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Date : 19981023


Dossier : IMM-3264-97

     OTTAWA (ONTARIO), LE VENDREDI 23 OCTOBRE 1998.

     EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE TEITELBAUM

ENTRE :     


JAVED SHAIKH,


demandeur,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.

                                        

     ORDONNANCE

     Pour les motifs exposés dans les motifs de l'ordonnance, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                 " Max M. Teitelbaum "

                             J.C.F.C.

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.



Date : 19981023


Dossier : IMM-3264-97

ENTRE :     


JAVED SHAIKH,


demandeur,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.

                                        

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE TEITELBAUM :

INTRODUCTION

[1]      La présente demande de contrôle judiciaire vise la décision, en date du 27 juin 1997, par laquelle une agente de l'immigration a refusé la demande de résidence permanente du demandeur. La présente demande a été déposée conformément au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la Cour fédérale et au paragraphe 82.1(2) de la Loi sur l'immigration. Le demandeur cherche à obtenir une ordonnance de certiorari annulant la décision visée ainsi qu'une ordonnance de mandamus enjoignant au défendeur de traiter sa demande de résidence permanente ou, subsidiairement, une ordonnance renvoyant l'affaire à un autre agent d'immigration pour que celui-ci statue de nouveau sur la demande de résidence permanente au Canada.

LES FAITS

[2]      En 1988, le demandeur, un citoyen de l'Inde, a déménagé aux États-Unis avec son épouse et ses quatre enfants. Il a trouvé un emploi en 1989 au restaurant Kabana Grill & Bar à New York, qu'il a conservé jusqu'à ce que l'établissement ferme en 1994. Il a été sans emploi pendant deux ans et a commencé à travailler en 1996 dans un restaurant pakistanais à Brooklyn. Le 12 juin 1996, M. Shaikh a déposé une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie des immigrants indépendants à titre de traiteur auprès du consulat du Canada, Section de l'immigration, à Detroit (Michigan), aux États-Unis. Le 22 avril 1997, M. Shaikh a eu une entrevue avec une agente d'immigration. Dans une lettre en date du 27 juin 1997, le demandeur a été avisé que sa demande avait été refusée. Le refus de l'agente était fondé sur l'évaluation suivante :

         Âge                              10
         Demande dans la profession              10
         Préparation professionnelle spécifique      18
         Expérience                           0
         Emploi réservé                       0
         Facteur démographique                  08
         Études                          13
         Anglais                          06
         Français                           0
         Personnalité                      02
         TOTAL                              67

Décision de l'agente d'immigration

[3]      L'agente d'immigration a évalué la demande de M. Shaikh dans la catégorie des immigrants indépendants à titre de traiteur conformément aux paragraphes 8(1) et 9(1) du Règlement sur l'immigration de 1978. L'agente n'a pas attribué de point pour le facteur expérience, ni pour le facteur emploi réservé, mais a attribué deux points pour la personnalité, pour un total de 67 points. En ce qui concerne l'expérience de M. Shaikh, l'agente d'immigration a conclu que la lettre que le demandeur a présentée relativement aux emplois qu'il a occupés en Inde était très vague et très suspecte. En outre, l'agente d'immigration, après avoir abordé avec le demandeur la question de son expérience de travail à chacun des établissements dans lesquels il avait travaillé, a conclu, compte tenu de la définition de la CCDP, que M. Shaikh était incapable d'apporter des précisions sur des questions relatives aux tâches qu'il accomplissait à titre de traiteur et, par conséquent, elle n'a pas cru que le demandeur avait travaillé comme traiteur en Inde. M. Shaikh n'a obtenu aucun point pour le facteur emploi réservé parce que la lettre, qui devait attester qu'un emploi lui était assuré, était truffée d'erreurs, était rédigée de manière peu professionnelle et indiquait que [TRADUCTION] " le salaire serait évalué à l'entrevue ". Il ne s'agissait pas là, de l'avis de l'agente d'immigration, d'une offre d'emploi crédible. Le demandeur a convenu que la lettre n'était pas une offre d'emploi, mais seulement une invitation à une entrevue d'emploi. Quant au facteur personnalité, l'agente d'immigration a conclu que M. Shaikh manquait de motivation et d'ingéniosité et qu'il éprouverait des difficultés à s'établir au Canada. L'agente a tenu compte du fait que M. Shaikh avait été sans emploi pendant deux ans et demi, qu'il n'était retourné travailler qu'après avoir été informé de la tenue d'une entrevue avec un agent d'immigration et que le relevé bancaire du compte en banque américain fourni datait de plus d'une année et ne contenait pas suffisamment de fonds pour subvenir aux besoins d'une famille de six personnes. Par conséquent, deux points ont été attribués pour le facteur personnalité.

