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Date : 20200123


Dossier : IMM‑2787‑19

Référence : 2020 CF 117

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 23 janvier 2020

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

HONGWU XIAO

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur le paragraphe 72(1) de Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], et visant la décision du 11 avril 2019 [la décision] par laquelle la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada [la SAI] a confirmé la mesure de renvoi prise contre le demandeur le 4 octobre 2018 par la Section de l’Immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada [la SI].

II.  CONTEXTE

[2]  Le demandeur, un citoyen chinois, est marié depuis 2005 et a trois enfants. L’aînée, Yi Jia, qui a 12 ans, est arrivée au Canada lorsqu’elle avait un an. Les deux enfants plus jeunes sont nés au Canada. Les enfants vivent actuellement avec leur mère à Vancouver, tandis que le demandeur vit à Guangzhou (Chine) où il travaille pour la Jurjong Company.

[3]  Le demandeur a obtenu son droit d’établissement en 2005. En 2007, il a parrainé avec succès la demande de résidence permanente au Canada de son épouse et de sa fille. Dans le cadre de cette demande, il a déposé un formulaire d’évaluation du parrainage dans lequel il avait fait une présentation erronée quant au fait qu’il travaillait pour New Can Consultants Limited au Canada comme directeur du marketing. Cette information était inexacte, mais la demande a quand même abouti à la délivrance, en janvier 2008, de visas de résidents permanents pour son épouse et sa fille.

[4]  En 2011, le demandeur a perdu son statut de résident permanent parce qu’il n’avait pas respecté l’obligation de résidence. Il n’a pas interjeté appel de cette décision. Cependant, il est redevenu résident permanent le 25 février 2012 au titre de la catégorie du regroupement familial, après avoir été parrainé par son épouse qui a déposé pour lui une demande de résidence permanente.

[5]  À son arrivée à l’aéroport international de Vancouver le 18 janvier 2017, un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC] a fait passer au demandeur un examen secondaire. L’agent a jugé que le demandeur n’avait pas rempli, une fois de plus, son obligation de résidence. Cependant, cet agent a attendu avant de prendre des mesures d’application de la loi, étant donné que le statut de résident du demandeur allait expirer dans un mois.

[6]  Mais le 23 janvier 2017, un deuxième agent de l’ASFC a établi un rapport en vertu du paragraphe 44(1) pour fausses déclarations sur la base des renseignements fournis par le demandeur durant cette entrevue. Ce rapport se rapportait aux fausses déclarations que le demandeur avait faites dans la demande de parrainage déposée pour son épouse et sa fille en 2007. Le rapport a été confirmé ensuite lors de discussions entre le demandeur et l’agent de l’ASFC. Ce dernier a donc fixé la tenue d’une enquête qui s’est déroulée devant la SI le 4 octobre 2018.

[7]  Le demandeur a reconnu devant la SI les présentations erronées quant à sa résidence qu’il avait faites dans la demande de parrainage de son épouse et de sa fille déposée en 2007. La SI a donc conclu qu’il était interdit de territoire au Canada pour fausses déclarations aux termes de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR et a pris une mesure de renvoi. Le demandeur a interjeté appel de cette mesure devant la SAI.

III.  LA DÉCISION SOUS CONTRÔLE

[8]  La SAI a confirmé la décision de la SI et conclu que les motifs d’ordre humanitaire ne justifiaient pas la prise de mesures spéciales.

[9]  Devant la SAI, le demandeur a contesté la validité juridique de la mesure de renvoi. Il soutenait que les fausses déclarations remontant à 2007, qu’il avait reconnues, n’étaient pas pertinentes au regard de la question dont était saisi l’agent, soit celle de savoir s’il avait rempli son obligation de résidence durant la deuxième période pertinente à cet effet. De plus, le demandeur alléguait que le paragraphe 44(1) de la LIPR ne s’appliquait pas aux demandes précédentes lorsqu’un statut de résident permanent est interrompu.

[10]  La SAI a conclu, en appliquant les principes issus des décisions Li c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CF 1151 [Li (2017)] et Kazzi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 153 [Kazzi], qu’aucun délai de prescription ne s’appliquait à l’égard des conséquences découlant des fausses déclarations, lesquelles avaient, en l’espèce, entraîné une erreur dans l’application de la LIPR et permis à son épouse et à sa fille d’obtenir la résidence permanente au Canada. La SAI a donc estimé que la SI devait envisager l’interdiction de territoire sous l’angle des fausses déclarations plutôt que du manquement à l’obligation de résidence. La SAI a également conclu que le fait d’avoir perdu la résidence permanente en 2011 et de l’avoir obtenue à nouveau en 2012 grâce au parrainage de son épouse n’avait pas pour effet de soustraire le demandeur aux conséquences découlant des présentations erronées faites en 2007.

