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Date : 20060601

Dossier : T‑616‑04

Référence : 2006 CF 679

Ottawa (Ontario), le 1er juin 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’KEEFE

 

 

ENTRE :

LE CHEF PETER BILL et les CONSEILLERS DENNIS LEWIS,

ROMEO THOMAS, FREDERICK WHITEHEAD,

WILLIE THOMAS, PETER SAKEBOW

et DAVID THOMAS

demandeurs

 

et

 

LE COMITÉ D’APPEL DE LA BANDE DU LAC PÉLICAN

(ci‑après le comité d’appel),

RAYMOND DUMAIS, DEBBIE THOMAS,

ALDEN HARRIS, ELMER THOMAS, JOHN UTZ

et FRANCIS THOMAS, JIMMY BILL,

HARRY THOMAS, CHARLES RABBITSKIN,

WAYNE THOMAS, GARRY THOMAS

et CALVIN THOMAS

défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire qui vise :

            1.         la décision datée du 15 mars 2004 par laquelle le comité d’appel de la bande du lac Pélican (le comité d’appel) a accueilli l’appel interjeté à l’encontre de l’élection du 5 mars 2004, et a attesté la nullité du résultat de l’élection;

            2.         l’avis en date du 21 mars 2004 envoyé par le comité d’appel pour aviser les parties concernées de la tenue prochaine d’une audience d’appel;

            3.         la décision par laquelle le comité d’appel, à l’audience d’appel du 23 mars 2004, a convoqué la tenue d’une élection partielle le 16 avril 2004.

 

[2]               Les demandeurs sollicitent :

            1.         une ordonnance confirmant l’élection du 5 mars 2004 et déclarant valide le résultat de l’élection;

            2.         une ordonnance annulant la décision du 15 mars 2004 du comité d’appel;

            3.         une ordonnance annulant la décision du 23 mars 2004 du comité d’appel;

            4.         l’octroi de dépens, de dommages‑intérêts et d’autres mesures de redressement que la Cour jugera bon d’attribuer.

 

[3]               Le comité d’appel défendeur sollicite :

            1.         une ordonnance enjoignant, en application de l’article 104 des Règles des Cours fédérales, que soit mis hors de cause le comité d’appel.

            2.         une ordonnance rejetant la demande de contrôle judiciaire en raison du défaut des demandeurs de se conformer à l’article 303 des Règles des Cours fédérales;

            3.         les mesures accessoires requises pour tenir compte du rejet, quant au comité d’appel, de la présente instance;

            4.         la pleine indemnisation des dépens du comité d’appel et de ses membres.

 

Contexte

 

[4]               La bande indienne du lac Pélican (la bande) du nord‑ouest de la Saskatchewan est dotée d’un système électoral coutumier en vue de l’élection tous les trois ans du chef et des conseillers de la bande en vertu de la Pelican Lake Election Act (la Loi). La Loi régit la procédure d’élection et prévoit que des appels peuvent être interjetés, à l’encontre d’élections, auprès du comité d’appel constitué en vertu de la Loi.

 

[5]               Une élection s’est déroulée le 5 mars 2004, Peter Bill étant réélu chef et Dennis Lewis, Romeo Thomas, Frederick Whitehead, Willie Thomas, Peter Sakebow et David Thomas étant élus conseillers. Ils sont collectivement les demandeurs dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[6]               Le 9 mars 2004, Donald Abbott, Harry Thomas et Garry Thomas (les appelants) ont interjeté appel, auprès du comité d’appel, à l’encontre de l’élection du 5 mars et du résultat de l’élection. Les motifs d’appel étaient les suivants :

            1.         on n’a pas suivi certaines procédures requises en vertu de modifications apportées à la Loi et cela a influé sur le résultat de l’élection du 5 mars;

            2.         un candidat à l’élection du 5 mars avait été condamné au criminel et il était donc inhabile à se présenter candidat aux termes de la Loi;

            3.         On a eu recours à des manœuvres frauduleuses en violation de la Loi, du fait qu’on a tenu illégalement un scrutin préliminaire, qu’on ne s’est pas servi d’un système de numérotation adéquat tenant compte du nombre de bulletins imprimés et qu’on aurait trouvé hors du bureau de scrutin pendant le dépouillement officiel deux bulletins portant les initiales du directeur des élections (les bulletins dans les bancs de neige).

 

[7]               Les appelants ont également soutenu que les irrégularités entourant la nomination du directeur des élections et l’inobservation par ce dernier des dispositions de la Loi étaient de nature si flagrante qu’il faudrait annuler l’élection du 5 mars.

 

[8]               Les membres du comité d’appel étaient Ray Dumais, Debbie Thomas, Alden Harris, Elmer Thomas et John Utz. Le comité d’appel a disposé de fonds pour trois jours, soit du 11 au 13 mars 2004. Par la suite, l’administrateur de la bande a déclaré qu’il ne reconnaissait plus le comité d’appel et il a refusé de lui verser d’autres fonds. Les membres du comité d’appel ont utilisé leur propre argent et ils en ont emprunté pour continuer à exercer au mieux leurs fonctions.

 

[9]               Par avis daté du 15 mars 2004, le comité d’appel a déclaré qu’il accueillait l’appel et qu’il attestait la nullité du résultat de l’élection du 5 mars. On déclarait également dans l’avis que : [traduction] « nouvel avis sera transmis par courrier recommandé précisant la date, l’heure et le lieu où l’audience d’appel sera tenue ainsi que le motif d’appel ».

 

[10]           Par avis daté du 21 mars 2004, le comité d’appel a déclaré que l’audience d’appel avait été fixée au 23 mars 2004 (l’audience d’appel) en conformité avec le paragraphe 12(5) de la Loi, et que tous les candidats concernés pouvaient y être présents. Cet avis a été envoyé à tous les demandeurs dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire. Les demandeurs ont toutefois allégué ne pas avoir tous reçu cet avis, le chef Peter Bill et les conseillers Dennis Lewis et Willie Thomas se trouvant à Calgary (Alberta) au moment concerné.

