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Date : 20060314

Dossier : IMM-10493-04

Référence : 2006 CF 333

Ottawa (Ontario), le 14 mars 2006

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SNIDER

ENTRE :

MAHMOUD HAMIDI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ETDE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]         M. Mahmoud Hamidi, le demandeur, est un citoyen de l'Afghanistan qui a fait une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie du regroupement familial. Il a servi dans l'armée afghane de 1961 à 1990, s'élevant jusqu'au grade de colonel. En 1984, il est entré au service du ministère de la Sécurité, également appelé le KhAD, Khedamat-e Etelea'at-e Dawlati ou Khedamat Eminiate Dawleti (ci-après désigné comme KhAD). Il est arrivé en Allemagne le 18 septembre 1990, pays dont il est maintenant résident permanent.

[2]         Dans une décision datée du 28 octobre 2004, un agent des visas de l'ambassade du Canada en Allemagne (l'agent des visas, ou l'agent) a établi que le demandeur était interdit de territoire au Canada conformément aux alinéas 35(1)a) et 35(1)b) de la Loisur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR). Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de cette décision.

Décision de l'agent des visas

[3]         Voici, à titre d'information, les passages pertinents de la décision de l'agent :

[traduction] Dans votre demande d'asile, en date du 23 octobre 1990, comme dans votre réponse à ma lettre, vous avez confirmé que vous étiez au service du ministère de la Sécurité d'État de l'Afghanistan, aussi connu sous le nom de KhAD [...] Vous avez indiqué que vous aviez été instructeur militaire dans le KhAD de 1986 à 1990 et directeur du service de planification au ministère de la Défense de 1980 à 1984. Il importe de signaler que vous êtes devenu officier des forces armées afghanes le 4 août 1961 et que vous avez occupé différents postes jusqu'à votre départ de l'Afghanistan le 1er septembre 1990. Cela confirme que vous avez continué de servir dans l'armée pendant l'occupation soviétique de l'Afghanistan (de 1979 à 1989). Vous avez aussi indiqué dans votre demande d'asile qu'en 1989 on vous avait mentionné que vous deviez être transféré à vos fonctions normales et qu'il était possible que vous soyez promu au poste de commandant de division, ce qui vous aurait valu de passer du grade de colonel à celui de général. J'en conclus que vos supérieurs vous considéraient comme loyal et digne de confiance.

Je suis d'avis que, pendant vos quatre années de travail au KhAD et en raison de votre rang établi de colonel, vous avez dû en venir à bien connaître les fins limitées et brutales de cette organisation, dont les graves violations des droits de la personne sont de notoriété publique.

À la lumière de ce qui précède, j'estime que vous êtes interdit de territoire aux termes [des alinéas 35(1)a) et 35(1)b) de la LIPR].

[. . .]

Étant donné que votre grade de colonel et vos états de service au KhAD ont été démontrés, il est raisonnable de conclure que l'interdiction de territoire prévue aux alinéas 35(1)a) et 35(1)b) de la [LIPR] est établie et, par conséquent, je rejette votre demande de résidence permanente au Canada.

Questions en litige

[4]         Pour statuer sur la présente demande, il est nécessaire de répondre aux questions suivantes :

  1. L'agent des visas a-t-il rendu une décision déraisonnable ou manifestement déraisonnable en établissant que le demandeur était interdit de territoire aux termes de l'alinéa 35(1)a) de la LIPR?

  1. L'agent des visas a-t-il commis une erreur en concluant que le demandeur avait occupé un poste de rang supérieur au sens de l'article 35 de la LIPR et de l'article 16 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement)?

Économie générale de la loi

[5]         Comme indiqué plus haut, l'agent des visas a décidé que le demandeur était interdit de territoire au Canada aux termes des alinéas 35(1)a) et 35(1)b) de la LIPR. Voici le libellé de ces dispositions :

35. (1) Emportent interdiction de territoire pour atteinte aux droits humains ou internationaux les faits suivants :

35. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of violating human or international rights for:

a) commettre, hors du Canada, une des infractions visées aux articles 4 à 7 de la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre;

(a) committing an act outside Canada that constitutes an offence referred to in sections 4 to 7 of the Crimes Against Humanity and War Crimes Act;

b) occuper un poste de rang supérieur - au sens du règlement - au sein d'un gouvernement qui, de l'avis du ministre, se livre ou s'est livré au terrorisme, à des violations graves ou répétées des droits de la personne ou commet ou a commis un génocide, un crime contre l'humanité ou un crime de guerre au sens des paragraphes 6(3) à (5) de la Loisur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre; ou

(b) being a prescribed senior official in the service of a government that, in the opinion of the Minister, engages or has engaged in terrorism, systematic or gross human rights violations, or genocide, a war crime or a crime against humanity within the meaning of subsections 6(3) to (5) of the Crimes Against Humanity and War Crimes Act; or

(c) [ne s'applique pas en l'espèce].