[11]  La SAI s’est ensuite attelée à évaluer l’intérêt supérieur de l’enfant [l’ISE] dans le contexte des considérations d’ordre humanitaire pour établir si elle pouvait accorder des mesures spéciales, vu les autres circonstances de l’affaire. Mais après avoir tenu compte des facteurs mentionnés dans Ribic c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1985] SAI 4 (T84‑9623) [Ribic], la SAI a déterminé que les considérations d’ordre humanitaire ne justifiaient pas de surseoir à l’exécution de la mesure de renvoi ni de faire droit à l’appel.

[12]  Après avoir analysé les facteurs Ribic, la SAI a estimé que la présentation erronée était très grave et qu’elle pesait lourdement contre l’octroi de mesures spéciales. La SAI a notablement jugé que les remords exprimés par le demandeur montraient qu’il regrettait davantage les conséquences subies par sa famille que ses actes. La SAI a également estimé que durant ses deux périodes de résidence permanente, le demandeur avait travaillé et résidé en Chine à l’exception de courtes visites rendues à sa famille au Canada. De plus, à l’exception de sa famille immédiate, la SAI a déterminé que le demandeur ne bénéficiait d’aucun soutien au sein d’une collectivité au Canada.

[13]  Quant à l’impact du renvoi sur la famille du demandeur, la SAI a conclu que la preuve ne démontrait pas l’existence de telles difficultés, étant donné que le demandeur et son épouse avaient choisi de vivre séparés géographiquement depuis 2005. De plus, le demandeur est déjà bien établi en Chine et comme il a l’intention de travailler dans ce pays au moins jusqu’à la retraite, la SAI a conclu qu’il avait démontré qu’il pouvait subvenir aux besoins de sa famille de l’extérieur du Canada. Pour les mêmes motifs, la SAI a conclu que ses enfants ne se heurteraient pas à des difficultés si le demandeur se voyait refuser l’entrée au Canada pendant cinq ans.

IV.  LES QUESTIONS EN LITIGE

[14]  Voici les questions soulevées en l’espèce :

  1. La présentation erronée reconnue par le demandeur était-elle pertinente au regard de son second statut de résident permanent, le rendant ainsi interdit de territoire au Canada?

  2. La décision était-elle raisonnable?

V.  LA NORME DE CONTRÔLE

[15]  La présente demande a été débattue avant que la Cour suprême du Canada ne rende ses décisions récentes dans les arrêts Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] et Bell Canada c Canada (Procureur général), 2019 CSC 66. La Cour a pris ce jugement en délibéré. Les observations des parties quant à la norme de contrôle s’inspiraient donc du cadre Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir]. Cependant, compte tenu des circonstances de la présente affaire et des instructions formulées par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Vavilov, au par. 144, la Cour a conclu qu’il n’était pas nécessaire de demander aux parties de fournir des observations additionnelles au sujet de la norme de contrôle. J’ai appliqué le cadre de l’arrêt Vavilov à mon examen de la demande et cet arrêt n’a pas pour effet de modifier les normes de contrôle applicables ou mes conclusions en l’espèce.

[16]  Aux paragraphes 23 à 32 de l’arrêt Vavilov, la majorité s’est efforcée de simplifier la démarche que doit entreprendre une cour de justice pour sélectionner la norme de contrôle applicable aux questions dont elle est saisie. La majorité a éliminé l’approche contextuelle et catégorielle adoptée dans l’arrêt Dunsmuir à la faveur d’une présomption d’application de la norme de la décision raisonnable. Cependant, la majorité a fait remarquer que cette présomption peut être écartée 1) lorsque le législateur prescrit clairement une autre norme de contrôle (Vavilov, aux par. 33 à 52), et 2) lorsque la règle de droit exige l’application de la norme de la décision correcte, comme à l’égard des questions constitutionnelles, des questions de droit générales d’importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et des questions liées aux délimitations des compétences respectives d’organismes administratifs (Vavilov, aux par. 53 à 64).

[17]  Le demandeur a fait valoir que la norme de contrôle applicable en l’espèce était celle de la décision raisonnable. Le défendeur a fait valoir la même chose. Je suis d’accord.

[18]  Rien ne permet de réfuter la présomption suivant laquelle c’est la norme du caractère raisonnable qui trouve à s’appliquer en l’espèce. Cette norme est également conforme à la jurisprudence de la Cour suprême du Canada antérieure à l’arrêt Vavilov : voir Sidhu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CAF 169, au par. 15, portant sur le contrôle par la Cour de l’interprétation de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR retenue par la SAI, et Momi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CAF 163, au par. 21, concernant le contrôle par la Cour de la conclusion tirée dans cette affaire par la SAI à l’égard de considérations d’ordre humanitaire.

