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Date : 20020717

Dossier : IMM-1169-01

Référence neutre : 2002 CFPI 796

ENTRE :

                                                                 MUHAMMAD ALI

                                                                                                                                                      demandeur

                                                                                   et

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE HENEGHAN

INTRODUCTION

[1]                 M. Mohammad Ali (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision que la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rendue le 1er mars 2001. Dans sa décision, la Commission a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention.

  

LES FAITS

[2]         Le demandeur est un citoyen du Pakistan qui a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention au Canada du fait de ses opinions politiques et de son appartenance à un groupe social, savoir la Fédération des étudiants du Pakistan (la FÉP) et le Parti du peuple pakistanais (le PPP). Il prétend avoir été harcelé, menacé et blessé par des membres de la Ligue musulmane. Il soutient également qu'il a été arrêté, détenu et battu par la police et que des accusations ont été portées contre lui après qu'il eut participé à une grève à l'échelle nationale en septembre 1999.

[3]         Le demandeur a quitté le Pakistan le 25 septembre 1999 et il est arrivé au Canada le 7 octobre 1999. Il a revendiqué le statut de réfugié environ un mois après son arrivée au Canada. Sa revendication a été entendue par un tribunal composé d'un seul commissaire le 6 décembre 2000.

[4]         La Commission a exprimé de sérieuses réserves au sujet de la crédibilité du demandeur. Ces réserves portaient notamment sur un paquet de documents, adressé au demandeur, qui a été saisie par Douanes Canada. Le paquet a apparemment été envoyé au demandeur par son père. Il contenait un certain nombre de documents, y compris des cartes de membre non remplies de la FÉP et du PPP, du papier à en-tête du PPP, du papier à en-tête d'un député provincial apparemment signé par lui, des clichés du demandeur et de sa famille, des feuilles blanches, une lettre d'un avocat, des documents intitulés [TRADUCTION] « Délinquant reconnu » ( « Proclaimed Offender » ) et « Ordonnance de détention » , et une liste de dates dans laquelle on faisait référence à des employés du PPP.


[5]         La Commission a conclu que l'explication fournie par le demandeur au sujet des documents était insuffisante. Elle a conclu que le demandeur avait l'intention de compléter les documents laissés en blanc et de les utiliser à l'appui de sa revendication du statut de réfugié.

[6]         La Commission a conclu que rien dans le témoignage du demandeur au sujet de ses activités au sein du PPP n'était crédible ou digne de foi. Elle a conclu en bout de ligne que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention et qu'il n'y avait aucun fondement crédible ou digne de foi lui permettant de conclure le contraire.

LES OBSERVATIONS DU DEMANDEUR

[7]         Le demandeur soutient que la Commission a commis une erreur de droit en interprétant mal la preuve et en tirant des conclusions de fait sans tenir compte de la preuve. Il soutient que la Commission a mal apprécié la preuve.

[8]         Le demandeur affirme que la Commission a commis une erreur lorsqu'elle a tiré des conclusions défavorables quant à sa crédibilité en se fondant uniquement sur les documents saisis par Douanes Canada, et ce, alors qu'il n'y avait aucune contradiction interne dans le reste de la preuve.

   

[9]         Le demandeur soutient que la Commission n'a pas tenu compte de l'ensemble de la preuve parce qu'elle n'a pas jugé crédible la preuve documentaire dont elle était saisie.

LES OBSERVATIONS DU DÉFENDEUR

[10]       Le défendeur prétend que la Commission a tenu compte de l'ensemble des éléments de preuve dont elle était saisie, mais qu'elle a conclu que ceux-ci n'étaient pas dignes de foi à la lumière du paquet de documents laissés en blanc envoyé au demandeur par sa famille.

[11]       Le défendeur prétend également que le tribunal peut tirer des conclusions défavorables quant à la crédibilité dans la mesure où il a des raisons valables de le faire et où il exprime ses motifs en termes clairs et explicites, et que rien ne justifie l'intervention de la Cour.