(c) [not relevant to this application].

[6]         Il ressort clairement de ce libellé que les alinéas 35(1)a) et 35(1)b) de la LIPR sont distincts. Autrement dit, l'application de l'un ou l'autre alinéa donnera lieu à la conclusion que la personne est interdite de territoire. Je vais examiner chacun d'eux ci-après.

(a)    Alinéa 35(1)a)

[7]         Selon le premier alinéa, l'agent des visas était tenu de déterminer s'il avait des « motifs raisonnables de croire » (LIPR, art. 33) que le demandeur avait commis en Afghanistan des actes constituant des infractions prévues aux articles 4 à 7 de la Loisur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, L.C. 2000, ch. 24. Pour les besoins du présent contrôle judiciaire, il n'est pas nécessaire de reproduire ni d'examiner ces articles.

(b)    Alinéa 35(1)b)

[8]         Le deuxième alinéa fait état de deux exigences. La première est que l'agent doit avoir des motifs raisonnables de croire que la personne occupe un « poste de rang supérieur » . Ce terme est défini à l'article 16 du Règlement :

Pour l'application de l'alinéa 35(1)b) de la Loi, occupent un poste de rang supérieur au sein d'une administration les personnes qui, du fait de leurs actuelles ou anciennes fonctions, sont ou étaient en mesure d'influencer sensiblement l'exercice du pouvoir par leur gouvernement ou en tirent ou auraient pu en tirer certains avantages, notamment :

For the purposes of paragraph 35(1)(b) of the Act, a prescribed senior official in the service of a government is a person who, by virtue of the position they hold or held, is or was able to exert significant influence on the exercise of government power or is or was able to benefit from their position, and includes:

a) le chef d'État ou le chef du gouvernement;

(a) heads of state or government;

b) les membres du cabinet ou du conseil exécutif;

(b) members of the cabinet or governing council;

c) les principaux conseillers des personnes visées aux alinéas a) et b);

(c) senior advisors to persons described in paragraph (a) or (b);

d) les hauts fonctionnaires;

(d) senior members of the public service;

e) les responsables des forces armées et des services de renseignement ou de sécurité intérieure;

(e) senior members of the military and of the intelligence and internal security services;

f) les ambassadeurs et les membres du service diplomatique de haut rang;

(f) ambassadors and senior diplomatic officials; and

g) les juges [Non souligné dans l'original].

(g) members of the judiciary [emphasis added].

[9]         La deuxième exigence est que l'agent doit être convaincu que, pendant la période visée, le gouvernement de l'Afghanistan, de l'avis du ministre, s'est livré au terrorisme ou à des violations graves ou répétées des droits de la personne ou a commis un génocide, un crime contre l'humanité ou un crime de guerre au sens des paragraphes 6(3) à (5) de la Loisur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre. Autrement dit, le gouvernement en question doit faire partie de ceux qui ont été désignés par le ministre. Le mode de désignation n'est pas précisé dans la loi, ce qui laisse toute latitude au ministre. En consultant le site Web du ministère de la Justice, on apprend que neuf régimes ont été désignés, dont le suivant :

désignés le 21 octobre 1994 : les anciens régimes marxistes d'Afghanistan entre 1978 et 1992

[10]       Enfin, le paragraphe 35(2) fait état d'une exception à l'alinéa 35(1)b). Il est rédigé comme suit :

(2) Les faits visés aux alinéas (1)b) et c) n'emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l'étranger qui convainc le ministre que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l'intérêt national.

Paragraphs (1)(b) and (c) do not apply in the case of a permanent resident or a foreign national who satisfies the Minister that their presence in Canada would not be detrimental to the national interest.

Analyse

[11]       Pour commencer, j'aimerais mentionner que l'agent des visas, dans ses motifs, n'a pas fait d'analyse distincte pour chacun des alinéas 35(1)a) et b). L'analyse distincte des questions aurait clarifié les motifs pour le demandeur et la Cour. Cela dit, la forme que prennent les motifs ne doit pas être l'élément déterminant du présent recours. Il s'agit plutôt de déterminer si la décision, selon la norme de contrôle applicable, est susceptible de contrôle.