 

[11]           Le 22 mars 2004, le comité d’appel a écrit à Affaires indiennes et du Nord Canada pour l’informer que l’élection du 5 mars avait été annulée, qu’il n’y avait pas eu attestation du résultat de l’élection et qu’il se préparait à ordonner aussitôt que possible la tenue d’une nouvelle élection.

 

[12]           Les appelants étaient présents à l’audience d’appel du 23 mars 2004. Les demandeurs (en l’occurrence le chef et les conseillers élus actuels) ne se sont pas présentés, bien que le comité d’appel ait retardé d’une heure le début de la séance pour qu’ils puissent le faire. Le comité d’appel a conclu de leur absence que sa décision visée dans l’avis du 15 mars 2004 n’était pas contestée. Le comité d’appel a décidé de confirmer l’appel visant l’élection du 5 mars et d’ordonner la tenue d’une nouvelle élection partielle en application de l’alinéa 12(6)c) de la Loi, sous réserve que la liste des candidats soit restreinte à ceux ayant brigué les suffrages à l’élection du 5 mars. Cette décision a été approuvée par la suite lors de la réunion du 1er avril 2004 des membres de la bande.

 

[13]           Le 31 mars 2004, Ray Dumais, le président du comité d’appel, a écrit à Herb Fiddler, le directeur administratif de la bande, pour l’informer que le résultat de l’élection du 5 mars avait été annulé et que le comité d’appel s’occuperait, à titre transitoire, de l’administration de la bande en attendant le résultat de la nouvelle élection. Dans sa lettre, M. Dumais demandait également à M. Fiddler de confirmer par écrit qu’il reconnaîtrait l’autorité du comité d’appel, faute de quoi il serait suspendu avec traitement et il lui serait demandé de renoncer à ses fonctions au sein du bureau du conseil de bande.

 

[14]           L’élection partielle a eu lieu le 16 avril 2004. Les demandeurs ont soutenu que cette élection était entachée d’irrégularités. Les demandeurs avaient le droit de se porter candidats lors de cette élection, mais ils ont décidé de ne pas y participer. De nouvelles personnes ont par conséquent été élues aux postes de chef et de conseillers.

 

[15]           Le 23 avril 2004, quelques membres de la bande ont fait appel auprès du comité d’appel de l’élection du 16 avril. Cet appel a été suspendu en attendant l’issue de la présente instance.

 

[16]           Les demandeurs ont ensuite sollicité une injonction interlocutoire visant à ce que soit préservé le statu quo, qui prévalait le 6 mars 2004, quant à leur élection à leurs postes respectifs immédiatement après l’annonce du résultat de l’élection du 5 mars. Le juge Martineau de la Cour a accordé l’injonction par ordonnance en date du 28 avril 2004. L’injonction est demeurée en vigueur jusqu’à maintenant au moyen d’ordonnances ultérieures de la Cour.

 

[17]           Fait à noter, le comité d’appel a signalé à la GRC que des irrégularités avaient entaché l’élection du 5 mars, notamment l’affaire des bulletins dans les bancs de neige, le prétendu usage incorrect de documents et le dossier d’élection manquant ainsi que les prétendues manœuvres ayant consisté à « acheter » des votes et à mésuser des remboursements de taxe des membres de la bande. Après enquête, la GRC a recommandé qu’aucune accusation criminelle ne soit portée relativement à ces incidents.

 

[18]           Il s’agit en l’espèce du contrôle judiciaire des décisions du 15 mars 2004 et du 23 mars 2004 par lesquelles le comité d’appel a accueilli l’appel porté à l’encontre de l’élection du 5 mars et a ordonné la tenue de l’élection partielle du 16 avril. Les demandeurs ont désigné à titre de défendeurs le comité d’appel, Raymond Dumais, Debbie Thomas, Alden Harris, Elmer Thomas, John Utz, Francis Thomas, Jimmy Bill, Harry Thomas, Charles Rabbitskin, Wayne Thomas, Garry Thomas et Calvin Thomas.

 

Les questions en litige

 

[19]           Les demandeurs ont soulevé les questions qui suivent.

              1.       Le comité d’appel a‑t‑il outrepassé sa compétence en vertu de la Loi lorsqu’il a rendu sa décision du 15 mars 2004?

               2.      Les actions du comité d’appel ont‑elles violé les principes d’équité procédurale?

               3.      Les actions du comité d’appel donnent‑elles lieu à une crainte raisonnable de partialité?

 

[20]           Les défendeurs, pour leur part, ont soulevé les questions qui suivent.

            1.         Y a‑t‑il lieu d’annuler la présente demande pour défaut de conformité avec l’article 303 des Règles des Cours fédérales?

            2.         Compte tenu de la coutume et de la clause privative contenue dans la Loi, quel est le degré de retenue judiciaire indiqué envers le comité d’appel?

 

Les prétentions des demandeurs

 

[21]           Les demandeurs font valoir qu’il est prescrit à l’alinéa 12(3)b) de la Loi que, dans les sept jours qui suivent la réception d’une plainte, le comité d’appel « détermine si l’appel doit être entendu compte tenu de la suffisance de la preuve présentée ». Selon les demandeurs, l’alinéa 12(3)b) ne confère pas au comité d’appel le pouvoir d’accueillir un appel ou d’attester la nullité du résultat de l’élection. Les demandeurs soutiennent également qu’en accueillant l’appel le 15 mars 2004, le comité d’appel a rendu prématurément jugement sur une question qui devait être tranchée lors d’une audience d’appel subséquente.

 

[22]           Les demandeurs soutiennent que l’avis du 21 mars 2004 envoyé par le comité d’appel ne se conformait pas au paragraphe 12(4) de la Loi parce que l’avis n’a pas été transmis par courrier recommandé et qu’il ne précisait pas les motifs d’appel. Les demandeurs ajoutent qu’en prévoyant que l’audience d’appel serait tenue dans un délai de moins de 48 heures après l’envoi de l’avis, le comité d’appel a enfreint les principes de l’équité procédurale, étant donné qu’il ne leur a pas donné ainsi un avis adéquat et suffisant.

 

[23]           Les demandeurs soutiennent aussi que le comité d’appel ne disposait pas de motifs suffisants pour fixer une audience d’appel ou pour accueillir l’appel à l’encontre de l’élection du 5 mars.

