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                                                                                       Date : 20020614

                                                                         Dossier : IMM-2656-01

                                                       Référence neutre : 2002 CFPI 681

ENTRE :

                                            QUANG DANG

                                                                                                 demandeur

                                                    - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                  défendeur

        MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE CAMPBELL

[1]                 La Cour statue sur une demande de contrôle judiciaire d'une décision en date du 12 avril 2001 par laquelle un agent des visas a refusé la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur en tant que réfugié au sens de la Convention cherchant à se réinstaller.


[2]                 Le demandeur est né au Cambodge et vit au Vietnam depuis que sa famille a fui le régime des Khmers rouges. En 1994, la soeur du demandeur a été parrainée par son mari et est venue s'installer au Canada. En 1998, la soeur du demandeur a parrainé son père et sa mère afin qu'ils puissent venir au Canada. Le demandeur est le seul membre de cette famille qui se trouve encore au Vietnam.

[3]                 En 1998, le demandeur a été parrainé par le Comité central mennonite à titre de réfugié au sens de la Convention cherchant à se réinstaller. Le demandeur a également demandé qu'il soit tenu compte de facteurs d'ordre humanitaire. Il est acquis aux débats qu'une telle demande donne lieu à une décision qui comporte deux volets : le volet relatif à la réinstallation en tant que réfugié au sens de la Convention et le volet relatif aux raisons d'ordre humanitaire. En conséquence, il est acquis aux débats que, dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, la Cour peut analyser séparément chacun de ces volets.

[4]                 L'agent des visas a conclu que le demandeur ne répondait pas à la définition de réfugié au sens de la Convention cherchant à se réinstaller parce que sa crainte subjective de persécution n'était pas fondée.

[5]                 L'agent des visas a déféré la demande de prise en considération de facteurs humanitaires à un agent d'immigration supérieur. Cette demande a été refusée et une lettre de refus a été envoyée au demandeur.


[6]                 À l'instruction de la présente affaire, l'avocat du demandeur a convenu volontiers que la conclusion de l'agent des visas suivant laquelle la crainte subjective du demandeur n'était pas fondée ne pouvait être réfutée compte tenu de la preuve versée au dossier. En conséquence, l'avocat du demandeur a également reconnu sans peine que le volet de la décision portant sur la réinstallation à titre de réfugié au sens de la Convention n'était entaché d'aucune erreur justifiant le contrôle judiciaire de la décision.

[7]                 Je trouve toutefois convaincants les arguments articulés par l'avocat du demandeur au sujet du volet de la décision portant sur les raisons d'ordre humanitaire.

[8]                 En ce qui concerne le volet de la décision relatif aux raisons d'ordre humanitaire, le demandeur signale que l'agent d'immigration n'a pas motivé son refus de la demande. Cet argument est à mon avis bien fondé parce qu'on ne trouve nulle part dans le dossier d'analyse sérieuse des considérations humanitaires. Dans ses notes STIDI, l'agent des visas, qui est l'auteur de la décision, a abordé le volet de la revendication du demandeur relative à sa réinstallation à titre de réfugié au sens de la Convention. On ne trouve toutefois aucune analyse sérieuse des considérations humanitaires dans les notes STIDI prises par l'agent des visas, qui s'est contenté de déférer la question à un agent d'immigration supérieur pour qu'il se prononce sur les raisons d'ordre humanitaire.

[9]                 Voici le texte de la décision de l'agent d'immigration supérieur :

Le demandeur ne répond pas à la définition de réfugié au sens de la Convention et, bien qu'il soit parrainé par un groupe, il n'y a pas de raison justifiant d'accueillir sa demande. Je ne suis pas convaincu qu'il existe des raisons d'ordre humanitaire qui justifieraient d'approuver sa demande pour ces motifs (dossier du Tribunal, à la page 5).

  

[10]            Je suis d'accord avec le demandeur pour dire que, non seulement l'agent d'immigration supérieur n'a pas motivé sa décision sur la question de l'existence de raisons d'ordre humanitaire dans l'extrait précité, mais aussi que les notes STIDI de l'agent des visas ne renferment aucune analyse qui pourrait être considérée comme des motifs de la décision. L'analyse à laquelle la Cour suprême du Canada s'est livrée dans l'arrêt Baker c. M.C.I., [1999] 2 R.C.S. 817, au paragraphe 63, au sujet de la norme de contrôle judiciaire qu'il convient d'appliquer dans le cas des décisions portant sur des raisons d'ordre humanitaire fait ressortir l'importance de motiver toute décision en la matière :

J'examinerai maintenant si la décision dans la présente affaire, et l'interprétation par l'agent d'immigration de l'étendue du pouvoir discrétionnaire qui lui était conféré, étaient déraisonnables au sens où l'entend le juge Iacobucci dans l'arrêt Southam, précité, au par. 56 :

Est déraisonnable la décision qui, dans l'ensemble, n'est étayée par aucun motif capable de résister à un examen assez poussé. En conséquence, la cour qui contrôle une conclusion en regard de la norme de la décision raisonnable doit se demander s'il existe quelque motif étayant cette conclusion. Le défaut, s'il en est, pourrait découler de la preuve elle-même ou du raisonnement qui a été appliqué pour tirer les conclusions de cette preuve.

  

[11]            En l'espèce, comme il n'y a pas de motifs à examiner, je conclus que le volet de la décision relatif aux considérations humanitaires est entaché d'une erreur justifiant le contrôle judiciaire.

  

                                     O R D O N N A N C E


En conséquence, j'annule la décision et, avec l'accord de l'avocat du demandeur et de l'avocate du défendeur, je renvoie l'affaire à la Commission pour qu'elle rende une nouvelle décision uniquement sur le volet de la demande portant sur les considérations humanitaires. Ainsi que les avocats l'ont également convenu, il sera loisible tant au demandeur qu'au défendeur de présenter de nouveaux éléments de preuve et de nouveaux arguments lors de la nouvelle audience.

                                                                            « Douglas R. Campbell »

                                                                                                             Juge                 

Calgary (Alberta)

Le 14 juin 2002

   

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                                         

          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

  

Date : 20020614

Dossier : IMM-2656-01

ENTRE :

                          QUANG DANG

                                                                 demandeur

  

                                     - et -

  

       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                   ET DE L'IMMIGRATION

                                                                    défendeur

                                                                                                                                                      

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

                                                                                                                                                      

  

                                       COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                  SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                    AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

   

DOSSIER :                                           IMM-2656-01

  

INTITULÉ :                                        QUANG DANG c. LE MINISTRE DE LA

CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                      

LIEU DE L'AUDIENCE :                 CALGARY (Alberta)

  

DATE DE L'AUDIENCE :              14 juin 2002

  

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL

DATE DES MOTIFS :                      14 juin 2002

   

COMPARUTIONS :

Peter Wong                                                                                     POUR LE DEMANDEUR

Tracy King                                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Caron & Partners LLP                                                                  POUR LE DEMANDEUR

Calgary (Alberta)

Morris A. Rosenberg                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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