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Date : 20050708

Dossier : T-1281-04

Référence : 2005 CF 939

Québec(Québec), le 8 juillet 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLAIS

ENTRE :

LA NATION MÉTISSE DU LABRADOR et CARTER RUSSELL

demandeurs

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire d'une décision du procureur général du Canada (le procureur général) de suspendre les poursuites engagées par un dénonciateur privé, M. Carter Russell (le demandeur), en sa qualité de membre de la Nation métisse du Labrador (la NML).

LES FAITS

[2]                La route trans-labradorienne (la RTL) devait être construite en trois phases, toutes comprises à l'intérieur de terres traditionnellement exploitées par la NML. Les diverses phases consistent à améliorer la surface de la chaussée ainsi que les ponts, à modifier le tracé actuel et à prolonger la longueur actuelle de la route.

[3]                Des études effectuées sur la phase II de la RTL ont montré que nombre des ponceaux installés étaient défectueux, parce qu'ils faisaient obstacle au mouvement du poisson et qu'ils contribuaient donc à la destruction de leur habitat. Le ministère des Pêches et des Océans (le MPO) a aussi constaté certaines anomalies dans les ponceaux et il obligera la province de Terre-Neuve-et-Labrador à les corriger.

[4]                Durant la phase II, un pont a été construit sur la rivière Paradise (le pont de la rivière Paradise), et un pont avec chaussée surélevée a été construit sur la rivière St. Lewis (le pont de la rivière St. Lewis). Ces deux rivières sont désignées comme rivières à saumon dans l'annexe I du Règlement de pêche de Terre-Neuve-et-Labrador, pris en vertu de la Loi sur les pêches, DORS/78-443.

[5]                Le demandeur allègue que le pont de la rivière Paradise a entraîné la détérioration, la destruction ou la perturbation de l'habitat du poisson, en contravention de l'article 35 de la Loi sur les pêches (L.R.C. 1985, ch. F-14) (la Loi), étant donné que, pour construire le pont temporaire, on avait utilisé un enrochement posé directement dans le lit de la rivière et que la province de Terre-Neuve-et-Labrador n'avait pas reçu l'autorisation de ce faire selon le paragraphe 35(2) de la Loi. Cependant, une deuxième structure permanente a ensuite été érigée après autorisation donnée en vertu du paragraphe 35(2). Le pont temporaire a depuis été enlevé.

[6]                Le demandeur prétend que les ponts de la rivière Paradise et de la rivière St. Lewis ont entraîné la réduction de plus des deux tiers de la largeur des cours d'eau, en contravention de l'article 26 de la Loi.

[7]                Par conséquent, le 26 septembre 2003, le demandeur a déposé sous serment des dénonciations privées contre la province de Terre-Neuve-et-Labrador et contre un entrepreneur, Johnson's Construction Ltd.

[8]                En vertu du Code criminel (L.R.C. 1985, ch. C-46), avis des dénonciations a été signifié au procureur général, qui a eu la possibilité de décider s'il convenait ou non d'intervenir dans la poursuite privée. Le procureur général a reçu les dénonciations établies sous serment, ainsi qu'un dossier de preuves se rapportant aux accusations, et d'autres documents utiles fournis par le MPO.

[9]                Le 8 juin 2004, après plusieurs mois d'échanges de correspondance, le procureur général a décidé de ne pas intervenir dans les poursuites et de ne pas autoriser le demandeur à aller de l'avant avec les poursuites. Le 30 juillet 2004, après réception d'une demande de réexamen de sa décision, le procureur général a décidé de suspendre les poursuites, en application de l'article 579.1 du Code criminel.

[10]            Le demandeur sollicite maintenant un contrôle judiciaire pour faire annuler la suspension imposée par le procureur général et être autorisé à aller de l'avant avec une poursuite privée, ou pour faire renvoyer l'affaire au procureur général pour nouvelle décision.

LA DÉCISION DU PROCUREUR GÉNÉRAL

[11]            Dans une lettre datée du 8 juin 2004, le procureur général écrivait que, selon lui, après évaluation de la preuve et prise en considération de l'intérêt public à ce que les poursuites suivent leur cours, il ne serait pas opportun de les continuer.

[12]            On a fait observer à l'audience que la lettre du 8 juin 2004 avait été signée par M. Adams, qui représentait le procureur général. Le même M. Adams a présenté dans la présente affaire les conclusions écrites et orales.

[13]            On se trouve devant la situation particulière où le décideur défend lui-même sa décision devant la Cour. Même si aucun manquement n'est allégué, la Cour juge que cela est inapproprié. Un décideur ou un tribunal administratif n'est pas autorisé en fait à défendre sa décision dans une procédure de contrôle judiciaire. Le fait que le décideur soit le procureur général pourrait être vu comme exceptionnel; néanmoins, je ne crois pas que la personne qui a signé la décision en son nom devrait être autorisée à présenter des conclusions écrites ou orales.