 

[24]           Les demandeurs soutiennent que la Loi ne conférait pas au comité d’appel le pouvoir de communiquer comme il l’a fait le 22 mars 2004 avec Affaires indiennes et du Nord Canada, et le 31 mars 2004 avec Herb Fiddler. Selon les demandeurs, en outre, la lettre du 22 mars 2004 donne lieu à une crainte raisonnable de partialité, sa teneur montrant que le comité d’appel avait tranché à l’avance l’affaire et que sa décision était arrêtée avant même l’audience d’appel.

 

[25]           Les demandeurs soutiennent que les membres du comité d’appel se sont montrés partiaux à leur endroit et qu’ils se sont indûment arrogés un rôle d’enquête avec la collaboration des appelants. Les demandeurs déclarent que, tout au long du processus d’appel, Raymond Dumais, le président du comité d’appel, a rencontré fréquemment Donald Abbott, l’un des appelants et un candidat défait à l’élection du 5 mars. Raymond Dumais aurait en outre agi à titre de représentant accrédité de Donald Abbott lors de cette même élection. Les demandeurs ont ajouté que Debbie Thomas, la secrétaire du comité d’appel, était ouvertement hostile à leur endroit.

 

[26]           Les demandeurs soutiennent que l’audience d’appel du 23 mars 2004 s’est déroulée d’une manière non conforme à la Loi de même qu’aux principes de l’équité procédurale. Les appelants n’ont pas eu à présenter leur cause, le comité d’appel présumant en l’absence des demandeurs que la décision n’était pas contestée.

 

[27]           Les demandeurs soutiennent que les cinq facteurs mentionnés dans Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, aux paragraphes 22 à 28, doivent être pris en compte pour discerner le contenu de l’obligation d’équité procédurale : 1) la nature de la décision recherchée et le processus suivi pour y parvenir (c’est‑à‑dire la mesure dans laquelle le processus administratif se rapproche du processus judiciaire); 2) la nature du régime législatif et les termes exacts de la loi en vertu de laquelle agit l’organisme en cause; 3) l’importance de la décision pour les personnes visées; 4) les attentes légitimes de ces personnes; 5) la nature de la retenue judiciaire indiquée à l’endroit de l’organisme décisionnaire. Les demandeurs soutiennent qu’aux fins de l’application de ces cinq facteurs, 1) le comité d’appel a pour objet de trancher des appels en matière d’élection après avoir examiné si ont eu lieu des violations de la Loi, et sa nature est judiciaire, de sorte qu’il est tenu de respecter une norme plus rigoureuse quant à l’impartialité et à l’équité; 2) l’absence de dispositions dans la Loi prévoyant l’appel des décisions du comité commande des mesures de protection procédurales et une obligation d’équité procédurale plus sévères; 3) la décision du comité d’appel a de graves incidences sur la carrière, le revenu, le statut et la réputation au sein de la collectivité des demandeurs; 4) même si le comité d’appel ne peut s’appuyer sur un long historique en matière de procédure, les demandeurs et la collectivité dans son ensemble ont pour attente légitime qu’il agira de manière impartiale et raisonnable, dans les limites fixées par sa loi constitutive; 5) les membres du comité d’appel ne disposent pas d’une expertise ou de connaissances particulières au‑delà du domaine judiciaire et leur mandat au sein du comité est temporaire et relativement court.

 

[28]           Les demandeurs soutiennent que leur demande est conforme à l’alinéa 303(1)a) des Règles des Cours fédérales. Il convient selon eux de désigner les membres du comité d’appel à titre de défendeurs puisqu’en l’espèce, comme c’était le cas dans Sunshine Village Corp. c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien) (1995), 96 F.T.R. 14, au paragraphe 6 (1re inst.), une injonction est demandée pour empêcher ces personnes d’agir en leur qualité même de membres du tribunal. Les demandeurs ajoutent que les membres du comité d’appel ont d’ailleurs agi à titre de défendeurs jusqu’à présent en déposant des affidavits, en présentant des requêtes et même en demandant de l’argent pour pouvoir agir en l’instance et en en recevant par ordonnance du 17 novembre 2004 du juge Mosley.

 

[29]           Les demandeurs soutiennent qu’en tout état de cause, le défaut de se conformer à l’article 303 des Règles des Cours fédérales est une irrégularité qui, en application de l’article 56, n’entache pas la demande de nullité.

 

Les prétentions du comité d’appel défendeur

 

[30]           Le comité d’appel défendeur (le défendeur) soutient que le directeur des élections et les demandeurs ont refusé de coopérer avec lui alors qu’il se préparait en vue de l’audience d’appel en refusant de lui remettre les bulletins aux fins d’un recomptage et le dossier d’élection pour la tenue en bonne et due forme de la procédure d’appel. Le défendeur soutient avoir ressenti de la frustration face aux difficultés entourant le processus d’appel, et avoir exercé son pouvoir discrétionnaire en application de l’alinéa 12(6)c) de la Loi pour ordonner la tenue d’une nouvelle élection, sans nouveaux candidats outre la liste de ceux ayant brigué les suffrages lors de la précédente élection. C’était là, selon le défendeur, sa seule option raisonnable compte tenu la situation à laquelle il était confronté. Cette situation, c’était notamment le fait que l’intégrité même des bulletins de vote et de la procédure d’élection était mise en doute, que l’administrateur de la bande et le directeur des élections se montraient peu coopératifs, que le défendeur ne pouvait obtenir de l’argent pour les services d’un conseiller juridique, que la Loi imposait des délais rigoureux et que certains membres de la bande alléguaient que des candidats avaient acheté ou obtenu frauduleusement des votes.

 

[31]           Le défendeur soutient que la demande des demandeurs contrevient à l’article 303 des Règles des Cours fédérales au motif : 1) qu’on y désigne à tort le comité d’appel à titre de défendeur, 2) qu’on omet d’y désigner tous les défendeurs idoines ou 3), subsidiairement, qu’on n’y désigne pas le procureur général du Canada comme défendeur éventuel.