Norme de contrôle

[12]       L'agent des visas a pris une décision discrétionnaire. Dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, paragraphe 53, la Coursuprême a conclu que les décisions des agents d'immigration concernant les demandes d'immigration sont discrétionnaires et doivent faire l'objet d'une grande retenue. La Cour suprême a assujetti l'agent à la norme de la décision déraisonnable simpliciter. Dans la présente affaire, peu importe si j'applique la norme de la décision raisonnable ou la norme de la décision manifestement déraisonnable, la plus élevée, j'arriverais au même résultat.

Question 1 : Décision aux termes de l'alinéa 35(1)a)

[13]       En l'occurrence, les motifs invoqués par l'agent pour décider que le demandeur est interdit de territoire en vertu de l'alinéa 35(1)a) sont brefs. Les termes employés par l'agent me donnent à penser qu'il a conclu que le demandeur s'est rendu complice de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité, et non qu'il a commis lui-même ces crimes.

[14]       L'arrêt qui fait jurisprudence en droit canadien en ce qui concerne la complicité dans la perpétration de crimes internationaux est Ramirez c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] 2 C.F. 306 (C.A.F.). La Cour d'appel a statué qu'une personne peut être complice des crimes internationaux de son organisation si la preuve a établi une « participation personnelle et consciente » à ces infractions (paragraphe 15). La simple appartenance à une organisation peut suffire à prouver une participation personnelle et consciente dans le seul cas où cette organisation « vise principalement des fins limitées et brutales, comme celles d'une police secrète » (paragraphe 16).

[15]       Il n'est pas contesté que le demandeur a été membre du KhAD pendant quatre ans et qu'il y a occupé le grade de colonel. Le demandeur fait valoir qu'il n'était qu'instructeur et qu'il ne commandait pas à des soldats.

[16]       Le demandeur prétend d'abord que l'agent des visas n'a pas déterminé si le KhAD avait ou non commis des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité et qu'il n'a pas produit de preuve précise pour établir ces faits. Dans la décision Andeel c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), 2003 CF 1085, un agent des visas a commis une erreur en ne précisant pas de quelles infractions, prévues aux articles 4 à 7 de la Loi sur les crimes de guerre, le demandeur s'était fait complice. Dans cette affaire, il n'y avait pas au dossier de preuve suffisante pour que l'agent puisse raisonnablement conclure qu'une infraction donnée avait été commise.

[17]       Le défendeur soutient que les fins limitées et brutales du KhAD ont été établies par la Cour et la Cour d'appel à plusieurs reprises (Zazai c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) 2005 CAF 303; Zadeh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1995] A.C.F. no 94 (T.D.) (QL); Rasuli c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), [1996] A.C.F. no 1417 (T.D.) (QL)) et que l'appartenance à l'organisation conduit généralement (mais pas toujours) à une conclusion de complicité. À cela, je réponds qu'il aurait été loisible à l'agent d'examiner et d'appliquer les conclusions des causes antérieures. Ces causes font certainement partie des cas « de notoriété publique » qu'il a évoqués. Mais, en définitive, rien n'indique que l'agent s'est appuyé sur ces causes. Quiconque lit la décision de l'agent ne sait pas sur quelles informations il s'est fondé : jurisprudence, rapports, encyclopédies, articles de journaux, etc. Je n'ai aucun moyen de vérifier si la décision de l'agent selon laquelle le KhAD poursuit des fins limitées et brutales est raisonnable.

[18]       Même si une organisation vise des fins limitées et brutales, l'appartenance ne prouve pas toujours la complicité. En l'espèce, le demandeur a présenté une preuve de son rôle dans le KhAD. Je ne suis pas convaincue que l'agent a effectué une analyse pour déterminer si le demandeur, en tant qu'instructeur, était au courant des activités du KhAD ou s'il s'est dissocié de l'organisation à la première occasion. Rien n'indique que l'agent s'est intéressé à ce dernier point, malgré la preuve montrant que le demandeur a refusé une promotion et un poste de commandement et a fui peu de temps après.

