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Date : 20200130


Dossier : IMM-1089-19

Référence : 2020 CF 171

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 30 janvier 2020

En présence de madame la juge Fuhrer

ENTRE :

SAKSHI LIKHI

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  La demanderesse, Sakshi Likhi, a présenté une demande de permis de travail ouvert fondée sur le statut de son époux qui travaille au Canada. Le 18 décembre 2018, cette demande a été refusée et la demanderesse a été frappée d’interdiction de territoire pour fausses déclarations aux termes de l’alinéa 40(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, présentée aux termes du paragraphe 72(1) de la LIPR, qui vise à la fois le refus d’accorder le permis de travail et la conclusion sous‑jacente selon laquelle la demanderesse avait fait une présentation erronée.

[2]  Mme Likhi et son époux, M. Anand Sethi, sont des citoyens indiens. M. Sethi a déjà vécu à Toronto, au Canada lorsqu’il travaillait pour une entreprise connue sous le nom de Cognizant. Cognizant est présente à tout le moins en Inde, aux États‑Unis d’Amérique et au Canada; M. Sethi travaille au sein de sa filiale canadienne depuis octobre 2014, et c’était notamment le cas lorsque Mme Likhi a soumis sa demande de permis de travail.

[3]  Le mariage entre Mme Likhi et M. Sethi a été arrangé par leurs familles; à part se parler au téléphone, ils ne se sont rencontrés en personne qu’à la fête de leurs fiançailles. Le père de Mme Likhi a découvert en premier le profil de M. Sethi sur un site Web matrimonial et les a mis en contact téléphonique en mars 2018. Après un mois de discussions, M. Sethi a demandé la main de Mme Likhi en avril 2018. Il s’est rendu en Inde en juillet suivant pour le mariage.

[4]  Mme Likhi explique qu’elle et M. Sethi se sont fiancés dans une cérémonie tenue le 9 juillet 2018 à Ghaziabad en présence d’amis et de parents. Deux jours plus tard, ils ont célébré une cérémonie de mariage civil et ont enregistré leur union. M. Sethi est ensuite revenu au Canada. En novembre 2018, il est retourné en Inde pour assister à un certain nombre d’événements familiaux, notamment un autre mariage et une fête d’anniversaire. Le couple a aussi organisé la cérémonie du mariage social le 28 novembre 2018, à Ambala, et leur réception de mariage le 3 décembre suivant, à Lucknow.

[5]  En septembre 2018, plusieurs mois après la cérémonie civile, mais avant la célébration du mariage social et la réception, Cognizant a aidé Mme Likhi à présenter une demande de permis de travail ouvert de manière à ce qu’elle puisse rejoindre M. Sethi au Canada. Le 24 novembre 2018, un agent des visas du Haut‑Commissariat du Canada à New Delhi l’a contactée et lui a demandé de se présenter à une entrevue à New Delhi le 4 décembre 2018. Comme la cérémonie de mariage était prévue le 3 décembre à Lucknow, Mme Likhi a demandé si l’entrevue pouvait être remise à une autre date, mais s’est fait dire que ce n’était pas possible. Elle déclare qu’aucun renseignement particulier ne lui a été fourni quant à l’objet de l’entrevue, et qu’on lui a précisé qu’elle n’avait pas à apporter d’autres éléments de preuve, hormis les documents qu’elle avait déjà soumis dans le cadre de sa demande. La lettre d’équité procédurale qui lui a été envoyée après cet appel l’informait qu’elle devait [traduction« apporter tous les documents nécessaires […] à l’entrevue », sans préciser davantage quel en était l’objet, si ce n’est pour dire que la tenue d’une entrevue était nécessaire [traduction« pour que le traitement de [sa] demande suive son cours ».

[6]  Bien que seule Mme Likhi ait été convoquée à l’entrevue, elle et M. Sethi se sont présentés ensemble. L’agent chargé de l’entrevue a décidé de les interviewer séparément. Mme Likhi a été questionnée d’emblée au sujet de l’authenticité de son mariage. Elle déclare que l’agent chargé de l’entrevue a exigé des photographies supplémentaires pour corroborer la version des événements qu’elle lui a fournie, mais qu’il ne l’a pas autorisée à récupérer son téléphone pour qu’elle trouve les photographies en question, et qu’il ne lui a pas non plus donné la possibilité de les fournir après le fait. Tout ce dont elle disposait à l’entrevue était donc les quelques photos additionnelles prises à l’occasion de la cérémonie sociale et qu’elle avait récemment fait imprimer, au cas où ce serait utile. Durant l’entrevue de M. Sethi, l’agent chargé de l’entrevue lui a posé des questions générales au sujet de ses voyages et de ses activités en Inde.

[7]  À la fin des deux entrevues, Mme Likhi a été informée que l’agent chargé de l’entrevue avait des motifs raisonnables de croire que son mariage n’était pas authentique et qu’elle s’était mariée principalement pour être admise au Canada en tant qu’épouse. L’agent chargé de l’entrevue lui a expliqué la teneur de l’article 40 de la LIPR, y compris l’interdiction d’entrer au Canada pendant cinq ans, et a ajouté qu’une décision définitive serait rendue à l’égard de sa demande par un agent ayant davantage d’expérience [l’agent principal].

[8]  Le 18 décembre 2018, l’agent principal s’est rangé à l’avis de l’agent chargé de l’entrevue; il a ainsi refusé la demande de permis de travail de Mme Likhi et a déclaré cette dernière interdite de territoire pour fausses déclarations.

[9]  Pour les motifs qui suivent, je fais droit à la présente demande de contrôle judiciaire et renvoie l’affaire à un autre agent d’examen ou agent principal pour qu’il rende une nouvelle décision.

II.  Décision contestée

[10]  Les notes consignées au Système mondial de gestion des cas [SMGC] qui font partie de la présente décision signalent une préoccupation initiale quant à l’authenticité du mariage de Mme Likhi, en raison de la célébration nuptiale précipitée et du peu de temps écoulé depuis son mariage avec M. Sethi. De plus, les mêmes notes indiquent : [traduction« Certificat de mariage fourni (2017). Correspondance par courriel fournie mentionne « prépare‑toi pour le mariage… » en 2018. Photographies présentées ne prouvent pas l’authenticité de la relation en termes de cérémonie ». À ce titre, Mme Likhi a été invitée à une entrevue pour établir [traduction« l’authenticité de la relation ». Elle n’a été informée de ces préoccupations quant à sa relation qu’au moment de l’entrevue le 4 décembre 2018.

