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Date : 20200319


Dossier : IMM-3348-19

Référence : 2020 CF 392

Ottawa (Ontario), le 19 mars 2020

En présence de monsieur le juge LeBlanc

ENTRE :

BERNATO AUGUSTE ET KATIANA TELFIN

demandeurs

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  Les demandeurs sont mari et femme et tous deux d’origine haïtienne. Ils se pourvoient en contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision de la Section d’appel des réfugiés [SAR] confirmant une décision de la Section de la protection des réfugiés [SPR]. Les deux instances ont conclu qu’ils étaient exclus de la protection du Canada en application de la section E de l’article premier de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 189 RTNU 150 [Convention] et de l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 21 [Loi], étant satisfaites qu’ils détenaient, en tout temps pertinent, le statut de résident permanent au Brésil, ce qui leur conférait essentiellement les mêmes droits que les ressortissants brésiliens.

[2]  Selon la section E de l’article premier de la Convention, la Convention ne sera pas applicable à une personne considérée, par les autorités compétentes du pays dans lequel cette personne a établi sa résidence, comme ayant les droits et les obligations attachés à la possession de la nationalité de ce pays. Pour sa part, l’article 98 de la Loi, qui incorpore cette disposition de la Convention en droit interne, stipule, notamment, qu’une personne visée par ladite disposition « ne peut avoir la qualité de réfugié ni de personne à protéger ».

[3]  La présente affaire ne soulève qu’une seule question, puisque les demandeurs ont laissé tomber, à l’audience du présent contrôle judiciaire, un argument d’équité procédurale qu’ils avaient soulevé dans leurs représentations écrites. Cette seule question a donc à voir avec le processus décisionnel suivi par la SAR pour en arriver à conclure que les demandeurs sont exclus de la protection du Canada.

[4]  Les demandeurs soutiennent plus particulièrement que la SAR a erré en ne spécifiant pas en quoi, une fois réglée la question de leur exclusion de la définition de réfugié ou de personne à protéger aux termes de la section E de l’article premier de la Convention et de l’article 98 de la Loi, elle était néanmoins autorisée, vu le silence de ces deux dispositions sur ce point, à se pencher, sur la base des articles 96 et 97 de la Loi, sur le risque prospectif auxquels ils feraient face advenant un retour dans leur pays de résidence et à en conclure, notamment, qu’une possibilité de refuge intérieur [PRI] viable s’offraient à eux à Rio de Janeiro.

[5]  Cette omission, plaident-ils, va à l’encontre du jugement rendu par cette Cour dans l’affaire Romelus c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 172 [Romelus], et rend, par conséquent, la décision de la SAR inintelligible.

II.  CONTEXTE

[6]  Les faits pertinents à la présente affaire peuvent se résumer comme suit. Les demandeurs sont arrivés au Canada, séparément, à l’été 2017. Ils arrivaient tous les deux des États-Unis où ils avaient séjourné après avoir quitté le Brésil. Ils ont chacun signé un formulaire de fondement de demande d’asile [FDA] exposant des récits distincts les ayant incités à quitter Haïti dans un premier temps, et le Brésil ensuite.

[7]  Le demandeur, M. Bernato Auguste, allègue dans son FDA avoir quitté Haïti pour le Brésil en 2013 en raison d’un conflit lié à une terre fertile dont son père était propriétaire et qu’un tiers voulait s’approprier. Pour s’être opposé à ce tiers, M. Auguste dit avoir reçu des menaces de mort, ce qui l’aurait incité à se relocaliser dans une autre ville du pays. Cette relocalisation, ajoute-t-il, ne l’aurait néanmoins pas empêché d’être la cible d’une tentative d’assassinat de la part d’individus engagés par cette personne. Il dit s’être résigné à quitter Haïti pour le Brésil en octobre 2013.