ARGUMENTATION

[4]      Le demandeur soutient que l'agente d'immigration a commis plusieurs erreurs de compétence et de procédure en rendant sa décision en date du 27 juin 1997. Premièrement, l'agente a tiré une conclusion de fait erronée qui était fondée sur des considérations inappropriées. Deuxièmement, l'agente d'immigration n'a respecté ni l'équité en matière de procédure ni la justice naturelle en menant son entrevue. Troisièmement, l'agente a commis une erreur de droit en décidant de refuser la demande de résidence permanente.

[5]      Le défendeur soutient que l'agente d'immigration n'a pas commis d'erreur de droit en évaluant l'expérience et la personnalité du demandeur. L'agente a évalué la demande du demandeur en tenant compte des facteurs figurant à la colonne I de l'annexe I du Règlement sur l'immigration de 1978 et de la crédibilité du demandeur. En outre, l'agente n'a pas manqué à ses obligations en matière de droits procéduraux étant donné qu'il ne lui appartenait pas d'aviser le demandeur des réserves qu'elle pouvait avoir relativement aux documents qu'il avait fournis au soutien de sa demande de résidence permanente.

[6]      Je suis convaincu, à la lecture de l'affidavit de l'agente d'immigration, qu'elle a effectivement avisé le demandeur de toutes ses réserves.

QUESTIONS EN LITIGE

[7]      Le demandeur soulève trois questions :

             
     1.      L'agente d'immigration a-t-elle omis de respecter un principe de justice naturelle, l'équité en matière de procédure ou d'autres exigences procédurales?
     2.      L'agente d'immigration a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée?         
     3.      L'agente d'immigration a-t-elle commis une erreur de droit en refusant la demande de résidence permanente du demandeur?         

    

Droits procéduraux

[8]      En l'espèce, le demandeur soutient que l'agente des visas a manqué à son devoir d'agir équitablement en ne lui donnant pas la possibilité de produire un autre élément de preuve à l'égard de ses ressources financières. L'agente a pris en considération un relevé bancaire américain qui datait de plus d'un an et qui ne contenait pas suffisamment de fonds pour subvenir aux besoins d'une famille de six personnes, de même que le fait qu'il avait été sans emploi pendant deux ans et demi, et elle a conclu que le demandeur manquait de motivation et d'ingéniosité et qu'il éprouverait des difficultés à s'établir au Canada.

[9]      Il est de droit constant qu'un agent des visas a l'obligation d'agir équitablement quand il évalue des demandes de résidence permanente en vertu de la Loi sur l'immigration. L'obligation d'agir équitablement exige que les demandeurs aient la possibilité de donner suite à tout renseignement préjudiciable se rapportant à leur affaire. Ainsi, il est également exact que l'obligation d'agir équitablement peut exiger de l'agent des visas qu'il fasse part de ses réserves au demandeur de façon à ce que ce dernier puisse réagir en conséquence : Asghar c. Canada, [1997] A.C.F. 1091; Fong v. Canada (Minister of Employment and Immigration) (1990), 35 F.T.R. 305; Muliadi c. M.E.I., [1986] 2 C.F. 205 (C.A.F.).

[10]      Dans une affaire récente, Asghar c. Canada (précitée), la Cour fédérale a examiné la question de savoir si un agent des visas avait manqué à son obligation d'agir équitablement en ne donnant pas au demandeur la possibilité de présenter des éléments de preuve à l'égard de ses compétences. Le juge Muldoon a fait un examen de la jurisprudence et a conclu qu'il appartient au demandeur de convaincre l'agent des visas qu'il a rempli les conditions prévues par la Loi et que l'agent des visas n'est pas tenu de demander la présentation d'éléments de preuve ou d'éléments de preuve additionnels : Prasad c. M.E.I., [1996] A.C.F. 453; Hajariwala c. M.E.I., [1989] 2 C.F. 79; Wai c. M.C.I., [1996] A.C.F. 1387. Le juge Muldoon a ensuite examiné l'allégation de manquement à l'obligation d'agir équitablement et l'a rejetée en ces termes :

         On ne sait pas encore trop dans quelles circonstances l'équité procédurale exige que l'agent des visas informe le requérant de ses préoccupations. Toutefois, il est possible de conclure, compte tenu des arrêts précités, que cette obligation ne prend pas simplement naissance du fait qu'après avoir soupesé la preuve l'agent des visas n'est toujours pas convaincu du bien-fondé de la demande. La tâche de l'agent des visas consiste précisément à soupeser les éléments de preuve présentés par le requérant. Comme la Cour l'a dit, étant donné qu'il incombe au requérant de présenter une preuve, il n'est pas évident que l'agent des visas devrait être obligé de lui faire part du " résultat intermédiaire " à chaque stade de la procédure [Covrig v. M.C.I. , (1995), 104 F.T.R. 41].                 
        

