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Date : 20060216

Dossier : IMM‑928‑05

Référence : 2006 CF 207

Ottawa (Ontario), le 16 février 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE VON FINCKENSTEIN

 

ENTRE :

MERCIBETH ROJAS ALARCON

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La demanderesse, une citoyenne du Venezuela, a travaillé pour la société pétrolière vénézuélienne (la PDVSA) et a participé à la grève qui a touché tout le Venezuela en décembre 2002. Elle a été détenue du 24 au 28 décembre 2002 par deux membres de la garde nationale vénézuélienne et par un représentant de la PDVSA. Ces personnes lui ont demandé de leur fournir son code d’accès au réseau informatique de la société, mais la demanderesse a refusé. Deux jours après avoir été relâchée, elle a reçu un appel téléphonique d’une personne qui lui conseillait de se tenir tranquille si elle ne voulait pas que quelque chose lui arrive.

 

[2]               Le 31 janvier 2003, les journaux ont indiqué qu’elle était l’un des nombreux employés de la PDVSA qui avaient été congédiés pour avoir participé à la grève. D’autres employeurs lui ont dit qu’ils ne pouvaient pas embaucher d’employés congédiés par la PDVSA, de sorte qu’elle a été incapable de trouver un autre emploi au Venezuela.

 

[3]               Le 2 novembre 2003, des membres de la garde nationale vénézuélienne ont contraint la demanderesse à immobiliser son véhicule et l’ont emmenée à un camp des Forces armées révolutionnaires de Colombie (les FARC) parce qu’elle était opposée à la révolution du gouvernement du président Chavez. Deux membres des FARC l’ont agressée sexuellement. Après avoir été relâchée, elle a décidé de s’enfuir du Venezuela. Elle est entrée au Canada le 19 décembre 2003, après être passée par les États‑Unis.

 

[4]               La Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a affirmé que la question déterminante en l’espèce était la double citoyenneté de la demanderesse. Elle s’est référée à la preuve documentaire qui indiquait que les enfants dont au moins un des parents est Colombien ont un droit inhérent à la nationalité colombienne. En conséquence, elle a conclu que la demanderesse était une ressortissante de la Colombie et du Venezuela. La Commission était d’avis qu’en tant que Colombienne la demanderesse n’avait rien à craindre des FARC, même si cette organisation avait assassiné son oncle et son cousin en Colombie en 2002, parce que, selon la preuve documentaire, elle n’avait pas le profil des personnes auxquelles les FARC, l’ELN ou d’autres groupes de guérilleros en Colombie s’en prennent.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[5]               La demanderesse a soulevé essentiellement trois questions devant moi :

1.         La Commission a‑t‑elle commis une erreur en décidant que la Colombie était un pays de référence?

 

2.         La Commission a‑t‑elle commis une erreur en ne déterminant pas si la Colombie pouvait offrir une protection adéquate?

 

3.         Y a‑t‑il eu manquement à la justice naturelle à cause des omissions importantes ou de la conduite de l’ancien conseil? Dans l’affirmative, la nouvelle preuve contenue dans l’affidavit de la demanderesse devrait‑elle être admise?

 

NORME DE CONTRÔLE

[6]               La Cour d’appel fédérale a énoncé la norme de contrôle qui s’applique en l’espèce dans l’arrêt Williams c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 126, aux paragraphes 17 et 18 :

La conclusion de la Commission suivant laquelle l’intimé pouvait obtenir la citoyenneté ougandaise de plein droit en renonçant à la citoyenneté rwandaise est une conclusion de fait que le juge de première instance ne pouvait modifier que s’il s’agissait d’une erreur manifeste et dominante. L’intimé ne conteste pas cette conclusion et, de toute façon, le juge Pinard ne l’a pas modifiée.

 

Pour déterminer si la possibilité de se réclamer de la protection de l’Ouganda constitue une raison valable de refuser d’accorder la qualité de réfugié, il faut interpréter l’article 96 de la Loi. Il s’agit d’une question de droit. Il est de jurisprudence constante que, pour les questions de droit de cette nature, la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte.

 

[7]               Il découle de cet extrait que la norme de contrôle qui s’applique à la question de savoir si la Colombie était un pays de référence est la décision manifestement déraisonnable.

