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Date : 20060222

Dossier : T-11-05

Référence : 2006 CF 237

Ottawa (Ontario), le 22 février 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLAIS

ENTRE :

AYMAN MERHAM

demandeur

et

LA BANQUE ROYALE DU CANADA

défenderesse

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]                La présente demande de contrôle judiciaire fondée sur l'article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7 (la Loi) vise une décision par laquelle la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) a rejeté, en date du 3 décembre 2004, la plainte de M. Ayman Merham (le demandeur) formulée à l'endroit de la Banque Royale du Canada (la défenderesse).

FACTEURS PERTINENTS

[2]                Le demandeur est à l'emploi de la défenderesse depuis septembre 1998. Il a commencé comme stagiaire au programme coopératif, un poste contractuel, au Centre informatique de Guelph. Vers le mois de décembre 1999, on lui a offert un poste dans la « salle de commande » et, en mars 2000, il est devenu un employé à plein temps. Le 11 août 2000, il a eu un accident d'automobile et il a été en congé d'invalidité de courte et de longue durée depuis ce temps. Il demeure à l'emploi de la Banque et continue de recevoir des prestations pour invalidité de longue durée.

[3]                Le demandeur a déposé auprès de la Commission, le 31 décembre 2001, une plainte de discrimination fondée sur la race, l'origine nationale ou ethnique et la déficience. La Commission a désigné Deborah Olver pour étudier la plainte. Celle-ci a présenté un rapport en date du 5 août 2004. Le rapport répond à toutes les allégations formulées par le demandeur sans exception, y compris celles qui ne se trouvaient pas dans la plainte initiale.

[4]                Le rapport comportait les recommandations suivantes :

Il est recommandé, en vertu de l'alinéa 44(3)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, que la Commission rejette la plainte pour les motifs suivants :

·                La preuve ne corrobore pas que le plaignant a fait l'objet d'un traitement différentiel défavorable en raison de sa race, de son origine ethnique ou de sa déficience.

·                La preuve ne corrobore pas que la défenderesse n'a pas offert un milieu de travail exempt de harcèlement fondé sur la race, l'origine ethnique ou la déficience.

·                La preuve ne soutient pas l'allégation suivant laquelle la défenderesse a omis d'apporter les mesures nécessaires pour répondre aux besoins découlant de la déficience du plaignant.

·                La preuve ne soutient pas l'allégation suivant laquelle la défenderesse a menacé de congédier le plaignant en raison de sa race, de son origine ethnique ou de sa déficience.

(Voir le paragraphe 82 du rapport de l'enquêteuse que l'on trouve à la page 25 du dossier de la défenderesse.)

[5]                Les deux parties ont eu la possibilité de présenter des observations sur le rapport avant que la Commission ne donne suite aux recommandations. Dans sa décision, la Commission a examiné la plainte, le rapport d'enquête et les observations des parties concernant ce rapport.

DÉCISION DE LA COMMISSION

[6]                Le 3 décembre 2004, la Commission a adopté les recommandations du rapport d'enquête et a rejeté la plainte du demandeur.

QUESTIONS EN LITIGE

1. La Commission a-t-elle manqué à son devoir d'équité procédurale en ne divulguant pas les documents demandés par le demandeur?

2. La Commission a-t-elle commis une erreur de fait et de droit dans l'examen de la preuve?

ANALYSE

1. La Commission a-t-elle manqué à son devoir d'équité procédurale en ne divulguant pas les documents demandés par le demandeur?

[7]                Dans la présente affaire, les dispositions pertinentes de la Loi canadienne sur les droits de la personne sont le paragraphe 44(1) et le sous-alinéa 44(3)b)(i) qui sont rédigés comme suit :

44. (1) L'enquêteur présente son rapport à la Commission le plus tôt possible après la fin de l'enquête.

(3) Sur réception du rapport d'enquête prévu au paragraphe (1), la Commission :

b) rejette la plainte, si elle est convaincue :

(i) soit que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l'examen de celle-ci n'est pas justifié

44. (1) An investigator shall, as soon as possible after the conclusion of an investigation, submit to the Commission a report of the findings of the investigation.