Le pont de la rivière St. Lewis

[14]            S'agissant du pont de la rivière St. Lewis, l'accusation se rapportait à une infraction à l'article 26 (obstruction d'un chenal principal), mais non à l'article 35 (destruction de l'habitat du poisson). Le procureur général est d'avis que, pour ce qui concerne l'accusation portée en vertu de l'article 26, un accès suffisant serait préservé pour les poissons migrateurs dans cette rivière, et que, par conséquent, la poursuite devrait être suspendue en ce qui concerne le pont de la rivière St. Lewis.

Le pont de la rivière Paradise

[15]            S'agissant du pont de la rivière Paradise, l'accusation se rapportait à une infraction à l'article 26 (obstruction d'un chenal principal) ainsi qu'à une infraction à l'article 35 (destruction de l'habitat du poisson). Le procureur général est d'avis que, en ce qui concerne l'accusation portée en application de l'article 35, la construction permanente avait été autorisée en vertu du paragraphe 35(2), et la destruction de l'habitat du poisson pouvait donc se faire dans la mesure où le préjudice était minimisé et dans la mesure où était conclue une entente de restauration de l'habitat du poisson. La poursuite devrait donc être suspendue en ce qui concerne le pont de la rivière Paradise.

[16]            Le procureur général a considéré la preuve ainsi que l'intérêt public à ce que les poursuites suivent leur cours et, selon lui, il ne serait pas opportun d'aller de l'avant avec telles poursuites.

LES POINTS LITIGIEUX

[17]            1. Le procureur général avait-il une obligation de consultation et d'accommodement compte tenu de l'existence des droits ancestraux de la demanderesse et de l'article 35 de la Loi constitutionnelle, de l'Accord sur la gestion des pêches et/ou des attentes légitimes de la demanderesse?

2. Si le procureur général n'avait pas cette obligation de consultation et d'accommodement envers la NML, alors a-t-il exercé convenablement son pouvoir discrétionnaire lorsqu'il a décidé de suspendre les poursuites?

ANALYSE

  1. Le procureur général avait-il une obligation de consultation et d'accommodement compte tenu de l'existence de droits ancestraux de la demanderesse et de l'article 35 de la Loi constitutionnelle, de l'Accord sur la gestion des pêches et/ou des attentes légitimes de la demanderesse?

[18]            Je commencerai mon analyse en rejetant la prétention des demandeurs selon laquelle le procureur général avait l'obligation de les consulter en raison d'attentes légitimes. Invoquant un prolongement des règles de justice naturelle et d'équité procédurale, la demanderesse soutient que la NML pouvait légitimement s'attendre à être consultée par le procureur général avant qu'il ne décide de suspendre les poursuites. Toutefois, comme le disait la Cour suprême du Canada dans l'arrêt R. c. Beare, [1988] 2 R.C.S. 387, au paragraphe 51, le simple exercice du pouvoir discrétionnaire conféré au procureur général ne porte pas atteinte aux principes de justice naturelle :

L'existence d'un pouvoir discrétionnaire conféré par ces dispositions législatives ne porte pas atteinte, à mon avis, aux principes de justice fondamentale. Le pouvoir discrétionnaire est une caractéristique essentielle de la justice criminelle. Un système qui tenterait d'éliminer tout pouvoir discrétionnaire serait trop complexe et rigide pour fonctionner. Les forces policières exercent nécessairement un pouvoir discrétionnaire quand elles décident de porter des accusations, de procéder à une arrestation et aux fouilles et perquisitions qui en découlent, tout comme la poursuite quand elle décide de retirer une accusation, de demander une suspension, de consentir à un ajournement, de procéder par voie d'acte d'accusation plutôt que par voie de déclaration sommaire de culpabilité, de former appel, etc.

Le Code criminel ne donne aucune directive sur l'exercice du pouvoir discrétionnaire dans aucun de ces cas. L'application de la loi et le fonctionnement de la justice criminelle n'en dépendent pas moins, quotidiennement, de l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire.

Cette Cour a déjà reconnu que le pouvoir discrétionnaire de la poursuite ne porte pas atteinte aux principes de justice fondamentale, voir R. c. Lyons, précité, à la p. 348, voir aussi R. c. Jones, [1986] 2 R.C.S. 284, aux pp. 303 et 304.

[19]            S'agissant de la prétention selon laquelle l'Accord de gestion des pêches [traduction] « non seulement rend compte du principe de l'honneur de la Couronne, [mais] établit aussi, expressément ou implicitement, une obligation quasi contractuelle pour la Couronne de "conférer et coopérer" avec les garde-pêche autochtones de la NML pour ce qui concerne la gestion des pêches et en particulier l'application de la Loi sur les pêches » (paragraphe 68 de l'exposé des faits et du droit du demandeur), il m'est impossible de voir comment les dispositions de cette entente pourraient être interprétées comme obligeant le procureur général à engager des consultations avant d'exercer son pouvoir discrétionnaire de poursuivre ou de ne pas poursuivre. D'ailleurs, si l'entente pouvait être interprétée de la sorte, elle serait carrément viciée, puisque cela reviendrait à dire que le procureur général délègue implicitement un pouvoir discrétionnaire dont lui seul est investi.