 

ANALYSE

Question no 1 

[8]               La Cour d’appel fédérale a dit ce qui suit au paragraphe 22 de l’arrêt Williams, précité :

Je souscris entièrement aux motifs du juge Rothstein et en particulier au passage suivant, au paragraphe 12 [[1993] A.C.F. no 576 (QL)] :

Le fait de ne pas avoir de nationalité ne doit pas relever du contrôle d’un [demandeur].

 

Le véritable critère est, selon moi, le suivant : s’il est en son pouvoir d’obtenir la citoyenneté d’un pays pour lequel il n’a aucune crainte fondée d’être persécuté, la qualité de réfugié sera refusée au demandeur. Bien que des expressions comme « acquisition de la citoyenneté de plein droit » ou « par l’accomplissement de simples formalités » aient été employées, il est préférable de formuler le critère en parlant de « pouvoir, faculté ou contrôle du demandeur », car cette expression englobe divers types de situations. De plus, ce critère dissuade les demandeurs d’asile de rechercher le pays le plus accommodant, une démarche qui est incompatible avec l’aspect « subsidiaire » de la protection internationale des réfugiés reconnue dans l’arrêt Ward et, contrairement à ce que l’avocat de l’intimé a laissé entendre, ce critère ne se limite pas à de simples formalités comme le serait le dépôt de documents appropriés. Le critère du « contrôle » exprime aussi une idée qui ressort de la définition du réfugié, en l’occurrence le fait que l’absence de « volonté » du demandeur à accomplir les démarches nécessaires pour obtenir la protection de l’État entraîne le rejet de sa demande d’asile à moins que cette absence s’explique par la crainte même de persécution. Le paragraphe 106 du Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés, [Genève, 1992] précise bien que « [c]haque fois qu’elle peut être réclamée, la protection nationale l’emporte sur la protection internationale ». Dans l’arrêt Ward, la Cour suprême du Canada fait observer, à la page 752, que « [l]orsqu’il est possible de l’obtenir, la protection de l’État d’origine est la seule solution qui s’offre à un demandeur ».

                       

[9]               La preuve documentaire indiquait en l’espèce :

[traduction] Les enfants dont au moins un des parents est Colombien ont un droit inhérent à la nationalité colombienne.

                        (dossier du tribunal, à la page 624)

 

[10]           La demanderesse n’a produit aucune preuve expliquant pourquoi cette affirmation était incorrecte ou pourquoi il n’était pas en son pouvoir d’obtenir la nationalité colombienne. Dans son témoignage devant la Commission, elle a souligné que ses parents avaient la double citoyenneté (voir le dossier du tribunal, à la page 671). Par conséquent, il n’était pas déraisonnable que la Commission conclue que la Colombie était un pays de référence. Un demandeur d’asile qui est le ressortissant de deux pays doit établir le bien‑fondé de sa demande à l’égard de ces deux pays (voir Tit c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 556).

[10]

Question no 2

[11]           La demanderesse prétend que la Commission a omis de se prononcer sur la question de la protection de l’État. La Commission a conclu en l’espèce que la demanderesse n’avait pas raison de craindre d’être persécutée en Colombie puisqu’elle n’a pas le profil des personnes persécutées par les FARC. En conséquence, il n’était pas nécessaire d’examiner la question de la protection de l’État. Les observations formulées par le juge Blais au paragraphe 13 de Muotoh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1599, sont pertinentes en l’espèce également :

En concluant que le demandeur n’a pas la qualité de réfugié ni celle de personne à protéger, la Commission a tranché que le demandeur n’est pas exposé à un risque. De plus, tel qu’il a été précédemment mentionné, le demandeur n’a pas présenté de nouveaux éléments pour prouver qu’il serait exposé à un risque. En l’absence de cette nouvelle preuve, il est inutile de déterminer si la protection étatique serait offerte. Le demandeur n’a pas besoin de la protection de l’État s’il n’est pas exposé à un risque. En conséquence, le défaut de l’agent d’évaluer la possibilité pour le demandeur de bénéficier de la protection de l’État ne viole pas les règles de justice naturelle.