[19]  Au moment de contrôler une décision selon la norme de la décision raisonnable, l’analyse consistera à établir si la décision « possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » (Vavilov, au par. 99). La norme de la décision raisonnable est une norme unique qui varie et « s’adapte au contexte » (Vavilov, au par. 89 citant Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au par. 59). Ces contraintes d’ordre contextuel « cernent les limites et les contours de l’espace à l’intérieur duquel le décideur peut agir, ainsi que les types de solution qu’il peut retenir » (Vavilov, au par. 90). En d’autres termes, la Cour ne doit intervenir que si la décision « souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence » (Vavilov, au par. 100). La Cour suprême du Canada énumère deux types de lacunes fondamentales qui rendent une décision déraisonnable : 1) le manque de logique interne du raisonnement; et 2) le caractère indéfendable d’une décision « compte tenu des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur [elle] » (Vavilov, au par. 101).

VI.  LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[20]  Les dispositions suivantes de la LIPR sont pertinentes à l’égard de la présente demande de contrôle judiciaire :

Fausses déclarations

Misrepresentation

40 (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

40 (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

...

...

SECTION 5

DIVISION 5

Perte de statut et renvoi

Loss of Status and Removal

Constat de l’interdiction de territoire

Report on Inadmissibility

Rapport d’interdiction de territoire

Preparation of report

44 (1) S’il estime que le résident permanent ou l’étranger qui se trouve au Canada est interdit de territoire, l’agent peut établir un rapport circonstancié, qu’il transmet au ministre.

44 (1) An officer who is of the opinion that a permanent resident or a foreign national who is in Canada is inadmissible may prepare a report setting out the relevant facts, which report shall be transmitted to the Minister.

VII.  LES ARGUMENTS

A.  Le demandeur

(1)  La conclusion de la SAI au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR est déraisonnable.

[21]  Le demandeur soutient que la SAI a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que les présentations erronées étaient pertinentes au regard de son deuxième statut de résident permanent, étant donné que, quelques années après avoir parrainé son épouse et sa fille en 2007, il avait perdu son premier statut. Par conséquent, citant Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 268, le demandeur affirme que ses présentations erronées ne relèvent pas de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR, car elles n’étaient pas importantes au regard de la question dont était saisi l’agent, soit celle de savoir s’il avait répondu aux obligations découlant de son deuxième statut de résident permanent.

[22]  De plus, le demandeur soutient que, selon la décision Ali c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 166, la SAI est tenue de motiver clairement sa conclusion portant qu’une présentation erronée alléguée est importante au regard de la question dont est saisi l’agent qui mène l’examen. De plus, le demandeur ajoute que la SAI ne considère nulle part dans sa décision qu’il avait déjà perdu son statut de résident permanent en 2011. Donc, d’après lui, l’agent a outrepassé le cadre de l’examen en considérant des faits dépourvus de pertinence qui remontaient à 2007.

[23]  Le demandeur affirme par ailleurs que la SAI a eu tort d’invoquer Li (2017), précitée. Dans cette décision, la demanderesse n’avait pas perdu son statut de résidente permanente par le passé. D’un autre côté, rien en l’espèce n’indique que le demandeur ait fait des présentations erronées liées à la question aujourd’hui en cause, qui est celle de son deuxième statut de résident obtenu en 2012.

[24]  En dernier lieu quant à cette question, le demandeur allègue que la SAI n’a cité aucune source confirmant que l’alinéa 40(1)a) de la LIPR n’est pas assujetti à des délais; la loi ne fournit pas non plus de directives en cette matière.

(2)  L’évaluation par la SAI des facteurs CH justifiant l’octroi de mesures spéciales était déraisonnable

[25]  D’après le demandeur, l’évaluation par la SAI des facteurs d’ordre humanitaire présente des lacunes, car elle est entachée par sa prise en compte des présentations erronées qu’il avait faites. Le demandeur ajoute que l’arrêt Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 [Kanthasamy], s’applique à la présente affaire et aux facteurs de l’ISE qui sont en jeu. Par conséquent, la SAI devait considérer et pondérer l’ensemble des faits et des facteurs pertinents à la lumière de la preuve. Le demandeur soutient que la SAI n’a pas tenu compte du témoignage de son épouse au sujet des conséquences auxquelles elle et les enfants se heurteraient s’il se voyait refuser l’entrée au Canada.

[26]  En outre, citant une deuxième décision intitulée Li c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CF 451 [Li (2016)], ainsi que Duong c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2001 CFPI 192, le demandeur prétend que, comme la SAI a été influencée par le poids excessif accordé aux présentations erronées, son évaluation était déraisonnable.

B.  Le défendeur

(1)  La conclusion de la SAI au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR est raisonnable.

[27]  Le défendeur soutient que l’alinéa 40(1)a) de la Loi vise à s’assurer que les demandeurs fournissent des renseignements complets et véridiques et à décourager les présentations erronées afin d’assurer l’intégrité du processus d’immigration.