[11]  À cette date, l’agent chargé de l’entrevue a aussi interviewé M. Sethi, de manière inopinée et indépendante; celui-ci accompagnait Mme Likhi à son entrevue pour la soutenir. Après l’entrevue de M. Sethi, l’agent chargé de l’entrevue lui a fait part des préoccupations suivantes :

  • - Mme Likhi et M. Sethi ne se sont pas rencontrés avant la finalisation de leur mariage et Mme Likhi n’a pu fournir aucune preuve de ses contacts déclarés avec M. Sethi avant le mariage;

  • - Le nombre limité d’invités qui apparaissant sur les photographies de fiançailles et de mariage atteste que le mariage a été célébré en présence de parents seulement et non des 120 invités, comme il l’était allégué;

  • - Les photographies de mariage fournies dans le cadre de la demande et à l’entrevue ont amené l’agent à conclure que celles dépeignant la cérémonie de mariage avaient été prises après que Mme Likhi eut été informée de l’entrevue;

  • - Rien ne donnait à penser que les parties avaient passé du temps ensemble après le mariage [je note toutefois que cela a été contredit dans une certaine mesure par la présence de M. Sethi à l’entrevue] et la preuve étayant l’existence de contacts entre eux était limitée;

  • - Mme Likhi croyait que M. Sethi étudiait en vue d’obtenir sa maîtrise en administration des affaires (MBA), ce qu’a contredit ce dernier lorsqu’il a déclaré qu’il avait entamé les études en question à distance en 2010, mais qu’il les avait interrompues après avoir trouvé un emploi [avec Cognizant];

  • - Mme Likhi a déclaré que M. Sethi était venu en Inde le 15 octobre 2018, alors qu’il a indiqué être arrivé dans ce pays le 17 novembre 2018;

  • - Elle a déclaré que c’est le mariage de la fille de l’oncle maternel de M. Sethi qui était célébré en décembre 2018, et non celui de son fils, comme l’a affirmé M. Sethi;

  • - M. Sethi a indiqué que Mme Likhi n’avait pas assisté à la fête d’anniversaire de sa nièce, malgré le témoignage précédent de cette dernière à l’effet contraire, déclarant plutôt qu’elle était avec ses parents; la preuve relative aux cadeaux remis par M. Sethi à sa nièce était également contradictoire.

[12]  Compte tenu de ce qui précède, l’agent chargé de l’entrevue a conclu que le mariage n’était pas authentique et a renvoyé la demande à un agent principal. Je remarque que ce dernier a désigné à plusieurs reprises M. Sethi comme un « étudiant », malgré le fait qu’il se trouvait au Canada au titre d’un permis de travail, et qu’il a désigné Mme Likhi comme un homme lorsqu’il a tiré la conclusion quant à l’interdiction de territoire. La lettre formelle de refus de la demande de permis de travail de Mme Likhi, qui indique que son interdiction de territoire durera cinq ans, est datée du 18 décembre 2018.

III.  Questions à trancher

  1. Questions préliminaires :

  1. Les affidavits de Mme Likhi et de M. Sethi sont‑ils admissibles en preuve?

  2. La question du refus d’accorder un permis de travail à Mme Likhi est‑elle théorique?

  1. La décision était‑elle équitable sur le plan procédural?

  2. La décision était‑elle raisonnable?

IV.  Dispositions pertinentes

[13]  Les dispositions pertinentes sont reproduites en annexe A.

V.  Analyse

A.  Questions préliminaires

(1)  Les affidavits de Mme Likhi et de M. Sethi sont‑ils admissibles en preuve?

[14]  Le dossier de demande de la demanderesse en l’espèce contient l’affidavit de Sakshi Likhi daté du 22 avril 2019, tandis que l’affidavit d’Anand Sethi daté du 31 octobre 2019 a été déposé le 1er novembre 2019, après que le juge Roy eut rendu l’ordonnance du 18 septembre 2019 faisant droit à la demande d’autorisation et précisant les mesures à prendre à l’égard du contrôle judiciaire réputé entamé [l’ordonnance d’autorisation]. Je constate que le ministre (i) a consenti à une modification des délais figurant dans l’ordonnance d’autorisation si bien que les affidavits supplémentaires éventuels de la demanderesse devaient être soumis au plus tard le 1er novembre 2019 et (ii) n’a pas contesté l’admissibilité de ces affidavits.

[15]  La preuve dont ne disposait pas le décideur n’est généralement pas admissible lors du contrôle judiciaire : Association des universités et collèges du Canada c Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22 [Access Copyright], au para 19; Bernard c Canada (Agence du revenu), 2015 CAF 263, au para 17. Mais lorsque les documents permettent à la Cour de comprendre des informations contextuelles générales relatives au contrôle judiciaire, qu’ils sont pertinents au regard d’une question d’équité procédurale ou de justice naturelle, ou qu’ils font ressortir une absence totale de preuve soumise au décideur, la Cour peut faire une exception et accepter la preuve en question : Access Copyright, précité, au para 20.

[16]  Les affidavits de Mme Likhi et de M. Sethi portent tous deux sur ce qui s’est produit jusqu’à l’entrevue et pendant son déroulement, y compris les conversations qu’ils ont eues tous les deux avec l’agent chargé de l’entrevue et les instructions fournies à Mme Likhi sur ce qu’elle devait apporter en prévision de l’entrevue. Comme cette dernière affirme que l’évaluation de sa demande n’était pas équitable sur le plan procédural, j’admets les affidavits, car ils permettent à la Cour de comprendre ce qui s’est produit jusqu’à l’entrevue et pendant son déroulement, sous réserve de la mise à l’écart des parties inadmissibles énoncées ci-après. Premièrement, chaque affidavit décrit le témoignage fourni par l’auteur de l’autre affidavit durant l’entrevue. Comme ces descriptions font intervenir du ouï‑dire, les segments en question seront écartés [paragraphe 16 de l’affidavit de Mme Likhi et paragraphe 5 de l’affidavit de M. Sethi]. Deuxièmement, l’affidavit de Mme Likhi décrit au paragraphe 19 les éléments de preuve supplémentaire qui auraient pu être fournis en réponse à la lettre d’équité procédurale et aux préoccupations de l’agent chargé de l’entrevue; ces éléments de preuve sont joints à titre de pièce. Comme cette preuve additionnelle n’avait été soumise ni à l’agent chargé de l’entrevue ni à l’agent principal, et qu’elle ne faisait donc pas partie de leur décision, elle ne peut être prise en compte dans l’évaluation du caractère raisonnable de la décision en question; elle sera également écartée.

(2)  La question du refus d’accorder un permis de travail à Mme Likhi est‑elle théorique?

[17]  Le ministre fait valoir que la contestation par Mme Likhi du refus de lui délivrer un permis de travail est à présent théorique, étant donné que M. Sethi a été transféré à la filiale de Cognizant à Boston (au Massachusetts, É.‑U.). Une épouse à charge ne peut présenter une demande de permis de travail ouvert que si le travailleur étranger principal réside physiquement, ou a l’intention de résider physiquement, au Canada pendant son emploi : sous‑alinéa 205c)(ii) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 [le RIPR]. Même si M. Sethi affirme dans son affidavit qu’il [traduction« espère » être transféré de nouveau au Canada lorsque son statut actuel aux États‑Unis expirera en mars 2020, le ministre soutient que cela n’équivaut pas à un projet concret. À ce titre, la demande de permis de travail de Mme Likhi ne peut pas être réexaminée.