 

Question no 3

[12]           La demanderesse prétend que son ancien conseil n’a pas abordé correctement la question du pays de référence. Elle aimerait déposer un affidavit dans lequel elle relate une conversation qu’elle a eue avec la consule colombienne à Toronto. Cette dernière a dit à la demanderesse que ses parents (qui sont nés en Colombie) avaient dû renoncer à leur citoyenneté colombienne pour obtenir la citoyenneté vénézuélienne. Pour que la demanderesse obtienne à nouveau la citoyenneté colombienne, il faudrait d’abord que ses parents demandent au consul colombien local de leur octroyer à nouveau la citoyenneté colombienne. Une fois que ses parents auraient recouvré cette citoyenneté, la demanderesse pourrait présenter une demande afin de l’obtenir à son tour.

 

[13]           La jurisprudence de la Cour établit clairement que de nouveaux éléments de preuve ne sont pas recevables dans le cadre d’un contrôle judiciaire (voir Charlery (Représentante désignée) c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 993, au paragraphe 16; Dokmajian c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2003), 25 Imm. L.R. (3d) 48, 2003 CFPI 85; Lemiecha (Tuteur à l’instance) c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 72 F.T.R. 49, [1993] A.C.F. no 1333).

 

[14]           Il y a cependant une exception dans les cas où l’équité procédurale est alléguée. Dans McFadyen c. Canada (Procureur général), [2005] A.C.F. no 1817, 2005 CAF 360, la juge Desjardins a dit au paragraphe 15 :

 

Le principe selon lequel une preuve qui ne fait pas partie du dossier administratif, c’est‑à‑dire une preuve qui n’apparaît pas au dossier dont le tribunal est saisi, peut être prise en compte lorsque les motifs de contrôle sont fondés sur une erreur de compétence quelconque est bien établi : comme l’a dit lord Denning dans une importante et ancienne décision anglaise : [traduction] « Lorsqu’une ordonnance de certiorari est rendue pour défaut de compétence, partialité ou fraude, une preuve sous forme d’affidavit est non seulement recevable mais, en règle générale, nécessaire » (R. c. Northumberland Compensation Appeal Tribunal, Ex parte Shaw, [1952] All E.R. 122, à la page 33 (C.A.)). La Cour suprême du Canada a approuvé le principe à maintes reprises : voir, par exemple, Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Montréal (Ville), [1997] 1 R.C.S. 793, au paragraphe 86; R. c. Miller, [1985] 2 R.C.S. 613, aux paragraphes 15 et 23 à 26; Cardinal c. Directeur de l’établissement Kent, [1985] 2 R.C.S. 643, au paragraphe 13. Le principe s’applique également en cas d’erreur de compétence, notamment de manquement à l’équité procédurale : voir Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 240 N.R. 376, (1999) 174 D.L.R. (4th) 165, au paragraphe 10 (C.A.F.); Robert W. Macaulay et James L.H. Sprague, Practice and Procedure Before Administrative Tribunals, feuilles mobiles, volume 3 (Toronto : Thomson Carswell, 1988) à 28‑56.2ff; Donald J.M. Brown et The Hon. John M. Evans, Judicial Review of Administrative Action, feuilles mobiles, volume 2 (Toronto : Canvasback Publishing, 2004) à 6‑62ff.

 

[15]           Cet extrait soulève évidemment la question suivante : y a‑t‑il eu manquement à la justice naturelle à cause des omissions importantes ou de la conduite de l’ancien conseil?

 

[16]           Un examen du dossier révèle que la demanderesse a elle‑même soulevé la question de la nationalité colombienne lorsqu’elle a produit un document attestant que sa mère avait obtenu la citoyenneté vénézuélienne (voir le dossier du tribunal, à la page 76, une page tirée de la Gazette officielle de la République du Venezuela).

 

[17]           La question de la citoyenneté colombienne et du droit inhérent des enfants a été examinée pendant le premier jour d’audience de la Commission le 26 octobre 2004. L’échange suivant a alors eu lieu :

[traduction]

R. Je vous remercie. Madame, des documents relatifs à l’entrevue que vous avez eue avec un agent d’immigration le 19 décembre 2003 au sujet de votre demande d’asile m’ont été présentés.

 

LE PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : M. Lesarge, je fais référence à la pièce R‑1, à la page 13.

