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     Date : 19980326

     Dossier : T-1291-97


OTTAWA (ONTARIO), LE JEUDI 26 MARS 1998

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE MCGILLIS


     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29

     ET l'appel formé contre la décision d'un juge de la citoyenneté

     ET

     BOGOLJUB KARIC,

     appelant,

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.




     JUGEMENT



     L'appel est accueilli. La décision en date du 29 avril 1997, par laquelle le juge de la citoyenneté Borosa a rejeté la demande de citoyenneté de l'appelant et de son épouse, est annulée. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration est réputé avoir reçu, à la date d'aujourd'hui, notification que le juge de la citoyenneté Borosa a fait droit à la demande de citoyenneté de l'appelant et de son épouse.

     Signé : D. McGillis

     ________________________________

     Juge




Traduction certifiée conforme,



Laurier Parenteau, LL. L.




     Date : 19980326

     Dossier : T-1291-97


OTTAWA (ONTARIO), LE JEUDI 26 MARS 1998

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE MCGILLIS


     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29

     ET l'appel formé contre la décision d'un juge de la citoyenneté

     ET

     BOGOLJUB KARIC,

     appelant,

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.



     MOTIFS DU JUGEMENT


LE JUGE McGILLIS


LES FAITS DE LA CAUSE


[1]      Il y a en l'espèce appel formé contre la décision en date du 29 avril 1997, par laquelle le juge de la citoyenneté W.A. Borosa a rejeté en application de l'alinéa 5(1)e) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29, modifiée (la Loi), la demande de citoyenneté faite par l'appelant, par ce motif que celui-ci et son épouse ne remplissaient pas les conditions de résidence prévues par la même loi.

[2]      Au cours de l'appel qui porte à la fois sur les points de fait et les points de droit, l'appelant et son épouse ont témoigné au sujet de l'audience présidée par le juge de la citoyenneté le 12 mars 1997. L'avocat qui les représentait à cette audience, Me Stephen Green, a également témoigné devant la Cour.

[3]      Les faits à prendre en considération dans cet appel sont comme suit.

[4]      À l'audience du 12 mars 1997, le juge de la citoyenneté a posé à l'appelant et à son épouse des questions visant à vérifier s'ils remplissaient les conditions de citoyenneté prévues par la Loi. À la clôture de l'audience, il a fait savoir que les deux remplissaient ces conditions, que leur demande de citoyenneté était accueillie, et qu'ils prêteraient serment en qualité de citoyens canadiens dans un proche avenir. Avant de lever l'audience, il s'est entretenu avec eux en serbo-croate au sujet de leur famille et d'autres questions générales, les a félicités d'avoir rempli les conditions de citoyenneté canadienne et leur a serré la main.

[5]      Peu de temps après l'audience, l'ancien gestionnaire du greffe de la Cour de la citoyenneté a montré au juge de la citoyenneté un article intitulé " The Fight for Bel Pagette " du magazine Maclean's du 10 mars 1997, où il était question de l'appelant.

[6]      À peu près une semaine après, M. Green a rencontré par hasard le juge de la citoyenneté qui lui a montré cet article. Sur le moment, M. Green " n'y faisait pas attention ".

[7]      Par lettre en date du 29 avril 1997, le juge de la citoyenneté a rejeté la demande de citoyenneté de l'appelant et de son épouse.

[8]      À l'audition de l'appel, a été produit en preuve un mémoire en date du 2 juillet 1997 du juge de la citoyenneté, où on peut lire ce qui suit :

     [TRADUCTION]

     La déclaration no 3, " Je fais appel par les motifs suivants ", est incorrecte .
     À la clôture des audiences où il est question de la condition de résidence, j'annonce ce qui suit :
     " (Conformément à l'article 14 de la Loi sur la citoyenneté) j'examinerai attentivement votre demande, le questionnaire sur la résidence et les documents à l'appui, dans les trois à six semaines , et vous serez informé par lettre de ma décision. "

[9]      Bien que dans ce mémoire, le juge de la citoyenneté fasse état de la pratique qu'il observe généralement à l'audience, il n'indique pas s'il l'a observée à la clôture de l'audience en question.

