoire des soumissionnaires après la publication de la DP, quelqu’un avait dit qu’il était question d’un contrat de trois ans. Elle ne savait pas avec certitude qui avait fait cette déclaration, mais elle croyait qu’il s’agissait de M. Davey. Mme Weaver a également entendu la même chose d’un représentant de DRHC, mais n’a pu se souvenir de qui il s’agissait.

 

[49]           La Cour a lu et relu la transcription du témoignage de M. Davey et n’est pas d’accord avec le représentant d’ISDC selon qui M. Davey aurait corroboré les déclarations de Mme Blackburn et de Mme Weaver à ce sujet.

 

[50]           De plus, la Cour ne peut inférer à partir de la [traduction] « note au dossier », datée du 31 mars 2000 écrite par J.A. Brown (pièce P-3A, onglet 42) que DRHC était lié par une obligation de trois ans envers ISDC. Le deuxième paragraphe explique le contexte dans lequel cette note a été rédigée :

[traduction

Depuis le 21 janvier 2000, le bureau a dû faire face à une quantité de travail sans précédent en raison de la nécessité de réviser et de confirmer tous les dossiers actifs. De ce fait, les employés n’ont pu s’occuper d’apporter les ajustements aux contrats des années à venir, car ils devaient plutôt consacrer leur temps à réviser et à « remettre de l’ordre » dans les contrats actuels. 

 

 

 De toute évidence, la note a été rédigée dans le contexte d’une modification visant à prolonger de trois mois, jusqu’au 30 juin 2000, le contrat pour les services de première ligne avec ISDC. Les mots du premier paragraphe [traduction] « […] et une approche de trois ans » et [traduction] « [l]e processus complet d’adjudication des contrats sera répété tous les trois ans » concordent avec les mots de l’[traduction] « ACCORD DE PRINCIPE » (voir le paragraphe [43] ci‑dessus) [traduction] « DRHC accepte en principe de financer le projet pendant au maximum trois ans » et ceux du [traduction] « RÉSUMÉ DES EXIGENCES » (voir le paragraphe [44] ci‑dessus) [traduction] « totalisant au maximum 36 mois ». Il ne s’agit pas de la confirmation d’un contrat de trois ans comme le prétend la demanderesse.  

 

[51]           En conséquence, la Cour considère que le dossier contractuel est clair et non ambigu. Les obligations contractuelles de DRHC ont pris fin le 30 juin 2000.

 

[52]           En supposant que lors des négociations entre DRHC et ISDC avant la fin de juin 2000, un représentant de DRHC ait conseillé à ISDC de cacher des frais administratifs ou un élément de profit dans certains postes des budgets proposés, ce fait en lui-même ne pourrait imposer à DRHC l’obligation de renouveler le contrat se terminant le 30 juin 2000.

 

[53]           DRHC a avancé à titre subsidiaire que, si la Cour n’est pas d’accord avec son interprétation du contrat, ISDC ne devrait pas recevoir plus que les deux mois prévus dans la clause de résiliation insérée dans le dossier contractuel. La Cour n’est pas d’accord puisque ISDC n’a pas reçu de tel avis. 

 

[54]           Compte tenu de la conclusion de la Cour au sujet de l’interprétation du dossier contractuel, la demanderesse n’a pas droit à des dommages-intérêts. Par contre, si la Cour avait accepté l’interprétation présentée par le représentant d’ISDC, elle aurait adjugé des dommages‑intérêts de 362 446 $ et aurait suivi l’opinion écrite d’expert de M. McKay (pièce D-3, annexe 3, modifiée au procès). La Cour a jugé l’expert de la défenderesse plus digne de foi. Ses explications étaient plus crédibles que celles de l’expert d’ISDC. 

 

 

JUGEMENT

 

            LA COUR ORDONNE QUE l’action soit rejetée, avec dépens en faveur de la défenderesse.

 

« Michel Beaudry »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T-11-02

 

INTITULÉ :                                                   446203 BC LTD. faisant affaire sous le nom de

                                                                        ISLAND SKILL DEVELOPMENT CENTRE

                                                                        c.

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA représentée par

                                                            DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             VANCOUVER (COLOMBIE‑BRITANNIQUE)

 

DATES DE L’AUDIENCE :                         LES 25, 26, 27, 28 JANVIER 2005

                                                                        LE 1er FÉVRIER 2005

                                                                        LES 19, 20, 21, 22, 23 SEPTEMBRE 2005

                                                                        LES 13 ET 14 FÉVRIER 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE BEAUDRY

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 21 AVRIL 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Joseph Markin                                                  POUR LA DEMANDERESSE

 

Susanne Pereira et                                            POUR LA DÉFENDERESSE

Steven C. Postman                                          

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Joseph Markin                                                  POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                             POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

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