[18]  Je suis d’accord. Comme M. Sethi n’a actuellement aucun statut au Canada, il n’est pas admissible à agir comme demandeur principal à l’égard de la demande de permis de travail ouvert présentée par Mme Likhi à titre de personne à charge, conformément au programme d’octroi des permis de travail ouverts aux conjoints. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire de Mme Likhi est théorique à l’égard du refus de lui délivrer un visa. La seule question réelle à examiner concerne la conclusion selon laquelle la demanderesse a fait une présentation erronée, conclusion qui empêche la demanderesse de présenter une nouvelle demande pendant une période de cinq ans.

B.  La décision était‑elle équitable sur le plan procédural?

[19]  En droit administratif, les atteintes à l’équité procédurale sont considérées comme étant susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte ou sont soumises à un « exercice de révision […] “particulièrement bien reflété dans la norme de la décision correcte”, même si, à proprement parler, aucune norme de contrôle n’est appliquée » : Chemin de fer Canadien Pacifique limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 [Chemin de fer CP], au para 54 [citant Eagles Nest Youth Ranch Inc. c Corman Park (Rural Municipality #344), 2016 SKCA 20, au para 20]; voir également Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, aux para 43 et 44 [citant Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir]; Établissement de Mission c Khela, 2014 CSC 24, au para 79; Punia c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 184, au para 19. Au moment d’évaluer les atteintes alléguées à l’équité procédurale, la cour de révision se pose en fin de compte la question de savoir si le processus était équitable, et elle doit à mon sens continuer de le faire. Comme le notait par ailleurs l’arrêt Chemin de fer CP, aux para 54 et 55 :

[54]  La cour qui apprécie un argument relatif à l’équité procédurale doit se demander si la procédure était équitable eu égard à l’ensemble des circonstances, y compris à l’égard des facteurs énoncés dans l’arrêt Baker [Baker c Canada (Citoyenneté et Immigration), [1999] 2 RCS 817 [Baker], aux par. 21 à 28]. [...] elle demande, en mettant nettement l’accent sur la nature des droits substantiels concernés et les conséquences pour la personne, si un processus juste et équitable a été suivi. [...]

[55]  Tenter de caser la question de l’équité procédurale dans une analyse relative à la norme de contrôle applicable est aussi, en fin de compte, un exercice non rentable. L’examen portant sur la procédure et l’examen portant sur le fond visent différents objectifs en droit administratif. Bien qu’il y ait un chevauchement, [...] certaines questions de procédure ne se prêtent pas du tout à une analyse relative à la norme de contrôle applicable, par exemple lorsque la partialité est alléguée. [...] la distinction entre l’examen portant sur le fond, l’examen portant sur la procédure et la capacité d’un tribunal à accorder des mesures de redressement adaptées à chacun est un outil utile dans la boîte à outils judiciaire et, [...] il n’y a aucune raison convaincante pour laquelle elle devrait être abandonnée.

[20]  Le récent arrêt rendu par la Cour suprême du Canada [CSC] dans l’affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], n’a pas supplanté le principe primordial de garantie d’un processus équitable, ni les facteurs à considérer pour évaluer si un tel processus a été suivi : Vavilov, aux para 23, 76 à 81. Confirmant que l’obligation d’équité procédurale « est “éminemment variable”, intrinsèquement souple et tributaire du contexte », l’arrêt Vavilov enseigne que, lorsqu’une obligation d’équité procédurale surgit, les exigences procédurales qui en découlent sont déterminées eu égard à l’ensemble des circonstances, y compris les facteurs de l’arrêt Baker : Vavilov, précité, au para 77.

[21]  Mais en fait d’équité procédurale, toutes les décisions administratives ne nécessitent pas des motifs; lorsque des motifs sont requis ou fournis, ils constituent le point de départ du contrôle judiciaire relatif à l’équité procédurale et au caractère raisonnable. Il existe à ce titre un certain lien ou chevauchement, comme cela est noté dans l’arrêt Vavilov, précité, au paragraphe 81 : « En conséquence, la communication des motifs à l’appui d’une décision administrative est susceptible d’avoir des répercussions sur sa légitimité, à la fois au regard de l’équité procédurale et du caractère raisonnable de ceux‑ci sur le fond ». De plus, malgré une distinction apparente au paragraphe 23 entre les atteintes à la justice naturelle ou à l’obligation d’équité procédurale d’une part et le contrôle de la décision administrative sur le fond d’autre part, l’arrêt Vavilov précise ce qui suit aux paragraphes 13 et 25 :

[13]  Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable est une approche visant à faire en sorte que les cours de justice interviennent dans les affaires administratives uniquement lorsque cela est vraiment nécessaire pour préserver la légitimité, la rationalité et l’équité du processus administratif. Il tire son origine du principe de la retenue judiciaire et témoigne d’un respect envers le rôle distinct des décideurs administratifs. Toutefois, il ne s’agit pas d’une « simple formalité » ni d’un moyen visant à soustraire les décideurs administratifs à leur obligation de rendre des comptes. Ce type de contrôle demeure rigoureux.

[25]  [...] À notre avis, il y a maintenant lieu d’affirmer que chaque fois qu’une cour examine une décision administrative, elle doit partir de la présomption que la norme de contrôle applicable à l’égard de tous les aspects de cette décision est celle de la décision raisonnable. Si cette présomption vise l’interprétation de sa loi habilitante par le décideur administratif, elle s’applique aussi de façon plus générale aux autres aspects de sa décision.

[Non souligné dans l’original.]

[22]  Par ailleurs, l’arrêt Vavilov précise les circonstances dans lesquelles la présomption relative à l’applicabilité de la norme de la décision raisonnable peut être réfutée, et où la norme applicable sera celle de la décision correcte. La Cour suprême y analyse ensuite ces circonstances de manière assez détaillée : Vavilov, précité, aux para 17, 33 à 72. Malgré l’ambiguïté introduite par le texte entre parenthèses au paragraphe 23, la CSC ne mentionne pas expressément l’équité procédurale lorsqu’elle explique les circonstances dans lesquelles il convient d’appliquer la norme de la « décision correcte ». Même si elle n’a pas exclu la possibilité qu’une autre catégorie puisse appeler une dérogation à la présomption d’applicabilité de la norme de contrôle de la décision raisonnable, la CSC a jugé que « [p]our le moment, […] les présents motifs couvrent l’ensemble des situations dans lesquelles il convient que la cour de révision déroge à la présomption de contrôle selon la norme de la décision raisonnable » : Vavilov, précité, au paragraphe 69. Cela concorde avec la reformulation de la démarche propre au contrôle judiciaire, qui non seulement élimine l’« approche contextuelle » au moment de déterminer la norme de contrôle applicable, mais ferme également la porte aux questions « de compétence » comme catégorie appelant la norme de la décision correcte : Vavilov, précité, aux paragraphes 31, 65 et 69. Comme l’a souligné la CSC au paragraphe 31 :

Puisque nous retenons dans les présents motifs la présomption d’application de la norme de la décision raisonnable en tant que point de départ, nous tenons à préciser que l’expertise n’est plus pertinente pour déterminer la norme de contrôle applicable, comme c’était le cas dans l’analyse contextuelle. Nous n’enlevons toutefois pas à l’expertise la place qu’elle occupe dans le processus décisionnel administratif. Cette considération est tout simplement incorporée au nouveau point de départ et, comme nous l’expliquons plus loin, l’expertise demeure pertinente lors de l’exercice du contrôle judiciaire selon la norme de la décision raisonnable.

