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Date : 20011210

Dossier : IMM-343-00

Référence neutre : 2001 CFPI 1352

ENTRE :

AFFAIRE INTÉRESSANT le paragraphe 82.1(2) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chapitre I-2, ses modifications et ses règlements d'application; et l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chapitre F-7, ses modifications et ses règlements d'application;

ET AFFAIRE INTÉRESSANT une décision d'une agente des visas de la Section de l'immigration du Haut-Commissariat du Canada à Londres (Royaume-Uni);

                                                          MUHAMMAD MUKHTAR

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE McKEOWN

[1]                 Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire d'une décision datée du 3 décembre 1999 dans laquelle l'agente des visas a rejeté sa demande de résidence permanente en tant qu'immigrant indépendant.


[2]         Il faut déterminer si l'agente des visas a commis une erreur en affirmant que le demandeur n'avait pas toutes les compétences requises pour exercer les fonctions d'anesthésiste tout en lui accordant 15 points d'appréciation pour le facteur des études et de la formation et aucun point pour le facteur de l'expérience.

LES FAITS                                                                                                                                       

[3]         En septembre 1999, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente en tant qu'immigrant indépendant en indiquant qu'il envisageait d'exercer la profession d'inhalothérapeute (catégorie 3214 de la CNP).

[4]         Le demandeur a indiqué qu'il avait travaillé comme anesthésiste au Pakistan et en Irlande et qu'il avait commencé à exercer cette profession en octobre 1995. Il travaille actuellement dans un hôpital universitaire et l'une de ses fonctions consiste à enseigner l'inhalothérapie (l'anesthésie).

[5]         Dans une lettre datée du 3 décembre 1999, l'agente des visas a informé le demandeur que sa demande était rejetée. L'agente des visas a indiqué qu'elle avait évalué le demandeur au regard des conditions d'accès à la profession d'inhalothérapeute, et qu'elle lui avait accordé 68 points d'appréciation. La lettre ajoutait ceci :

[TRADUCTION] Pour accéder à la profession d'inhalothérapeute, il faut avoir « une formation spécialisée de deux à trois ans, en milieu scolaire ou hospitalier, ainsi qu'une formation clinique [...] » .


Compte tenu des renseignements fournis dans votre demande et de la documentation d'accompagnement, vous ne satisfaites pas à cette exigence. En outre, bien qu'un anesthésiste parfaitement compétent et expérimenté puisse avoir exercé les fonctions d'un inhalothérapeute, selon les fonctions de son poste, vous n'avez pas toutes les compétences requises pour exercer cette profession. En conséquence, vous n'avez pas exercé la majorité des fonctions d'un inhalothérapeute. Pour les motifs qui précèdent, vous n'avez obtenu aucun point d'appréciation pour le facteur de l'expérience dans la profession d'inhalothérapeute.

[6]         L'agente des visas n'a pas accordé d'entrevue au demandeur avant de rendre sa décision.

[7]         L'agente des visas explique sa décision plus en détail dans son affidavit :                         

[TRADUCTION] 9. J'ai également conclu qu'il n'y avait rien dans l'expérience de travail du demandeur qui suppléait à l'absence de compétences prévues dans la CNP comme étant les exigences fondamentales pour exercer la profession d'inhalothérapeute au Canada. J'ai pris acte du fait que le demandeur suit un cours de formation en anesthésie en Irlande, mais, au moment de mon appréciation, il n'avait pas les compétences requises pour exercer la profession d'anesthésiste et j'ai donc conclu qu'il n'avait pas exercé la majorité des fonctions d'un inhalothérapeute.

[...]

13. Compte tenu du paragraphe 11(1) du Règlement sur l'immigration, je ne peux pas délivrer de visa d'immigrant à l'immigrant qui n'obtient aucun point pour le facteur de l'expérience. Ainsi, j'ai conclu qu'une entrevue personnelle avec le demandeur n'était pas justifiée.