[8]  Une fois établi au Brésil, M. Auguste affirme avoir été victime du racisme ambiant dans ce pays où un grand nombre d’haïtiens sont battus, lynchés ou même tués en toute impunité. Plus particulièrement, il dit avoir été lui-même battu, en juillet 2015, à la sortie de son travail par un collègue et deux autres personnes. Après avoir dénoncé ce collègue à son superviseur, ce qui aurait entrainé le congédiement de ce dernier, il dit avoir reçu des menaces de mort de cette personne, ce qui l’aurait incité à se réfugier à Sao Paulo. Rien n’y fit, cependant, puisque le demandeur soutient avoir rencontré son persécuteur dans les rues de Sao Paulo quelques jours après s’y être installé. Le lendemain de cette rencontre fortuite, il quittait le Brésil pour les États-Unis où il affirme avoir demandé l’asile sans toutefois ne jamais recevoir de réponse. Il a donc traversé la frontière canadienne le 19 juillet 2017 en vue de réclamer la protection du Canada.

[9]  Quant à la demanderesse, Mme Katiana Telfin, elle allègue, en ce qui a trait à ce qu’il l’a incité à fuir Haïti, avoir été, en quelque sorte, la victime collatérale d’un conflit qui a éclaté en septembre 2010 entre son père et un homme qui l’accuse d’avoir causé la mort de sa fillette en ayant recours à des procédures mystiques vaudou. S’en serait suivi, selon le récit de Mme Telfin, l’incendie de la résidence familiale et des menaces de mort, tant à son endroit qu’à l’endroit de son père. Après s’être réfugiés en République Dominicaine entre décembre 2010 et 2015, Mme Telfin et son père seraient retournés en Haïti avec l’intention de reconstruire leur résidence incendiée. Le père de la fillette se serait alors manifesté, avec un groupe d’hommes armés, pour les avertir qu’ils allaient les tuer s’ils persistaient à reconstruire la maison.

[10]  Suite à cet indicent, le père de Mme Telfin aurait alors décidé de retourner en République Dominicaine alors que Mme Telfin se serait cachée chez une amie en Haïti avant de quitter pour le Brésil en février 2016. Peu de temps après son arrivée au Brésil, son père l’aurait informée que le père de la fillette allait se rendre au Brésil, ce qui aurait convaincu Mme Telfin de se rendre aux États-Unis, ce qu’elle aurait fait le 29 novembre 2016. La demanderesse est arrivée au Canada, en provenance des États-Unis, quelques semaines après M. Auguste, soit en août 2017.

[11]  Le défendeur est intervenu devant la SPR afin de faire valoir que les demandeurs avaient le statut de résident permanent au Brésil, que cela leur conférait les mêmes droits que les ressortissants brésiliens et qu’en conséquence, ils ne pouvaient bénéficier de la protection du Canada à la lumière de la section E de l’article premier de la Convention et de l’article 98 de la Loi.

III.  DÉCISIONS DE LA SPR ET DE LA SAR

[12]  Après avoir déterminé que les demandeurs avaient obtenu le statut de résident permanent au Brésil et qu’ils détenaient les mêmes droits que les ressortissants brésiliens, la SPR s’est enquis du risque auxquels ils feraient face advenant leur retour au Brésil. Dans chaque cas, la SPR a jugé ce risque non fondé, notamment en raison de contradictions et d’invraisemblances minant le récit de chaque demandeur. Quant à l’argument fondé sur le racisme et la discrimination ambiantes au Brésil à l’encontre des haïtiens, la SPR ne l’a pas retenu, étant d’avis que cette situation n’était pas d’un niveau tel qu’elle entrainait une possibilité sérieuse de persécution, au sens de l’article 96 de la Loi.

[13]  Après avoir fait ces constats, la SPR a conclu que les demandeurs étaient visés par la section E de l’article premier de la Convention et qu’ils ne pouvaient donc se voir reconnaître, par le jeu de l’article 98 de la Loi, la qualité de réfugié ou de personne à protéger, au sens des articles 96 et 97 de la Loi.

[14]  Saisie de l’appel formulé par les demandeurs, la SAR a d’abord noté que ceux-ci ne contestaient pas qu’ils étaient résidents permanents du Brésil au moment de l’audience devant la SPR. Elle n’a par ailleurs décelé aucune erreur dans la conclusion de la SPR selon laquelle les demandeurs, en raison de ce statut, bénéficiaient des mêmes droits que les ressortissants brésiliens. Elle a jugé qu’il n’y avait pas non plus matière à intervenir à l’égard de la conclusion voulant que le risque allégué par Mme Telfin, advenant son retour au Brésil, ne soit pas crédible.

