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Date : 20200304

Dossier : IMM-1690-19

Référence : 2020 CF 336

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Calgary (Alberta), le 4 mars 2020

En présence de monsieur le juge Ahmed

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

demandeur

et

ABDULMOULLA S. ABDULMOULLA ALGAZAL

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  La présente affaire concerne la décision de la Section d’appel des réfugiés (la SAR) de faire droit à l’appel interjeté contre la décision de la Section de la protection des réfugiés (la SPR). La SPR a conclu que le défendeur était exclu du bénéfice de la protection accordée aux réfugiés au titre de l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR) et de l’alinéa c) de la section F de l’article premier de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés (la Convention). Plus précisément, la SPR a exclu le défendeur en raison de ses antécédents de violence familiale à l’endroit de deux femmes au Canada. La SAR a fait droit à l’appel, après avoir conclu que l’alinéa c) de la section F de l’article premier de la Convention n’excluait pas le défendeur et avoir confirmé le statut de réfugié au sens de la Convention de ce dernier.

[2]  Le défendeur est citoyen de la Libye. Les membres de sa famille étaient perçus comme des partisans de Kadhafi, étant donné que le père du défendeur a travaillé là‑bas pour une société pétrolière nationale pendant 40 ans. En septembre 2015, le défendeur a présenté une demande d’asile au motif qu’il risquait d’être persécuté et d’être pris pour cible par les milices, s’il retournait en Libye.

[3]  Dans une décision datée du 7 mai 2018, la SPR a refusé la demande d’asile du défendeur. Le défendeur a interjeté appel de cette décision devant la SAR. Dans une décision datée du 18 février 2019, la SAR a fait droit à l’appel.

[4]  Le 12 mars 2019, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le demandeur) a présenté à la Cour une demande de contrôle judiciaire de la décision de la SAR. Le demandeur soutient que la SAR a commis une erreur en infirmant la conclusion de la SPR selon laquelle le défendeur est exclu du bénéfice de la protection accordée aux réfugiés en raison de ses antécédents de violence à l’égard des femmes. Le demandeur soutient également que la SAR a commis une erreur en accordant le statut de réfugié au sens de la Convention au défendeur.

[5]  Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie.

 

II.  Les faits

A.  Le défendeur

[6]  Abdulmoulla S. Abdulmoulla Algazal (le défendeur), qui est âgé de 33 ans, est citoyen de la Libye. Il est venu au Canada en 2009 pour suivre une formation dans une école de pilotage. Il n’éprouvait aucun problème dans son pays. Il n’est retourné en Libye qu’à une seule occasion et a quitté le pays pour la dernière fois en septembre 2010. Il n’a pas remis les pieds là‑bas depuis la chute de Mouammar Kadhafi, en février 2011.

[7]  Tel qu’il a été mentionné précédemment, les membres de la famille du défendeur étaient perçus comme des partisans de Kadhafi, en raison de l’emploi qu’a occupé pendant 40 ans là‑bas le père du défendeur au sein d’une société pétrolière nationale. Lorsque les milices ont pris pour cible l’un des frères du défendeur pour ce motif, les membres de la famille du défendeur sont partis pour le Canada, où ils ont obtenu l’asile en mars 2015.

[8]  Aux environs du mois d’avril 2015, le défendeur a reçu un diagnostic de tumeur au cerveau. En mai 2015, il a subi sa première intervention chirurgicale en lien avec cette tumeur.

[9]  En septembre 2015, le défendeur a présenté une demande d’asile au Canada. Toutefois, sa demande d’asile a été renvoyée devant la Section de l’immigration (la SI) en vue d’une enquête, en vertu de l’alinéa 34(1)e) de la LIPR, pour des incidents allégués de violence familiale commis par le défendeur entre 2011 et 2013. La SI a conclu que le défendeur n’était pas interdit de territoire en vertu de cette disposition, et l’affaire a été renvoyée devant la SPR. Lors de l’audience devant la SPR, le demandeur a soutenu que les incidents de violence familiale commis par le défendeur l’excluaient du bénéfice de la protection accordée aux réfugiés, en vertu de l’article 98 de la LIPR et de l’alinéa c) de la section F de l’article premier de la Convention.

[10]  Devant la SPR et la SAR, le défendeur a présenté des éléments de preuve et a fait valoir que sa tumeur et l’intervention chirurgicale qu’il a subie ont [traduction« affecté sa mémoire ».