[23]  En fin de compte, j’estime que la question ultime concernant le processus administratif demeure la suivante : « Était‑il équitable? » Il est tentant, compte tenu de l’analyse ci-dessus concernant l’arrêt Vavilov et du traitement réservé par la CSC à l’obligation d’équité procédurale, de conclure que la norme de contrôle applicable se rapproche davantage d’une norme rigoureuse du caractère raisonnable tempérée par une certaine retenue judiciaire, à moins que le législateur n’exprime explicitement une intention contraire à cet égard [c.‑à‑d. l’une des circonstances décrites comme étant susceptible de réfuter la présomption du contrôle selon la norme du caractère raisonnable]. Dans une certaine mesure, cela concorde avec la manière dont l’obligation d’équité procédurale a été formulée dans l’arrêt Baker, précité, aux paragraphes 22 et 27 :

[…] l’obligation d’équité [est] souple et variable et […] repose sur une appréciation du contexte de la loi particulière et des droits visés. […]

[…] l’analyse des procédures requises par l’obligation d’équité devrait également prendre en considération et respecter les choix de procédure que l’organisme fait lui-même, particulièrement quand la loi laisse au décideur la possibilité de choisir ses propres procédures, ou quand l’organisme a une expertise dans le choix des procédures appropriées dans les circonstances […] Bien que, de toute évidence, cela ne soit pas déterminant, il faut accorder une grande importance au choix de procédures par l’organisme lui-même et à ses contraintes institutionnelles.

[24]  Cela dit, l’arrêt Vavilov ne formule pas clairement de norme de contrôle applicable au contrôle judiciaire de l’équité procédurale. Tout au plus peut-on affirmer que « la Cour suprême n’a pas fondu une doctrine distincte du droit administratif, à savoir le droit de l’équité procédurale, dans la norme de contrôle applicable à l’examen portant sur le fond » : Chemin de fer CP, précité, au para 52 [au sujet de l’arrêt Khela]. Cependant, il est permis de penser que les distinctions ont été brouillées au profit de l’application d’un critère rigoureux du caractère raisonnable à l’examen de l’équité procédurale, le niveau d’équité requis (élevé, tendant vers la norme de la décision correcte, ou peu élevé et situé entre les deux) dépendant alors du contexte. À mon avis, cela est parfaitement illustré par la description suivante du lien ou du chevauchement entre l’équité procédurale et les motifs dans l’arrêt Vavilov, précité, au para 127 :

Les principes de la justification et de la transparence exigent que les motifs du décideur administratif tiennent valablement compte des questions et préoccupations centrales soulevées par les parties. Le principe suivant lequel la ou les personnes visées par une décision doivent avoir la possibilité de présenter entièrement et équitablement leur position est à la base de l’obligation d’équité procédurale et trouve son origine dans le droit d’être entendu : Baker, par. 28. La notion de « motifs adaptés aux questions et préoccupations soulevées » est inextricablement liée à ce principe étant donné que les motifs sont le principal mécanisme par lequel le décideur démontre qu’il a effectivement écouté les parties.

[25]  Compte tenu de cela, je me pencherai maintenant sur l’équité du processus administratif applicable en l’espèce.

[26]  Compte tenu des graves conséquences découlant de la conclusion selon laquelle elle a fait une présentation erronée, à savoir l’inadmissibilité à présenter une demande d’entrée au Canada pendant cinq ans, Mme Likhi fait valoir qu’un degré plus strict d’équité procédurale est requis pour veiller à ce que de telles conclusions ne soient tirées que lorsque les présentations erronées sont établies par une preuve claire et convaincante : Ni c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 162 [Ni], au para 18; Lin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1284 [Lin], aux para 24 et 25; Seraj c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 38 [Seraj], au para 1; Lamsen c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 815, au para 24; Bao c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2019 CF 268, aux para 17 et 18.

[27]  Je suis d’accord. La décision de délivrer un visa temporaire suppose habituellement un degré faible ou négligeable d’équité procédurale, attendu que le demandeur ne risque pas la détention ou le renvoi et qu’il peut présenter une nouvelle demande : Bains c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2020 CF 57 [Bains], au para 56, citant Qin c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 815, au para 5, Guo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 161, au para 27, et Bautista c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 669, au para 17. Mais à mon avis, les conclusions afférentes d’avoir fait une présentation erronée au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR appellent un niveau ou un degré plus strict d’équité procédurale, car une telle conclusion empêche l’intéressé de présenter une nouvelle demande pendant cinq ans, une conséquence sévère, qui peut donc également rejaillir sur sa réputation : Ni, précitée, au para 18; Lin, précitée, au para 25; Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 273 [Kaur], au para 13. Comme cela est noté dans l’arrêt Vavilov, précité, au para 133, lorsque la décision a de graves répercussions, les motifs du décideur doivent refléter les enjeux pour l’intéressé et tenir compte de la perspective de ce dernier :

Il est bien établi que les individus ont droit à une plus grande protection procédurale lorsque la décision sous examen est susceptible d’avoir des répercussions personnelles importantes ou de leur causer un grave préjudice : Baker, par. 25. Toutefois, ce principe a également une incidence sur la manière dont une cour de justice effectue un contrôle selon la norme de la décision raisonnable. Le point de vue de la partie ou de l’individu sur lequel l’autorité est exercée est au cœur de la nécessité d’une justification adéquate. Lorsque la décision a des répercussions sévères sur les droits et intérêts de l’individu visé, les motifs fournis à ce dernier doivent refléter ces enjeux. Le principe de la justification adaptée aux questions et préoccupations soulevées veut que le décideur explique pourquoi sa décision reflète le mieux l’intention du législateur, malgré les conséquences particulièrement graves pour l’individu concerné. Cela vaut notamment pour les décisions dont les conséquences menacent la vie, la liberté, la dignité ou les moyens de subsistance d’un individu.

[Non souligné dans l’original.]