[15]  Quant au risque invoqué par M. Auguste, la SAR ne l’a pas, elle aussi, jugé crédible, mais elle a tiré cette conclusion pour des raisons différentes de celles invoquées par la SPR. Quant au climat général de racisme et de discrimination qui prévaut au Brésil à l’endroit des haïtiens, la SAR a jugé, elle aussi, qu’il n’équivalait pas à de la persécution. Enfin, la SAR a jugé, en supposant crédible le risque invoqué par les demandeurs, qu’il existait néanmoins pour eux, à Rio de Janeiro, une PRI viable.

IV.  QUESTION EN LITIGE ET NORME DE CONTRÔLE

[16]  Comme je l’ai indiqué d’entrée de jeu, les demandeurs soutiennent, pour l’essentiel, que la SAR a commis une erreur justifiant l’intervention de la Cour en analysant le risque prospectif auxquels ils feraient face advenant leur retour dans leur pays de résidence, après avoir aussi décidé qu’ils étaient exclus de la protection du Canada en application de la section E de l’article premier de la Convention et de l’article 98 de la Loi.

[17]  Je note que les demandeurs ne contestent pas qu’en tout temps pertinent à la présente affaire, ils avaient le statut de résident permanent au Brésil. Ils ne contestent pas non plus la conclusion de la SAR à l’effet que ce statut leur conférait essentiellement les mêmes droits que ceux que possèdent les ressortissants brésiliens.

[18]  Il n’est par ailleurs pas contesté que la question en litige ici doit être examinée suivant la norme de la décision raisonnable. En effet, il est acquis que lorsqu’un décideur administratif est appelé à interpréter des dispositions de sa loi constitutive ou d’une loi étroitement liée à son mandat, sa décision est révisable suivant la norme de la décision raisonnable (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61 au para 30). L’arrêt récent de la Cour suprême du Canada dans Canada (Citoyenneté et Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] n’a pas modifié l’état du droit en cette matière (Vavilov au para 116; Célestin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 97 aux para 31-32 [Célestin]).

V.  ANALYSE

[19]  Les demandeurs plaident que dès lors qu’ils étaient exclus de la protection du Canada par l’effet de la section E de l’article premier de la Convention et de l’article 98 de la Loi, l’analyse du risque à laquelle s’est livrée la SAR, laquelle a abouti, notamment, à la conclusion relative à l’existence d’une PRI viable, ne reposait plus sur aucune assise juridique.

[20]  Comme j’en ai déjà fait état, la théorie des demandeurs repose essentiellement sur l’affaire Romelus.

[21]  Il importe de préciser, à ce stade-ci, qu’au moment où la présente affaire a été plaidée, le pouvoir de la SAR d’évaluer, lorsqu’elle était appelée à déterminer si un demandeur d’asile était exclu de la protection du Canada aux termes de la section E de l’article premier de la Convention et de l’article 98 de la Loi, le risque allégué auquel serait exposé ce demandeur d’asile advenant son retour dans son pays de résidence, ne faisait pas de doute (Jean c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 242 aux para 21 et 24 [Jean]; Constant c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 990 au para 38; Milfort-Laguere c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1361 au para 39). Un doute subsistait – et subsiste toujours – par contre quant au moment où doit se faire cette évaluation : doit-elle obligatoirement précéder le constat relatif à l’exclusion ou peut-elle être faite une fois ce constat établi? (Romelus au para 43; Jean au para 21).