(3) On receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

(b) shall dismiss the complaint to which the report relates if it is satisfied

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is not warranted

[8]                Dans McFadyen c. Canada (Procureur général), 2005 CF 779, [2005] A.C.F. no 963, le juge Michael Kelen a confirmé que la norme de contrôle applicable à une décision de la Commission rejetant une plainte en vertu de l'alinéa 44(3)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne est la norme de la décision raisonnable simpliciter. Aux paragraphes 11 et 13 de la décision, il a fait état de la jurisprudence qui a établi cette norme en disant ceci :

Dans l'arrêt MacLean c. Marine Atlantic Inc., [2003] A.C.F. no 1854, le juge O'Keefe, mettant en application la méthode pragmatique et fonctionnelle, a conclu que la norme de contrôle à appliquer quand la Commission rejette une plainte aux termes de l'alinéa 44(3)b) de la Loi est celle de la décision raisonnable simpliciter.

Une décision examinée selon la norme de la décision raisonnable simpliciter ne devrait être infirmée que si elle n'est pas étayée par des motifs capables de résister à un examen assez poussé. Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247.

[9]                Cette norme de contrôle ne s'applique pas s'il peut être démontré que la Commission a manqué à son devoir d'équité procédurale en rendant sa décision. Les questions d'équité procédurale ne sont pas assujetties à l'analyse pragmatique et fonctionnelle (voir S.C.F.P. c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539, au paragraphe 100).

[10]            Le demandeur allègue que, à la suite de la communication de la déclaration de la défenderesse, il a demandé la divulgation de certains documents, qui se rapportaient directement aux allégations de la défenderesse, avant qu'il ne dépose sa réponse. Les documents qui n'auraient jamais été divulgués sont énumérés comme suit dans une lettre, datée du 7 octobre 2003, qui a été envoyée par le demandeur à l'enquêteuse :

7. Veuillez transmettre une copie de la prétendue évaluation (QPI).

12. Veuillez transmettre une copie de la note de M. King.

14. Veuillez transmettre une copie de la correspondance par courriel de M. Huston concernant les prétendues tentatives de remise de l'évaluation.

16. Veuillez transmettre une copie de la prétendue tentative de me remettre la prétendue évaluation.

17. Veuillez transmettre une copie de la prétendue tentative de me remettre l'évaluation de rendement.

18. Veuillez transmettre une copie de la prétendue tentative de me communiquer les problèmes de rendement allégués.

19. Veuillez transmettre une copie des prétendus courriels qui ont été mentionnés dans ce paragraphe (courriel envoyé à Fil King par Meg Mackenzie et la prétendue interruption de deux heures).

20. Veuillez transmettre une copie de la prétendue correspondance par courriel entre Mme Pineau et moi.

21. Veuillez transmettre une copie des courriels envoyés par Meg Mackenzie à Kathy Elliot et Joanne Pineau dans le premier cas et à Filemon King, Kathy Elliot et Joanne Pineau dans le deuxième cas.

(Voir le dossier du demandeur, onglet 7, page 36.)

[11]            Le demandeur soutient que le défaut de divulguer les documents susmentionnés l'a empêché d'être bien renseigné sur la preuve qu'il devait réfuter pour établir sa demande. Il allègue que la Commission a manqué aux règles de l'équité procédurale en omettant de divulguer les documents ou même de répondre à sa demande de divulgation.

[12]            La Cour suprême du Canada a déclaré à maintes reprises que les obligations imposées par le devoir d'agir équitablement variaient selon les circonstances (voir Knight c. Indian Head School Division No. 19, [1990] 1 R.C.S. 653 et Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, au paragraphe 21).

[13]            Dans Banks c. Société canadienne des postes, 2004 CF 713, le juge James Russell a discuté de la portée de l'obligation d'équité procédurale concernant des décisions prises en vertu du paragraphe 44(3) de la Loi canadienne sur les droits de la personne et il a précisé ce qui suit aux paragraphes 79 et 82 :

La jurisprudence de la présente cour et de la Cour d'appel fédérale établit clairement quelles sont les obligations de la Commission dans ces circonstances. Dans l'arrêt Société Radio-Canada c. Paul, 2001 C.A.F. 93, au paragraphe 43 et (2001), 198 D.L.R. (4th) 633, à la page 648, la Cour d'appel fédérale a établi les principes suivants :

Les tribunaux, appliquant le principe de l'équité procédurale, ont imposé d'autres obligations que la Commission doit respecter avant d'agir en vertu du paragraphe 44(3). La Commission doit informer les parties « de la substance de la preuve réunie par l'enquêteur et produite devant la Commission » . Pour ce faire, la Commission doit divulguer le rapport d'enquête aux parties. La Commission est également tenue d'accorder aux parties la possibilité de formuler toutes les observations utiles en réponse au rapport et de tenir compte de ces observations pour rendre sa décision. Elle n'est pas tenue de motiver sa décision. Les tribunaux ont statué que les motifs de la Commission sont ceux qui sont exposés dans le rapport d'enquête lui-même.