[28]  Mme Likhi soutient qu’elle n’a pas été avisée avant l’entrevue que l’agent ne jugeait pas son mariage authentique et qu’elle n’a donc pas été en mesure de s’y préparer adéquatement. Elle soutient que l’agent chargé de l’entrevue était tenu de divulguer au préalable que l’objet et la raison principale de l’entrevue seraient l’authenticité de son mariage, et non le traitement habituel de sa demande : Bin Chen c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1227 [Bin Chen], aux para 32‑35; Kaur, précitée, au para 14; Johnson c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 550, aux para 15 et 16; Bushra c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2016 CF 1412 [Bushra], aux para 9, 15, 19 et 20. Mme Likhi n’a pas eu non plus la possibilité de répondre par des observations ou des documents appropriés après l’entrevue. Elle fait valoir que l’équité procédurale exigeait à tout le moins, dans ce contexte, qu’elle ait la possibilité de fournir après l’entrevue des observations et les documents demandés avant que l’agent ne tire la conclusion selon laquelle elle a fait une présentation erronée : Mohammed c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2019 CF 326, au para 32; Shadow Lai c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 563, aux para 28 et 29.

[29]  Enfin, Mme Likhi fait valoir qu’elle ignorait avant l’entrevue les exigences liées aux documents supplémentaires, car a) la liste de documents sur laquelle elle s’est appuyée, préparée par l’employeur de M. Sethi, n’énumérait pas tous les documents susceptibles d’être pertinents; et b) la liste de contrôle des documents relatifs aux permis de travail ouverts, qui constitue le guide applicable dans son cas, ne fait pas référence aux types de documents requis pour que la preuve d’une relation soit jugée suffisante. À ce titre, elle maintient avoir initialement fourni des renseignements suffisants. Comme elle n’a pas été avisée au préalable des préoccupations de l’agent chargé de l’entrevue et de l’objet de l’entrevue, qu’elle s’est explicitement fait dire de ne pas apporter de documents supplémentaires, et qu’elle n’a pas eu la possibilité de fournir d’autres observations (notamment, de sortir son téléphone) avant que la décision ne soit rendue, elle affirme que le processus était inéquitable sur le plan procédural.

[30]  Le ministre fait valoir que, comme Mme Likhi a choisi de fonder sa demande de permis de travail ouvert sur sa relation conjugale [alléguée], elle savait raisonnablement que l’authenticité de sa relation constituerait le pilier central de sa demande. Il souligne par ailleurs que l’agent n’a pas à aviser le demandeur de ses préoccupations lorsque celles‑ci « découlent directement des exigences de la loi ou d’un règlement connexe » : Zhou c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 465, au para 28. Comme les agents sont tenus, aux termes de l’article 4 du RIPR, d’évaluer l’authenticité du mariage des demandeurs, le ministre soutient que Mme Likhi n’aurait pas dû être surprise que l’entrevue aborde ce sujet. Il ajoute avec insistance que la demande comprenait aussi une liste de contrôle des documents pertinents et nécessaires, y compris un certificat de mariage, des photographies du mariage, une invitation de mariage, et des copies de communications entre elle et M. Sethi; pour le ministre, cela indiquait clairement que de tels documents seraient pertinents, ce qui était réitéré dans la lettre d’équité.

[31]  Le ministre établit une distinction entre la présente affaire et les décisions rendues dans Bushra et Bin Chen, au motif que Mme Likhi a été informée durant l’entrevue que l’authenticité de son mariage était en cause et qu’elle a eu la possibilité de répondre. Par contre, dans les décisions Bushra et Bin Chen, les préoccupations n’ont été soulevées qu’après l’entrevue et n’ont jamais été signalées aux demandeurs. Le ministre maintient que l’obligation d’équité n’exige pas d’accorder la possibilité de dissiper les préoccupations après l’entrevue : Sar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1147, aux para 20 à 34. Compte tenu de la formation de Mme Likhi en applications informatiques [domaine dans lequel elle détient une maîtrise] et des graves préoccupations de l’agent chargé de l’entrevue au sujet de sa crédibilité, le ministre soutient que le fait de lui accorder un délai supplémentaire pour soumettre des images numériques provenant de son téléphone n’aurait pas dissipé les préoccupations de l’agent, car il est facile d’altérer une image numériquement : R c Andalib‑Goortani, 2014 ONSC 4690, aux para 23 à 33, citant la décision américaine People v Beckley, 110 Cal Rptr. (3d) 362 (Ct App 2010). À mon avis, cette dernière remarque est inappropriée et déraisonnable, en l’absence du moindre élément attestant une falsification de la preuve. Par ailleurs, ni l’agent chargé de l’entrevue ni l’agent principal n’ont déclaré avoir tenu compte de ce facteur.

[32]  Je note que la crédibilité, d’une part, et l’insuffisance de la preuve, d’autre part, sont des concepts distincts qui ne devraient pas être confondus, surtout lorsqu’un agent des visas tire une conclusion d’interdiction de territoire pour fausses déclarations : Seraj, précitée, au para 18. Une conclusion selon laquelle la preuve est insuffisante n’entraîne pas automatiquement en soi une conclusion quant à une présentation erronée. Il n’est plutôt raisonnable de tirer une telle conclusion que lorsqu’il est établi que le demandeur a présenté des renseignements incorrects ou qu’il a omis des renseignements importants, de manière intentionnelle ou accidentelle, ce qui aurait pu nuire à la capacité du Canada d’appliquer ses lois en immigration : paragraphe 40(1) de la LIPR; Muthui, précitée, au para 27.

[33]  Pour trancher la question de savoir si l’agent principal a tiré une conclusion relative à une présentation erronée à l’issue d’une démarche équitable sur le plan procédural, il est important d’élucider si ce dernier a appuyé la conclusion en question sur le fait que la preuve fournie a) était insuffisante pour attester la bonne foi du mariage, comme le prétend le ministre; ou b) n’était ni crédible, ni authentique, ni exacte, comme le fait valoir Mme Likhi. Suivant le premier motif, l’agent chargé de l’entrevue était en droit de présumer que la LIPR et le RIPR précisent la norme de preuve à respecter pour prouver la conformité aux lois canadiennes de l’immigration, et il n’était donc pas soumis à l’obligation procédurale d’alerter Mme Likhi au sujet de ses préoccupations quant aux lacunes de sa demande : Zhou, précitée, au para 28 : Bains, précitée, au para 58. Suivant le deuxième motif, l’agent chargé de l’entrevue devait porter ces préoccupations à l’attention de Mme Likhi, et lui donner la possibilité adéquate de dissiper ces préoccupations : Zhou, précitée, au para 29.

[34]  À mon avis, les conclusions de l’agent chargé de l’entrevue et de l’agent principal (qui a essentiellement souscrit à l’évaluation de l’agent) portant que Mme Likhi avait fait une présentation erronée concernant l’authenticité de son mariage reposaient sur le fait que les éléments qu’elle avait présentés, y compris les photographies de la cérémonie civile et la preuve de vive voix fournie par elle et M. Sethi, n’ont pas été jugés dignes de foi. Les notes du SMGC révèlent que les deux agents nourrissaient des préoccupations quant à la crédibilité de la preuve de Mme Likhi.