[28]  Aussi, le défendeur invoque Aoun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 296, Li (2017), et Reyes c Canada (Citoyenneté et Immigration), [2013] IMM‑3859‑11, pour faire valoir que celui qui détient déjà un statut de résident permanent, mais qui fait une présentation erronée sur une demande de parrainage, commet une fausse déclaration. Par ailleurs, le libellé de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR donne à penser que le législateur n’avait pas l’intention de dispenser les répondants de leurs obligations à l’endroit du Canada. Par conséquent, le défendeur affirme que la confirmation de la mesure de renvoi par la SAI était valide.

(2)  L’évaluation des facteurs d’ordre humanitaire par la SAI était raisonnable.

[29]  Le défendeur affirme que la SAI a raisonnablement pondéré la preuve se rapportant aux présentations erronées. Il était loisible à cette dernière de décider des facteurs à prendre en considérations à l’appui de son refus d’accorder des mesures spéciales afin d’éviter de créer un précédent qui encouragerait les entrées illégales au Canada.

[30]  De plus, le défendeur prétend que l’arrêt Kanthasamy nous enseigne que les détails de chaque affaire doivent être examinés de manière contextuelle. Il fait valoir qu’il n’existe à première vue aucune présomption suivant laquelle les intérêts des enfants doivent avoir préséance et l’emporter sur les autres considérations, y compris les présentations erronées.

VIII.  ANALYSE

A.  La présentation erronée

[31]  Les arguments du demandeur portant que l’analyse de la SAI quant à la présentation erronée était déraisonnable sont résumés de façon éloquente dans ses observations écrites :

[traduction]
38.  La question qui se pose en l’espèce est de savoir si l’interprétation du tribunal suivant laquelle le ministre peut remonter dans le temps pour conclure que le demandeur est interdit de territoire est déraisonnable. Le demandeur a déjà perdu son statut de résident permanent, ce qui remplit un objectif clair de l’alinéa 40(1)a), qui est d’assurer l’intégrité du processus d’immigration. Le tribunal n’a jamais tenu compte de cela dans la décision. Le fait que le demandeur a fourni de faux renseignements dans le cadre d’une demande de parrainage en 2007 était sans importance à l’égard de la question dont était saisi l’agent qui menait l’examen. Cette question était de savoir s’il remplissait ou non l’obligation de résidence. En l’espèce, la séquence des événements et les descriptions rapportées dans la déclaration de l’agent Bajwa montrent qu’il craignait que le demandeur n’ait pas rempli son obligation de résidence. C’est là toute la raison pour laquelle il a été soumis par l’ASFC à un examen secondaire à son arrivée au Canada. Bien que le délégué du ministre ait conseillé à l’agent Bajwa d’attendre un mois jusqu’à ce que le statut de résident permanent du demandeur expire avant d’envisager des mesures d’application, un rapport a été établi en vertu de l’article 44. Ce rapport, qui découlait de l’examen effectué par l’agent Bajwa, en a toutefois dépassé l’objet en considérant des faits qui remontaient à 2007. Ainsi, les présentations erronées alléguées ne se rapportaient pas à un objet « pertinent » au regard de la question et l’interprétation de l’alinéa 40(1)a) retenue par le tribunal a essentiellement [eu] pour effet de pénaliser le demandeur, ce qui rend l’évaluation inéquitable.

40.  En l’espèce, le demandeur aurait fait une présentation erronée en 2007. Cellecsi se rapportait toutefois à son premier statut de résident permanent qu’il avait perdu en janvier 2011. Lorsque le ministre a pris des mesures d’application de la loi en annulant le statut de résident permanent du demandeur en 2011, il a choisi de le faire à l’égard de l’obligation de résidence. Il ne peut à présent prendre d’autres mesures contre le demandeur à l’égard d’un acte que ce dernier aurait commis lorsqu’il bénéficiait de son premier statut de résident permanent, qu’il a depuis perdu. Rien n’indique que le demandeur a fait une présentation erronée quant à la question aujourd’hui en cause, à savoir sa demande de résidence permanente, qu’il a obtenue en 2012.

41.  Le tribunal a par ailleurs commis une erreur lorsqu’il a conclu que l’alinéa 40(1)a) n’est assujetti à aucune limite en matière de délais et que la loi ne fournit pas non plus de directives de cet ordre aux fins de la pertinence qui doit être établie. Le tribunal n’a pas étayé cette position. Il convient d’ailleurs de noter que la Section de l’immigration a fait remarquer qu’aucune jurisprudence ne confirme la position du ministre qui consiste à prendre des mesures d’application continues à l’égard de fausses déclarations commises de longue date. Le tribunal semble pourtant écarter la jurisprudence citée par l’avocat du demandeur pour y préférer la décision Li, sans évaluer ni interpréter l’alinéa 40(1)a) et la LIPR.