[20]            Troisièmement, bien que le demandeur invoque les récents arrêts de la Cour suprême du Canada dans les affaires Nation Haida c. Colombie-Britannique (Ministre des Forêts), [2004] 3 R.C.S. 511 et Première nation Tlingit de Taku River c. Colombie-Britannique, [2004] 3 R.C.S. 550, pour affirmer que la Couronne a l'obligation de les consulter, je n'estime pas que ces arrêts soient applicables lorsque le procureur général exerce son pouvoir discrétionnaire de suspendre ou non des poursuites pénales.

[21]            Le principe de l'honneur de la Couronne ne saurait être interprété d'une manière étroite ou technique, et il doit recevoir pleine application si l'on veut promouvoir le processus de réconciliation imposé par le paragraphe 35(1) de la Loi constitutionnelle de 1982, mais il n'en reste pas moins que le contexte de cette obligation n'englobe pas absolument tout. Au contraire, comme l'expliquait la juge en chef McLachlin au paragraphe 25 de l'arrêt Taku River, précité :

Comme il a été expliqué dans Haïda, les obligations requises pour que soit respecté le principe de l'honneur de la Couronne varient selon les circonstances. La Couronne peut être tenue de consulter les peuples autochtones et de trouver des accommodements aux préoccupations de ceux-ci avant de prendre des décisions : R. c. Sparrow, [1990] 1 R.C.S. 1075, page 1119; R c. Nikal, [1996] 1 R.C.S. 1013; R. c. Gladstone, [1996] 2 R.C.S. 723; Delgamuukw c. Colombie-Britannique, [1997] 3 R.C.S. 1010, paragraphe 168. [...] L'obligation de consulter naît lorsqu'un représentant de la Couronne a connaissance, concrètement ou par imputation, de l'existence potentielle d'un titre ou de droits ancestraux et envisage des mesures susceptibles d'avoir un effet préjudiciable sur ces droits ou ce titre. Cette obligation pourrait également obliger le gouvernement à modifier ses plans ou politiques afin de trouver des accommodements aux préoccupations des Autochtones.

[22]            Je ne suis pas persuadé que la décision du procureur général de ne pas aller de l'avant avec une accusation criminelle d'obstruction d'un chenal principal et de destruction de l'habitat du poisson constitue une conduite susceptible d'avoir un effet préjudiciable sur les droits ancestraux ou le titre ancestral de la NML. Plus précisément, la juge en chef McLachlin dit que l'effet préjudiciable possible pourrait conduire à une obligation pour le gouvernement de modifier ses plans ou politiques afin de répondre aux préoccupations des Autochtones. Dans le cas du pouvoir discrétionnaire de poursuivre ou de ne pas poursuivre l'auteur d'une infraction, je crois que rien ni personne ne devrait être en mesure d'exercer des pressions afin d'infléchir d'un côté ou de l'autre la décision du procureur général. Autoriser de telles pressions aurait pour effet de miner l'indépendance du procureur général.

[23]            Comme l'écrivait la Cour suprême dans l'arrêt R. c. Power, [1994] 1 R.C.S. 601, [1994] A.C.S. no 29, au paragraphe 31 :

Aux pages 18 et 19, elle [Donna C. Morgan, dans « Controlling Prosecutorial Powers -- Judicial Review, Abuse of Process and Section 7 of The Charter » (1986-87), 29 Crim. L.Q. 15] ajoute, sur l'indépendance de la poursuite :

[TRADUCTION] Le statut supérieur de la charge du procureur général ne vient pas sans attentes considérables quant à l'exercice de ses fonctions. Investi d'une grande confiance constitutionnelle, il assume la lourde tâche de se conduire avec dignité et équité. Dans bon nombre de cas, il est décrit comme agissant soit judiciairement soit quasi judiciairement. Lorsqu'il exerce son pouvoir discrétionnaire « solennel » en matière de poursuites, il doit tenir compte non seulement de la situation de l'individu, mais également de l'intérêt de la société. Ce faisant, il se retrouve seul, agissant indépendamment des influences politiques ou autres influences extérieures. Il ne doit ni recevoir des ordres ni être restreint, sauf par son obligation ultime de rendre compte au législateur. [Non souligné dans l'original.]

[24]            Le pouvoir discrétionnaire dont est investi le procureur général est d'une importance primordiale pour la bonne application de la loi. Si le procureur général était tenu de consulter tel ou tel groupe avant de prendre la décision d'engager ou non des poursuites, il y aurait alors certainement lieu de s'interroger sur son indépendance. Ainsi que l'expliquait le juge en chef Fauteux, tel était alors son titre, dans l'arrêt Smythe c. La Reine, [1971] R.C.S. 680, à la page 686 :

De toute évidence, la façon dont le Procureur général alors en fonction exerce le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par le législateur peut être mise en question ou censurée par le corps législatif auquel il répond, mais encore une fois, cela n'a aucun rapport avec la détermination de la question à l'examen. Il serait impossible, particulièrement en matière criminelle, d'appliquer la loi si un certain pouvoir discrétionnaire n'était dévolu à une personne ayant autorité.