B.  La décision de la SPR

[11]  L’audience devant la SPR a été tenue le 9 novembre 2017. Dans une décision datée du 7 mai 2018, la SPR a conclu que le défendeur était exclu du bénéfice de la protection accordée aux réfugiés au titre de l’article 98 de la LIPR, par application de l’alinéa c) de la section F de l’article premier de la Convention. Bien que les accusations portées contre le défendeur pour violence familiale à l’endroit de ses deux anciennes petites amies aient été suspendues, la preuve a amené la SPR à conclure, selon la prépondérance des probabilités, que les agressions violentes contre les deux femmes avaient bel et bien eu lieu. La SPR a également conclu que le défendeur avait l’intention coupable requise pour ce qui est de la perpétration de ces actes de violence familiale, étant donné que la preuve d’ordre médical n’étayait pas la conclusion selon laquelle le comportement du défendeur était directement affecté par sa tumeur.

[12]  Pour déterminer si les actes de violence commis par le défendeur étaient [traduction« contraires aux buts et aux principes des Nations Unies aux fins d’exclusion », la SPR s’est appuyée sur l’arrêt Pushpanathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1998 CanLII 778 (CSC), [1998] 1 RCS 982 (Pushpanathan) et sur diverses déclarations des Nations Unies. La conclusion de la SPR est rédigée en ces termes :

[traduction]
Comme je le souligne ci‑dessous, cette considération m’amène à conclure que les actes dont le demandeur d’asile est coupable constituent une violation systémique des droits de la personne, comme celle observée contre les femmes à l’échelle mondiale, et que le comportement particulier [du défendeur] à l’égard de deux femmes sur une période de deux ans était également grave, soutenu et systémique, constituant ainsi une persécution.

[13]  La SPR a conclu, en outre, que les mauvais traitements auxquels le défendeur s’est livré étaient systématiques, étant donné que certaines constantes se dégageaient de son comportement violent. Se référant à l’arrêt Pushpanathan, la SPR a souligné que [traduction« les avantages que confère l’asile ne devraient pas être accordés à ceux qui sont eux‑mêmes responsables de persécution ». Enfin, la SPR a estimé qu’il n’était pas nécessaire de considérer l’inclusion, dans la mesure où l’exclusion avait été établie.

[14]  La décision de la SPR a été portée en appel devant la SAR.

C.  La décision de la SAR

[15]  Dans une décision datée du 18 février 2019, la SAR a fait droit à l’appel du défendeur. Devant la SAR, les parties n’ont pas contesté la constatation des faits et les conclusions de la SPR concernant la violence familiale perpétrée par le défendeur. La SAR a fait remarquer que dans le cadre de l’appel, la question déterminante était de savoir si la commissaire de la SPR avait conclu, à juste titre, que la violence familiale perpétrée sur une période de deux ans constituait un comportement visé à l’alinéa c) la section F de l’article premier de la Convention. Après avoir examiné l’arrêt Pushpanathan, la SAR a finalement conclu que l’alinéa c) n’excluait pas le défendeur du bénéfice de la protection accordée aux réfugiés.

[16]  Premièrement, la SAR a conclu que la SPR avait mal interprété et mal appliqué l’expression [traduction« grave, soutenu et systémique », ayant notamment interverti les mots [traduction« systématique » et [traduction« systémique ». La SAR a convenu qu’au sein de la communauté internationale, la violence familiale peut être une composante de la discrimination systémique à l’égard des femmes. Toutefois, elle a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour conclure que le comportement systématique du défendeur, au Canada, était issu d’une structure systémique plus vaste de violence fondée sur le sexe. Sur ce point, les motifs de la SAR sont ainsi libellés :

Un individu agresset‑il les femmes systématiquement parce qu’il est le produit d’une structure mondiale de violence fondée sur le sexe? Une structure mondiale de violence fondée sur le sexe estelle en place en raison d’individus qui, comme l’appelant, agressent systématiquement les femmes? Peu importe ces possibilités ou d’autres possibilités, un lien de causalité ou une corrélation n’ont pas été établis selon les éléments de preuve ou une analyse adéquate de la présente affaire.

[17]  En outre, la SAR n’était pas d’accord sur la façon dont le terme « soutenu » a été utilisé par la commissaire de la SPR, qui a jugé approprié de qualifier ainsi le comportement violent du défendeur puisqu’il s’étalait sur deux ans à l’égard de deux femmes différentes. La SAR était plutôt d’avis que la Cour suprême, dans l’arrêt Pushpanathan, a utilisé le terme « soutenu » dans « le contexte d’un principe dont l’objectif est de veiller à ce que les agents de persécution, c’est‑à‑dire ceux qui sont à l’origine de l’existence des réfugiés, ne se voient pas accorder l’asile ». La SAR a fait remarquer que la nature et la portée de la violence perpétrée par le défendeur à l’endroit de ces deux femmes au Canada ne sont pas « un moyen logique d’évaluer si son comportement était “soutenu”, selon le sens attribué à ce terme par la CSC ».