LA QUESTION LITIGIEUSE

[12]       La seule question soulevée en l'espèce est de savoir si la Commission a commis une erreur en ne tenant pas compte de l'ensemble des éléments de preuve dont elle était saisie ou en rendant une décision fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait.

L'ANALYSE


[13]       À mon avis, un examen du dossier en l'espèce, et notamment de la transcription de l'audition du demandeur par la Commission, montre que cette dernière a tenu compte des éléments de preuve dont elle était saisie. Le fondement de sa décision est la conclusion défavorable tirée quant à la crédibilité du demandeur.

[14]       Les conclusions sur la crédibilité relèvent clairement du mandat de la Commission; voir Hilo c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 130 N.R., à la page 236 (C.A.F.).

[15]       La Commission n'a pas tenu compte du témoignage du demandeur, et notamment de la preuve documentaire qu'il a soumise, en raison de sa conclusion selon laquelle les documents saisis avaient été envoyés au demandeur dans le seul but d'appuyer sa revendication du statut de réfugié au sens de la Convention. Autrement dit, la Commission a conclu que le demandeur avait l'intention de se fonder sur les documents interceptés pour établir le bien-fondé de sa revendication du statut de réfugié qui autrement n'aurait aucun fondement.

[16]       Le demandeur soutient que la Commission, par erreur, n'a pas tenu compte de l'ensemble de la preuve. Il prétend que certains éléments de preuve documentaire étaient crédibles et appuyaient sa revendication, et que la Commission aurait dû en tenir compte dans sa décision.


[17]       La conclusion que la Commission a tirée en application du paragraphe 69.1 (9.1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, et ses modifications, selon laquelle la revendication du demandeur n'avait pas un minimum de fondement, est liée à une conclusion générale quant à la crédibilité, mais comme elle a une incidence sur la possibilité du demandeur de rester au Canada avant l'exécution de la mesure de renvoi dont il est frappé, la Cour a conclu que le recours au paragraphe 69.1 (9.1) exige de la Commission qu'elle examine l'ensemble des éléments de preuve dont elle est saisie. À cet égard, le demandeur invoque la décision Foyet c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001), 187 F.T.R. 181.

[18]       À mon avis, la Commission a tenu compte de l'ensemble des éléments de preuve après avoir d'abord tiré une conclusion sur la crédibilité du demandeur tel qu'il ressort de l'extrait suivant :            

Le tribunal estime qu'aucun des éléments de preuve du revendicateur concernant ses activités au sein du PPP, ou liés à l'existence des fausses poursuites intentées contre lui, n'est crédible ou digne de foi, particulièrement s'il est tenu compte du fait que les documents provenant de M. Haider se trouvaient dans la même enveloppe que les documents vierges destinés à l'utilisation que le revendicateur voulait en faire.

Le tribunal estime aussi que des documents additionnels ont été fournis par M. Usman Haider; toutefois, compte tenu des conclusions susmentionnées, le tribunal n'accorde aucune valeur à ces documents ou à d'autres documents présentés par la suite par le revendicateur, et n'accorde aucune valeur à quelque document reçu de quelque manière que ce soit pour étayer la revendication avant ou après la saisie.

Dossier du tribunal, à la page 6.

[19]       Rien ne permet à la Cour d'intervenir relativement à la décision de la Commission. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[20]       Il n'y a pas de question à certifier.


                                           ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Il n'y pas de question à certifier.                                                                                                       

« E. Heneghan »

Juge

OTTAWA (Ontario)

Le 17 juillet 2002

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


                                   COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                               IMM-1169-01

INTITULÉ :                              Muhammad Ali c. MCI

                                                         

LIEU DE L'AUDIENCE :      Calgary (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :    Le jeudi 11 juillet 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MADAME LE JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :           Le 17 juillet 2002

COMPARUTIONS :

M. Birjinder Mangat                                                                       POUR LE DEMANDEUR

Mme Kerry Franklin                                                                       POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Birjinder Mangat                                                                       POUR LE DEMANDEUR

Calgary (Alberta)

Morris Rosenberg                                                                           POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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