Compte tenu de la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire S.E.P.Q.A., précitée, aux pages 899 et 900, je suis d'avis que la présente cour peut uniquement examiner la décision pour s'assurer qu'elle est conforme à la Loi et aux règles d'équité procédurale, telles qu'elles ont été établies par les tribunaux. Cela veut dire que la Cour doit s'assurer que la demanderesse a été informée de la substance de la preuve sur laquelle la Commission entendait se fonder en prenant sa décision et qu'elle s'est vu offrir la possibilité de répondre à cette preuve et de présenter tous les arguments pertinents s'y rapportant (voir Mercier, précité, aux paragraphes 5 et 14). Je crois que c'est ce qui s'est produit en l'espèce. La décision ne correspondait pas à ce que recherchait la demanderesse, mais je ne crois pas qu'une erreur susceptible de révision ait été commise. [Non souligné dans l'original.]

[14]            Dans Hutchinson c. Canada (Ministre de l'Environnement), [2003] 4 CF 4 580, la Cour d'appel fédérale a conclu que le « droit de connaître la preuve à réfuter et d'y répondre se rapporte à des éléments qui seront mis à la disposition du décideur plutôt qu'à des éléments qui passent entre les mains d'un enquêteur dans le cadre de l'enquête » . La Cour d'appel fédérale, aux paragraphes 48 à 50, a expliqué le fondement de cette conclusion en s'appuyant sur les conclusions des décisions Mercier c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 3 CF 3, et Madsen c. Canada (Procureur général) (1996), 39 Admin. L.R. (2d) 248 :

Dans la décision Madsen, précitée, la Cour a statué que lorsque les arguments présentés en réponse à la divulgation de l'essence de l'affaire soulèvent de nouveaux faits, ils devraient être divulgués à la partie adverse, de façon à lui permettre d'y répondre (au paragraphe 28) :

Appliquant le critère énoncé dans l'affaire Mercier à l'espèce, j'estime que si les secondes observations de l'une ou de l'autre partie contenaient des faits qui différaient de ceux exposés dans le rapport d'enquête, le rapport de conciliation ou dans les observations antérieures, les règles d'équité procédurales exigeaient peut-être de la CCDP qu'elle divulgue le second ensemble d'observations d'une partie à l'autre et permette aux parties de déposer un troisième ensemble d'observations. Cependant, je dois également exprimer mon accord avec la Cour d'appel fédérale sur le fait que les règles d'équité procédurale n'exigent pas de la Commission qu'elle « communique systématiquement à une partie les observations qu'elle reçoit de l'autre partie » . [Mercier, aux pages 253 et 254.] Autrement, on pourrait concevoir que les observations/le processus de la réplique continuent ad infinitum. [Non souligné dans l'original.]

Il ressort clairement des décisions Madsen et Mercier que l'obligation de divulguer les observations avait pris naissance dans un contexte où ces observations devaient être mises à la disposition de la Commission. Le principe sous-jacent avait été établi dix ans plus tôt dans l'arrêt Radulesco, précité. Il n'y a rien dans ces arrêts qui étayerait la thèse selon laquelle toute communication entre un enquêteur et une partie intéressée doit être divulguée à l'autre partie. Le droit de connaître la preuve à réfuter et d'y répondre se rapporte à des éléments qui seront mis à la disposition du décideur plutôt qu'à des éléments qui passent entre les mains d'un enquêteur dans le cadre de l'enquête.

Par conséquent, le juge des demandes a commis une erreur en statuant que la lettre du 22 octobre 1997 aurait dû être transmise à l'intimée pour qu'elle puisse y répondre. Dans la mesure où le rapport d'enquête divulguait des renseignements contenus dans la lettre, l'intimée a amplement exercé son droit d'y répondre. Dans la mesure où les renseignements figurant dans la lettre n'étaient pas inclus dans le rapport d'enquête et où ils n'étaient pas par ailleurs mis à la disposition de la Commission, le droit d'y répondre n'a pas pris naissance. [Non souligné dans l'original.]