[25]            Voir aussi les observations faites par la Cour d'appel de l'Ontario dans l'arrêt R. v. Saikaly, [1979] O.J. no 94, au paragraphe 17 :

[TRADUCTION]

Si le procureur général devait accorder une audience à quiconque est susceptible d'être concerné chaque fois qu'il se propose d'exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré de par sa charge, alors l'administration de la justice pénale serait paralysée.

[26]            L'obligation de consulter est une obligation que la Couronne ne doit pas prendre à la légère lorsqu'elle prend des décisions susceptibles de porter atteinte à des droits ou titres autochtones, mais je n'estime pas que cette obligation s'applique au pouvoir du procureur général lorsqu'il décide s'il convient ou non d'exercer son droit de suspendre des poursuites. Par conséquent, dans la présente affaire, le procureur général n'a pas commis d'erreur en ne consultant pas officiellement la NML avant de suspendre les poursuites privées engagées par le demandeur.

  1. Si le procureur général n'avait pas cette obligation de consultation et d'accommodement envers la NML, alors a-t-il exercé convenablement son pouvoir discrétionnaire lorsqu'il a décidé de suspendre les poursuites?

[27]            Le pouvoir discrétionnaire conféré au procureur général de décider unilatéralement, et selon son appréciation exclusive, tout point se rapportant à des poursuites pénales est un pouvoir dont le procureur général n'est comptable qu'au Parlement et non à une cour de justice. Ce principe trouve ses racines dans une jurisprudence très ancienne, ainsi qu'en fait foi la décision Winn c. Canada (Procureur général), [1994] A.C.F. no 1280, au paragraphe 28 :

En réponse à tout cela, l'avocat de l'intimé rappelle qu'il appartient traditionnellement au Procureur général de décider, de lui-même et en vertu de son pouvoir discrétionnaire exclusif, de l'opportunité des poursuites criminelles. En cela, le Procureur général n'est comptable qu'au Parlement et non pas à l'ordre judiciaire. Ce principe est ancien puisqu'on le trouve dans Ex parte Newton, [1885] 119 E.R. 323; The Queen, on the Prosecution of Gregory v. Allen, [1962] 121 E.R. 929; et London City Council v. Attorney General, [1902] A.C. 165 (H.L.).

[28]            L'indépendance du procureur général a été confirmée à maintes reprises dans la jurisprudence récente, et en particulier dans un arrêt de la Cour suprême du Canada, Krieger c. Law Society of Alberta, [2002] 3 R.C.S. 372, aux paragraphes 30 et 31 :

Dans notre pays, un principe constitutionnel veut que le procureur général agisse indépendamment de toute considération partisane lorsqu'il supervise les décisions d'un procureur du ministère public. Voir, à l'appui de ce point de vue : Commission de réforme du droit du Canada, Document de travail 62, Poursuites pénales : les pouvoirs du procureur général et des procureurs de la Couronne. Ottawa : la Commission, 1990, p. 9-11. Voir également le juge Binnie (dissident sur un autre point) dans l'arrêt R. c. Regan, [2002] 1 R.C.S. 297, 2002 CSC 12, par. 157-158.

Cet aspect de l'indépendance du procureur général se reflète également dans le principe selon lequel les tribunaux n'interviennent pas dans la façon dont celui-ci exerce son pouvoir exécutif, comme l'illustre le processus décisionnel en matière de poursuites. Dans l'arrêt R. c. Power, [1994] 1 R.C.S. 601, madame le juge L'Heureux-Dubé précise, aux p. 621-623 :

Il est évident qu'en principe et en règle générale, les tribunaux ne devraient pas s'immiscer dans le pouvoir discrétionnaire de la poursuite. Cela paraît clairement aller de pair avec le respect du partage des pouvoirs et de la primauté du droit. Aux termes de la théorie du partage des pouvoirs, le droit criminel relève du pouvoir exécutif...

[29]            Par ailleurs, pour ce qui concerne la demande de contrôle judiciaire d'une décision de ne pas engager de poursuites, la jurisprudence où est exprimé l'avis selon lequel une telle décision « se prête particulièrement mal au contrôle judiciaire » est d'une constance remarquable. (Voir l'arrêt R. c. T. (V.), [1992] 1 R.C.S. 749, au paragraphe 18; voir aussi l'arrêt Smythe c. La Reine, précité; l'arrêt R. c. Lyons, [1987] 2 R.C.S. 309 et l'arrêt R. c. Regan, [2002] 1 R.C.S. 297; Re. Balderstone and The Queen (1983), 4 D.L.R. (4th) 162).)

[30]            Plus exactement, dans l'arrêt R. c. Power, précité, la juge L'Heureux-Dubé, s'exprimant au nom des juges majoritaires, écrivait aux paragraphes 34 et 35 :

Il ressort clairement de la jurisprudence que les tribunaux sont extrêmement réticents à intervenir dans le pouvoir discrétionnaire de la poursuite. Ils agissent ainsi par principe, compte tenu du partage des pouvoirs, de l'efficacité du système de justice criminelle et du fait que le pouvoir discrétionnaire de la poursuite se prête particulièrement mal au contrôle judiciaire.