 

LA COMMISSION (LE PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE) :

 

Q. Ce document indique que votre mère et votre père, qui est décédé, sont nés en Colombie. Est‑ce exact?

R. Oui, c’est exact.

Q. Étant nés en Colombie, vos parents étaient‑ils également des citoyens de ce pays?

R. Ma mère s’est fait naturaliser et mon père a obtenu sa nationalité après son décès.

Q. De quelle nationalité s’agit‑il?

R. De la nationalité vénézuélienne.

Q. Étant donné que vos parents sont nés en Colombie, ne sont‑ils pas également des citoyens de ce pays?

R. Oui, c’est exact. Ils ont la double nationalité, la double citoyenneté.

Q. Madame, la preuve documentaire dont je dispose indique, comme vous l’avez dit, que le Venezuela et la Colombie permettent la double citoyenneté.

 

LE PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : M. Lesarge, je fais référence à la pièce R‑2, plus précisément aux points G‑1 et G‑2 concernant la Colombie.

 

LA COMMISSION (LE PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE) :

Q. Cette preuve documentaire indique également que les enfants dont au moins un des parents est Colombien ont un droit inhérent à la citoyenneté ou à la nationalité colombienne. Compte tenu de cette preuve, vous serait‑il possible de vivre en Colombie sans risquer de subir un préjudice grave?

R. Il ne serait pas possible pour moi de vivre en Colombie parce que les FARC sont l’une des raisons pour lesquelles je me suis enfuie, et je crains qu’elles ne me retrouvent plus facilement en Colombie. En outre, je mettrais davantage en danger les membres de ma famille, mes oncles et mes cousins par exemple.

 

(dossier du tribunal, à la page 671)

 

[18]           Comme le montre clairement cet échange, toute la question du droit inhérent des enfants de parents colombiens à la citoyenneté colombienne a été soulevée en octobre 2004. Lorsque l’audience a repris en novembre, aucune preuve n’a été produite pour réfuter la preuve documentaire citée par la Commission. Il n’a été question de la possibilité que la demanderesse trouve asile en Colombie que dans la question et la réponse suivantes :

[traduction]

Q.    Madame, je vous ai posé des questions sur la Colombie lors du premier jour d’audience. Vous serait‑il possible de vous installer en Colombie et de vivre dans la capitale, Bogotá, sans craindre que les FARC ne s’en prennent gravement à vous?

 

  1. Cela serait impossible. Si elles peuvent me retrouver au Venezuela, elles pourront le faire plus facilement encore en Colombie. Elles me retrouveront dès mon arrivée à l’aéroport de Bogotá ou à un autre point d’entrée.

(dossier du tribunal, à la page 688)

 

 

Il en a aussi été question dans la dernière observation du conseil :

[traduction] Nous savons déjà que les FARC ont causé des ravages inimaginables en Colombie. La famille de la demanderesse a personnellement été victime de ces ravages, un oncle et un cousin de la demanderesse ayant été tués. Je pense qu’il ne fait aucun doute que la Colombie serait à peu près le dernier endroit au monde où une personne qui a été victime des FARC penserait vivre en sécurité.

 

(dossier du tribunal, à la page 694)

 

 

[19]           Pour démontrer que son conseil était incompétent, la demanderesse doit fonder sa prétention sur des faits précis. Le juge Denault a bien résumé le droit relatif à l’incompétence des conseils dans Shirwa c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 2 C.F. 51, aux paragraphes 11 et 12 :

Bien que les affaires susmentionnées portent sur des fautes professionnelles distinctes, il appert que l’incompétence manifestée par un avocat à l’audition d’une demande du statut de réfugié justifie le contrôle judiciaire de la décision du tribunal, en raison de la violation d’un principe de justice naturelle. Les critères applicables à l’examen d’une telle décision ne sont pas clairement établis, mais il est possible de dégager un certain nombre de principes à partir de la jurisprudence précitée. Lorsque le requérant n’a commis aucune faute, mais le manque de diligence de son avocat a pour effet de le priver totalement de son droit d’être entendu, il y a manquement à un principe de justice naturelle, en sorte qu’un contrôle judiciaire est fondé (Mathon).

