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Date : 20050506

                                                                                                                    Dossier : IMM-3946-04

                                                                                                                 Référence : 2005 CF 612

ENTRE:

EREN KURSAD ATAGUN

                                                                                                                                      demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 2 avril 2004 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention ni une « personne à protéger » au sens des articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.


[2]         Eren Kursad Atagun (le demandeur) est un citoyen de la Turquie. Il affirme craindre dtre persécuté et torturé dans son pays pour deux motifs : ses origines comme Alevi et le fait qu'il s'est soustrait au service militaire parce qu'il se prétend objecteur de conscience.

[3]         La Commission a jugé que le demandeur ntait pas un témoin digne de foi et a refusé sa demande d'asile.

[4]         En ce qui concerne sa crainte alléguée dtre persécuté du fait de sa religion Alevi, le demandeur a déclaré qu'il n'avait aucun problème à cet égard en Turquie. Il n'a pas contesté la conclusion de la Commission sur ce point.

[5]         Llément essentiel aux fins de la demande est la question de savoir si le demandeur avait fait son service militaire et s'il était un objecteur de conscience.


[6]         Il ntait pas déraisonnable pour la Commission de conclure que le demandeur avait fait son service militaire en 1994 étant donné que les explications qu'il a données ne rendent pas suffisamment compte de ce qu'il faisait en 1994. Le demandeur prétend avoir travaillé comme journaliste, mais il n'avait pour le prouver aucun article dont il était l'auteur. Il ne pouvait pas non plus expliquer pourquoi son père aurait eu une carte de presse alors qu'il n'en avait pas. Il était donc logique pour la Commission de conclure que l'absence de documentation au soutien de la prétention du demandeur qu'il était journaliste minait sa crédibilité étant donné qu'il ntait plus vraisemblable qu'il lui avait fallu plus de temps pour compléter son programme parce qu'il travaillait. Cela étant dit, il en découle qu'il était également raisonnable pour la Commission de conclure que le demandeur n'avait pas tenté, à titre de journaliste, d'exprimer ses présumées opinions antigouvernementales et anti-militaires et n'avait pas fait l'objet de sanctions.

[7]         Pour ce qui est des allégations du demandeur relatives à son objection de conscience, la Commission a souligné que, pour prouver son objection partielle ou circonstancielle, le demandeur doit établir non seulement qu'il possède ce genre de conviction, mais aussi qu'il y a une possibilité raisonnable qu'on l'oblige, s'il était conscrit, à participer à des activités militaires illégitimes suivant les normes internationales. Les circonstances où la persécution pour objection de conscience est assimilable à de la persécution ont été exposées dans l'arrêt Zolfagharkhani c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, 155 N.R. 311, où le juge MacGuigan de la Cour d'appel fédérale a cité le Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugiédu H.C.N.U.R., Genève, 1988, au paragraphe 26 :

. . . lorsque le type d'action militaire auquel l'individu en question ne veut pas s'associer est condamné par la communauté internationale comme étant contraire aux règles de conduite les plus élémentaires, la peine prévue pour la désertion ou l'insoumission peut [...]. être considérée en soi comme une persécution.


[8]         Le demandeur prétend que la Commission n'a pas fait une analyse suffisante comme l'exige l'arrêt Zolfagharkhani, précité; cependant, à la page 11 de sa décision, la Commission a souligné que la preuve documentaire ne démontre pas que l'armée turque se livre actuellement à de telles atrocités (Bakir c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (19 janvier 2004), IMM-5709-02, 2004 CF 70). Cette conclusion jointe à celle de la Commission voulant que le demandeur avait déjà fait son service militaire confirme le caractère raisonnable de sa décision selon laquelle le demandeur ne risquerait pas dtre persécuté s'il était renvoyé en Turquie.

[9]         De plus, le demandeur a attendu deux ans avant de présenter une demande d'asile ce qui remet en question sa crainte subjective dtre persécuté en Turquie.

[10]       Pour ces motifs, je rejette la demande de contrôle judiciaire.

                   (YVON PINARD)                        

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 6 mai 2005

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                          IMM-3946-04

INTITULÉ:                                                     EREN KURSAD ATAGUN c.

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                     ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE 5 AVRIL 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               LE JUGE PINARD

DATE DES MOTIFS :                                  LE 6 MAI 2005

COMPARUTIONS:

Leigh Salsberg                                               POUR LE DEMANDEUR

Marianne Zoric                                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

WALDMAN & ASSOCIATES                      POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

John H. Sims, c.r.                                           POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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