[18]  La SAR a déclaré que la section F de l’article premier de la Convention s’inscrit dans le cadre d’un processus plus vaste de protection accordée aux réfugiés et que d’autres processus peuvent être utilisés pour assurer la sûreté et la sécurité de la population canadienne. Elle a attiré l’attention sur l’alinéa 34(1)e) de la LIPR, qui porte sur l’interdiction de territoire des personnes qui représentent une menace pour la société canadienne. Elle a rappelé que le demandeur a renvoyé le cas du défendeur devant la SI en vue d’une enquête, en vertu de l’alinéa 34(1)e) de la LIPR, et a fait remarquer que la SI n’a pas conclu que le défendeur était interdit de territoire. La SAR a conclu que, même si le fait de se voir refuser l’asile n’équivaut pas au fait d’être interdit de territoire au Canada, la SPR a commis une erreur en n’examinant pas la relation entre cette enquête et l’alinéa c) de la section F de l’article premier.

[19]  Enfin, la SAR a estimé que la demande d’asile du défendeur était semblable à celles des membres de sa famille, qui se sont vu accorder l’asile au Canada. Puisque la SPR a conclu que les éléments de preuve présentés permettaient d’établir de façon convaincante la crainte du défendeur d’être persécuté et d’être pris pour cible en Libye, la SAR a confirmé que ce dernier avait qualité de réfugié au sens de la Convention.

III.  Dispositions pertinentes

[20]  Les articles 33, 34 et 98 de la LIPR sont ainsi libellés :

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, al. 34(1)e) et art. 98

Sécurité

34 (1) Emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants :

a) être l’auteur de tout acte d’espionnage dirigé contre le Canada ou contraire aux intérêts du Canada;

b) être l’instigateur ou l’auteur d’actes visant au renversement d’un gouvernement par la force;

b.1) se livrer à la subversion contre toute institution démocratique, au sens où cette expression s’entend au Canada;

c) se livrer au terrorisme;

d) constituer un danger pour la sécurité du Canada;

e) être l’auteur de tout acte de violence susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité d’autrui au Canada;

f) être membre d’une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu’elle est, a été ou sera l’auteur d’un acte visé aux alinéas a), b), b.1) ou c).

Security

34 (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on security grounds for

(a) engaging in an act of espionage that is against Canada or that is contrary to Canada’s interests;

(b) engaging in or instigating the subversion by force of any government;

(b.1) engaging in an act of subversion against a democratic government, institution or process as they are understood in Canada;

(c) engaging in terrorism;

(d) being a danger to the security of Canada;

(e) engaging in acts of violence that would or might endanger the lives or safety of persons in Canada; or

(f) being a member of an organization that there are reasonable grounds to believe engages, has engaged or will engage in acts referred to in paragraph (a), (b), (b.1) or (c).

Exclusion par application de la Convention sur les réfugiés

98 La personne visée aux sections E ou F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés ne peut avoir la qualité de réfugié ni de personne à protéger.

Exclusion — Refugee Convention

98 A person referred to in section E or F of Article 1 of the Refugee Convention is not a Convention refugee or a person in need of protection.

[21]  L’alinéa c) de la section F de l’article premier de la Convention est ainsi libellé :

Article premier.

Définition du terme "réfugié"

F. Les dispositions de cette Convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser :

(a) Qu’elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l’humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes;

(b) Qu’elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d’accueil avant d’y être admises comme réfugiés;

(c) Qu’elles se sont rendues coupables d’agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.

Article 1

Definition of the term “refugee”

F. The provisions of this Convention shall not apply to any person with respect to whom there are serious reasons for considering that:

(a) he has committed a crime against peace, a war crime, or a crime against humanity, as defined in the international instruments drawn up to make provision in respect of such crimes;

(b) he has committed a serious non-political crime outside the country of refuge prior to his admission to that country as a refugee;

(c) he has been guilty of acts contrary to the purposes and principles of the United Nations.

IV.  Questions en litige et norme de contrôle

[22]  La question en litige dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire consiste à déterminer si la décision de la SAR est raisonnable, ce qui m’amène, plus particulièrement, à trancher les questions suivantes :

[23]  Avant l’arrêt récent de la Cour suprême dans l’affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 (CanLII) [Vavilov], la norme de la décision raisonnable s’appliquait lors du contrôle d’une décision de la SAR portant sur des questions de fait et des questions mixtes de fait et de droit : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93 (CanLII), aux par. 30, 34 et 35; Majoros c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 667 (CanLII), au par. 24; Idahosa c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 384 (CanLII), au par. 10. Il n’y a pas lieu de déroger à la norme de contrôle appliquée dans la jurisprudence antérieure, étant donné que l’application du cadre d’analyse établi dans l’arrêt Vavilov impose la même norme de contrôle, soit celle de la décision raisonnable.

