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Date : 20020711

Dossier : IMM-3739-01

OTTAWA (ONTARIO), LE JEUDI 11 JUILLET 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX

ENTRE :

                                                     SALEEM IBRAHIM MAAN

                                                                                                                                          demandeur

                                                                          - et -

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                                ORDONNANCE

Pour les motifs ci-après exposés, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question certifiée n'a été soulevée.

                                                                                                                            « François Lemieux »         

                                                                                                                                                                                                                     

                                                                                                                                                J U G E              

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


Date : 20020711

Dossier : IMM-3739-01

Référence neutre : 2202 CFPI 775

ENTRE :

                                                     SALEEM IBRAHIM MAAN

                                                                                                                                          demandeur

                                                                          - et -

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX

[1]                Dans la présente instance en contrôle judiciaire, Saleem Ibrahim Maan (le demandeur), un citoyen du Pakistan, conteste la décision en date du 15 janvier 2001 par laquelle l'agent des visas Mary Coulter (l'agent des visas) a refusé la demande de résidence permanente qu'il avait présentée dans la catégorie des immigrants autonomes en fonction de la profession envisagée d'ingénieur électricien (CNP 2133.0).

[2]                Les circonstances de l'affaire du demandeur sont fort inusitées car, après son entrevue, qui a eu lieu le 15 février 1999, le demandeur a reçu le 3 février 2000 une lettre l'informant que sa demande avait été approuvée et que des visas seraient délivrés à condition que sa demande demeure inchangée et qu'il continue à satisfaire aux autres exigences.

[3]                Toutefois, avant de boucler le dossier, des vérifications ont été entreprises à une date non précisée dans le Système de soutien des opérations des bureaux locaux (SSOBL) et on a découvert qu'un mandat non exécuté avait été délivré au Canada au sujet d'un individu ayant le même nom, le même pays d'origine et la même date de naissance que le demandeur.

[4]                Le mandat avait été lancé le 3 décembre 1993 contre un dénommé Saleem Maan qui avait tenté d'entrer illégalement au Canada et qui ne s'était pas présenté à son enquête. Cette personne avait vraisemblablement présenté une revendication du statut de réfugié dont elle avait par la suite été déclarée s'être désistée.


[5]                L'agent des visas a interrogé de nouveau le demandeur le 29 février 2000 pour lui fournir l'occasion de répondre à ses préoccupations au sujet du mandat non exécuté. Le demandeur a nié s'être jamais trouvé au Canada. Il a avancé l'hypothèse que la personne nommée sur le mandat était son frère ou un autre membre de sa famille, étant donné que toute sa famille se trouve maintenant au Canada. Ses empreintes digitales ont été prélevées, mais il n'a pas été possible de les comparer à celles du Saleem Maan qui était nommé dans le mandat parce que les empreintes de ce dernier ne se trouvaient pas au dossier.

[6]                Dans l'affidavit qu'elle a souscrit au soutien de la thèse du défendeur, l'agent des visas a déclaré qu'il y avait des motifs raisonnables de croire que les deux individus en question étaient une seule et même personne pour les raisons suivantes :

a)         ils avaient tous les deux une épouse du nom de Maan, Samina;

b)         les deux épouses ont le même lieu de résidence, Chicha Watni;

c)         la mère du demandeur s'appelle Manzoor, Bibi, et vit à Toronto, et elle est désignée sous le nom de Maan dans le formulaire d'immigrant admis, tandis que le dénommé Saleem Maan contre qui le mandat a été lancé a une mère qui s'appelle Manzoor Maan qui vit à Toronto;

d)         le demandeur a un frère nommé Tariq Maan à Toronto, tandis que l'autre M. Maan contre qui un mandat a été lancé a lui aussi un frère qui s'appelle Tariq Maan et qui vit à Toronto.


[7]                Dans son affidavit, l'agent des visas affirme que, le 12 novembre 2000, elle a examiné le dossier dans son ensemble, y compris les résultats de l'enquête menée par le contrôleur de l'immigration et la réponse que le demandeur a donnée aux préoccupations soulevées au sujet de sa tentative d'entrer au Canada. L'agent des visas affirme que, d'après l'entrevue et les résultats de l'enquête qui a eu lieu par la suite, elle était convaincue que le demandeur avait effectivement tenté d'entrer au Canada, à la suite de quoi un mandat avait été lancé contre lui.

[8]                Elle a jugé que le demandeur n'était pas crédible et que ce manque de crédibilité valait pour l'ensemble de sa demande et l'emportait sur toute décision déjà prise dans son dossier. Elle affirmait que le manque de crédibilité du demandeur minait toute sa demande, et notamment ses affirmations au sujet de ses études et son expérience de travail. Elle a souligné que le Saleem Maan qui faisait l'objet du mandat avait indiqué que la profession qu'il avait exercé de 1985 à 1992 était celle d'agriculteur sur la ferme de son père. En conséquence, l'expérience que le demandeur prétendait posséder comme ingénieur électricien n'était pas crédible. Il n'a recueilli aucun point pour le facteur de l'expérience ou pour celui de la profession. Aux termes du paragraphe 11(2) du Règlement sur l'immigration de 1978 (le Règlement), l'agent des visas ne peut délivrer un visa à un immigrant si celui-ci n'a pas obtenu au moins un point d'appréciation pour le facteur des études ou pour le facteur de l'expérience.