[15]            Dans 1185740 Ontario Ltd. c. Canada (Ministre du Revenu national), [1999] A.C.F. no 1432, la Cour d'appel a déclaré ce qui suit au paragraphe 5 :

Dans Canada (Commission des droits de la personne) c. Pathak, [1995] 2 C.F. 455 (C.A.), la Cour a statué que seuls les documents qui étaient en la possession de la Commission des droits de la personne lorsqu'elle a pris sa décision devaient être produits. À défaut d'une preuve que l'enquêteur avait mal résumé les autres documents sur lesquels il s'appuyait, il n'était pas nécessaire de les produire. La décision de la Cour dans Terminaux portuaires du Québec Inc. c. Canada (Conseil canadien des relations du travail) 17 Admin. L.R. (2d) 16 va dans le même sens. J'accepte ces décisions et je les applique. [Non souligné dans l'original.]

[16]            Les règles de l'équité procédurale n'exigent pas que la Commission divulgue systématiquement à une partie les observations reçues de l'autre partie. Le droit de connaître la preuve à réfuter et d'y répondre se rapporte à des éléments qui seront mis à la disposition du décideur plutôt qu'à des éléments qui passent entre les mains d'un enquêteur dans le cadre de l'enquête.

[17]            Les documents demandés n'ont pas été mis à la disposition du décideur. La Commission a certifié les documents dont elle disposait au moment de prendre sa décision. Ces documents sont les suivants :

1.          Formulaire de plainte, daté du 31 décembre 2001;

2.          Rapport d'enquête, daté du 5 août 2004;

3.          Réponse du plaignant au rapport d'enquête, datée du 31 août 2004;

4.          Réplique à la réponse du plaignant au rapport d'enquête, datée du 27 septembre 2004;

5.          Chronologie.

(Voir le dossier de la défenderesse, à la page 5.)

[18]            Seuls les documents qui étaient en la possession de la Commission lorsqu'elle a pris sa décision devaient être produits. Il n'était pas nécessaire de produire les autres documents sur lesquels l'enquêteuse s'est appuyée, en l'absence d'une preuve démontrant qu'elle les avait mal résumés. Le demandeur n'a pas démontré que l'enquêteuse avait même utilisé les documents non divulgués dans la rédaction de son rapport. Qui plus est, même si ces documents avaient été utilisés, le demandeur n'a présenté aucune preuve démontrant qu'ils ont été mal résumés ou interprétés.

[19]            Dans la présente affaire, la demande de divulgation des documents a été faite au début de l'enquête de la plainte. Elle a été faite avant que le rapport d'enquête ne soit terminé et avant que les parties n'aient eu la possibilité d'y répondre. En outre, le demandeur n'a jamais fait état de préoccupations concernant le défaut de l'enquêteuse de communiquer certains documents lorsqu'il a eu la possibilité de fournir des observations en réponse au rapport. De plus, dans cette réponse, le demandeur ne mentionne pas qu'il n'était pas au courant de la substance de la preuve réunie par l'enquêteuse et mise à sa disposition.

[20]            La Commission doit informer les parties de la substance de la preuve réunie par l'enquêteur et produite devant elle. Pour répondre à cette exigence, elle doit divulguer le rapport d'enquête aux parties. La Commission doit également donner aux parties la possibilité de formuler toutes les observations utiles en réponse au rapport et tenir compte de ces observations pour rendre sa décision. Dans son rapport, l'enquêteuse a tenu compte de toutes les allégations du demandeur sans exception, y compris celles qui ne se trouvaient pas dans la plainte initiale. Pour chacune des allégations, le rapport donne un aperçu de la nature de l'allégation, un résumé de la preuve fournie tant à l'appui de l'allégation qu'en réponse à celle-ci et une analyse faite par l'enquêteuse. Pour cette raison, je suis convaincu que le demandeur a été informé de la substance de la preuve réunie par l'enquêteuse. De plus, j'estime que le demandeur s'est vu accorder la possibilité de fournir des observations en réponse au rapport. Je conclus que la Commission n'a pas manqué à son obligation d'équité procédurale en ne divulguant pas les documents demandés par le demandeur.