         (Non souligné dans l'original.)

[11]      Bien qu'il soit manifeste que l'obligation d'agir équitablement s'applique à l'agente des visas, je ne peux conclure qu'elle a manqué à ce devoir. Comme en témoigne l'affidavit du défendeur, il a été mentionné à M. Shaikh pendant l'entrevue que son relevé bancaire américain faisait état de fonds insuffisants pour subvenir aux besoins d'une famille de six personnes. Le demandeur a simplement répondu que sa femme possédait des biens en Inde qui seraient vendus à cette fin et n'a pas fourni de relevé de compte bancaire américain courant. Je suis convaincu qu'il appartenait à M. Shaikh de fournir à l'agente les documents appropriés au soutien de sa demande et qu'il a eu la possibilité de le faire pendant l'entrevue ainsi que de réagir aux préoccupations de l'agente. J'estime que l'agente des visas n'a pas manqué à son obligation d'agir de façon équitable.

Facteurs pertinents à prendre en considération et à apprécier dans l'évaluation de l'expérience, de l'emploi réservé et de la personnalité du demandeur aux fins de la citoyenneté permanente.

[12]      Les facteurs à prendre en considération figurent à l'annexe I du Règlement sur l'immigration de 1978. Les facteurs visés par la présente demande de contrôle sont : l'expérience, l'emploi réservé et la personnalité.

[13]      Le demandeur soutient que l'agente des visas n'a pas tenu compte des éléments de preuve appropriés en évaluant son expérience. Dans son affidavit, M. Shaikh a déclaré qu'il avait travaillé comme traiteur pendant 12 ans. Il soutient avoir obtenu un diplôme de traiteur au Zarapar Catering Institute à Bombay (Inde) en 1984 et avoir travaillé à Bombay comme stagiaire de 1985 à 1986 et comme responsable d'un service de traiteur de 1986 à 1988, date à laquelle il a déménagé aux États-Unis. De 1989 à 1994, il a travaillé à New York comme traiteur. Il n'a pas travaillé de 1994 à 1996 parce qu'il ne pouvait pas trouver du travail dans son domaine, mais il a par la suite travaillé à compter de 1996 comme traiteur dans un restaurant pakistanais à Brooklyn.

[14]      Le défendeur soutient que l'agente a bel et bien tenu compte des éléments de preuve précédemment mentionnés. Dans son affidavit, l'agente déclare qu'ayant examiné les deux lettres d'emploi, elle a conclu qu'elles paraissaient avoir été modifiées et qu'en conséquence elle ne pouvait leur prêter foi. L'agente des visas affirme dans son affidavit à l'alinéa 2 b) : [TRADUCTION] " J'ai conclu que sa lettre de référence du Hotel Govardhan Bar & Restaurant était très suspecte. Sur le quart de la page du côté gauche figurait des taches noires qui paraissaient résulter d'une photocopie. Sur le verso de cette lettre de référence figurait une partie de son diplôme de traiteur qui y était photocopié de façon étrange "; et à l'alinéa 2 c) de son affidavit : [TRADUCTION] " la lettre de référence du restaurant Kabana Grill & Bar à New York contient son nom inséré en lieu et place de celui d'une autre personne dont le nom a été enlevé. L'appel de la lettre a également été modifié. Le nom désigne un petit établissement, mais l'une des fonctions du poste mentionnée est "la disposition et la décoration de salles de réception pour les clients" ". De plus, l'agente a conclu que le demandeur était incapable de répondre à des questions portant sur le commerce de traiteur et de donner des précisions sur la façon dont il accomplissait les tâches de traiteur. De l'avis du défendeur, l'agente n'a pas commis d'erreur en évaluant la crédibilité de la preuve documentaire du demandeur.