 

[32]           Le défendeur soutient premièrement qu’il ne convenait pas que les demandeurs désignent le comité d’appel et ses membres à titre de défendeurs (Yeager c. Canada (Service correctionnel) (2000), 189 F.T.R. 196, paragraphes 15 à 26 (1re inst.)). Selon le défendeur, un contrôle judiciaire demandé en application de l’article 18 de la Loi sur les cours fédérales est une procédure de contrôle des décisions d’offices fédéraux qui est habituellement intentée contre des personnes aux intérêts opposés à ceux des demandeurs quant à la décision en cause (Mundle c. Canada (1994), 85 F.T.R. 258, paragraphe 9 (1re inst.)). Le défendeur soutient que le rôle du tribunal administratif dont la décision est contestée se restreint à expliquer le dossier dont il est saisi et à présenter des observations relativement à la compétence (Northwestern Utilities Ltd. c. Edmonton, [1979] 1 R.C.S. 684). Le défendeur soutient que lorsqu’un office fédéral est désigné à tort comme défendeur, il n’aura pas qualité de défendeur et ne pourra intervenir dans l’instance avant d’en avoir obtenu l’autorisation (Canada Commission des droits de la personne c. Canada (Procureur général), [1994] 2 C.F. 447, paragraphes 31 et 32 (C.A.)). Or, le défendeur signale‑t‑il, une telle autorisation n’a pas été obtenue en l’espèce. Selon le défendeur, une cour peut ordonner, en application de l’article 104 des Règles des Cours fédérales, qu’une personne constituée erronément comme partie ou une partie dont la présence n’est pas nécessaire au règlement des questions en litige soit mise hors de cause, ou ordonner que soit constituée comme partie à l’instance toute personne qui aurait dû l’être.

 

[33]           Le défendeur soutient deuxièmement que le paragraphe 303(1) des Règles des Cours fédérales obligeait les demandeurs à désigner à titre de défendeur toute personne directement touchée par la décision du comité d’appel, sauf celui‑ci. Or, selon le défendeur, les appelants à l’encontre de l’élection du 5 mars (Donald Abbott, Harry Thomas et Garry Thomas) sont directement touchés par la présente demande et auraient donc dû être désignés à titre de défendeurs. Harry Thomas et Garry Thomas ont été désignés comme défendeurs, mais non pas Donald Abbott.

 

[34]           Le défendeur soutient troisièmement que, si les demandeurs avaient des doutes quant aux défendeurs idoines, ils auraient pu désigner ainsi le procureur général du Canada en application du paragraphe 303(2) des Règles. Si le procureur général du Canada est incapable d’agir à titre de défendeur ou n’est pas disposé à le faire, la Cour peut désigner en remplacement une autre personne ou entité, y compris le tribunal concerné, en application du paragraphe 303(3).

 

[35]           Le défendeur soutient également que le pouvoir de la Cour de donner des directives de la nature d’un verdict imposé a un caractère exceptionnel et ne doit être exercé que dans les cas les plus clairs (Refuse c. Canada (Commission d’appel des pensions), 2002 CAF 31, paragraphe 14). Le défendeur ajoute toutefois que, lorsque les faits ne sont pas contestés, la Cour peut renvoyer l’affaire au tribunal concerné pour qu’il rende une nouvelle décision, en lui donnant des directives précises qui équivalent à un verdict imposé (Turanskaya c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 145 D.L.R. (4th) 259, p. 262 (C.A.F.)).

 

[36]           Selon le défendeur, il arrive qu’une mesure de redressement déclaratoire ne soit pas accordée lorsque cela viendrait en aide à une personne ayant enfreint la loi (Basu c. Canada (1991), [1992] 2 C.F. 38, paragraphes 10 à 12 (1re inst.)). Or, en l’espèce, le défendeur soutient qu’on a des raisons de croire que les demandeurs, en particulier le chef Peter Bill, ont enfreint la Loi, voire même le Code criminel.

 

[37]           Le défendeur prétend que la Loi confère au comité d’appel de larges pouvoirs discrétionnaires quant à la tenue d’un appel relatif à une élection. En outre, le renvoi par référence à la coutume à l’alinéa 2j) de la Loi offre une certaine latitude au comité d’appel afin que se réalisent l’objet de la Loi et l’intention de ses rédacteurs (Simon c. Nation crie de Samson, 2001 CFPI 467, paragraphes 27 à 34).

 

[38]           Selon le défendeur, il convient de faire preuve d’une grande retenue judiciaire envers le comité d’appel en raison de la clause privative du paragraphe 12(8), des dispositions relatives à la coutume de l’alinéa 2j) ainsi que des dispositions de l’alinéa 12(3)a) de la Loi sur la composition du comité d’appel.

 

[39]           Le défendeur soutient finalement que la décision du comité d’appel n’était pas manifestement déraisonnable.

 

Les prétentions des candidats successeurs défendeurs

[40]           Les candidats qui ont succédé aux demandeurs soutiennent que l’octroi d’une injonction n’est pas indiqué parce que les demandeurs n’ont pas démontré qu’ils subiraient eux‑mêmes un préjudice irréparable. Ils ont également fait leurs les arguments du comité d’appel.

 

Analyse et décision

 

[41]           Je vais maintenant examiner les deux questions qui suivent.

            1.         Devrait‑on rayer la présente demande pour défaut de désignation des défendeurs idoines, en application des Règles des Cours fédérales?

            2.         Dans la négative, les décisions du comité d’appel devraient‑elles être annulées?

 

[42]           1re question en litige

            La présente demande de contrôle judiciaire devrait‑elle être rayée pour défaut de désignation des défendeurs idoines, en application de l’article 303 des Règles des Cours fédérales?

            Le paragraphe 303(1) des Règles des Cours fédérales prévoit qu’un demandeur doit désigner à titre de défendeur « toute personne directement touchée par l’ordonnance recherchée, autre que l’office fédéral visé par la demande […] ».

 

[43]           Il est arrivé à quelques reprises qu’une injonction soit demandée à l’encontre du tribunal, qui était désigné à titre de défendeur. Ainsi, dans Abbott c. Première nation du lac Pélican, 2003 CFPI 340, une affaire concernant le même comité d’appel du lac Pélican, celui‑ci était désigné à titre de défendeur.