[9]                Dans la lettre du 15 janvier 2001 dans laquelle elle a communiqué sa décision, l'agent des visas a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION] Il a été jugé que vous n'avez pas dit la vérité dans les déclarations que vous avez faites au sujet de vos activités antérieures au Canada. Vous n'avez pas répondu de façon satisfaisante à mes préoccupations lorsque je vous les ai formulées. Je ne suis par conséquent pas convaincue de votre crédibilité dans l'ensemble et j'estime que votre manque de crédibilité vaut aussi pour vos affirmations antérieures au sujet de vos études et de votre expérience de travail.


Comme le paragraphe 11(2) du Règlement interdit de délivrer un visa d'immigrant dans une situation comme la vôtre, vous faites partie de la catégorie de personnes non admissibles au Canada visées à l'alinéa 19(2)d) de la Loi sur l'immigration de 1976. J'ai donc refusé votre demande.

ANALYSE

[10]            L'agent des visas a modifié l'opinion favorable qu'elle avait d'abord eue au sujet de la demande de résidence permanente du demandeur parce qu'elle a conclu qu'il n'était pas crédible et que ce manque de crédibilité comptait davantage que la preuve documentaire que le demandeur avait fournie à l'appui de sa demande, y compris une lettre de son employeur actuel au Pakistan et des documents attestant qu'il était titulaire d'un diplôme universitaire en génie.

[11]            L'agent des visas a tiré sa conclusion au sujet de la crédibilité parce qu'elle avait conclu que le demandeur n'avait pas dit la vérité en niant s'être déjà trouvé au Canada.

[12]            Dans ses notes STIDI, l'agent des visas a écrit ce qui suit :

[TRADUCTEUR] Le demandeur a maintenu tout au long de l'enquête qu'il n'était pas la même personne que celle contre qui un mandat avait été lancé et qu'il n'était jamais venu au Canada. La preuve présentée ne m'a pas convaincue que l'intéressé est effectivement une personne différente de celle contre qui le mandat a été lancé. Son manque de franchise mine la crédibilité de toute sa demande, y compris ses affirmations au sujet de ses études et de son expérience de travail.

[13]            L'affidavit de l'agent des visas est plus clair sur ce point. Elle affirme qu'elle a conclu que le demandeur et le dénommé Saleem Maan nommé dans le mandat de 1993 sont la même personne et que son affirmation qu'il n'était jamais venu au Canada auparavant est fausse.

[14]            L'agent des visas reprend cette opinion dans sa lettre de refus où elle déclare : « Il a été jugé que vous n'avez pas dit la vérité dans les déclarations que vous avez faites au sujet de vos activités antérieures au Canada. »

[15]            La présente demande ne soulève pas d'arguments d'équité comme la question de savoir si l'agent des visas a fait part de ses préoccupations au demandeur et si elle lui a donné la possibilité de faire valoir son point de vue pour la détromper.

[16]            La présente demande a plutôt été instruite en partant du principe que la conclusion que l'agent des visas a tirée au sujet de la crédibilité était déraisonnable dans les circonstances parce qu'elle ne constituait pas un motif suffisant pour pouvoir conclure que les deux individus étaient une seule et même personne.


[17]            Une conclusion de crédibilité est une conclusion qui repose sur les faits et qui donne lieu à l'application du critère prévu à l'alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale, en l'occurrence celui de savoir si l'auteur de la décision « a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose » . Ce critère s'apparente à la norme de contrôle judiciaire de la décision manifestement déraisonnable.

[18]            Le demandeur n'a pas réussi à me persuader que la conclusion tirée par l'agent des visas était manifestement déraisonnable.

[19]            L'agent des visas avait des motifs raisonnables de croire que les deux individus n'étaient en fait qu'un seul. La preuve démontrait que cette éventualité était fort possible. L'agent des visas a confronté le demandeur avec les faits et lui a fourni l'occasion de réagir. Il a réagi en se contentant de tout nier.

[20]            Suivant un principe fondamental de la Loi sur l'immigration et de son règlement d'application, les personnes qui cherchent à immigrer au Canada ont la charge de convaincre l'agent des visas qu'ils remplissent les qualités requises pour être admises.

[21]            Après avoir été confronté, le demandeur avait l'occasion de soumettre à l'agent des visas des éléments de preuve démontrant qu'il n'était pas la même personne que le Saleem Maan nommé dans le mandat de 1993. Il aurait pu le faire de plusieurs façons, mais il n'en a rien fait.

[22]            Dans ces conditions et compte tenu de la preuve dont elle disposait, l'agent des visas pouvait raisonnablement conclure que les deux individus étaient une seule et même personne à partir de la conclusion qu'elle avait tirée au sujet de la crédibilité.

[23]            Pour tous ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question certifiée n'a été soulevée.

                                                                                                                « François Lemieux »     

                                                                                                                                    J U G E              

OTTAWA (ONTARIO)

Le 11 juillet 2002

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                                           COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                      SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                        AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                  IMM-3739-01

INTITULÉ :                                 Saleem Ibrahim Maan

c.

Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :          Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :         Le 29 mai 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX

DATE DES MOTIFS :               Le 11 juillet 2002

COMPARUTIONS :

Jean-François Bertrand                                                        POUR LE DEMANDEUR

Sherry Rafai Far                                                                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jean-François Bertrand                                                        POUR LE DEMANDEUR

et Bertrand Deslauriers                                                       

Morris Rosenberg                                                                POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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