[22]  Comme le note, à juste titre, le défendeur, ce débat est académique en l’espèce puisque rien permet de conclure, lorsque la décision de la SAR est lue dans son ensemble, que celle-ci a évalué le risque allégué dans le pays de résidence seulement après avoir conclu à l’exclusion des demandeurs. L’argument des demandeurs repose essentiellement sur deux des 26 paragraphes de la décision de la SAR : le paragraphe 6, qui donne un aperçu des motifs à suivre, et le paragraphe 25, qui fait office de conclusion générale sur la question de l’exclusion. Cette façon de présenter la décision de la SAR ne lui rend pas justice en ce qu’elle dénature ce qui, à mon avis, étaye une démarche claire où l’évaluation du risque fait partie intégrante de la détermination de l’exclusion, et non l’inverse, le tout conformément à ce qu’enseignait le courant majoritaire des jugements de cette Cour sur cette question au moment où la présente affaire a été plaidée.

[23]  À mon avis, Romelus n’avance pas la cause des demandeurs puisque la Cour (madame la juge St-Louis), s’est interrogée, dans cette affaire, sur « le pouvoir de la SAR d’octroyer l’un de ces statuts [celui de réfugié ou de personne à protéger] une fois l’exclusion prononcée et conséquemment, sur l’opportunité d’analyser la crainte envers le pays de résidence à ce stade de l’analyse » (Romelus au para 4; voir aussi le para 39) [Je souligne]. La juge St-Louis a accueilli le contrôle judiciaire dans cette affaire afin que la SAR précise, s’il en est une, l’assise légale de ce pouvoir. Elle n’a pas certifié de question en vue d’un appel.

[24]  Dans la mesure, donc, où Romelus pose la question du pouvoir de la SAR d’examiner le risque prospectif qu’encourt un demandeur d’asile dans son pays de résidence « après avoir confirmé que [ce demandeur d’asile] est une personne visée par la section [E de l’article premier de la Convention] » (Romelus au para 39), cette question, comme nous l’avons vu, ne se pose pas ici. [Je souligne].

[25]  Cela reflète l’état du droit au moment où la présente affaire a été plaidée. Toutefois, le même jour où l’audience du présent contrôle judiciaire a eu lieu, la Cour (monsieur le juge Pamel), rendait publique sa décision dans l’affaire Célestin où le ministre défendeur a demandé à la Cour « de mettre fin au débat portant sur la question de savoir si la SPR et la SAR doivent analyser la crainte de persécution de la demanderesse du statut de réfugié ou le risque de préjudice auquel elle est exposée, dans le pays de résidence, avant ou après avoir décidé si la demanderesse est visée par l’article 1E de la Convention à l’étape du premier volet du critère énoncé dans l’arrêt Zeng (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Zeng, 2010 CAF 118, [2011] 4 RCF 3 [Zeng] » (Célestin au para 4).

[26]  L’arrêt Zeng énonce le cadre d’analyse suivant, en trois étapes, en vue de déterminer si la section E de l’article premier de la Convention s’applique à un demandeur d’asile:

[28]  Compte tenu de tous les facteurs pertinents existant à la date de l’audience, le demandeur a-t-il, dans le tiers pays, un statut essentiellement semblable à celui des ressortissants de ce pays? Si la réponse est affirmative, le demandeur est exclu. Si la réponse est négative, il faut se demander si le demandeur avait précédemment ce statut et s’il l’a perdu, ou s’il pouvait obtenir ce statut et qu’il ne l’a pas fait. Si la réponse est négative, le demandeur n’est pas exclu en vertu de la section 1E. Si elle est affirmative, la SPR doit soupeser différents facteurs, notamment la raison de la perte du statut (volontaire ou involontaire), la possibilité, pour le demandeur, de retourner dans le tiers pays, le risque auquel le demandeur serait exposé dans son pays d’origine, les obligations internationales du Canada et tous les autres faits pertinents.

[27]  Dans un jugement étoffé, le juge Pamel a conclu, pour l’essentiel, que pour donner plein effet à la section E de l’article premier de la Convention, malgré son silence quant à l’évaluation d’une crainte de persécution dans le pays de résidence lorsque le demandeur d’asile y bénéficie d’un statut essentiellement semblable à celui des ressortissants de ce pays, une telle évaluation s’imposait (Célestin au para 92). Toutefois, il s’est dit d’avis que la « mise en œuvre » de cette évaluation ne relevait ni de la SPR, ni de la SAR, mais devait plutôt se faire au stade de la procédure de l’évaluation de risques avant renvoi [ÉRAR], prévue aux articles 112 et 113 de la Loi, tels qu’amendés, une procédure distincte de celle aux termes de laquelle une demande d’asile est traitée et décidée (Célestin aux para 111 à 114).