[19]       Le défendeur est d'avis que l'agent a tiré une conclusion raisonnable à cause du grade du demandeur et de ses quatre années de service. Il signale que, dans l'arrêt Zazai, le demandeur a été jugé complice des activités du KhAD même si, en tant que capitaine, il n'occupait pas un grade aussi élevé que celui de colonel. Je note que, dans l'arrêt Zazai, il y avait une preuve concrète des opinions du demandeur et des actes précis à l'appui du KhAD. Le grade de M. Zazai n'est pas le seul facteur ayant mené à une conclusion de complicité.

[20]       En résumé, la décision de l'agent selon laquelle le demandeur est interdit de territoire aux termes de l'alinéa 35(1)a) soulève deux grands problèmes. Le premier, le plus important, est que l'agent n'a pas effectué une analyse suffisante ou précisé les éléments de preuve sur lesquels il s'est fondé pour établir que le KhAD poursuivait des fins limitées et brutales. Il devient impossible pour moi de déterminer si la preuve justifie la décision de l'agent. Le second problème est que l'agent semble avoir abrégé son analyse en concluant que le demandeur connaissait et cautionnait les crimes commis par le KhAD simplement à cause de son grade. Le libellé de la décision donne à penser que l'agent n'a pas apprécié la preuve du demandeur qui aurait pu contredire cette conclusion. Il aurait été loisible à l'agent de conclure comme il l'a fait, si la Cour avait pu être assurée jusqu'à un certain point qu'il avait évalué la possibilité que le demandeur ne soit pas complice.

[21]       Je conclus donc que la décision de l'agent selon laquelle le demandeur était interdit de territoire en vertu de l'alinéa 35(1)a) de la LIPR était manifestement déraisonnable.

Question 2 : Décision aux termes de l'alinéa 35(1)b)

[22]       La prise d'une décision en vertu de l'alinéa 35(1)b) de la LIPR est beaucoup plus directe. La liste des régimes désignés, dont le régime afghan pendant la période visée par la demande, soustrait l'agent à une grande partie du travail d'appréciation. Contrairement à ce qui se produit pour l'alinéa 35(1)a), il n'est pas nécessaire d'analyser les infractions commises par le KhAD ni de déterminer si l'organisation poursuit des fins limitées et brutales. La désignation vise tout le gouvernement, y compris le KhAD.

[23]       En outre, l'agent est libéré dans une certaine mesure de l'obligation d'évaluer en détail la complicité du demandeur dans les actes du KhAD. L'article 16 du Règlement énumère les catégories de personnes qui « occupent un poste de rang supérieur » . Le demandeur reconnaît qu'il a été établi par la jurisprudence que, dès qu'une personne entre dans la catégorie d'un des alinéas 16a) à g), elle est considérée comme occupant un poste de rang supérieur (Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) c. Adam, [2001] 2 C.F. 337).

[24]       Bien que l'agent n'invoque pas expressément le sous-alinéa 16e) du Règlement, il a de toute évidence conclu que le demandeur avait fait partie des « responsables des forces armées » au sein du régime désigné. Le demandeur fait valoir que l'agent a pris cette décision sans s'appuyer sur des éléments de preuve pertinents. Le défendeur conteste en disant que le grade de colonel, surtout à la lumière de l'offre de promotion au rang de général, est suffisamment élevé pour se qualifier comme rang supérieur dans les forces armées.

[25]       La question qui se posait à l'agent - et qui se pose maintenant à la Cour - est la signification de « rang supérieur » . Ni la LIPR ni le Règlement n'en donnent une définition. Dans la décision Hussein v. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), [2001] D.S.A.I. no 1330, la Section d'appel de l'immigration indique, au paragraphe 13 :

Un membre militaire de haut rang serait une personne qui occupe un poste élevé dans l'armée, une situation plus avancée et, souvent, comptant à son actif un service relativement long. On peut reconnaître une situation avancée par les responsabilités qui sont confiées à la personne et par les postes occupés par ses supérieurs immédiats.

[26]       D'après cet énoncé, j'ajouterais que l'application de l'alinéa 16e) à un rang en particulier dépend des faits liés au régime militaire en question. Le grade de colonel ou de général est supérieur dans l'armée canadienne, mais je pense qu'il est erroné d'appliquer les critères canadiens à la hiérarchie militaire d'autres pays.