[32]  Bien que le demandeur fasse remarquer que la décision Li (2017), précitée, invoquée par la SAI, puisse être écartée sur la base des faits, il m’apparaît clairement que la SAI invoque cette décision seulement pour indiquer à titre général que les répondants malhonnêtes ne devraient pas être autorisés à « éluder les obligations morales et juridiques qu’une demande de parrainage exige d’eux », parce que « cela entraînerait une grave menace pour l’intégrité du système ».

[33]  Je ne crois pas que ces remarques générales soient dépourvues de pertinence en l’espèce : en réalité, le demandeur fait valoir, certes à l’égard de faits très différents que ceux de la décision Li (2017), qu’il ne peut à présent se voir reprocher une ancienne présentation erronée grave et malhonnête, étant donné que son impact s’est dissipé et qu’elle ne peut être liée au statut de résident permanent qu’il a de nouveau acquis en 2012 grâce au parrainage de son épouse, ni à la question de savoir s’il a de nouveau perdu ce statut par manquement aux obligations de résidence.

[34]  Le lien m’apparaît assez évident. L’épouse du demandeur a pu le parrainer en 2012 uniquement parce qu’elle est devenue résidente permanente du Canada grâce aux fausses déclarations qu’il avait faites en 2007. En d’autres mots, l’obtention par le demandeur du statut de résident permanent en 2012 résultait directement de ses propres fausses déclarations. La perte de son statut de résident permanent en 2011 pour manquement à ses obligations de résidence ne signifie pas que la présentation erronée faite en 2007 n’avait plus d’impact. Il en a malgré tout personnellement tiré profit, puisque cette présentation erronée a permis à son épouse d’obtenir la résidence permanente, puis de le parrainer. Compte tenu des faits de la présente affaire, l’avantage (résidence permanente) tiré par le demandeur résultait directement de la très grave présentation erronée qu’il avait faite en 2007.

[35]  La SAI a invoqué Kazzi, précitée, simplement parce que cette décision résumait les principes généraux applicables aux présentations erronées au titre de l’alinéa 40(1)a) ainsi que la jurisprudence de la Cour qui étaye ces principes.

[36]  À mon avis, rien dans ces principes généraux ne permettrait au demandeur de dégager sa responsabilité à l’égard de la présentation erronée très grave qu’il a faite en 2007. Comme l’indiquent clairement Kazzi et les décisions allant dans le même sens, « l’évaluation de la question de savoir si une fausse déclaration aurait pu mener à une erreur dans l’application de la LIPR est réalisée au moment où est faite la représentation erronée » [non souligné dans l’original]. En l’espèce, non seulement la présentation erronée aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR, mais elle en a en plus provoqué une, puisque l’obtention par l’épouse et les enfants du demandeur de la résidence permanente découlait directement de cette présentation erronée et en plus, le demandeur a pu obtenir la résidence permanente à nouveau par l’intermédiaire de son épouse, grâce à la même présentation erronée.

[37]  Lorsqu’il a présenté une nouvelle demande de résidence permanente par l’intermédiaire de son épouse, le demandeur était encore soumis à une obligation de franchise aux termes de laquelle il devait divulguer les présentations erronées antérieures qui avaient permis à son épouse d’acquérir la résidence permanente et de le parrainer. Il n’a pas respecté cette obligation de franchise. Il s’agissait d’une présentation erronée importante qui a eu des répercussions significatives sur le processus d’immigration; accorder au demandeur l’exemption à laquelle il prétend avoir droit du fait d’événements subséquents reviendrait à récompenser une immoralité flagrante et à saper l’intégrité du système, en confortant les parties malhonnêtes qui parviennent à dissimuler leurs fausses déclarations pendant un certain nombre d’années. En d’autres mots, cela établirait clairement qu’il est possible de devenir résident permanent du Canada en racontant des mensonges sans en subir les conséquences pendant longtemps ou en tirant profit d’événements survenus entre-temps.

[38]  Le demandeur n’a pas perdu son statut de résident permanent en 2011 à cause de la présentation erronée qu’il avait faite 2007; il l’a perdu parce qu’il avait contrevenu à ses obligations de résidence. Jusqu’à la présente décision, il n’a jamais été tenu responsable d’avoir fait une présentation erronée et d’avoir fraudé le système.

[39]  Le demandeur n’a fourni aucune source à l’appui de ses divers arguments et assertions.

[40]  Le fait que le demandeur a perdu son statut de résident permanent en 2011 pour d’autres raisons ne préserve pas l’intégrité du système d’immigration. À ce moment‑là, sa présentation erronée n’avait pas été découverte et les conséquences qu’elle a provoquées n’étaient pas comprises. Le fait que le demandeur a rapidement acquis de nouveau le statut de résident permanent grâce à son épouse ne favorise pas les objectifs de l’alinéa 40(1)a) ni ne nullifie l’impact de ses présentations erronées.

