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                                                                                                                                  Date: 20001120

                                                                                                                            Dossier: T-2101-99

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                              appelant

et

WAI-CHEUNG CHAN

                                                                                                                                                  intimé

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE NADON

[1]         Il s'agit d'un appel interjeté par le ministre contre la décision par laquelle le juge de la citoyenneté Stuart Hodgson a approuvé, le 4 octobre 1999, la demande de citoyenneté présentée par l'intimé.

[2]         L'intimé, qui est né le 18 juin 1976, est citoyen du BDTC, Hong Kong. Il a obtenu le droit d'établissement au Canada le 11 décembre 1994 et il a demandé la citoyenneté le 30 septembre 1998. Du 23 septembre 1994 au 23 septembre 1998, le défendeur a été absent du Canada pendant 890 jours. Il a donc été présent au pays pendant 507 jours, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, de sorte qu'il lui manque un grand nombre de jours en vertu de l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, qui se lit comme suit :


5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

5. (1) Le ministre attribue le citoyenneté à toute personne qui, à la fois :

(c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante :

(i) for every day during which the peson was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;

[3]         À mon avis, cet appel doit être accueilli. Dans l'affaire Pourghasemi[1], le juge Muldoon a expliqué le sens de l'alinéa 5(1)c) comme suit :

En entreprenant une interprétation téléologique du texte de loi, on doit se demander pourquoi le législateur prescrit au moins trois ans de résidence au Canada durant les quatre années qui précèdent la date de la demande de citoyenneté.

Il est évident que l'alinéa 5(1)c) vise à garantir que quiconque aspire au don précieux de la citoyenneté canadienne ait acquis, ou se soit vu obligé d'acquérir, au préalable la possibilité quotidienne de « se canadianiser » . Il le fait en côtoyant les Canadiens au centre commercial, au magasin d'alimentation du coin, à la bibliothèque, à la salle de concert, au garage de réparation d'automobiles, dans les buvettes, les cabarets, dans l'ascenseur, à l'église, à la synagogue, à la mosquée ou au temple - en un mot là où l'on peut rencontrer des Canadiens et parler avec eux - durant les trois années requises. [...] Si le candidat ne passe pas par cet apprentissage, cela signifiera que la citoyenneté peut être accordée à quelqu'un qui est encore un étranger pour ce qui est de son vécu, de son degré d'adaptation sociale, et souvent de sa pensée et de sa conception des choses. [...]


La loi ne dit pas à la Cour de s'abandonner à la sentimentalité pour tourner ou pour défier la condition légale de résidence. Peut-être par méprise sur la jurisprudence de cette Cour en la matière, il semble que des demandeurs se sont fait conseiller que pour satisfaire à la condition prévue par la loi, il suffit d'avoir un ou des comptes bancaires canadiens, de s'abonner à des magazines canadiens, de s'inscrire à l'assurance-maladie canadienne, d'avoir une demeure et des meubles et autres biens au Canada et de nourrir de bonnes intentions, en un mot, tout sauf vivre vraiment au milieu des Canadiens au Canada pendant trois des années précédant la date de la demande, ainsi que le prescrit le législateur. On peut poser la question : « Mais si le candidat à la citoyenneté suit des études à l'étranger? Qu'y a-t-il de si urgent? » Si le candidat ne peut trouver une école ou université à sa convenance au Canada, qu'il suive les études à étranger puis revienne au Canada pour satisfaire à la condition de résidence. [...]

Ainsi donc, ceux qui entendent partager volontairement le sort des Canadiens en devenant citoyens du pays doivent le faire en vivant parmi les Canadiens, au Canada, durant trois des quatre années précédant la demande, afin de se canadianiser. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut faire à l'étranger, car la vie canadienne et la société canadienne n'existent qu'au Canada, nulle part ailleurs.

[4]         Je souscris entièrement à l'avis du juge Muldoon, à savoir que la personne qui demande la citoyenneté canadienne ne peut pas remplir les conditions de résidence énoncées à l'alinéa 5(1)c) pendant qu'elle vit à l'étranger d'une façon permanente ou presque permanente.

[5]         L'intimé ici en cause ne remplit clairement pas les conditions prévues à l'alinéa 5(1)c). Le juge Hodgson a donc commis une erreur en concluant que l'intimé était admissible à la citoyenneté canadienne.


[6]         Par conséquent, l'appel est accueilli et la décision que le juge Hodgson a rendue le 4 octobre 1999 est infirmée.

« Marc Nadon »

Juge

VANCOUVER (Colombie-Britannique)

le 20 novembre 2000.

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                 T-2101-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                MCI

c.

Wai-Cheung Chan

LIEU DE L'AUDIENCE :                     Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :                    le 17 novembre 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE du juge Nadon en date du 20 novembre 2000

ONT COMPARU :

Rama Sood                                                       pour l'appelant

Wai Cheung Chan                                             pour son propre compte

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg                                              pour l'appelant

Sous-procureur général du Canada



[1]            Re Pourghasemi (1993), 19 Imm.L.R. (2d) 259, pp. 260-261.

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