Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision




     Date : 19980320

     Dossier : DES-3-95


     AFFAIRE intéressant une attestation délivrée en application de l'article 40.1 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi)
     ET une demande de remise en liberté faite en application du paragraphe 40.1(8) de la Loi

AU SUJET DE :


     MANICKAVASAGAM SURESH




     J'ordonne que le texte révisé ci-joint des motifs de ma décision, prononcés oralement à l'audience tenue à Toronto (Ontario), le 19 mars 1998, soit déposé conformément à l'article 51 de la Loi sur la Cour fédérale.

     Signé : Max M. Teitelbaum

     ________________________________

     Juge


Le 20 mars 1998


Traduction certifiée conforme,



Laurier Parenteau, LL. L.




     Date : 19980320

     Dossier : DES-3-95


     AFFAIRE intéressant une attestation délivrée en application de l'article 40.1 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi)
     ET une demande de remise en liberté faite en application du paragraphe 40.1(8) de la Loi


AU SUJET DE :



     MANICKAVASAGAM SURESH




     Audience présidée par M. le juge Teitelbaum de la Cour fédérale du Canada, au 330, University Avenue, Toronto, en la salle d'audience 7, le 19 mars 1998









     TORONTO COURT REPORTERS

     Toronto (Ontario)




ONT COMPARU :

Mlle B. Jackman              pour M. Suresh

Me N. Vaillancourt              pour le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration


     M. M. Sepe - greffier



DÉCISION DE SA SEIGNEURIE :                              3



     TABLE DES MATIÈRES



INDEX DES INTERROGATOIRES :



DÉCISION DE SA SEIGNEURIE :                              3








     TORONTO COURT REPORTERS

     Toronto (Ontario)


L'audience s'ouvre à 14 h 30 en la salle d'audience 7.

     SA SEIGNEURIE : Bonjour.

     Mlle JACKMAN : Bonjour, monsieur le juge.

     M. VAILLANCOURT : Bonjour.

     SA SEIGNEURIE : Monsieur Vaillancourt, est-ce vrai qu'à cette date, le juge Lane n'a été saisi d'aucune requête en modification de son ordonnance?

     M. VAILLANCOURT : C'est exact, monsieur le juge.

     SA SEIGNEURIE ; Dans ce cas, je vais rendre ma décision sur la requête sous forme sommaire. Des motifs plus détaillés suivront en toute probabilité à une date ultérieure.

     DÉCISION DE SA SEIGNEURIE :

     Une attestation faisant suite à un rapport secret en matière de sécurité du Service canadien du renseignement de sécurité, selon lequel M. Suresh n'est pas admissible en application des dispositions 19(1)e)(iv)(C), 19(1)f)(ii) et 19(1)f)(iii)(B) de la Loi sur l'immigration, a été signée par le Solliciteur général du Canada le 1er août 1995, et par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration le 11 septembre 1995.

     Selon cette attestation ministérielle, M. Suresh n'était pas admissible au Canada parce qu'il appartenait à la catégorie des personnes visées par les dispositions 19(1)e)(iv)(C), 19(1)f)(ii) et 19(1)f)(iii)(B) de la Loi.

     J'ai jugé cette attestation raisonnable. Le 29 août 1997, j'ai conclu que le Solliciteur général et le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration avaient des motifs raisonnables de délivrer une attestation en application de 40.1 de la Loi. J'étais convaincu, à la lumière de tous les éléments de preuve produits, qu'il y avait des motifs raisonnables de croire que M. Suresh avait été et était toujours un membre des LTTE. Je convenais avec la Couronne qu'il avait été un cadre dirigeant dévoué, jouissant de la confiance des LTTE.

     J'ai aussi constaté qu'à la demande des LTTE, M. Suresh s'était rendu au Canada pour diriger le World Tamil Movement, dont on peut raisonnablement conclure qu'il fait partie des LTTE, ou est à tout le moins une organisation qui soutient normalement les activités de ces derniers.