[10]      Étant donné le témoignage catégorique et conséquent de M. Green, de l'appelant et de son épouse au sujet de ce qui s'est passé à la clôture de cette audience, et étant donné que le mémoire du juge de la citoyenneté n'en fait pas du tout mention, je conclus que le témoignage contenu dans le mémoire du 2 juillet 1997 est dénué de valeur probante.


LE POINT LITIGIEUX

[11]      Il échet d'examiner au premier chef si le juge de la citoyenneté ne s'est pas conformé au paragraphe 14(2) de la Loi, faute d'avoir fait droit à la demande de citoyenneté conformément à la conclusion qu'il avait tirée à la clôture de l'audience.

ANALYSE

[12]      L'article 14 de la Loi prescrit entre autres la procédure à suivre par le juge de la citoyenneté lorsqu'il décide d'attribuer la citoyenneté en application du paragraphe 5(1). Le paragraphe 14(1) prévoit que " [dans] les soixante jours de sa saisine, le juge de la citoyenneté statue sur la conformité " avec les dispositions applicables " de la présente loi et de ses règlements " des demandes déposées ". Le paragraphe 14(2) lui impose l'obligation suivante :

     14.(2) Aussitôt après avoir statué sur la demande visée au paragraphe (1), le juge de la citoyenneté, sous réserve de l'article 15, approuve ou rejette la demande selon qu'il conclut ou non à la conformité de celle-ci et transmet sa décision motivée au ministre.

                                 [non souligné dans l'original]

[13]      Il ressort des faits de la cause qu'à la clôture de l'audience, le juge de la citoyenneté a conclu que l'appelant et son épouse remplissaient les conditions de citoyenneté canadienne, telles que les prévoit la Loi. Par suite de cette conclusion, il était tenu par le paragraphe 14(2) de faire droit à leur demande de citoyenneté. Faute d'y avoir fait droit conformément à la conclusion qu'il avait tirée à l'audience, il a manqué à l'obligation qu'il tient du paragraphe 14(2) de la Loi. Il s'ensuit que la lettre par laquelle il rejetait la demande de citoyenneté de l'appelant et de son épouse est nulle et non avenue1.

[14]      Outre le manquement à l'obligation que lui impose expressément la loi, le juge de la citoyenneté a encore commis un manquement flagrant aux règles de justice naturelle en reprenant sa conclusion à la lumière de l'information contenue dans un article de magazine porté à son attention après l'audience, sans avoir donné aux parties la possibilité de produire des preuves ou de proposer des arguments au sujet du contenu de cet article.

[15]      L'appel est accueilli. La décision en date du 29 avril 1997, par laquelle le juge de la citoyenneté Borosa a rejeté la demande de citoyenneté de l'appelant et de son épouse, est annulée.

[16]      Afin que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration puisse exercer son droit d'appel, il est réputé avoir reçu, à la date d'aujourd'hui, notification que le juge de la citoyenneté Borosa a fait droit à la demande de citoyenneté de l'appelant et de son épouse.

     Signé : D. McGillis

     ________________________________

     Juge

Ottawa, le 26 mars 1998





Traduction certifiée conforme,



Laurier Parenteau, LL. L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER


NUMÉRO DU GREFFE :          T-1291-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Affaire intéressant la Loi sur la citoyenneté et Bogoljub Karic


LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)


DATE DE L'AUDIENCE :      24 mars 1998


MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MME LE JUGE McGILLIS


LE :                      26 mars 1998


ONT COMPARU :

Mendel M. Green                  pour l'appelant

John Loncar et Lori Hendricks          pour l'intimé

Peter K. Large                  intervenant bénévole


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Green & Spiegel                  pour l'appelant

Avocats

Toronto (Ontario)

George Thomson                  pour l'intimé

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Peter K. Large                  intervenant bénévole

Avocat

Toronto (Ontario)

__________________

1 Voir également Wong (Re), [1997] A.C.F. no 1578, Dossier no T-2003-96, et Lo (Re), [1997] A.C.F. no 1576, Dossier no T-1331-96, affaires dans lesquelles la Cour a fait droit à l'appel formé contre la décision du juge de la citoyenneté Borosa qui n'avait pas accueilli la demande de citoyenneté conformément à la conclusion tirée lors de l'audience.

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