[8]         Si l'agente des visas n'avait pas accordé 15 points d'appréciation pour le facteur des études et de la formation, je n'aurais trouvé aucune erreur susceptible de contrôle. Compte tenu des faits dont je suis saisi, je suis d'accord avec ce que l'agente des visas a dit dans son appréciation, mais je n'accepte pas qu'elle puisse accorder 15 points d'appréciation, le nombre maximal de points qu'on peut octroyer pour le facteur des études et de la formation, si le demandeur n'a pas toutes les compétences requises pour exercer la profession. L'agente des visas a expliqué au paragraphe 11 de son affidavit qu'elle avait accordé 15 points d'appréciation parce que les agents des visas ont pour pratique de toujours accorder des points d'appréciation pour ce facteur. Elle a affirmé :

[TRADUCTION] 11. Les agents des visas ont pour pratique de toujours accorder des points d'appréciation pour le facteur des études et de la formation. Si on conclut que le demandeur n'a pas les compétences voulues pour exercer la profession, on ne lui accordera aucun point d'appréciation pour l'expérience, mais on ne modifiera pas le nombre de points d'appréciation accordés pour le facteur des études et de la formation. L'omission de soustraire ces points ne change rien à l'issue de la demande d'établissement, parce l'octroi d'aucun point d'appréciation pour l'expérience est fatal à la demande. La pratique est adoptée pour permettre à l'agent des visas de faire l'évaluation du demandeur au regard d'une profession tout en reconnaissant néanmoins que l'esprit du Règlement sur l'immigration de 1978 ne permet pas qu'une personne reçoive un visa d'immigrant pour exercer une profession pour laquelle elle n'a pas les compétences requises.

[9]         À mon avis, c'est tout à fait contradictoire et je m'appuie à cet égard sur les propos du juge Dawson dans Yar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1658, où elle affirme au paragraphe 18 :

[...] Le ministre a cependant soutenu qu'en l'absence de preuve établissant que M. Yar avait suivi un programme d'études collégiales de deux ou trois ans en techniques de denturologie, l'agente des visas avait eu raison de ne pas lui accorder de points au titre de l'expérience. À mon avis, cette prétention n'est pas compatible avec la décision de l'agente des visas d'accorder 15 points d'appréciation au demandeur au titre des études et de la formation étant donné que le Règlement prévoit que ce facteur doit refléter les études et la formation nécessaires en vue d'acquérir l'information, les techniques et les aptitudes requises afin de pouvoir exercer la profession envisagée.


[10]       Dans les décisions suivantes, on a également examiné cette contradiction relativement au nombre de points d'appréciation accordés au titre de la demande dans la profession : Lin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) [2001] A.C.F. no 501; Osman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 142; et Dauz c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 1307. Dans ces affaires, l'agent des visas accorde le nombre maximal de points d'appréciation et affirme par la suite que le demandeur ne remplit pas les conditions d'accès à la profession prévues dans la CNP.

[11]       Dans la présente affaire, l'agente des visas se contredit clairement en affirmant dans ses commentaires que le demandeur n'a pas les compétences requises pour exercer la profession d'anesthésiste et en lui accordant par la suite 15 points d'appréciation pour le facteur des études et de la formation. C'est une erreur d'accorder le nombre maximal de points d'appréciation pour le facteur des études et de la formation et ensuite de n'octroyer aucun point d'appréciation pour le facteur de l'expérience parce que l'intéressé n'a pas les compétences requises pour exercer la profession en cause.

[12]       La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision que l'agente des visas a rendue le 3 décembre 1999 est annulée et l'affaire est renvoyée à un autre agent des visas pour qu'il rende une nouvelle décision.

« W.P. McKEOWN »

Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 10 décembre 2001

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


Date : 20011210

Dossier : IMM-343-00

OTTAWA (ONTARIO), LE 10 DÉCEMBRE 2001

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE McKEOWN

ENTRE :

AFFAIRE INTÉRESSANT le paragraphe 82.1(2) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), chapitre I-2, ses modifications et ses règlements d'application; et l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), chapitre F-7, ses modifications et ses règlements d'application;

ET AFFAIRE INTÉRESSANT une décision d'une agente des visas de la Section de l'immigration du Haut-Commissariat du Canada à Londres (Royaume-Uni);

                                MUHAMMAD MUKHTAR

                                                                                                 demandeur

                                                    - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                  défendeur

                                           ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision que l'agente des visas a rendue le 3 décembre 1999 est annulée et l'affaire est renvoyée à un autre agent des visas pour qu'il rende une nouvelle décision.

« W.P. McKEOWN »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                         IMM-343-00

INTITULÉ :                                                       Muhammad Mukhtar et le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                               Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                              Le 27 novembre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE MCKEOWN

DATE DES MOTIFS :                                     Le 10 décembre 2001

COMPARUTIONS:

M. John Kalina                                                                               POUR LE DEMANDEUR

Mme Neeta Logsetty                                                                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

John Kalina                                                                                                  POUR LE DEMANDEUR

Brampton (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                                                  POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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