 

[44]           En l’espèce, les décisions du comité d’appel font l’objet de contrôle judiciaire, de sorte que le comité n’est pas, en application du paragraphe 303(1), une partie idoine aux fins de la présente demande. Le comité d’appel n’a toutefois pas demandé par requête à être soustrait du nombre des défendeurs. Il s’est lui‑même comporté comme un défendeur en déposant des affidavits et en présentant des observations, et il a même demandé de l’argent à la Cour, tel que les demandeurs l’ont souligné, pour pouvoir agir en l’instance. En de telles circonstances, le comité d’appel ne peut maintenant demander à la Cour de rejeter la demande au motif qu’il n’est pas un défendeur idoine. En outre, l’inobservation d’une disposition des Règles des Cours fédérales est considérée comme une irrégularité qui n’entache pas l’instance de nullité (article 56).

 

[45]           Je n’estime donc pas indiqué de rejeter la présente demande pour défaut de désignation des défendeurs idoines.

 

[46]           La 2e question en litige

            Les décisions du comité d’appel devraient‑elles être annulées?

            La juge Tremblay‑Lamer était saisie d’une demande de contrôle judiciaire qui visait la même bande et la Loi dans Abbott c. Première nation du lac Pélican, 2003 CFPI 340. Une partie des motifs de sa décision (paragraphes 21 à 25) est reproduite ci‑après :

Le paragraphe 11(2) de la Loi exige que le comité « administre tous les appels relatifs aux élections conformément à la Elections Act ». Conformément à l’alinéa 12(3)b), l’appel est une procédure en deux étapes. À l’étape initiale, le comité doit examiner la plainte et déterminer dans un délai de sept jours « si l’appel doit être entendu compte tenu de la suffisance de la preuve présentée dans la plainte [...] ». Cette décision est uniquement fondée sur la plainte. Le comité a le droit de rejeter la plainte s’il croit que les allégations sont insuffisantes pour justifier la tenue d’une audience officielle. Je note que la Loi ne renferme aucune disposition au sujet de la question de savoir si la décision doit être prise par consensus ou si elle peut être prise à la simple majorité. Il me semble qu’une objection soulevée par un membre indiquerait fortement qu’il existe suffisamment d’éléments de preuve pour procéder à une audience formelle et qu’il ne convient pas de rejeter sommairement l’appel eu égard aux circonstances.

 

Si le comité décide d’entendre l’appel, conformément au paragraphe 12(4), toutes les personnes concernées sont avisées et l’audience est tenue dans les quatorze jours de la réception de la plainte. À l’audience, conformément au paragraphe 12(5), les appelants présentent leur preuve, les intimés ont le droit de soumettre une réponse et une défense complètes et les appelants ont la possibilité de soumettre une contre‑preuve. À l’audience, le comité entend toute la preuve pertinente soumise par les appelants et par les intimés.

 

Les demandeurs soutiennent que le comité n’a pas suivi la procédure énoncée dans la Loi puisque le DE, Osborne Turner, et la scrutatrice, Lisa Chamakese, étaient présents et qu’ils ont soumis des observations à la réunion initiale du comité.

 

Les personnes chargées de prendre des décisions administratives peuvent à bon droit tirer des conclusions au sujet de la valeur probante de la preuve ou conclure que certaines plaintes ne méritent pas d’être poursuivies au‑delà du stade de l’enquête à cause d’une faiblesse intrinsèque (Tan c. Société canadienne des postes (1995), 97 F.T.R.1), mais elles doivent néanmoins observer les règles d’équité procédurale. En l’espèce, il n’est pas contesté que le comité était autorisé en vertu de la loi à rejeter la plainte des demandeurs à la première étape de l’audience. Toutefois, c’est le fait que le comité a rendu sa décision après avoir entendu l’avis du DE qui est contesté. Le point litigieux ne se rapporte pas à la substance de la décision elle‑même, mais plutôt à la façon dont le comité y est arrivé. Sur ce point, contrairement à l’argument du défendeur, le fait que la Loi comporte une clause privative n’a rien à voir avec la question de savoir si le comité à agi d’une façon équitable.

 

À mon avis, il ne convenait pas pour le DE et pour la scrutatrice d’être présents et de soumettre des observations à la réunion initiale du comité. La présence du DE et de la scrutatrice ne peut pas être considérée comme neutre. M. Turner et Mme Chamakese n’avaient pas intérêt à voir un candidat l’emporter sur un autre candidat, mais ils avaient intérêt à convaincre le comité que l’élection qu’ils supervisaient avait été légalement tenue. Ils n’étaient pas des observateurs impartiaux.

 

 

[47]           Pour résumer, la procédure d’appel prévue dans la Loi comporte deux étapes. En premier lieu, le comité d’appel détermine, après réception d’une plainte, si l’appel doit ou non être entendu compte tenu de la suffisance de la preuve. En deuxième lieu, si le comité décide d’entendre l’appel, toutes les parties concernées doivent être avisées de la date de l’audience, laquelle doit avoir lieu dans les 14 jours qui suivent la réception de la plainte. Les appelants doivent présenter leurs arguments lors de l’audition de l’appel et les intimés ont le droit de soumettre une réponse.

 

[48]           En l’espèce, le comité d’appel a reçu la plainte et il a envoyé un avis, daté du 15 mars 2004, où il déclarait qu’il accueillait l’appel et attestait la nullité du résultat de l’élection. Le comité d’appel a soutenu que la Loi lui conférait le pouvoir de ce faire. Le comité s’est fondé, peut‑on présumer, sur le paragraphe 11(3) de la Loi, qui prévoit :

Il incombe au comité d’appel d’attester le résultat de l’élection du conseil de la bande du lac Pélican si un appel est interjeté après la tenue d’une élection générale ou partielle.