[41]  Le demandeur s’appuie abondamment sur l’expression « objet pertinent » employée à l’alinéa 40(1)a) et affirme que l’objet pertinent désigne la demande en cause, ce qui renvoie en l’espèce à son statut actuel de résident permanent acquis en 2012 grâce au parrainage de son épouse.

[42]  Pour commencer, je crois que la présentation erronée faite par le demandeur en 2007 était à la fois importante et pertinente quant au fait qu’il est redevenu résident permanent en 2012, grâce au parrainage de son épouse, dont le statut de résidente permanente et le droit de le parrainer découlaient directement de sa présentation erronée. La seule raison pour laquelle son épouse a pu le parrainer en 2012 tenait au fait que le demandeur avait directement, ou indirectement par son intermédiaire, exprimé une réticence sur un fait important qui était pertinent au regard de la capacité de cette dernière de le parrainer.Cette réticence exprimée quant à un fait important a entraîné une erreur dans l’application de la LIPR, à savoir que le demandeur a pu acquérir de nouveau le statut de résident permanent par l’intermédiaire de son épouse.

[43]  Deuxièmement, je ne relève rien dans la législation ou la jurisprudence prescrivant qu’en dehors d’une demande actuellement en traitement ou présentée dans l’intervalle, le ministre qui découvre une présentation erronée ne puisse exclure le demandeur à cause des présentations erronées qu’il a faites en 2007 lors du parrainage de son épouse. Aucune limite en matière de délais n’est imposée à l’égard de l’alinéa 40(1)a) et l’appréciation de la question de savoir si une présentation erronée pouvait entraîner ou a entraîné une erreur dans l’application de la LIPR doit se replacer au moment où la fausse déclaration a été faite (voir Kazzi, précitée, au par. 38). À mon avis, cela signifie que « l’objet pertinent » était le parrainage par le demandeur de son épouse.

[44]  Le demandeur soutient que, parce qu’il a perdu son statut de résident permanent en 2011 pour manquement à ses obligations de résidence, il est maintenant à l’abri des conséquences découlant des présentations erronées de 2007. Cette position n’est à mon sens étayée ni dans la législation ni dans la jurisprudence, et si elle devait être acceptée, elle saperait considérablement l’objet et les effets de l’alinéa 40(1)a), car cela signifierait qu’une présentation erronée flagrante et tenue secrète pourrait être soustraite aux mesures appropriées par des formalités et des demandes subséquentes se rapportant au processus d’immigration.

[45]  Le demandeur affirme qu’il est injuste qu’il soit puni deux fois. Il a perdu son statut de résident permanent parce qu’il n’avait pas respecté ses obligations en matière de résidence. Ce défaut relevait de son choix, tout comme la présentation erronée qu’il avait faite en 2007. Je ne vois ni logique ni principe juridique à même d’étayer son argument portant que, parce qu’il a perdu son statut en 2011 pour avoir manqué à ses obligations de résidence, il ne devrait pas à présent faire face aux conséquences de sa présentation erronée. Différentes dispositions législatives entrent ici en jeu et elles poursuivent des objectifs différents. La présentation erronée du demandeur n’a pas été révélée plus tôt, parce qu’il l’a dissimulée et qu’il a continué de dissimuler aux autorités de l’immigration des renseignements pertinents à l’égard de son statut. Le fait qu’il a réussi à s’en tirer jusqu’à ce qu’il parraine son épouse et qu’elle le parraine n’est pas injuste. Je peux reconnaître que dans certaines situations, il est peut-être injuste que le ministre donne suite à une présentation erronée en particulier après une longue période. Mais cela dépend de la nature de cette présentation erronée, des motifs pour lesquels elle n’a pas été découverte, et des conséquences qu’il y aurait à y donner suite. Il s’agit là toutefois de considérations d’ordre humanitaire que le demandeur invoque en l’espèce. Elles ne sauraient justifier de restreindre juridiquement le pouvoir discrétionnaire du ministre d’intenter un recours relativement à une présentation erronée lorsque celle-ci est découverte après une longue période, ou suivant une autre demande ayant été présentée avant qu’elle ne soit découverte.

[46]  Le demandeur n’a fourni aucune preuve établissant que le législateur s’oppose à ce que ceux qui ont perdu le statut de résident permanent pour manquement aux obligations de résidence n’aient pas à subir ensuite les conséquences de présentations erronées n’ayant pas été découvertes antérieurement. Une lecture claire et évidente de l’alinéa 40(1)a) dans le contexte global de la LIPR ne donne pas non plus à penser, selon moi, que ceux qui font une présentation erronée peuvent être dispensés des conséquences de celle-ci s’ils perdent entre-temps leur statut pour des raisons n’ayant aucun lien avec la fausse déclaration en question.