Dans les autres cas où une audience a lieu, la décision rendue ne peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire que dans des « circonstances extraordinaires », lorsqu’il y a suffisamment d’éléments de preuve pour établir « l’étendue du problème » et que le contrôle judiciaire a « pour fondement des faits très précis ». Ces restrictions sont essentielles, selon moi, afin de tenir compte des préoccupations exprimées par les juges MacGuigan et Rothstein, selon lesquelles l’insatisfaction d’ordre général ressentie à l’égard de la qualité de la représentation assurée par l’avocat dont le demandeur a, de son propre chef, retenu les services, ne saurait justifier le contrôle judiciaire d’une décision défavorable. Toutefois, lorsque l’incompétence ou la négligence du représentant ressort de la preuve de façon suffisamment claire et précise, elle est en soi préjudiciable au demandeur et elle justifie l’annulation de la décision, même si le tribunal n’a pas agi de mauvaise foi ni omis de faire quoi que ce soit.

 

 

[20]           Je ne vois pas comment, dans les circonstances de l’espèce, on peut dire que l’ancien conseil de la demanderesse a été incompétent. En premier lieu, je ne dispose d’aucune preuve indiquant que la conclusion de la Commission concernant les droits inhérents des enfants de parents colombiens était erronée. La preuve relative aux droits inhérents des enfants était tirée d’un rapport de recherche de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié qui était fondé sur un avis du bureau des services juridiques du ministère des Affaires étrangères de Colombie (le rapport de recherche) (voir le dossier du tribunal, à la page 624).

 

[21]           La demanderesse cherche maintenant à produire un affidavit relatant une conversation téléphonique (confirmée par un courriel) avec la consule colombienne à Toronto, au cours de laquelle celle‑ci a avancé des hypothèses au sujet du droit vénézuélien et des démarches que ses parents avaient dû entreprendre pour obtenir la citoyenneté vénézuélienne. Même si l’on ne tient pas compte du fait qu’il s’agit clairement de ouï‑dire, la preuve concernant le droit vénézuélien ne repose sur rien de solide. Aucune preuve des compétences de la consule colombienne concernant le droit vénézuélien n’a été produite. En second lieu, il est question des parents de la demanderesse et non de la demanderesse elle‑même dans le courriel :

[traduction] Dans le cas de Marcibeth, ses parents ont été forcés de renoncer à la nationalité colombienne pour pouvoir obtenir la citoyenneté vénézuélienne, ce qui signifie que, pour recouvrer leur nationalité, ils doivent d’abord l’obtenir et ensuite inscrire la demanderesse dans le registre civil. Sa mère peut le faire dans un consulat colombien situé au Venezuela et, après avoir obtenu le formulaire relatif à sa carte d’identité, elle peut être inscrite au Venezuela ou à Bogotá.

 

Veuillez agréer l’expression de nos meilleurs sentiments.

 

 

La consule générale,

Catalina Chaux

 

(dossier de la demanderesse, à la page 35)

Le courriel ne traite pas des droits inhérents des enfants de parents colombiens ni du processus que doit suivre la demanderesse pour acquérir la citoyenneté colombienne.

 

[22]           Compte tenu du fait que la demanderesse avait admis que ses parents possédaient la double citoyenneté et de la preuve tirée du rapport de recherche, on peut difficilement dire que son ancien conseil a fait montre d’incompétence parce qu’il n’a pas vérifié cette information auprès de la consule colombienne. Par ailleurs, il est loin d’être évident que le droit vénézuélien est décrit correctement dans le courriel de la consule colombienne.

 

[23]           Par conséquent, je ne vois aucune raison d’admettre le nouvel affidavit de la demanderesse. La demanderesse n’ayant pas démontré le bien‑fondé de sa thèse concernant les trois questions en litige en l’espèce, la présente demande doit être rejetée.

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la présente demande soit rejetée.

 

 

« Konrad W. von Finckenstein »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                        IMM‑928‑05

 

 

INTITULÉ :                                                       MERCIBETH ROJAS ALARCON

                                                                            c.

                                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                               LE 9 FÉVRIER 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                      LE JUGE K. VON FINCKENSTEIN

 

DATE DES MOTIFS :                                     LE 16 FÉVRIER 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jeinis Patel                                                           POUR LA DEMANDERESSE

 

Kristina Dragaitis                                                  POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jeinis Patel                                                           POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

 

Sous‑procureur général du Canada                       POUR LE DÉFENDEUR

Ottawa (Ontario)

 

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