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Date : 20011217

Dossier : IMM-5295-01

Référence neutre : 2001 CFPI 1394

ENTRE :

                                                             JUAN RAUL HERRERA

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                                   et

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE SIMPSON

[1]                 Dans la présente requête, entendue le jeudi 22 novembre 2001 à 13 h 00, on demandait à la Cour de surseoir à une expulsion prévue pour le lundi 26 novembre à 9 h 30. Une ordonnance accordant un court sursis a été rendue le 23 novembre 2001. J'exposerai les motifs de cette ordonnance dans les lignes qui suivent.

[2]                 Le demandeur, son épouse et leurs trois garçons, âgés de 21, 13 et 11 ans, viennent de Lima au Pérou. Le demandeur a travaillé comme policier au Pérou de 1976 à 1994 et, en raison de son emploi, on a jugé qu'il s'était rendu complice de crimes contre l'humanité au sens de l'alinéa 1Fa) de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés. Pour ce motif, la Section du statut de réfugié (la SSR) a conclu que, même s'il risquait d'être persécuté au Pérou par le Sentier lumineux et le Tupac Amaru, il n'était pas admissible au statut de réfugié. Le demandeur a présenté une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de la SSR, mais sa demande a été rejetée parce qu'elle n'a jamais été mise en état. Les autres membres de la famille du demandeur ont obtenu le statut de réfugié.

[3]                 Bien que sa décision soit datée du 9 novembre 2000, la SSR avait terminé ses audiences et reçu toutes les observations ultérieures du demandeur à la fin de 1999. En conséquence, la décision de la SSR quant au risque de persécution du demandeur s'appuyait sur des renseignements disponibles en 1999.

[4]                 En janvier 2000, le demandeur a présenté une demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire. Elle comportait des observations exhaustives sur les risques que le demandeur courait au Pérou. Bien qu'elle ait été présentée dans les délais prévus, cette demande n'a pas encore été tranchée et il n'y a aucun élément de preuve relativement à la question de savoir quand on peut s'attendre à ce qu'une décision soit rendue.

[5]                 Il n'y avait aucune exigence légale selon laquelle il devait y avoir une évaluation du risque relativement à l'expulsion du demandeur. Cependant, l'agent chargé du renvoi du demandeur a apparemment demandé une telle évaluation et celle-ci a été effectuée. Il convient de noter que l'agente chargée de l'évaluation du risque avait devant elle des renseignements dont avait été saisie la SSR et, en plus, elle disposait de renseignements plus actuels (dont ne disposait pas la SSR). Elle était également saisie des observations qu'avait présentées le demandeur à l'appui de sa demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire. Compte tenu de ces documents, elle a conclu que le demandeur n'était pas en danger (l'évaluation).

[6]                 L'évaluation a été présentée au demandeur et à son avocat lors d'une réunion le 15 novembre 2001; ceux-ci ont alors exprimé leur désaccord avec la conclusion tirée. Le lendemain, la demande du demandeur pour qu'on diffère son expulsion a été refusée. Le demandeur a soutenu que seule une évaluation du risque effectuée dans le cadre d'une demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire pouvait satisfaire à l'exigence établie dans Farhadi c. Canada, [2000] A.C.F. 646, (2000), 257 N.R. 158, selon laquelle il faut au préalable qu'une évaluation du risque soit effectuée conformément aux principes de justice naturelle. Il a également prétendu que, conformément aux principes de justice fondamentale, il fallait qu'on lui donne la possibilité d'examiner et de commenter l'évaluation, et il a affirmé que son expulsion constituerait un préjudice irréparable si les droits que lui garantissent l'article 7 de la Charte n'étaient pas respectés.


Conclusions

[7]         À mon avis, si on suppose que le demandeur avait le droit à une évaluation du risque, rien dans les circonstances de l'espèce ne justifie son observation selon laquelle cette évaluation pouvait uniquement être effectuée dans le cadre de l'examen de sa demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire.

[8]         Compte tenu de l'urgence de la présente affaire, je n'ai tiré aucune conclusion sur la question de savoir si les droits du demandeur comprenaient celui de commenter l'évaluation. Cependant, le demandeur croyait que l'agente chargée de l'évaluation du risque pouvait ne pas avoir tenu compte de certains faits énoncés dans les documents dont elle était saisie ou qu'elle pouvait ne pas avoir accordé suffisamment d'importance à ceux-ci. Dans ces circonstances, l'octroi d'un court sursis a donné au demandeur la possibilité de soumettre ses observations écrites sur l'évaluation. Le sursis pouvait être court parce que le demandeur et son avocat ont reçu l'évaluation le 15 novembre 2001.

[9]         En conséquence, on a rendu une ordonnance de sursis de façon à permettre au demandeur et à son avocat de présenter des observations écrites sur l'évaluation. Ils devaient le faire avant 16 h le mardi 27 novembre 2001.


[10]       L'ordonnance prévoyait que l'agente chargée de l'évaluation du risque devait avoir examiné les commentaires au plus tard à midi le vendredi 30 novembre 2001. Si elle changeait d'avis quant au risque, il fallait surseoir au renvoi du demandeur en attendant qu'il soit statué sur sa demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire. Si elle ne changeait pas d'avis, on pouvait procéder au renvoi du demandeur le samedi 1er décembre 2001.

« Sandra J. SIMPSON »

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 17 décembre 2001

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

NO DU GREFFE :                                IMM-5295-01

INTITULÉ :                                          JUAN RAUL HERRERA c. MCI

REQUÊTE JUGÉE PAR TÉLÉCONFÉRENCE ENTRE OTTAWA ET TORONTO

DATE DE L'AUDIENCE :                Le 22 novembre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MADAME LE JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS :                       Le 17 décembre 2001

  

COMPARUTIONS :

M. Ronald Poulton                                                                         POUR LE DEMANDEUR

Mme Kareena Wilding                                                     POUR LE DÉFENDEUR

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mamann & Associates                                                     POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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