[47]  Aucun principe ni source juridiques ne m’amène à adopter une telle interprétation de l’alinéa 40(1)a) qui limiterait le pouvoir du ministre de la manière suggérée par le demandeur.

[48]  En outre, le demandeur n’a pas démontré qu’il existait une disposition de la LIPR, un principe juridique, ou une source de droit établissant que le ministre [TRADUCTION] « ne peut prendre d’autres mesures contre [lui] relativement à un acte qu’il a commis durant la période où il avait perdu sa première résidence permanente ». Le demandeur ne fait qu’affirmer par là qu’il n’a pas réussi à étayer ses arguments par des principes ou des sources pertinentes.

B.  L’appréciation des considérations d’ordre humanitaire

[49]  Le demandeur soutient aussi que la SAI, dans son analyse des considérations d’ordre humanitaire, s’est laissée excessivement influencer la présentation erronée, quitte à en exclure d’autres facteurs.

[50]  Une simple lecture de la décision suffit à réfuter cette affirmation. Selon la décision, la SAI a pleinement tenu compte de tous les autres facteurs en jeu, conformément à la directive formulée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy, précité, selon laquelle le décideur « doit véritablement examiner tous les faits et les facteurs pertinents portés à sa connaissance et leur accorder du poids ».

[51]  La SAI a relevé et raisonnablement examiné non seulement la présentation erronée, mais aussi les remords (ou l’absence de remords) du demandeur, la durée et le degré de son établissement au Canada, le soutien au sein de sa famille et de la collectivité, l’impact que son renvoi aurait sur sa famille au Canada, toute difficulté que causerait son renvoi et l’intérêt supérieur des enfants touchés.

[52]  La preuve indiquait clairement en l’espèce que même si le demandeur a de la famille au Canada, il vit et travaille en Chine, ce qu’il a l’intention de continuer à faire au moins jusqu’à la retraite. En fait, tout ce que sa femme a pu dire était que [TRADUCTION] « peut-être qu’il va revenir au Canada lorsqu’il prendra sa retraite » [non souligné dans l’original]. Le demandeur n’a pas témoigné lui-même; la preuve établissant qu’il reviendrait n’importe quand au Canada, ou que la perte de son statut de résident permanent ferait une grande différence dans la manière dont il vit sa vie, n’est donc pas très solide.

[53]  Il convient de garder cela à l’esprit au moment d’examiner l’analyse de l’ISE effectuée par la SAI. L’épouse du demandeur a indiqué assez clairement qu’elle et ses enfants resteraient au Canada. Il serait interdit au demandeur d’entrer au Canada pendant cinq ans, mais il a pleinement l’intention de vivre et de travailler en Chine de toute façon. Cela signifie donc que le seul changement significatif concernera ses visites annuelles au Canada. La SAI était totalement consciente de la situation, mais a estimé que « [le demandeur] pourrait maintenir le contact avec les enfants et continuer de faire partie de leur vie comme il le fait actuellement et le fait depuis plusieurs années » :

[...]  La capacité de la famille de voyager en Chine est évidente. Peu d’éléments de preuve donnent à penser que les enfants de l’appelant ne pourraient pas lui rendre visite en Chine. Peu d’éléments de preuve portent à croire que l’appelant ne pourrait pas continuer de voir les enfants ni de leur parler tous les jours par Internet. Bien que l’intérêt supérieur des enfants soit un facteur important et favorable en l’espèce, il ne l’emporte pas sur les autres facteurs.

[54]  Étant donné que le demandeur a choisi de vivre et de travailler en Chine séparé de son épouse et de ses enfants pendant la plus grande partie de l’année et que la famille peut se rendre en Chine et communiquer quotidiennement avec lui, comme ils l’ont fait par le passé, nous ne pouvons pas dire que la pondération de l’ISE par la SAI était déraisonnable. Il se pourrait que ces enfants voient moins leur père au cours des cinq prochaines années, mais je ne dispose pas d’une preuve convaincante selon laquelle cela affectera grandement leur vie, compte tenu des arrangements familiaux actuels et des projets suivant lesquels le demandeur continuera de vivre et de travailler en Chine.

[55]  À l’audition de la présente demande, le demandeur a fait valoir que la SAI n’a pas raisonnablement examiné la preuve de son épouse quant à l’impact important qu’aura sur les enfants le changement de circonstances. Le demandeur n’a lui-même fourni aucune preuve à l’audience et lorsqu’elle a été questionnée au sujet des conséquences, son épouse a fourni des réponses distinctement vagues :

[traduction]

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : D’accord. Attendez une seconde.

 

CONSEIL DU MINISTRE : Je vais m’opposer à la question, étant donné que l’appelante ne peut pas témoigner au sujet de ce que pense vraiment son époux. Elle ne peut évoquer que ce dont ils ont discuté.