[15]      Le demandeur soutient également que l'agente a tenu compte de facteurs non pertinents en évaluant son offre d'emploi, tels que les fautes d'orthographe et de grammaire et le manque de professionnalisme. Le défendeur allègue que les documents n'étaient pas crédibles. L'agente affirme à l'alinéa 3 d) de son affidavit que [TRADUCTION] " le nom de l'entreprise et la description des services de Horizon Catering Services (l'offre d'emploi alléguée) sont rédigés sur un ordinateur domestique et contiennent des fautes de grammaire et d'orthographe, ce qui me donne l'impression d'être peu professionnel pour un commerce. Dans le premier paragraphe, ils lui offrent un emploi, mais par la suite ils lui demandent de fournir deux lettres de référence et des copies de ses certificats d'études. Ils ajoutent "nous discuterons de votre salaire à l'entrevue". Cela me porte à croire qu'on ne lui fait pas une offre d'emploi, mais qu'on l'invite à une entrevue. "

[16]      À mon avis, bien que les agents des visas ne soient pas experts en documents contrefaits, ils ont le devoir d'évaluer l'authenticité et la véracité des éléments de preuve documentaire présentés à l'appui des demandes de résidence permanente. J'estime que l'agente a exercé son pouvoir discrétionnaire en évaluant si les lettres de référence soulèvent des doutes en ce qui concerne leur authenticité et leur véracité. Je suis incapable de conclure que l'évaluation de l'agente, fondée sur les éléments de preuve dont elle disposait, est déraisonnable. Dans la décision Hussain v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration) (1997), 36 Imm. L.R. (2d) 232 (C.F. 1re inst.), le juge Heald a déclaré que " [l]e poids à accorder à une lettre de ce genre est une question de fait dont l'appréciation relève de l'agent des visas ".

[17]      En dernier lieu, le demandeur allègue dans son argumentation écrite que l'agente a commis une erreur dans l'évaluation de sa personnalité et qu'elle a pris en considération des facteurs non pertinents tels que son expérience, qui avait déjà été évaluée en fonction du facteur trois de l'annexe I du Règlement sur l'immigration de 1978. La décision montre que l'agente a tenu compte du fait que, dans les neuf années passées depuis son arrivée aux États-Unis, il a travaillé comme cuisinier en restauration rapide, serveur et garçon livreur, qu'il n'avait pas travaillé pendant deux à deux ans et demi et qu'il était retourné travailler après avoir appris la date de son entrevue avec un agent des visas. L'agente a également tenu compte du fait qu'interrogé au sujet de la période de deux ans au cours de laquelle il n'avait pas travaillé, le demandeur a répondu qu'il n'avait pas trouvé un travail qu'il aimait ou qui payait suffisamment. Enfin, le relevé bancaire fourni ne contenait pas suffisamment de fonds pour subvenir aux besoins d'une famille de six personnes.

[18]      Le demandeur soutient, dans son mémoire écrit, et non à l'audience, que cela équivaut à une double prise en considération et que l'agente a commis une erreur en évaluant sa personnalité. Bien que je sois d'accord avec le juge Wetston quand il affirme dans la décision Ho c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1994] A.C.F. 1845, que le facteur personnalité n'est pas destiné à englober des facteurs déjà évalués à d'autres égards, j'estime également que l'évaluation de la personnalité de quelqu'un est un facteur économique qui permet à un agent des visas de se faire une opinion à l'égard de l'aptitude d'un demandeur à réussir à subvenir à ses besoins dans son domaine de prédilection au Canada : Amir v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration) (1996), 125 F.T.R. 158 (1re inst.); Hussain v. Canada (précitée).

[19]      À mon avis, après avoir lu l'affidavit de l'agente des visas, au sujet duquel celle-ci n'a pas été contre-interrogée, je conclus que l'agente a pris en considération le nombre d'années passées par le demandeur aux États-Unis, le genre de travail qu'il a effectué, la durée des emplois ou l'absence d'emploi, les réponses fournies à l'entrevue relativement au métier de traiteur, ainsi que le manque de ressources financières pour subvenir aux besoins d'une famille de six personnes. J'estime que ces considérations ont été évaluées d'un autre point de vue sous le facteur personnalité pour permettre que soit mis en évidence la motivation, l'ingéniosité, l'esprit d'initiative et la faculté d'adaptation du demandeur relativement à son établissement avec succès au Canada. Comme l'énonce la décision Stefan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1995] A.C.F. 1793, l'examen d'un facteur, tel que les études, qui a déjà été évalué en fonction d'un autre facteur ne constitue pas nécessairement une double prise en considération quand il est envisagé sous un angle différent. Le juge Simpson énonce, à la page 2 :

