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Date : 19980917


Dossier : IMM-4491-97

Entre :

     MANYEMBWA THADD NTAGARA

     Demandeur

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

     Défendeur

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE NADON :

[1]      Le demandeur cherche à faire annuler la décision rendue par la Section du statut de réfugié de la Commission de l"immigration et du statut de réfugié (la "Section") le 5 septembre 1997. La Section a conclu que le demandeur n"était pas un réfugié au sens de la Convention, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l"immigration, L.R. 1985, c. I-2.

[2]      Le demandeur est citoyen du Zaïre et membre de la tribu des Tutsis. Il allègue avoir une crainte bien fondée de persécution dans la république démocratique du Congo-Zaïre en raison de sa race ou de son origine ethnique et de ses opinions politiques. Spécifiquement, le demandeur allègue que s"il devait retourner dans son pays, il serait persécuté par de simples citoyens zaïrois parce qu"il est Tutsi et parce que l"homme qui occupe sa propriété à Kinshasa aurait répandu des rumeurs selon lesquelles le demandeur était Mobutiste.

[3]      L"homme qui occupe la propriété du demandeur serait un ami du demandeur, général sous le régime Mobutu. Il semble que le général serait maintenant associé au régime Kabila qui détient présentement le pouvoir et qu"il travaille dans le domaine de la sécurité.

[4]      La crainte du demandeur résultant des rumeurs répandues à son sujet par le général résulte d"information qu"il aurait reçu d"une femme qu"il connaît dans la région d"Ottawa et qui vivait auparavant au Zaïre. Cette femme aurait été voisine du demandeur à Kinshasa. Elle aurait obtenu l"information à Brazzaville de personnes qui traversaient le Congo. La Section a rejeté cette preuve au motif qu"il s"agissait d"information de "troisième ou de quatrième main au mieux". La Section a déclaré que le demandeur n"avait fait aucun effort pour "confirmer cette information de façon indépendante". Je ne vois aucune erreur de la part de la Section en concluant comme elle l"a fait sur ce point.

[5]      Quant à la crainte du demandeur d"être persécuté parce qu"il est Tutsi, la Section a conclu qu"il n"existait aucun risque de persécution pour le demandeur s"il retournait vivre à Kinshasa. Voici comment s"exprime la Section sur ce point:

     En qualité de Tutsi, il se peut que le demandeur ait eu raison de craindre la colère de simples citoyens à Kinshasa au début de 1996; il est donc compréhensible qu"il ait choisi de ne pas y retourner quand il a quitté l"Afrique du Sud après avoir été débouté d"une demande de statut permanent dans ce pays. La situation s"est radicalement transformée toutefois après la mi-mai 1997, quand les forces commandées par Laurent Kabila ont renversé le président Mobutu et détruit son régime. Les preuves dont nous sommes saisis établissent que le régime Kabila a beaucoup de contacts avec les Tutsis tant à l"intérieur qu"à l"extérieur de la RDC-Z et que les Tutsis l"ont aidé à prendre le pouvoir et à le conserver. Certains vont même jusqu"à prétendre que les leaders tutsis au Rwanda ont une influence indue sur le gouvernement Kabila. Il n"y a donc pas d"animosité dirigée par l"État contre les Tutsis à Kinshasa. En outre, d"après une réponse à une demande de renseignements, il n"y a pas d"information au sujet de problèmes que pourraient avoir les Tutsis à Kinshasa aux mains du public en général. Étant donné le nombre élevé d"observateurs internationaux qui peuvent nous informer, si les Tutsis avaient des problèmes à Kinshasa simplement parce qu"ils sont tutsis, ils l"auraient certainement noté. Nous estimons donc que la crainte de persécution du demandeur à Kinshasa parce qu"il est tutsi n"est pas fondée.

[6]      Après avoir noté qu"il existait un danger pour les Tutsis à Kinshasa en 1996, la Section, n"ayant rien trouvé dans la documentation qui démontrait l"existence d"un tel danger en septembre 1997, a conclu que la crainte du requérant sous ce chef n"était pas fondée. La documentation au dossier démontre qu"il y avait des problèmes pour les Tutsis à Kinshasa en novembre 1996. Par ailleurs, pour ce qui en est de septembre 1997, la documentation est silencieuse. Elle ne démontre aucunement que les Tutsis sont persécutés, ou risquent d"être persécutés, par la population.

[7]      La Section devait évaluer la crainte de persécution du requérant à la date de l"audition qui a eu lieu le 5 septembre 1997. À mon avis, eu égard à la preuve, la conclusion de la Section n"est pas déraisonnable.

[8]      Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

Ottawa (Ontario)      "MARC NADON"

Le17 septembre 1998      JUGE

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