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : J’écoute.

CONSEIL : Donc, si je comprends bien mon collègue, le témoin ne peut pas témoigner au sujet de ce que pense son époux, mais elle peut décrire ce dont elle et son époux ont discuté?

CONSEIL DU MINISTRE : Oui.

CONSEIL : D’accord. Laissez-moi donc reformuler cela. D’après ce que vous a dit votre époux, dans quelle mesure se sent‑il responsable de l’acte qui a abouti à ce qui est arrivé aujourd’hui?

INTERPRÈTE : Eh bien, il a beaucoup de regrets – il ne s’est jamais imaginé que cette question nous causerait autant de problèmes.

CONSEIL : D’accord. Maintenant si l’appel de M. Xiao est rejeté, s’il est débouté aujourd’hui, ce qui signifie qu’il ne pourra pas venir au Canada, même pour une visite, pendant les cinq prochaines années, à quel genre de conséquences, si tant est qu’il y en ait une, serez-vous exposés, vous et les enfants?

INTERPRÈTE : Je ne peux pas vraiment dire s’il y a un choix comment puis‑je faire ce choix? Je ne peux pas m’imaginer que les enfants ne pourront pas voir leur père, quel genre de douleur vont‑ils ressentir? À la fin de l’année, leur père passe en revue leur performance annuelle. Ils vont se demander quelles mauvaises choses leur père a faites. Eh bien, leur père est quelqu’un de très important dans l’esprit de ces trois enfants.

[...]

CONSEIL : D’accord. Maintenant, si je, laissez-moi vous poser cette question, le père des enfants ne vient à l’heure actuelle au Canada qu’environ quatre fois par année. Et puis vous et les enfants allez là‑bas lui rendre visite peut-être deux fois par année. Comment – si le père ne peut pas venir au Canada pendant cinq ans, quelle différence cela fera‑t‑il?

INTERPRÈTE : Même si le père n’y est pas, bien entendu c’est une grande différence, vous savez même s’il n’est pas toujours au Canada avec nous, mais la plupart des vacances ou les congés scolaires, nous les passons ensemble. Par exemple, cette année, il ne peut pas venir et je ne pourrai pas lui amener les enfants, je n’oserai pas prendre les enfants avec moi toute seule.

Pour les enfants nous ne pouvons pas garantir ce qui va se passer en cas d’urgence et si le père ne peut pas venir au Canada si j’ai un problème qui va s’occuper des enfants?

[...]

CONSEIL DU MINISTRE : Donc si l’appel de votre époux est rejeté, qu’avez-vous l’intention de faire?

INTERPRÈTE : Je ne peux m’imaginer ce qui va se passer. Je suis ici ça fait déjà 10 ans. Je suis – je suis très à l’aise de vivre ici. Tous les enfants grandissent ici. Je vais faire de mon mieux pour profiter de cette opportunité et faire entrer mon mari. Disons que ma fille aînée est déjà en 7e année, si nous repartons et déménageons tous en Chine et lorsqu’ils auront l’âge d’aller à l’université, à ce moment‑là, ils devront revenir ici, ce qui n’est pas juste envers eux de devoir subir un double choc culturel.

CONSEIL DU MINISTRE : Donc vous avez discuté avec votre mari de ce que vous feriez si son appel était rejeté?

INTERPRÈTE : Eh bien, je dirais que notre objectif était d’immigrer au Canada il y a 10 ans pour les enfants qui grandissaient.

COMMISSAIRE PRÉSIDENT : Madame. Veuillez répondre à la question qui vous a été posée. M. Carey s’il vous plaît, répétez la question.

CONSEIL DU MINISTRE : Bien sûr. Avez-vous discuté avec votre époux d’un plan au cas où son appel serait rejeté?

INTERPRÈTE : Nous en avons discuté, mais nous ne sommes pas arrivés à un résultat.

[56]  Compte tenu de cette preuve vague et non déterminante quant à l’impact qu’aura l’absence du demandeur du Canada pendant cinq ans, je ne peux pas dire que la SAI a négligé un aspect important de l’analyse de l’ISE.

IX.  CERTIFICATION

[57]  Les avocats conviennent qu’aucune question n’est à certifier et la Cour est d’accord.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑2787‑19

LA COUR STATUE que :

  1. La demande est rejetée;

  2. Aucune question n’est certifiée.

« James Russell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 7e jour de février 2020

Maxime Deslippes


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑2787‑19

 

INTITULÉ :

HONGWU XIAO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 DÉCEMBRE 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE Russell

 

DATE DES MOTIFS :

LE 23 JANVIER 2020

 

COMPARUTIONS :

Sumeya Mulla

 

POUR Le demandeur

 

John Loncar

 

POUR Le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Waldman and Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR Le demandeur

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR Le défendeur

 

 

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