[35]  Comme les décisions des agents reposaient à première vue sur la crédibilité, ceux-ci devaient à mon avis communiquer à Mme Likhi leurs préoccupations à ce chapitre et lui donner la possibilité adéquate de répondre. Cela aurait pu se faire si l’agent chargé de l’entrevue l’avait avisée que le but général de l’entrevue était d’apprécier l’authenticité du mariage (lui donnant ainsi une possibilité adéquate de se préparer en conséquence) ou si l’agent principal lui avait ensuite donné la possibilité de déposer des observations additionnelles pour répondre aux préoccupations particulières soulevées durant son entrevue, attendu que l’agent chargé de l’entrevue avait exigé des éléments de preuve bien précis. Aucune de ces possibilités ne lui a été offerte. Si Mme Likhi avait su, en se présentant à l’entrevue, que l’agent chargé de l’entrevue nourrissait des préoccupations au sujet de l’authenticité du mariage, et non que le traitement de sa demande suivait son cours habituel, comme elle l’avait compris lors de l’appel téléphonique durant lequel la date de l’entrevue avait été fixée, elle aurait pu se préparer différemment : Bin Chen, précitée, aux para 34 et 35; Bushra, précitée, au para 20.

[36]  Je note que la mention suivante figure dans les notes du SMGC datées du 22 novembre 2018, deux jours avant que Mme Likhi ne reçoive l’appel fixant la date de l’entrevue :

[traduction]
***NE PAS DIVULGUER : […] Entrevue recommandée pour établir l’authenticité de la relation. Certificat de mariage fourni (2017). Correspondance par courriel mentionne : « prépare‑toi pour le mariage […] » en 2018. Photographies fournies ne prouvent pas l’authenticité de la relation en termes de cérémonie.

Rien n’explique pourquoi la mention [traduction« ***NE PAS DIVULGUER » a été rajoutée, et comme les notes du SMGC sont contenues dans le dossier de demande de la demanderesse et qu’elles font donc partie du dossier public de la Cour en l’espèce, je ne vois aucune raison de ne pas le signaler, d’autant plus que cette question renvoie à mon avis à l’enjeu de l’équité procédurale.

[37]  Je constate en outre que le certificat de mariage indique que celui-ci a été enregistré le 11 juillet 2018, en vertu d’un règlement officiel datant de « 2017 » [à savoir le « UTTAR PRADESH MARRIAGE REGULATION REGISTRATION, 2017 » (RÈGLEMENT DE L’UTTAR PRADESH SUR L’ENREGISTREMENT DES MARIAGES, 2017)], mais apparemment il ne s’agit pas de la date du certificat de mariage lui-même. Les notes saisies dans le SMGC ne permettent pas de savoir si la mention du [traduction« Certificat de mariage fourni (2017) » comportait une erreur typographique concernant la date et, dans le cas contraire, si et dans quelle mesure cela a pu peser sur l’évaluation de la demande de Mme Likhi par l’agent. Au vu des notes saisies dans le SMGC, personne n’a tenté, au cours de l’entretien, de clarifier ou de confirmer la date du certificat de mariage pour ce qui intéresse les cérémonies de mariage [car il y en a eu plus d’une] et la réception.

[38]  On a omis d’informer Mme Likhi avant l’entrevue des préoccupations de l’agent chargé de l’entrevue quant à l’authenticité de son mariage, mais cette omission était intentionnelle. Mme Likhi a ainsi effectivement été empêchée de présenter une preuve supplémentaire pour dissiper ces préoccupations durant l’entrevue en particulier, mais dans les circonstances, même après. À mon avis, cela rend la décision de l’agent principal manifestement inéquitable sur le plan procédural. Il s’agit là d’une erreur déterminante qui justifie qu’une nouvelle décision soit rendue quant à la demande.

[39]  Après l’audience, mais avant la présente décision, le ministre a attiré l’attention de la Cour sur la décision Bains, précitée, ce que j’ai jugé prudent, alors que ma décision en l’espèce avait été prise en délibéré; le ministre a ainsi respecté l’obligation à laquelle sont constamment soumis les avocats à l’égard de la Cour : Blake c Blake, 2019 ONSC 4062, aux para 33 et 34. J’ai toutefois informé les parties qu’elles n’étaient pas tenues de me soumettre des observations sur l’application de la décision Bains à la présente instance.

[40]  J’estime qu’un certain nombre de différences factuelles permettent de distinguer l’affaire dont était saisie la Cour dans Bains de la présente instance. Premièrement, je ferais remarquer que la demande de M. Bains a initialement été approuvée; il n’a été convoqué à une entrevue qu’après que sa demande eut été annulée en raison de préoccupations touchant à l’authenticité du mariage : Bains, précitée, au para 8. Contrairement aux circonstances en l’espèce, M. Bains connaissait la raison pour laquelle l’entrevue avait lieu et a donc eu la possibilité de se préparer. Deuxièmement, rien n’indiquait que M. Bains ait été informé, à quelque moment que ce soit, que des éléments de preuve documentaires n’étaient pas nécessaires, mais néanmoins attendus à l’entrevue, comme cela s’est produit en l’espèce. Troisièmement, M. Bains avait de la famille au Canada, ce qui faisait craindre que le mariage arrangé ait été facilité non pas pour des raisons culturelles, mais à des fins d’immigration : Bains, précitée, au para 61. Ce n’était pas le cas dans la présente affaire.

[41]  Cependant, la décision repose surtout sur le faible niveau d’équité procédurale associé aux demandes de permis de travail : Bains, précitée, au para 56, citant des décisions qui ne comportent pas d’éléments de fausses déclarations. La distinction entre le refus d’un permis de travail et une conclusion selon laquelle une présentation erronée a été faite aux termes de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR ne semble pas entrer en ligne de compte dans la décision Bains. Compte tenu des différences importantes entre ces deux affaires, je crois [comme je l’explique plus haut] qu’il convient en l’espèce d’appliquer un degré accru d’équité procédurale.

[42]  Même si j’ai conclu que ces erreurs touchant à l’équité procédurale sont déterminantes, j’examinerai maintenant le caractère raisonnable de la décision des agents par souci d’exhaustivité et pour éviter dans la mesure du possible « un va‑et‑vient interminable de contrôles judiciaires et de nouveaux examens » : Vavilov, précité, au para 142.

C.  La décision était‑elle raisonnable?

[43]  L’arrêt Vavilov rendu le 19 décembre 2019 a adopté « un cadre d’analyse révisé permettant de déterminer la norme de contrôle applicable lorsqu’une cour de justice se penche sur le fond d’une décision administrative », avec pour point de départ « la présomption [réfutable] voulant que la norme de la décision raisonnable soit la norme applicable dans tous les cas » et la formulation « d’indications plus précises […] sur l’application appropriée de la norme de contrôle de la décision raisonnable » : Vavilov, précité, aux para 10 et 11. Je juge qu’aucune des situations justifiant de réfuter la présomption de contrôle selon la norme du caractère raisonnable [résumées dans l’arrêt Vavilov, précité, aux para 17 et 69] n’est présente en l’espèce. Par ailleurs, « [l]orsqu’elle effectue un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, la cour de révision doit tenir compte du résultat de la décision administrative eu égard au raisonnement sous‑jacent à celle‑ci afin de s’assurer que la décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée » : Vavilov, précité, au para 15.