[24]  Comme l’ont indiqué les juges majoritaires dans l’arrêt Vavilov, « une décision raisonnable doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, au par. 85). En outre, « la cour de révision doit être convaincue qu’elle [la décision] souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence » (Vavilov, au par. 100).

V.  Analyse

A.  La SAR a‑t‑elle commis une erreur en concluant que le défendeur avait qualité de réfugié au sens de la Convention?

[25]  Le demandeur soutient que la SAR a commis une erreur en concluant que le défendeur avait qualité de réfugié au sens de la Convention, sans avoir procédé à une évaluation individualisée du risque de persécution auquel il est exposé en Libye. Il fait valoir que, si la SAR n’a pas commis d’erreur en concluant que le défendeur n’était pas exclu, elle aurait dû renvoyer l’affaire devant la SPR en vue d’une évaluation individualisée du risque, puisque la décision de la SPR portait principalement sur l’exclusion du défendeur en vertu de l’alinéa c) de la section F de l’article premier de la Convention.

[26]  Le demandeur s’appuie sur la décision Canada (Citoyenneté et Immigration) c Kaler, 2019 CF 883 (CanLII), aux par. 14 à 19, pour soutenir que la SAR est tenue de procéder à une évaluation complète de toutes les questions pertinentes concernant la demande d’asile du demandeur, comme si la SPR elle‑même effectuait cette analyse. Toutefois, le demandeur soutient que la SAR a commis une erreur en accordant l’asile au défendeur, puisqu’elle n’a pas procédé à une évaluation complète et individualisée du risque de persécution auquel il est exposé.

[27]  Le défendeur soutient que la SPR a procédé à une évaluation individualisée du risque. En outre, il prétend que le demandeur ne peut pas soutenir, dans le cadre du contrôle judiciaire, que la SAR a commis une erreur, en ne tenant pas compte de la possibilité que l’évaluation de la SPR ait été incorrecte, puisqu’il n’a pas fait valoir devant la SAR que la SPR avait commis une erreur dans son évaluation.

[28]  À mon avis, la SAR a commis une erreur en omettant de procéder à une évaluation complète et individualisée du risque de persécution auquel le défendeur est exposé, et il était déraisonnable de sa part d’accorder à ce dernier le statut de réfugié au sens de la Convention. La SAR a simplement fait remarquer que la demande d’asile du défendeur était semblable à celles des membres de sa famille, qui se sont vu accorder l’asile, et que la SPR n’avait trouvé aucune raison de croire que les éléments de preuve présentés dans les demandes d’asile de sa famille n’étaient pas crédibles, avant de conclure que le défendeur avait qualité de réfugié au sens de la Convention.

[29]  Toutefois, je constate que lors de son analyse de la question de l’inclusion, la SPR n’a pas conclu que le défendeur se verrait accorder le statut de réfugié au sens de la Convention. Au lieu de cela, la SPR a conclu que [traduction« compte tenu de la situation particulière du demandeur d’asile, l’évaluation de sa demande d’inclusion serait probablement fondée sur une analyse et une application des conditions dans le pays en fonction de son profil ». Étant donné que la SPR n’a pas présenté une telle analyse et application des conditions dans le pays en fonction du profil du défendeur, il était erroné de la part de la SAR de conclure que ce dernier avait qualité de réfugié au sens de la Convention, en se fondant sur les demandes d’asile des membres de sa famille. Contrairement à ce qu’a conclu la SAR, qui a affirmé que « la commissaire de la SPR a reconnu que la situation particulière [du défendeur] et l’évaluation de sa demande d’inclusion [...] donneraient lieu à un résultat favorable quant à une conclusion selon laquelle il a qualité de réfugié au sens de la Convention », la SPR n’a tiré aucune conclusion du genre. La SAR a commis une erreur en s’appuyant sur des conclusions et des analyses qui n’existaient pas.

[30]  La SAR était tenue de procéder à une évaluation complète des questions pertinentes concernant la demande d’asile du défendeur pour en arriver à tirer ses conclusions, mais elle ne l’a pas fait. Par conséquent, je conclus que la décision de la SAR est déraisonnable.

B.  La SAR a‑t‑elle commis une erreur en infirmant la conclusion de la SPR selon laquelle le défendeur est exclu du bénéfice de la protection accordée aux réfugiés en raison de ses antécédents de violence à l’égard des femmes?

[31]  Comme j’ai conclu que la décision de la SAR est déraisonnable, j’estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner la deuxième question en litige.

VI.  Question à certifier

[32]  Les avocats des deux parties ont été invités à préciser s’ils avaient des questions à soumettre aux fins de certification. Ils ont chacun affirmé qu’il n’y avait pas de questions à certifier, et je suis d’accord avec eux.

VII.  Conclusion

[33]  La décision de la SAR est déraisonnable. La présente demande de contrôle judiciaire est accueillie.

 




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