 

[49]           Il faut toutefois interpréter cette disposition à la lumière des autres dispositions qui régissent le processus d’appel. Après réception d’une plainte, le comité d’appel doit déterminer si l’appel doit être entendu compte tenu de la suffisance de la preuve. À cette étape initiale du processus d’appel, le comité n’a pas à décider s’il doit accueillir ou non l’appel et attester la nullité du résultat de l’élection. C’est après l’audience d’appel, où toutes les parties ont l’occasion de défendre leur cause, que l’on doit décider d’accueillir ou non l’appel.

 

[50]           Ainsi, en rendant sa décision du 15 mars 2004, le comité d’appel n’a pas suivi la procédure prévue par la Loi.

 

[51]           Le comité d’appel a en outre mené la procédure d’appel d’une manière soulevant des inquiétudes quant à l’équité procédurale. L’avis qu’il a donné aux demandeurs relativement à l’audience d’appel n’était pas suffisant. Les demandeurs ont déclaré ne pas avoir tous reçu l’avis, vu qu’il a été donné moins de 48 heures avant l’audience d’appel fixée et que certains d’entre eux étaient alors à l’extérieur de la province. Les demandeurs n’ayant pas été avisés, ils ne se sont pas présentés à l’audience d’appel et n’ont donc pas soumis d’observations en réponse aux allégations concernant l’élection du 5 mars.

 

[52]           Puisque le comité d’appel n’a pas dûment suivi la procédure d’appel prévue dans la Loi et qu’il n’a pas donné aux demandeurs un avis suffisant de l’audience d’appel (de sorte que les demandeurs n’ont pas eu l’occasion de répliquer aux allégations portées contre eux), les décisions du comité d’appel relatives à l’élection du 5 mars devraient être annulées.

 

[53]           La demande de contrôle judiciaire est par conséquent accueillie.

 

[54]           Je désire aussi faire de brefs commentaires relativement à la prétention du défendeur selon laquelle la demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée parce que les demandeurs n’ont pas désigné (à titre de défendeur) l’une des personnes directement touchées par l’ordonnance, en l’occurrence Donald Abbott. Je suis bien d’avis que M. Abbott aurait dû être désigné comme défendeur. Cela ne modifie toutefois en rien ma conclusion selon laquelle la décision du comité d’appel doit être rejetée parce que celui‑ci n’a pas suivi la procédure énoncée dans la Loi.

 

[55]           Étant donné la décision que je rends en l’espèce, je ne traiterai pas de l’affidavit des demandeurs concernant l’enquête criminelle menée par la GRC.

 

[56]           Dans leur mémoire des faits et du droit, les demandeurs ont sollicité les mesures de redressement qui suivent :

[traduction]

Par conséquent, les demandeurs sollicitent respectueusement une ordonnance déclaratoire prévoyant :

 

a.)                que l’élection et le résultat de l’élection du 5 mars 2004 sont valides et confirmés;

 

b.)                que la décision du 15 mars 2004 du comité d’appel est nulle et invalide, ou annulée, qu’il n’y a pas de motifs de porter en appel l’élection et le résultat de l’élection du 5 mars et que le comité d’appel n’aurait pas dû rendre une telle décision et qu’il lui est interdit de rendre une telle décision;

 

c.)                que la décision du 23 mars 2004 du comité d’appel est nulle et invalide, ou qu’elle est annulée;

 

d.)                que les actions et les décisions prises par le comité d’appel entre le 23 mars 2004 et l’élection de bande du 16 avril 2004 concernant l’appel relatif à l’élection du 5 mars 2004, puis la tenue subséquente de l’élection du 16 avril 2004 et toutes les questions incidentes et connexes sont nulles et invalides, ou sont annulées;

 

e.)                que l’élection de bande du 16 avril 2004 et son résultat sont nuls et invalides, ou sont annulés;

 

f.)                  l’octroi des dépens, dommages‑intérêts et(ou) autres mesures de redressement pouvant être requis dans la présente affaire et que l’honorable Cour jugera bon d’octroyer.

 

 

[57]           Je ne suis pas disposé à déclarer valide le résultat de l’élection du 5 mars 2004 parce que c’est ce qu’il résulterait d’une décision du comité d’appel de rejeter l’appel. Pour la même raison, je ne suis pas disposé à annuler le résultat de l’élection de bande du 16 avril 2004.

 

[58]           Je suis disposé à accorder les mesures de redressement ci‑dessous. Une ordonnance suivra, prévoyant ce qui suit :

1.         Les décisions du 15 mars 2004 et du 23 mars 2004 du comité d’appel sont annulées.

2.         L’appel relatif à l’élection du 5 mars 2004 et au résultat de cette élection est renvoyé au comité d’appel pour qu’il rende une nouvelle décision en conformité avec la Loi, l’étape prévue à l’alinéa 12(3)b) débutant dans les 14 jours qui suivent la réception de la présente ordonnance. Toute autre étape devra se dérouler en conformité avec la Loi.

3.         Les dépens des demandeurs dans le cadre de la présente demande leur sont adjugés.

 

[59]           L’affaire ne peut être renvoyée à un comité d’appel différemment constitué parce qu’aucune disposition ne prévoit une telle nouvelle constitution. Le paragraphe 11(1) de la Loi requiert que le comité d’appel soit constitué de la manière suivante :

[traduction]

11(1)  Un comité d’appel est constitué par les membres à l’assemblée de mise en candidature, immédiatement après que la fin des mises en candidature a été annoncée par le directeur des élections ou par la personne que celui‑ci aura désignée.

 

 


JUGEMENT

 

[60]           LA COUR ORDONNE :

            1.         Tel que mentionné ci‑dessus, la demande de contrôle judiciaire est accueillie.

            2.         Les décisions du 15 mars 2004 et du 23 mars 2004 du comité d’appel sont annulées.

            3.         L’appel relatif à l’élection du 5 mars 2004 et au résultat de cette élection est renvoyé au comité d’appel pour qu’il rende une nouvelle décision en conformité avec la Loi, l’étape prévue à l’alinéa 12(3)b) débutant dans les 14 jours qui suivent la réception de la présente ordonnance. Toute autre étape devra se dérouler en conformité avec la Loi.

            4.         Les dépens des demandeurs dans le cadre de la présente demande leur sont adjugés.

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


ANNEXE

 

Les dispositions législatives pertinentes

 

 

Les dispositions pertinentes de la Pelican Lake Election Act sont les suivantes :

 

            [traduction]

2.         Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente Loi.