[28]  Sur le plan du remède, le juge Pamel a jugé que l’intervention de la Cour, dans cette affaire, n’était pas justifiée, malgré les lacunes juridictionnelles identifiées, puisque, justement, l’analyse du risque effectuée par la SAR était sans importance, celle-ci n’étant pas tenue de l’effectuer (Célestin aux para 130-131).

[29]  Il a toutefois décidé de certifier une question de manière à permettre à la Cour d’appel fédérale, si elle juge que l’affaire s’y prête, de se prononcer sur le bien-fondé de son interprétation de l’effet combiné de la section E de l’article premier de la Convention et de l’article 98 de la Loi. Il a estimé, à cet égard, que cette question avait une portée générale transcendant les intérêts des parties au litige et qu’elle pourrait avoir une incidence sur l’issue de l’appel.

[30]  Sur ce dernier point, le juge Pamel a précisé que si son interprétation devait prévaloir en appel, une intervention judiciaire dans ce dossier ne serait pas justifiée compte tenu de l’inutilité de l’analyse du risque conduite par la SAR. Par contre, si son interprétation devait être renversée, une intervention judiciaire serait dans ce cas justifiée, ayant déjà conclu que cette analyse était déraisonnable, la SAR n’ayant pas abordé tous les éléments constituant le fondement de la crainte de la demanderesse envers le Brésil, son pays de résidence (Célestin au para 140).

[31]  Pour ces mêmes raisons, j’estime que l’affaire Célestin n’a aucun impact sur le présent dossier. En effet, si j’applique l’interprétation dégagée par le juge Pamel aux faits de la présente affaire, l’analyse du risque à laquelle s’est livrée la SAR en l’espèce devient inutile, puisque la SAR n’avait pas à l’effectuer. Dans une telle hypothèse, les demandeurs n’en subiraient pas de préjudice puisqu’ils pourraient faire valoir leur crainte d’un retour dans leur pays de résidence au stade de l’ÉRAR. Si je ne l’applique pas, l’intervention de la Cour ne serait pas davantage justifiée puisque, contrairement à ce qui était le cas dans Célestin, les demandeurs n’ont pas contesté devant moi le bien-fondé ou la raisonnabilité de l’analyse de risques effectuée par la SAR. Ils se sont contentés, je le rappelle, de contester le processus aux termes duquel la SAR en est arrivée à conclure à leur exclusion de la protection du Canada.

[32]  Ainsi, en tenant pour acquis le pouvoir de la SAR de procéder à une telle analyse dans le cadre de la mise en œuvre de la section E de l’article premier de la Convention, rien ne justifie que l’affaire soit retournée à la SAR, puisque les demandeurs ne lui adressent aucun reproche en lien avec les résultats de cette analyse.

[33]  Même si les parties n’en ont pas fait la demande à l’audience, je ne vois pas matière à certifier une question en vue d’un appel puisqu’encore une fois, contrairement à ce qui était le cas dans Célestin, une telle question, s’inspirant nécessairement de celle certifiée par le juge Pamel, ne saurait avoir, pour les raisons que je viens d’étayer, d’incidence sur l’issue de l’appel.

[34]  La présente demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée. Aucune question ne sera certifiée.


JUGEMENT dans le dossier IMM-3348-19

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée;
  2. Aucune question n’est certifiée.

« René LeBlanc »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3348-19

 

INTITULÉ :

BERNATO AUGUSTE ET KATIANA TELFIN c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 janvier 2020

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE LEBLANC

 

DATE DES MOTIFS :

LE 19 mars 2020

 

COMPARUTIONS :

Me Cristian F. Roa-Riveros

 

Pour les demandeurs

 

Me Chantal Chatmajian

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Cristian F. Roa-Riveros

Avocat

Montréal (Québec)

 

Pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

 

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