Dans l'arrêt Re Balderstone and The Queen (1983), 8 C.C.C. (3d) 532 (C.A. Man.) (autorisation de pourvoi refusée par la Cour suprême du Canada le 15 décembre 1983, [1983] 2 R.C.S. v), le juge en chef Monnin écrivait, à la page 539 :

[TRADUCTION] Le judiciaire et l'exécutif ne doivent pas se mêler. Il s'agit de deux fonctions séparées et distinctes. Les agents d'accusation déposent des dénonciations ou, dans certains cas, des actes d'accusation. Les tribunaux entendent les affaires qui leur sont déférées et statuent sur celles-ci quant au fond ou aux questions préliminaires valables. Si un juge tente d'examiner les actions ou le comportement du procureur général, -- sauf en cas de conduite répréhensible flagrante -- il se peut qu'il outrepasse sa compétence et empêche le procureur général ou ses représentants d'exercer leur fonction administrative et accusatoire, ce qu'un juge ne doit pas faire. [Non souligné dans l'original.]

[31]            Le raisonnement à l'origine de cette hésitation des tribunaux, saisis de demandes de contrôle judiciaire, à intervenir dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire d'engager des poursuites est bien résumé au paragraphe 37 de ce même arrêt :

Dans l'arrêt R. c. T. (V.), [1992] 1 R.C.S. 749, à la p. 761, notre Cour a commenté les motifs qui justifient cette retenue envers le pouvoir discrétionnaire de la poursuite :

Il est important de comprendre la raison de cette retenue judiciaire envers le pouvoir discrétionnaire du poursuivant. À cet égard, les motifs du vicomte Dilhorne dans l'arrêt Director of Public Prosecutions c. Humphrys, [1976] 2 All E.R. 497 (H.L.), à la p. 511, sont instructifs :

[TRADUCTION] Un juge ne doit pas descendre dans l'arène. Il ne doit avoir ni sembler avoir aucune responsabilité dans l'institution d'une poursuite. Les rôles du ministère public et des juges doivent être nettement délimités. Si un juge a le pouvoir de refuser d'entendre une affaire parce qu'à son avis, elle n'aurait pas dû être engagée, on en viendra vite à penser que les affaires dont il autorise la poursuite sont entamées avec son consentement ou son approbation. [Souligné dans l'original.]

Soulignons également les commentaires du juge Powell dans l'arrêt Wayte c. United States, 470 U.S. 598 (1985). Bien que les faits soient ici fondamentalement différents de ceux dont le tribunal américain était saisi (poursuite sélective des contrevenants à une loi exigeant l'enrôlement dans le cadre d'un programme de « Selective Service » ), la mise en garde qu'adresse le juge Powell, aux pp. 607 et 608, concernant la compétence institutionnelle des tribunaux mérite d'être reprise :

[TRADUCTION] Ce large pouvoir discrétionnaire repose en grande partie sur la reconnaissance que la décision d'instituer des poursuites se prête particulièrement mal au contrôle judiciaire. Des facteurs tels la valeur de la preuve, l'effet de dissuasion de la poursuite, les priorités du gouvernement en matière d'application de la loi et la place que tient l'affaire dans l'ensemble des mesures prises à cet effet, ne peuvent faire aisément l'objet du genre d'analyse relevant de la compétence des tribunaux. De plus, la surveillance judiciaire dans ce domaine engendre des coûts systémiques préoccupants. Examiner le fondement d'une poursuite en retarde le cheminement, menace de paralyser l'application de la loi en soumettant le processus et les motifs des décisions du poursuivant à une enquête extérieure et risque d'en saper l'efficacité en révélant la politique du gouvernement en matière d'application de la loi. Ce sont toutes là des questions importantes qui expliquent la réticence des tribunaux à soumettre à l'examen la décision d'instituer une poursuite. [Souligné dans l'original.]

[32]            La Cour suprême du Canada semble toutefois avoir admis que le pouvoir discrétionnaire du procureur général en matière de poursuites puisse faire l'objet d'un contrôle dans les cas de conduite répréhensible flagrante ou de poursuites abusives. Dans l'arrêt Krieger c. Law Society of Alberta, précité, au paragraphe 49, il est affirmé que :

Dans l'arrêt Campbell c. Attorney-General of Ontario (1987), 35 C.C.C. (3d) 480 (C.A. Ont.), la cour a statué que la décision du procureur général d'arrêter les procédures ne ferait l'objet d'un examen que dans les cas de [TRADUCTION] « conduite répréhensible flagrante » . Voir également Power, précité; Procureur général du Québec c. Chartrand, [1987] R.J.Q. 1732 (C.A.). Quant à l'essentiel du pouvoir discrétionnaire en matière de poursuites, les tribunaux ne peuvent intervenir que dans les cas de conduite répréhensible flagrante ou d'actions pour « poursuites abusives » : Nelles, précité. Dans tous ces cas, le procureur général aura accompli des actes non protégés par le principe constitutionnel applicable à sa charge, et la retenue ne sera plus justifiée.