         La requérante a obtenu le maximum de points pour ses études, et il est vrai que l'agent a pris en compte cette catégorie une seconde fois au moment d'apprécier la question de la personnalité. Toutefois, pour ce qui est de cette dernière catégorie, les études ont été considérées sous un angle différent. Au cours de cette appréciation, la question qui se posait était de savoir si la requérante avait la formation voulue pour se servir de ses qualités professionnelles en tant qu'ingénieure civile au Canada.                 
         À mon sens, cette méthode d'analyse n'est entachée d'aucune erreur. Il y avait certainement lieu, dans une analyse des facteurs, d'examiner si la requérante s'était renseignée de quelque façon sur les conditions qu'elle devait remplir pour travailler comme ingénieure civile au Canada, et il était pertinent aussi de vérifier si elle avait suivi les cours d'informatique nécessaires pour exercer sa profession au pays.                 

[20]      Bien que j'aie certaines réticences et certaines réserves à l'égard de la générosité dont l'agente a fait preuve en déterminant le nombre de points attribués sous les facteurs personnalité et expérience, je ne peux conclure que cette évaluation est déraisonnable compte tenu des commentaires précédents faits par l'agente des visas dans son affidavit, et, comme je l'ai déjà mentionné, elle n'a pas été contre-interrogée.

[21]      Dans la décision Fok c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1997] A.C.F. 1595, le juge Richard (maintenant Juge en chef adjoint) affirme :

         C'est aussi une règle établie que la Cour ne doit pas s'ingérer dans l'exercice qu'un organisme désigné par la loi fait d'un pouvoir discrétionnaire simplement parce que la Cour aurait exercé ce pouvoir différemment si la responsabilité lui en avait incombé. Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, la Cour ne devrait pas modifier la décision.                 

[22]      Dans la décision Omar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. 990, le juge Richard énonce :

         L'attribution de points d'appréciation à l'égard des compétences d'un demandeur en vue d'une admission au Canada relève du pouvoir discrétionnaire de l'agent des visas, et la Cour ne modifiera sa décision que si l'agent a manifestement eu tort d'exercer son pouvoir comme il l'a fait.                 
         [...]                 
         L'opinion de l'agent des visas selon laquelle le demandeur n'avait aucune expérience comme traiteur, de sorte qu'il ne pouvait pas lui délivrer un visa d'immigrant pour cette profession en vertu du paragraphe 11(1) du Règlement, est raisonnable et n'est pas arbitraire. Il n'existe aucun motif justifiant un contrôle judiciaire.                 

    

[23]      Dans l'arrêt To c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1996] A.C.F. 696, la Cour d'appel fédérale déclare :

         En l'espèce, l'agente d'immigration n'était pas convaincue que l'appelant avait soit le sens des affaires soit les ressources pécuniaires personnelles nécessaires pour établir une entreprise au pays. Nous sommes d'accord avec le juge en chef adjoint Jerome qu'il n'est pas justifié que la Cour intervienne. Dans l'arrêt Maple Lodge Farms Limited c. Gouvernement du Canada et autre, [1982] 2 R.C.S. 2, aux pages 7 et 8, le juge McIntyre déclare ce qui suit au nom de la Cour :                 
         C'est aussi une règle bien établie que les cours ne doivent pas s'ingérer dans l'exercice qu'un organisme désigné par la loi fait d'un pouvoir discrétionnaire simplement parce que la Cour aurait exercé ce pouvoir différemment si la responsabilité lui en avait incombé. Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, les cours ne devraient pas modifier la décision.                 

CONCLUSION

[24]      Il est manifeste, à la lecture de l'affidavit de l'agente des visas, que cette dernière a soigneusement étudié tous les éléments de preuve pertinents dont elle disposait et qu'elle a fait part de toutes ses réserves au demandeur.

[25]      Je ne peux conclure que l'agente des visas a commis une erreur en rendant la décision de refuser la demande de résidence permanente du demandeur.

[26]      La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[27]      Aucune des parties n'a présenté de questions devant être certifiées.

                 " Max M. Teitelbaum "

                             J.C.F.C.

OTTAWA (Ontario)

Le 23 octobre 1998.

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                  IMM-3264-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :          JAVED SHAIKH c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 20 octobre 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE TEITELBAUM

EN DATE DU :                  23 octobre 1998

ONT COMPARU :

M. Hart Kaminker                      POUR LE DEMANDEUR

Mme Bridget A. O'Leary                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Matthew M. Moyal

Don Mills (Ontario)                      POUR LE DEMANDEUR

M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada          POUR LE DÉFENDEUR

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