2. La Commission a-t-elle commis une erreur de fait et de droit dans l'examen de la preuve?

[21]            Le demandeur soutient que l'enquêteuse a commis une erreur de fait et de droit parce qu'elle a omis d'examiner convenablement une preuve importante qui démontrait que le demandeur était un employé exceptionnel et qu'un certain document avait prétendument été falsifié. En conséquence, il allègue que la Commission a fait erreur en s'appuyant sur le rapport de l'enquêteuse pour rejeter la plainte en vertu de l'alinéa 44(3)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[22]            Dans Tse c. Federal Express Canada Ltd. [2005] A.C.F. no 740, la juge Eleanor Dawson a souligné que la Commission n'est pas tenue d'examiner le dossier d'enquête au complet. Elle a déclaré ce qui suit au paragraphe 20 :

Comme je l'ai indiqué dans les motifs connexes, la Cour d'appel fédérale a statué que l'équité procédurale n'exige pas que les membres de la Commission examinent le dossier d'enquête au complet. Ces derniers sont plutôt autorisés à se baser sur le rapport de l'enquêteur pour autant que celui-ci soit divulgué aux parties, que celles-ci aient la possibilité de faire toutes les observations pertinentes en réponse à ce rapport et que ces observations en réponse soient prises en compte par la Commission lorsqu'elle rend sa décision. De plus, l'enquêteur qui prépare le rapport doit mener une enquête rigoureuse. Une intervention est justifiée dans le cadre d'un contrôle judiciaire si l'enquêteur omet d'examiner des preuves manifestement capitales. Voir, par exemple, Tahmourpour c. Canada (Solliciteur général), 2005 C.A.F. 113; [2005] A.C.F. no 543, au paragraphe 8 et suivants. [Non souligné dans l'original.]

[23]            Après avoir examiné la présente affaire, je suis d'avis que l'enquêteuse a mené une enquête rigoureuse. Dans son rapport, elle a tenu compte de toutes les allégations du demandeur sans exception, y compris celles qui ne se trouvaient pas dans la plainte initiale. Pour chacune des allégations, le rapport donne un aperçu de la nature de l'allégation, un résumé de la preuve fournie tant à l'appui de l'allégation qu'en réponse à celle-ci et une analyse faite par l'enquêteuse. De plus, je suis d'avis que l'enquêteuse n'a pas « om[is] d'examiner des preuves manifestement capitales » . Je suis convaincu que la Commission a examiné tous les documents et éléments de preuve présentés. La conclusion tirée par l'enquêteuse et adoptée par la Commission après l'audition des observations des parties constitue l'aboutissement d'un traitement consciencieux et raisonné des questions soulevées dans la plainte. J'estime que la décision de la Commission est raisonnable.

[24]            La défenderesse allègue que les seuls documents produits devant la Cour sont les documents dont la Commission disposait lorsqu'elle a pris sa décision. Tel qu'il a été mentionné précédemment, la Commission a certifié à la Cour les documents qu'elle avait à sa disposition. La défenderesse fait remarquer que les éléments de preuve de crédibilité présentés dans l'affidavit du demandeur ne faisaient pas partie de la preuve certifiée devant la Commission. En conséquence, la défenderesse allègue que ces renseignements ne devraient pas être pris en compte pour décider si la demande de contrôle judiciaire doit être accueillie.

[25]            Je ne suis pas d'accord avec la défenderesse. Si le demandeur peut fournir une preuve pour illustrer que l'enquêteuse n'a pas mené une enquête rigoureuse et qu'elle a négligé une preuve capitale, il n'est alors pas important que cette preuve capitale ait été présentée ou non à la Commission. Si une preuve capitale a été écartée par l'enquêteuse dans la préparation de son rapport, cette preuve peut alors être utilisée comme argument pour faire droit à la demande de contrôle judiciaire. Toutefois, dans la présente affaire, le demandeur n'a pas démontré qu'une preuve capitale a été négligée et que l'enquêteuse n'a pas mené une enquête rigoureuse.

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

·          La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Pierre Blais »

Juge

Traduction certifiée conforme

Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                              T-11-05

INTITULÉ :                                                            AYMAN MERHAM

                                                                                demandeur

                                                                                c.

                                                                                LA BANQUE ROYALE DU CANADA

                                                                                défenderesse

LIEU DE L'AUDIENCE :                                      TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                    LE 20 FÉVRIER 2006

MOTIFS DU JUGEMENT
ET JUGEMENT :
                                                  LE JUGE BLAIS

DATE DES MOTIFS :                                           LE 22 FÉVRIER 2006

COMPARUTIONS :

Yehuda Levinson

              POUR LE DEMANDEUR

Douglas K. Gray

Sarah C. Crossley

              POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Levinson & Associates

Toronto (Ontario)

     POUR LE DEMANDEUR

Hicks Morley Hamilton Stewart Storie LLP

Toronto (Ontario)

     POUR LA DÉFENDERESSE

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