[33]            Toutefois, après examen de la décision du procureur général dans l'affaire dont je suis saisi, je n'y trouve aucun indice de conduite répréhensible flagrante qui puisse conduire la Cour à exercer son pouvoir de contrôle judiciaire et à annuler la décision de suspendre les poursuites.

[34]            Selon la partie V du Guide du Service fédéral des poursuites - La décision de poursuivre, le procureur général doit tenir compte de deux aspects lorsqu'il décide s'il convient ou non d'engager des poursuites. D'abord, la preuve suffit-elle à justifier le lancement ou la continuation de procédures? Deuxièmement, dans l'affirmative, l'intérêt public requiert-il que des poursuites soient engagées? Je suis d'avis que, dans sa décision, le procureur général a fait exactement cela, en affirmant que, pour ce qui concerne le pont de la rivière St. Lewis, la preuve révélait qu'un accès suffisant serait préservé pour les poissons migrateurs. Pour ce qui concerne le pont de la rivière Paradise, le procureur général a indiqué que la construction du pont permanent avait été autorisée en application du paragraphe 35(2) de la Loi et que, par conséquent, la détérioration de l'habitat du poisson ne constituait pas une infraction aux termes du paragraphe 35(1).

[35]            Finalement, le procureur général précise dans sa décision que, après examen des critères de suffisance de la preuve et des impératifs d'intérêt public, il avait estimé qu'il serait inopportun d'aller de l'avant avec les poursuites.

[36]            Au vu de la preuve qui m'a été présentée, la demanderesse n'a pas prouvé en quoi l'une quelconque des mesures susmentionnées du procureur général pourrait être vue comme une mesure relevant de la catégorie des conduites répréhensibles flagrantes.

[37]            Même s'il m'est impossible de constater des abus dans la conduite du procureur général, certaines irrégularités avaient été recensées dans la méthode suivie par les parties, irrégularités qui ont conduit au lancement de la présente procédure : la manière dont les ponts étaient installés, l'enrochement posé dans le lit de la rivière et l'étroitesse excessive du nouveau chenal ainsi créé, pour n'en nommer que quelques-unes.

[38]            Les exemples ci-dessus montrent clairement que les parties concernées par la construction de la route et de ses ponts n'observaient pas les plans initiaux, et il semble qu'elles agissaient en contravention de certaines dispositions de la Loi sur les pêches.

[39]            Néanmoins, comme il s'agit ici d'une procédure de contrôle judiciaire, la Cour n'a pas eu accès à toute la preuve et à tous les éléments qu'il faudrait prendre en compte pour arriver à une telle conclusion.

[40]            Le point que devait décider la Cour n'était pas celui de savoir si la construction d'un pont et d'une levée sur la rivière St. Lewis, ou la construction d'un pont sur la rivière Paradise, a été exécutée dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à l'époque, mais plutôt celui de savoir si le procureur général a convenablement exercé son pouvoir discrétionnaire lorsqu'il a décidé de suspendre les poursuites.

[41]            Je suis donc d'avis que le procureur général n'avait pas l'obligation de consulter la NML avant d'exercer son pouvoir discrétionnaire de suspendre les accusations, et aussi que son pouvoir discrétionnaire n'a pas été exercé d'une manière qui puisse être considérée comme une conduite répréhensible flagrante. La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

[42]            Vu les circonstances particulières de cette affaire, je suis d'avis qu'il ne devrait pas être adjugé de dépens.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

-            La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

                        -            Il n'est pas adjugé de dépens.

« Pierre Blais »

Juge

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


TEXTES LÉGISLATIFS APPLICABLES

Loi sur les pêches(L.R.C. 1985, ch. F-14)

Ouverture permanente du chenal principal

26. (1) Un tiers de la largeur des cours d'eau et au moins les deux tiers à marée basse de la largeur du chenal principal des courants de marée doivent toujours être laissés libres; il est interdit d'y employer ou d'y placer des filets ou autres engins de pêche, des grumes de bois ou des matériaux de quelque nature que ce soit.

(...)

Main channel not to be obstructed

26. (1) One-third of the width of any river or stream and not less than two-thirds of the width of the main channel at low tide in every tidal stream shall be always left open, and no kind of net or other fishing apparatus, logs or any material of any kind shall be used or placed therein.

(...)

Détérioration de l'habitat du poisson, etc.

35. (1) Il est interdit d'exploiter des ouvrages ou entreprises entraînant la détérioration, la destruction ou la perturbation de l'habitat du poisson.

Harmful alteration, etc., of fish habitat

35. (1) No person shall carry on any work or undertaking that results in the harmful alteration, disruption or destruction of fish habitat.

Exception

(2) Le paragraphe (1) ne s'applique pas aux personnes qui détériorent, détruisent ou perturbent l'habitat du poisson avec des moyens ou dans des circonstances autorisés par le ministre ou conformes aux règlements pris par le gouverneur en conseil en application de la présente loi.

Alteration, etc., authorized

(2) No person contravenes subsection (1) by causing the alteration, disruption or destruction of fish habitat by any means or under any conditions authorized by the Minister or under regulations made by the Governor in Council under this Act.