[44]  En principe, le contrôle selon la norme de la décision raisonnable fait passer les motifs avant tout : il « […] examine […] les motifs donnés avec “une attention respectueuse”, et cherche […] à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à [la] conclusion » : Vavilov, précité, au para 84. Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable doit donc mettre l’accent sur la décision, y compris le raisonnement du décideur et le résultat. La cour de révision doit uniquement se demander si la décision, eu égard au raisonnement et au résultat, était déraisonnable, et doit éviter de substituer sa propre analyse ou l’issue qu’elle estime préférable : Vavilov, précité, au para 83. Comme l’a fait remarquer la CSC, « [i]l incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère raisonnable. […] la cour de justice doit […] être convaincue que la lacune ou la déficience […] est suffisamment capitale ou importante pour rendre cette décision déraisonnable » : Vavilov, précité, au para 100.

[45]  La CSC a relevé deux types de lacunes fondamentales qu’il est utile de considérer : « [l]a première est le manque de logique interne du raisonnement »; et « [l]a seconde se présente dans le cas d’une décision indéfendable sous certains rapports compte tenu des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur la décision » : Vavilov, précité, au para 101. En d’autres mots, pour être jugée raisonnable, la décision doit être fondée sur un raisonnement à la fois rationnel et logique : Vavilov, précité, au para 102. Pour la CSC, une décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » et « […] la cour de justice [doit faire] preuve de déférence envers une telle décision » : Vavilov, précité, au para 85. Toujours selon la CSC, « il ne suffit pas que la décision soit justifiable. Dans les cas où des motifs s’imposent, le décideur doit également, au moyen de ceux‑ci, justifier sa décision […] : Vavilov, précité, au para 86 [italique dans l’original]. La décision doit présenter les caractéristiques d’une décision raisonnable – la justification, la transparence et l’intelligibilité – et se justifier à la lumière des contraintes légales et factuelles applicables dans les circonstances » : Vavilov, précité, au para 99. « [S]i des motifs sont communiqués, mais que ceux‑ci ne justifient pas la décision de manière transparente et intelligible […], la décision sera déraisonnable » : Vavilov, précité, au para 136. Cependant, les motifs écrits « ne doivent pas être jugés au regard d’une norme de perfection » : Vavilov, précité, au para 91. Il faut plutôt « les interpréter de façon globale et contextuelle. L’objectif est justement de comprendre le fondement sur lequel repose la décision » : Vavilov, précité, au para 97.

[46]  En bref, lorsqu’il s’agit d’établir si la décision contestée était déraisonnable, « le contrôle judiciaire porte à la fois sur le résultat et sur le processus », et s’intéresse au raisonnement suivi [était‑il intrinsèquement cohérent, rationnel et justifié?] compte tenu des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur était assujetti : Vavilov, précité, au para 87. Avec ce cadre et ces directives à l’esprit, je m’attellerai maintenant à analyser la décision contestée, y compris le raisonnement et le résultat. J’ajouterais que la présente affaire a été instruite lors de la semaine où l’arrêt Vavilov de la CSC a été publié. Les deux parties ont préconisé d’appliquer la norme du caractère raisonnable, telle qu’elle est formulée dans l’arrêt Dunsmuir c New Brunswick, 2008 CSC 9, et les décisions rendues entre‑temps. Cette norme continue de s’appliquer à la présente affaire, mais telle qu’elle a été reformulée dans l’arrêt Vavilov, sans que cela ne fasse de différence quant à l’issue devant la Cour.

[47]  Mme Likhi fait valoir que l’agent chargé de l’entrevue et l’agent principal ont omis de reconnaître ou d’accorder autrement de l’importance à une preuve pertinente qui contredisait leurs conclusions, ce qui constituait une erreur : Groohi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 837, au para 16; Thomas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 1038, aux para 13 et 14; Yaqoob c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1370, au para 8. Elle soutient qu’en mettant l’accent sur une courte mention dans le courriel et sur les photographies, l’agent chargé de l’entrevue a ensuite accordé « [une] importance [excessive] […] à des éléments marginaux et à des points de détail et [démontré] un manque d’attention à la preuve qui porte directement sur l’authenticité de la relation conjugale » : Tamber c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 951, au para 18. Cela a entraîné une évaluation à courte vue plutôt qu’exhaustive de sa demande. Par exemple, elle affirme que l’agent principal :

  • - n’a pas considéré son explication au sujet de la courte mention dans le courriel, ni le fait que la préoccupation initiale de l’agent chargé de l’entrevue sur ce point découlait apparemment d’une méprise quant à la date de son certificat de mariage (2017 d’après les notes du SMGC alors que le certificat mentionne la date précise du 7 novembre 2018); comme je l’ai déjà noté, cela n’a pas été abordé durant l’entrevue;

  • - a fait référence à [traduction« la vie d’étudiant au Canada » – une déclaration factuellement incorrecte; d’après Mme Likhi, cela pose la question de savoir si l’agent principal a réellement examiné tout le dossier avant de rendre une décision;

  • - n’a pas mentionné une lettre de Cognizant ni la preuve fournie par elle et attestant des communications récentes entre elle et son époux;

  • - n’a pas reconnu qu’elle a répondu correctement aux questions concernant la vie actuelle et passée de M. Sethi; elle savait par exemple qu’il s’était inscrit à un programme de MBA et a notamment pu répondre à la seule question que l’agent a posée au sujet de la vie de M. Sethi au Canada; à ce titre, elle soutient que la conclusion de l’agent portant qu’elle était incapable de décrire la vie de son époux au Canada n’est ni justifiable ni intelligible;

  • - n’a pas tenu compte du fait que Mme Likhi a seulement fourni certaines photographies bien précises du mariage, mais qu’elle a aussi offert d’en montrer d’autres, ce qu’on lui a refusé lorsqu’il a été conclu que le fait que le mariage était attesté uniquement par des photographies de la famille [traduction« n’avait aucun sens », alors que 120 invités étaient censés avoir assisté au mariage;

  • - ne s’est pas rendu compte que les photographies additionnelles fournies à l’entrevue se rapportaient au [traduction« mariage social » subséquent, comme cela a été expliqué à l’entrevue.

[48]  Mme Likhi soutient que ces erreurs, qu’elle qualifie de significatives, dépouillent la décision de transparence, d’intelligibilité et de justification, compte tenu de la preuve : Dunsmuir, précité, au para 47. Comme cela a été reformulé dans l’arrêt Vavilov, la décision doit présenter les caractéristiques d’une décision raisonnable – la justification, la transparence et l’intelligibilité – et elle doit être justifiée, pas simplement justifiable, au regard des contraintes juridiques et factuelles applicables dans les circonstances : Vavilov, précité, au para 99. Cependant, les motifs écrits « ne doivent pas être jugés au regard d’une norme de perfection » : Vavilov, précité, au para 91. Il faut plutôt « les interpréter de façon globale et contextuelle. L’objectif est justement de comprendre le fondement sur lequel repose la décision » : Vavilov, précité, au para 97.

