Date : 20031028
Dossier : IMM-6232-02
Référence : 2003 CF 1252
OTTAWA (ONTARIO), LE 28 OCTOBRE 2003
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX
ENTRE :
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
appelant
et
KODEESWARAN PATHMANATHAN
intimé
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (le ministre) est le demandeur dans la présente instance en contrôle judiciaire.
[2] Il conteste une décision en date du 19 novembre 2002 par laquelle la Section d'appel de l'immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (le tribunal) a décidé, en vertu de l'alinéa 70(3)b) de l'ancienne Loi sur l'immigration (la Loi), de surseoir à certaines conditions pour une période de cinq ans à l'exécution de la mesure d'expulsion prise en vertu de la Loi contre M. Pathmanathan (l'intimé), qui est un réfugié au sens de la Convention ainsi qu'un résident permanent du Canada.
[3] Le ministre affirme que, bien qu'il était au courant des nombreuses (six) condamnations au criminel dont l'intimé avait fait l'objet entre 1996 et 2001, notamment pour vol, voies de fait, possession d'une arme à autorisation restreinte non enregistrée et menaces, le tribunal n'a pas tenu compte d'aucun de ces crimes à l'exception du dernier, viciant ainsi son examen des facteurs obligatoires relatifs à la sécurité du public et à la réadaptation lorsqu'il s'est interrogé sur l'opportunité d'accorder ou non un sursis.
[4] L'avocat du ministre cite les motifs du tribunal et affirme que les motifs en question ne renferme aucune allusion, mention ou analyse des autres déclarations de culpabilité hormis la dernière, qui a été prononcée le 23 mai 2001, date à laquelle l'intimé a été jugé coupable de mise en circulation de monnaie contrefaite et de voies de fait dans l'intention de résister à une arrestation.
[5] L'avocat du ministre a soulevé un second point. Il fait valoir que l'analyse que le tribunal a faite du degré d'intégration de l'intimé à la société canadienne était arbitraire, car le tribunal a estimé que ses antécédents judiciaires justifiaient ou expliquaient son manque d'intégration au Canada.
[6] L'avocat de l'intimé ne conteste pas l'argument du ministre suivant lequel, parmi les facteurs pertinents, le tribunal devait tenir compte de la sécurité du public et des possibilités de réadaptation de l'intimé et que, pour ce faire, il devait tenir compte de l'ensemble des antécédents judiciaires de ce dernier. Il soutient qu'il ressort des motifs du tribunal que c'est précisément ce que le tribunal a fait. Sur le second point, il affirme que le tribunal n'a pas estimé que la criminalité de l'intimé était la raison qui expliquait son manque d'intégration.
[7] Il est de jurisprudence constante qu'il ne faut pas examiner à la loupe les motifs d'un tribunal administratif. C'est la proposition qu'a formulée le juge Laskin avant de devenir juge en chef dans l'arrêt Boulis c. Ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration, [1974] R.C.S. 875, où il écrit, à la page 885 :
Il ne faut pas examiner ses motifs à la loupe, il suffit qu'ils laissent voir une compréhension des questions que l'article 15(1)b) soulève et de la preuve qui porte sur ces questions, sans mention détaillée. Le dossier est disponible pour fin de contrôle des conclusions de la Commission.
[8] Je suis d'accord avec l'avocat de l'intimé pour dire que lorsqu'on examine les motifs du présent tribunal dans leur ensemble, il appert que celui-ci a tenu compte de tous les antécédents judiciaires de M. Pathmanathan pour décider de surseoir pour cinq ans à l'exécution de la mesure d'expulsion prise contre lui.
[9] Dans sa décision, le tribunal évoque à de nombreuses reprises les « crimes » et les « antécédents » de l'intimé, le fait qu'il se tient lui-même responsable de ses « actes » , l'influence que son entourage a exercée sur les « actes criminels » qu'il a commis, les remords qu'il éprouve à l'égard de ses « actes criminels » et le fait qu'il doit se rappeler que [TRADUCTION] « toute autre condamnation au criminel ou manquement aux conditions de son sursis risque de conduire à son renvoi du Canada » .
[10] Je suis également convaincu que le tribunal a tenu compte de la sécurité du public et des possibilités de réadaptation parmi les facteurs pertinents. Le tribunal mentionne d'ailleurs explicitement la réadaptation et les faibles risques de récidive aux paragraphes 19 et 21 de ses motifs. En outre, le tribunal a conclu que l'intimé avait [TRADUCTION] « manifesté une volonté crédible de changer de vie » .
[11] Sur le second point, la déclaration contre laquelle le ministre s'insurge se trouve au paragraphe 18, dont voici un extrait :
[TRADUCTION]
[18] L'appelant [l'intimé] vit au Canada depuis l'âge de 18 ans. En raison de son âge et de ses antécédents, l'appelant montre peu d'indices d'intégration sur le plan du travail, de l'instruction et des biens qu'il possède. Il est toutefois évident qu'il a des racines dans la société canadienne [...]
[12] En faisant allusion aux « antécédents » de l'intimé au paragraphe 18 de ses motifs, le tribunal faisait, à mon avis, une affirmation de fait; il n'expliquait pas le manque d'intégration de l'intimé.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question certifiée n'a été proposée.
« François Lemieux »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-6232-02
INTITULÉ : MCI c. KODEESWARAN PATHMANATHAN
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontraio)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 22 OCTOBRE 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE LEMIEUX
DATE DES MOTIFS : LE 28 OCTOBRE 2003
COMPARUTIONS :
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POUR L'APPELANT
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POUR L'INTIMÉ |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Ministère de la Justice Toronto (Ontario) |
POUR L'APPELANT |
Toronto (Ontario) |
POUR L'INTIMÉ |