Code criminel(L.R.C. 1985, ch. C-46)

Renvoi en cas de poursuites privées

507.1 (1) Le juge de paix qui reçoit une dénonciation faite en vertu de l'article 504, autre que celle visée au paragraphe 507(1), la renvoie devant un juge de la cour provinciale ou, au Québec, devant un juge de la Cour du Québec, ou devant un juge de paix désigné, afin qu'il soit décidé si l'accusé devra comparaître à cet égard.

Referral when private prosecution

507.1 (1) A justice who receives an information laid under section 504, other than an information referred to in subsection 507(1), shall refer it to a provincial court judge or, in Quebec, a judge of the Court of Quebec, or to a designated justice, to consider whether to compel the appearance of the accused on the information.

Sommation ou mandat d'arrestation

(2) Lorsqu'il estime qu'on a démontré qu'il est justifié de le faire, le juge ou le juge de paix désigné à qui une dénonciation est renvoyée en vertu du paragraphe (1) décerne une sommation ou un mandat d'arrestation pour obliger l'accusé à comparaître devant un juge de paix pour répondre à l'inculpation.

Summons or warrant

(2) A judge or designated justice to whom an information is referred under subsection (1) and who considers that a case for doing so is made out shall issue either a summons or warrant for the arrest of the accused to compel him or her to attend before a justice to answer to a charge of the offence charged in the information.

Conditions

(3) Le juge ou le juge de paix désigné ne peut décerner une sommation ou un mandat d'arrestation que si les conditions suivantes sont remplies :

Conditions for issuance

(3) The judge or designated justice may issue a summons or warrant only if he or she

a) il a entendu et examiné les allégations du dénonciateur et les dépositions des témoins;

(a) has heard and considered the allegations of the informant and the evidence of witnesses;

b) il est convaincu que le procureur général a reçu copie de la dénonciation;

(b) is satisfied that the Attorney General has received a copy of the information;

c) il est convaincu que le procureur général a été avisé, en temps utile, de la tenue de l'audience au titre de l'alinéa a);

(c) is satisfied that the Attorney General has received reasonable notice of the hearing under paragraph (a); and

d) le procureur général a eu la possibilité d'assister à l'audience, de procéder à des contre-interrogatoires, d'appeler des témoins et de présenter tout élément de preuve pertinent.

(d) has given the Attorney General an opportunity to attend the hearing under paragraph (a) and to cross-examine and call witnesses and to present any relevant evidence at the hearing.

Droit du procureur général

(4) Le procureur général peut assister à l'audience sans être réputé intervenir dans la procédure.

Appearance of Attorney General

(4) The Attorney General may appear at the hearing held under paragraph (3)(a) without being deemed to intervene in the proceeding.

Présomption

(5) S'il ne décerne pas de sommation ou de mandat au titre du paragraphe (2), le juge ou le juge de paix désigné vise la dénonciation et y appose une mention à cet effet. À moins que le dénonciateur n'intente, dans les six mois suivant l'apposition du visa, un recours en vue de contraindre le juge ou le juge de paix désigné à décerner une sommation ou un mandat, la dénonciation est réputée ne pas avoir été faite.

Information deemed not to have been laid

(5) If the judge or designated justice does not issue a summons or warrant under subsection (2), he or she shall endorse the information with a statement to that effect. Unless the informant, not later than six months after the endorsement, commences proceedings to compel the judge or designated justice to issue a summons or warrant, the information is deemed never to have been laid.

Présomption

(6) Si des procédures sont intentées au titre du paragraphe (5) et qu'un mandat ou une sommation n'est pas décerné, la dénonciation est réputée ne pas avoir été faite.

Information deemed not to have been laid -- proceedings commenced

(6) If proceedings are commenced under subsection (5) and a summons or warrant is not issued as a result of those proceedings, the information is deemed never to have been laid.

Nouvelle audience

(7) S'il y a refus de décerner une sommation ou un mandat à la suite d'une audience tenue au titre de l'alinéa (3)a), il ne peut être tenu d'audience relativement à la même infraction ou une infraction incluse que si de nouveaux éléments de preuve appuient la dénonciation en cause.

New evidence required for new hearing

(7) If a hearing in respect of an offence has been held under paragraph (3)(a) and the judge or designated justice has not issued a summons or a warrant, no other hearings may be held under that paragraph with respect to the offence or an included offence unless there is new evidence in support of the allegation in respect of which the hearing is sought to be held.

Application des paragraphes 507(2) à (8)

(8) Les paragraphes 507(2) à (8) s'appliquent aux procédures visées au présent article.

Subsections 507(2) to (8) to apply

(8) Subsections 507(2) to (8) apply to proceedings under this section.

Non-application -- dénonciations au titre des articles 810 et 810.1

(9) Les paragraphes (1) à (8) ne s'appliquent pas à la dénonciation déposée au titre des articles 810 ou 810.1.

Non-application -- informations laid under sections 810 and 810.1

(9) Subsections (1) to (8) do not apply in respect of an information laid under section 810 or 810.1.