[27]       Ce point de vue est confirmé par la section 8.2 du chapitre « ENF 18 Crimes de guerre et crimes contre l'humanité » , du Guide de l'exécution de la loi de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), qui guide les agents dans la prise de décisions sur l'interdiction de territoire prévue à l'alinéa 35(1)b). Plus précisément, CIC indique que l'agent doit obtenir la « [p]reuve d'un poste de rang supérieur » et poursuit ainsi :

Outre la preuve nécessaire, on doit établir que le poste est de rang supérieur. À cette fin, on doit situer le poste dans la hiérarchie où le fonctionnaire travaille ... Si l'on peut prouver que le poste est dans la moitié supérieure de l'organisation, on peut considérer qu'il est un poste de rang supérieur. Un autre moyen de l'établir est celui des preuves de responsabilités liées au poste et du type de travail effectué ou des types de décisions prises (à défaut d'être prises par le demandeur, par les titulaires de postes analogues).

In addition to the evidence required, it must be established that the position the person holds or held is a senior one. In order to establish that the person's position was senior, the position should be related to the hierarchy in which the functionary operates. . . . If it can be demonstrated that the position is in the top half of the organization, the position can be considered senior. This can be further established by evidence of the responsibilities attached to the position and the type of work actually done or the types of decisions made (if not by the Applicant then by holders of similar positions).

[28]       Le chapitre ENF 18, à la section 8.4, incite aussi à la prudence les agents qui doivent prendre ce type de décision importante aux termes de l'alinéa 35(1)b) :

Les agents doivent être conscients de la nature délicate de ce qui touche L 35(1)b) et de la nécessité d'une évaluation soignée et approfondie de tous les renseignements pertinents. L'intention n'est pas que les agents emploient des critères si généraux que tous les employés de régimes désignés soient considérés comme interdits de territoire.

Officers should be aware of the sensitive nature of A35(1)(b) and the need for careful and thorough consideration of all relevant information. It is not intended that officers should cast the net so widely that all employees of a designated regime are considered inadmissible.

[29]       Enfin, dans le contexte de la présente demande, je signale le courriel envoyé à l'agent des visas par un analyste du Service des crimes de guerre contemporains, Agence des services frontaliers du Canada, qui donne les renseignements suivants :

[traduction] En ce qui concerne le demandeur, il ressort clairement de la note d'entrevue qu'il existe des motifs probables d'interdiction de territoire en vertu des alinéas 35(1)a) et 35(1)b), résumés ci-dessous. Cependant, l'information sur la carrière militaire du demandeur n'est pas très détaillée. Pour être en mesure de faire une recommandation finale, nous aimerions avoir un document des états de service militaire énumérant les unités et les officiers de commandement pour qui le demandeur a travaillé et le détail des distinctions ou mentions qu'il a reçues, ainsi qu'une copie de la demande IMM0008.

[30]       Ce courriel tend à montrer que même un spécialiste du domaine n'était pas en mesure de formuler une recommandation finale sans avoir obtenu plus de précisions. Dans la présente affaire, rien dans la preuve dont j'ai été saisie ne prouve que l'agent ait obtenu ces précisions. Il semble avoir supposé, sans plus de preuve, que le grade de colonel dans le régime marxiste afghan équivalait à un « rang supérieur » .

[31]       Comme l'agent n'a pas pris en considération, ou même essayé d'obtenir, d'autres renseignements sur la hiérarchie de l'armée afghane et sur le rôle du demandeur dans l'organisation, je conclus que sa décision aux termes de l'alinéa35(1)b) était irrémédiablement entachée.

Conclusion

[32]       Comme j'ai conclu que l'agent a commis une erreur en tirant ses conclusions aux termes des deux alinéas en cause, 35(1)a) et 35(1)b), la demande sera accueillie. Il n'est pas nécessaire d'examiner les autres points soulevés par le demandeur.

[33]       Aucune des parties n'a proposé de question à certifier. Aucune question ne sera donc certifiée.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE:

  1. La demande est accueillie et l'affaire est renvoyée à un autre agent des visas pour nouvel examen.

  1. Aucune question de portée générale n'est certifiée.

« Judith A. Snider »

                                                                                                ___________________________

                                                                                                            Juge

Traduction certifiée conforme

Lucie Boisvenue, trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-10493-04

INTITULÉ :                                        MAHMOUD HAMIDI c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                LE 8 MARS 2006

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LA JUGE SNIDER

DATE DES MOTIFS :                       LE 14 MARS 2006

COMPARUTIONS :

Ronald Poulton                                                                           POUR LE DEMANDEUR

Marina Stefanovic                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mamann & Associates                                                               POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

John H. Sims, c.r.                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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