 

[. . .]

 

j)    « élection » ou « élection générale » Le processus de choix des dirigeants au moyen duquel le chef et les conseillers sont choisis selon les coutumes de la bande et conformément aux dispositions de la présente Loi.

 

[. . .]

 

11(1)  Un comité d’appel est constitué par les membres à l’assemblée de mise en candidature, immédiatement après que la fin des mises en candidature a été annoncée par le directeur des élections ou par la personne que celui‑ci aura désignée.

 

(2)  Le comité d’appel supervise et administre tous les appels relatifs aux élections conformément à la Elections Act.

 

(3)  Il incombe au comité d’appel d’attester le résultat de l’élection du conseil de la bande du lac Pélican si un appel est interjeté après la tenue d’une élection générale ou partielle.

 

(4)  Les membres du comité d’appel exercent leurs fonctions tant que tous les appels ne sont pas réglés. Aucun membre du comité d’appel ne peut être membre du conseil de la bande.

 

12(1)  Un candidat à l’élection ou un électeur qui a voté à l’élection peut, dans les quatorze (14) jours civils de la tenue du scrutin, interjeter appel contre l’élection s’il a des motifs raisonnables de croire :

 

a)  qu’une erreur ou violation de la Elections Act a été commise sur le plan de l’interprétation ou de l’application de la Loi, laquelle a peut‑être influé sur le résultat de l’élection;

 

b)  un candidat à l’élection n’était pas habile à être présenté conformément à la Loi; ou

 

c)  on a eu recours à des manoeuvres frauduleuses en violation de la Elections Act.

 

(2)  L’appel d’une élection de la bande du lac Pélican est interjeté selon les modalités suivantes :

 

a)  un avis d’appel, dûment certifié par un affidavit approprié, est transmis par courrier recommandé ou en mains propres au directeur des élections; les motifs de l’appel y sont énoncés et un montant de trois cents dollars (300 $) y est joint, en espèces ou sous la forme d’un chèque certifié ou d’un mandat, au nom de l’Administration de la bande du lac Pélican. L’avis d’appel doit être reçu dans les quatorze (14) jours civils de la date de l’élection;

 

b)  si l’appel est accueilli, la somme consignée est remise;

 

c)  si l’appel est rejeté, la somme consignée est confisquée au profit de la bande du lac Pélican; elle est affectée aux frais de conduite de l’appel.

 

(3)  Le comité d’appel :

 

a)  est composé de cinq (5) personnes impartiales, dont la majorité sont membres de la bande, y compris au moins une (1) personne d’affaires, une personne exerçant une profession ou un directeur de banque local qui n’est pas membre de la bande;

 

b)  dans les sept (7) jours qui suivent la réception de la plainte, détermine si l’appel doit être entendu compte tenu de la suffisance de la preuve présentée dans la plainte et par la suite, le plus tôt qu’il est raisonnablement possible de le faire, informe la bande, le plaignant ou les plaignants [l’appelant ou les appelants] et tout candidat qui pourrait être touché par une décision défavorable du comité d’appel [l’intimé ou les intimés] de la décision préliminaire qu’il a rendue.

 

(4)  Si le comité d’appel décide d’entendre l’appel, l’audience a lieu dans les quatorze (14) jours qui suivent la réception de la plainte. Toutes les personnes concernées sont avisées par courrier recommandé de la date, de l’heure et du lieu de l’audience ainsi que des motifs d’appel.

 

(5)  À l’audition de l’appel, l’appelant présente sa preuve. Les intimés ont le droit de soumettre une réponse et une défense complètes. L’appelant a alors la possibilité de présenter une contre‑preuve. Les parties peuvent être représentées par un avocat ou par un conseiller à leurs propres frais. Le comité d’appel entend toute la preuve pertinente fournie par l’appelant et par l’intimé.

 

(6)  Dans les sept (7) jours qui suivent l’audition de l’appel, le comité d’appel rend l’une des décisions suivantes :

 

a)  le comité rejette l’appel au motif que la preuve présentée ne révélait pas l’existence d’une infraction à la Loi et il en informe la bande et le plaignant;

 

b)  le comité accueille l’appel mais confirme la validité de l’élection, au motif qu’on ne peut raisonnablement estimer que l’infraction a influé sur le résultat de l’élection;

 

c)  le comité accueille l’appel et ordonne la tenue d’une nouvelle élection dans les vingt et un (21) jours qui suivent sa décision sur l’appel, pour l’ensemble ou un certain nombre des postes pour lesquels l’élection était contestée, en donnant des directives précises pour faire en sorte que soit corrigé ce qui a motivé la décision sur l’appel. Aucun candidat nouveau ou additionnel ne peut être présenté en dehors de la liste des candidats qui ont brigué les suffrages lors de l’élection générale ou partielle visée par l’appel.

 

(7)  Lorsqu’un appel est interjeté auprès du comité d’appel en vertu du paragraphe 12(1), le comité d’appel :

 

a)  dans les sept (7) jours qui suivent la réception de la demande d’appel, en transmet copie ainsi que des documents à l’appui;

 

b)  transmet dans les meilleurs délais, par courrier recommandé, copie de sa décision préliminaire à chacune des parties désignées à l’alinéa 12(3)b);

 

c)  avise chacune des parties susmentionnées, par courrier courant, courrier électronique ou télécopieur, de la date, de l’heure et du lieu de l’audience, s’il en est, ainsi que des motifs d’appel;

 

d)  avise chacune des parties susmentionnées, par courrier recommandé, de sa décision.

 

(8)  La décision du comité d’appel est définitive.

 

 

 


 

 

 

            Les dispositions pertinentes des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, sont reproduites ci‑après.

 

 

56. L’inobservation d’une disposition des présentes règles n’entache pas de nullité l’instance, une mesure prise dans l’instance ou l’ordonnance en cause. Elle constitue une irrégularité régie par les règles 58 à 60.

 

56. Non‑compliance with any of these Rules does not render a proceeding, a step in a proceeding or an order void, but instead constitutes an irregularity, which may be addressed under rules 58 to 60.