Juge de paix désigné

(10) Au présent article, « juge de paix désigné » s'entend d'un juge de paix désigné par le juge en chef de la cour provinciale qui a compétence et, au Québec, d'un juge de paix désigné par le juge en chef de la Cour du Québec.

Definition of "designated justice"

(10) In this section, "designated justice" means a justice designated for the purpose by the chief judge of the provincial court having jurisdiction in the matter or, in Quebec, a justice designated by the chief judge of the Court of Quebec.

Le procureur général peut ordonner un arrêt des procédures

579. (1) Le procureur général ou le procureur mandaté par lui à cette fin peut, à tout moment après le début des procédures à l'égard d'un prévenu ou d'un défendeur et avant jugement, ordonner au greffier ou à tout autre fonctionnaire compétent du tribunal de mentionner au dossier que les procédures sont arrêtées sur son ordre et cette mention doit être faite séance tenante; dès lors, les procédures sont suspendues en conséquence et tout engagement y relatif est annulé.

Attorney General may direct stay

579. (1) The Attorney General or counsel instructed by him for that purpose may, at any time after any proceedings in relation to an accused or a defendant are commenced and before judgment, direct the clerk or other proper officer of the court to make an entry on the record that the proceedings are stayed by his direction, and such entry shall be made forthwith thereafter, whereupon the proceedings shall be stayed accordingly and any recognizance relating to the proceedings is vacated.

Reprise des procédures

(2) Les procédures arrêtées conformément au paragraphe (1) peuvent être reprises sans nouvelle dénonciation ou sans nouvel acte d'accusation, selon le cas, par le procureur général ou le procureur mandaté par lui à cette fin en donnant avis de la reprise au greffier du tribunal où les procédures ont été arrêtées; cependant lorsqu'un tel avis n'est pas donné dans l'année qui suit l'arrêt des procédures ou avant l'expiration du délai dans lequel les procédures auraient pu être engagées, si ce délai expire le premier, les procédures sont réputées n'avoir jamais été engagées.

Recommencement of proceedings

(2) Proceedings stayed in accordance with subsection (1) may be recommenced, without laying a new information or preferring a new indictment, as the case may be, by the Attorney General or counsel instructed by him for that purpose giving notice of the recommencement to the clerk of the court in which the stay of the proceedings was entered, but where no such notice is given within one year after the entry of the stay of proceedings, or before the expiration of the time within which the proceedings could have been commenced, whichever is the earlier, the proceedings shall be deemed never to have been commenced.

Non-arrêt des procédures par le procureur général

579.01 S'il intervient dans des procédures et ne les fait pas arrêter en vertu de l'article 579, le procureur général peut, sans pour autant assumer la conduite des procédures, appeler des témoins, les interroger et contre-interroger ou présenter des éléments de preuve et des observations.

When Attorney General does not stay proceedings

579.01 If the Attorney General intervenes in proceedings and does not stay them under section 579, he or she may, without conducting the proceedings, call witnesses, examine and cross-examine witnesses, present evidence and make submissions.

Intervention du procureur général du Canada

579.1 (1) Le procureur général du Canada ou le procureur mandaté par lui à cette fin peut, si les circonstances suivantes sont réunies, intervenir dans toute procédure :

Intervention by Attorney General of Canada

579.1 (1) The Attorney General of Canada or counsel instructed by him or her for that purpose may intervene in proceedings in the following circumstances:

a) concernant une contravention à une loi fédérale autre que la présente loi ou à ses règlements d'application, une tentative ou un complot en vue d'y contrevenir ou le fait de conseiller une telle contravention;

(a) the proceedings are in respect of a contravention of, a conspiracy or attempt to contravene or counselling the contravention of an Act of Parliament or a regulation made under that Act, other than this Act or a regulation made under this Act;

b) qui n'a pas été engagée par un procureur général;

(b) the proceedings have not been instituted by an Attorney General;

c) où le jugement n'a pas été rendu;

(c) judgment has not been rendered; and

d) à l'égard de laquelle n'est pas intervenu le procureur général de la province où les procédures sont engagées.

(d) the Attorney General of the province in which the proceedings are taken has not intervened.

Application de l'article 579

(2) L'article 579 s'applique, avec les adaptations nécessaires, aux procédures dans lesquelles le procureur général du Canada intervient en vertu du présent article.

Section 579 to apply

(2) Section 579 applies, with such modifications as the circumstances require, to proceedings in which the Attorney General of Canada intervenes pursuant to this section.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                  T-1281-04

INTITULÉ :                                                 LA NATION MÉTISSE DU LABRADOR ET CARTER RUSSEL

                                                                     c.

                                                                     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                           ST. JOHN (TERRE-NEUVE-ET-LABRADOR)

DATE DE L'AUDIENCE :                         LE 21 JUIN 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :            LE JUGE BLAIS

DATE DES MOTIFS

ET DE L'ORDONNANCE :                       LE 8 JUILLET 2005

COMPARUTIONS:

Robert Wright et                                                                        POUR LES DEMANDEURS

Justin Duncan

Paul Adams                                                                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Sierra Legal Defence Fund                                                         POUR LES DEMANDEURS

Toronto (Ontario)

John H. Sims, c.r.                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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