[49]  D’après le ministre, il est bien établi en droit que les conclusions défavorables en matière de crédibilité sont rationnellement étayées en présence d’incohérences, de contradictions et d’omissions importantes et confirmées : Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1379, au para 34. Il ajoute que les conclusions de l’agent chargé de l’entrevue quant au nombre d’invités présents au mariage étaient raisonnables, étant donné que la preuve photographique soumise ne concordait pas avec les descriptions fournies. Les autres incohérences et contradictions de Mme Likhi, dont certaines concernaient des événements très récents, comme la fête d’anniversaire de sa nièce et les cadeaux remis à cette occasion, n’ont fait que renforcer les préoccupations en matière de crédibilité de l’agent chargé de l’entrevue. Par ailleurs, si l’agent principal a qualifié M. Sethi d’« étudiant » c’est en raison de la description qu’en avait faite Mme Likhi elle-même – description inexacte sur le plan factuel, puisqu’il n’avait pas fait d’études depuis plusieurs années et qu’il avait interrompu son programme de MBA, auquel Mme Likhi pensait qu’il était toujours inscrit.

[50]  À mon avis, la décision de l’agent principal était déraisonnable. Comme le fait remarquer Mme Likhi, cet agent ne mentionne aucun des éléments de preuve de vive voix qu’elle a fournis pour contrer les préoccupations en matière de crédibilité de l’agent chargé de l’entrevue. Par exemple, l’agent principal ne précise pas s’il a accepté les observations de Mme Likhi portant que plusieurs cérémonies de son mariage avaient été organisées, certaines uniquement en présence de parents et d’autres avec près de 120 invités. Les motifs doivent être adaptés aux observations : Vavilov, précité, aux para 127 et 128.

[51]  L’agent principal a également conclu que Mme Likhi n’avait pas expliqué par des réponses claires pourquoi les photographies de leur mariage ne concordaient pas avec les détails fournis. Les notes du SMGC indiquent toutefois qu’elle a initialement fourni des photographies de leur mariage civil, qu’elle a prétendu ignorer qu’elle était tenue de soumettre des photographies du mariage social et qu’elle a expliqué que les photographies qu’elle avait de ce mariage‑là ne représentaient pas tous les invités présents. L’agent principal ne s’est pas penché sur ces explications, ni n’a précisé si le refus de l’agent chargé de l’entrevue d’autoriser Mme Likhi à montrer d’autres photographies conservées dans son téléphone était raisonnable. Ce qui, à mon avis, ne l’était pas, compte tenu des préoccupations formulées.

[52]  Enfin, l’agent principal a conclu que Mme Likhi ignorait des détails de base concernant la vie de M. Sethi au Canada. Cela semble renvoyer à sa croyance erronée selon laquelle M. Sethi suivait encore son programme de MBA par correspondance (alors qu’il a attesté que ce n’était pas le cas), et qu’elle ignorait le mois de son arrivée initiale au Canada. À mon avis, il était déraisonnable que l’agent déduise que Mme Likhi ne connaissait pas la vie qu’avait menée M. Sethi au Canada sur la base de deux éléments, dont l’un lui était partiellement connu et qui était survenu avant la naissance de leur relation.

[53]  À mon avis, le fait que l’agent principal n’a pas examiné la preuve de Mme Likhi rend en soi la décision déraisonnable, sans parler du refus de l’agent chargé de l’entrevue de l’autoriser à présenter les autres photos du mariage conservées dans son téléphone, compte tenu de l’importance primordiale de l’authenticité du mariage à l’égard de la conclusion selon laquelle la demanderesse avait fait une présentation erronée.

[54]  Aucune partie n’a proposé de question grave de portée générale à certifier.

VI.  Conclusion

[55]  Il est fait droit à la présente demande de contrôle judiciaire. La décision contestée est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent principal ou agent d’examen, pour réexamen de la conclusion selon laquelle Mme Likhi avait fait une présentation erronée, après que cette dernière aura été invitée à déposer des observations supplémentaires. Mme Likhi n’a pas bénéficié d’une possibilité adéquate de répondre aux préoccupations des agents quant à l’authenticité de son mariage. L’agent principal n’a pas non plus démontré qu’il avait examiné l’ensemble de la preuve. Aucune question n’est à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑1089-19

LA COUR DÉCLARE que : la demande de contrôle judiciaire est accueillie; la décision contestée du 18 décembre 2018 est annulée; l’affaire est renvoyée à un autre agent principal pour nouvelle décision, après que Mme Likhi aura été invitée à déposer des observations supplémentaires, et il n’a aucune question à certifier.

« Janet M. Fuhrer »

Juge


Annexe A : Dispositions pertinentes

Des permis de travail ouverts peuvent être délivrés aux conjoints de travailleurs qui se trouvent déjà au Canada : sous-alinéa 205c)(ii) du RIPR.

205 Un permis de travail peut être délivré à l’étranger en vertu de l’article 200 si le travail pour lequel le permis est demandé satisfait à l’une ou l’autre des conditions suivantes :

205 A work permit may be issued under section 200 to a foreign national who intends to perform work that

c) il est désigné par le ministre comme travail pouvant être exercé par des étrangers, sur la base des critères suivants :

(c) is designated by the Minister as being work that can be performed by a foreign national on the basis of the following criteria, namely,

(ii) un accès limité au marché du travail au Canada est justifiable pour des raisons d’intérêt public en rapport avec la compétitivité des établissements universitaires ou de l’économie du Canada;

(ii) limited access to the Canadian labour market is necessary for reasons of public policy relating to the competitiveness of Canada’s academic institutions or economy; or

La relation doit être authentique pour que les dispositions visant les époux puissent s’appliquer : alinéa 4(1)a) du RIPR.

4 (1) Pour l’application du présent règlement, l’étranger n’est pas considéré comme étant l’époux, le conjoint de fait ou le partenaire conjugal d’une personne si le mariage ou la relation des conjoints de fait ou des partenaires conjugaux, selon le cas :

4 (1) For the purposes of these Regulations, a foreign national shall not be considered a spouse, a common-law partner or a conjugal partner of a person if the marriage, common-law partnership or conjugal partnership

b) n’est pas authentique.

(b) is not genuine.

Une présentation erronée sur un fait important ou une réticence exprimée sur un tel fait peut emporter interdiction de territoire : alinéa 40(1)a) de la LIPR.

40 (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

40 (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑1089‑19

 

INTITULÉ :

SAKSHI LIKHI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 17 décembre 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

La juge FUHRER

 

DATE DES MOTIS :

Le 30 janvier 2020

 

COMPARUTIONS :

Tamara Thomas

 

pour la demanderesse

 

Christopher Ezrin

pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bellissimo Law Group

Avocats

Toronto (Ontario)

pour la demanderesse

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

pour le défendeur

 

 

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