 

58. (1) Une partie peut, par requête, contester toute mesure prise par une autre partie en invoquant l’inobservation d’une disposition des présentes règles.

 

58. (1) A party may by motion challenge any step taken by another party for non‑compliance with these Rules.

When motion to be brought

 

(2) La partie doit présenter sa requête aux termes du paragraphe (1) le plus tôt possible après avoir pris connaissance de l’irrégularité.

 

(2) A motion under subsection (1) shall be brought as soon as practicable after the moving party obtains knowledge of the irregularity.

 

59. Sous réserve de la règle 57, si la Cour, sur requête présentée en vertu de la règle 58, conclut à l’inobservation des présentes règles par une partie, elle peut, par ordonnance :

 

59. Subject to rule 57, where, on a motion brought under rule 58, the Court finds that a party has not complied with these Rules, the Court may, by order,

 

a) rejeter la requête dans le cas où le requérant ne l’a pas présentée dans un délai suffisant — après avoir pris connaissance de l’irrégularité — pour éviter tout préjudice à l’intimé;

 

(a) dismiss the motion, where the motion was not brought within a sufficient time after the moving party became aware of the irregularity to avoid prejudice to the respondent in the motion;

 

b) autoriser les modifications nécessaires pour corriger l’irrégularité;

 

(b) grant any amendments required to address the irregularity; or

 

c) annuler l’instance en tout ou en partie.

 

(c) set aside the proceeding, in whole or in part.

 

60. La Cour peut, à tout moment avant de rendre jugement dans une instance, signaler à une partie les lacunes que comporte sa preuve ou les règles qui n’ont pas été observées, le cas échéant, et lui permettre d’y remédier selon les modalités qu’elle juge équitables.

 

60. At any time before judgment is given in a proceeding, the Court may draw the attention of a party to any gap in the proof of its case or to any non‑compliance with these Rules and permit the party to remedy it on such conditions as the Court considers just.

 

104. (1) La Cour peut, à tout moment, ordonner :

 

104. (1) At any time, the Court may

 

a) qu’une personne constituée erronément comme partie ou une partie dont la présence n’est pas nécessaire au règlement des questions en litige soit mise hors de cause;

 

(a) order that a person who is not a proper or necessary party shall cease to be a party; or

 

b) que soit constituée comme partie à l’instance toute personne qui aurait dû l’être ou dont la présence devant la Cour est nécessaire pour assurer une instruction complète et le règlement des questions en litige dans l’instance; toutefois, nul ne peut être constitué codemandeur sans son consentement, lequel est notifié par écrit ou de telle autre manière que la Cour ordonne.

 

(b) order that a person who ought to have been joined as a party or whose presence before the Court is necessary to ensure that all matters in dispute in the proceeding may be effectually and completely determined be added as a party, but no person shall be added as a plaintiff or applicant without his or her consent, signified in writing or in such other manner as the Court may order.

 

303. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le demandeur désigne à titre de défendeur :

 

303. (1) Subject to subsection (2), an applicant shall name as a respondent every person

 

a) toute personne directement touchée par l’ordonnance recherchée, autre que l’office fédéral visé par la demande;

 

(a) directly affected by the order sought in the application, other than a tribunal in respect of which the application is brought; or

 

b) toute autre personne qui doit être désignée à titre de partie aux termes de la loi fédérale ou de ses textes d’application qui prévoient ou autorisent la présentation de la demande.

 

(b) required to be named as a party under an Act of Parliament pursuant to which the application is brought.

 

(2) Dans une demande de contrôle judiciaire, si aucun défendeur n’est désigné en application du paragraphe (1), le demandeur désigne le procureur général du Canada à ce titre.

 

(2) Where in an application for judicial review there are no persons that can be named under subsection (1), the applicant shall name the Attorney General of Canada as a respondent.

 

(3) La Cour peut, sur requête du procureur général du Canada, si elle est convaincue que celui‑ci est incapable d’agir à titre de défendeur ou n’est pas disposé à le faire après avoir été ainsi désigné conformément au paragraphe (2), désigner en remplacement une autre personne ou entité, y compris l’office fédéral visé par la demande.

(3) On a motion by the Attorney General of Canada, where the Court is satisfied that the Attorney General is unable or unwilling to act as a respondent after having been named under subsection (2), the Court may substitute another person or body, including the tribunal in respect of which the application is made, as a respondent in the place of the Attorney General of Canada.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        T‑616‑04

 

INTITULÉ :                                      LE CHEF PETER BILL et les CONSEILLERS

                                                           DENNIS LEWIS, ROMEO THOMAS,

                                                           FREDERICK WHITEHEAD, WILLIE THOMAS,

                                                           PETER SAKEBOW et DAVID THOMAS

                                                           c.

                                                           LE COMITÉ D’APPEL DE LA BANDE DU LAC PÉLICAN (ci‑après le comité d’appel),

                                                           RAYMOND DUMAIS, DEBBIE THOMAS, ALDEN HARRIS, ELMER THOMAS, JOHN UTZ et FRANCIS THOMAS, JIMMY BILL, HARRY THOMAS, CHARLES RABBITSKIN, WAYNE THOMAS, GARRY THOMAS et CALVIN THOMAS

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Saskatoon (Saskatchewan)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 12 décembre 2005

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS ET

DU JUGEMENT :                             LE 1er JUIN 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Anil K. Pandila, c.r.

 

POUR LES DEMANDEURS

Ron Cherkewich

 

 

Edward B. Stephens

 

POUR LES DÉFENDEURS –

Le comité d’appel de la bande du lac Pélican

 

POUR LES DÉFENDEURS –

Francis Thomas et al.

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pandila & Co.

Prince Albert (Saskatchewan)

 

Ron Cherkewich Legal Services

Prince Albert (Saskatchewan)

POUR LES DEMANDEURS

 

 

POUR LES DÉFENDEURS –

Le comité d’appel de la bande du lac Pélican

 

Stephens Law Office

Prince Albert (Saskatchewan)

POUR LES DÉFENDEURS –

Francis Thomas et al.

 

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