     J'étais également convaincu qu'il y avait des motifs raisonnables de croire que les LTTE avaient commis des actes de terrorisme.

     Par application de l'article 40.1 de la Loi sur l'immigration, Suresh a été arrêté le 18 octobre 1995; il est toujours en détention.

     Jusqu'à présent, les intimés n'ont pas réussi à renvoyer Suresh hors du Canada. Il est toujours en détention. Le 23 décembre 1997, il a introduit une demande de remise en liberté en application du paragraphe 40.1(8) de la Loi. Son renvoi hors du Canada avait été ordonné le 17 septembre 1997, mais il est toujours là à cause d'une injonction rendue par le juge Lane de la Cour de l'Ontario, Division générale, qui interdisait son renvoi du Canada pour l'avenir immédiat.

     Je suis aussi convaincu que Suresh ne sera pas renvoyé du Canada dans un délai raisonnable; j'expliquerai pourquoi quand je rendrai une décision plus détaillée en la matière.

     Je conclus également des témoignages rendus à huis clos comme à l'audience publique qu'avec des conditions strictes, la remise en liberté de Suresh en attendant son renvoi hors du Canada ne compromettrait ni la sécurité nationale ni la sécurité des personnes, au sens de l'article 2 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité.


     Voici les conditions de la remise en liberté de M. Suresh :

     À l'issue de près de 60 jours d'audience relative à la délivrance de l'attestation visée à l'article 40.1 de la Loi sur l'immigration, j'ai conclu, entre autres, que M. Suresh n'était pas du tout crédible. C'est d'ailleurs ce qui ressort des documents qu'il avait signés pour revendiquer le statut de réfugié. Pratiquement rien de ce qu'il écrivait n'était véridique.

     Puisqu'il en est ainsi, je doute que M. Suresh se présente le cas échéant de plein gré pour être renvoyé hors du Canada, en particulier s'il devait être renvoyé au Sri Lanka conformément aux arrangements déjà pris par le gouvernement du Canada. Pour garantir qu'il se présente au cas où il serait renvoyé, je conclus qu'une somme substantielle (c'est-à-dire substantielle pour ses amis) doit être déposée auprès de l'intimé, laquelle somme sera confisquée au profit du gouvernement du Canada si, pour quelque raison que ce soit, Suresh ne se présente pas quand il en reçoit l'ordre.

     Suresh, ou les personnes agissant pour son compte mais sans aucun lien direct ou indirect avec les LTTE, déposeront la somme de 40 000 $ au comptant auprès de l'intimé, qui la détiendra pour le compte du gouvernement du Canada jusqu'à ce que celui-ci renvoie Suresh hors du Canada, après quoi cette somme, intérêts y compris, sera restituée à la ou aux personnes qui l'auront déposée.

     En outre, Xavier Noble Arasaratnam (vous me donnerez l'orthographe de ce nom, Mlle Jackman) constituera un cautionnement d'exécution de 150 000 $ au profit du gouvernement du Canada. Pour garantir le paiement de cette somme au cas où Suresh ne respecterait pas toutes les conditions de sa remise en liberté, M. Arasaratnam engagera auprès du gouvernement du Canada sa maison dans laquelle il déclare que son avoir propre s'élève à 250 000 $.

     Une fois remis en liberté, Suresh se présentera une fois par semaine au centre de contrôle de l'immigration au 60, rue Richmond est, Toronto (Ontario), au jour et à l'heure fixés par le représentant de l'intimé.

     Suresh résidera chez Xavier Noble Arasaratnam, au 6136 Silken Laumann Way, Mississauga (Ontario) L5V 1A2. Au cas où, pour quelque raison que ce soit, M. Arasaratnam déménagerait, Suresh devra en prévenir le CIC et obtenir la permission de l'intimé pour changer d'adresse. Cette condition n'interdit pas les visites occasionnelles chez Ramalashmy Jayavaman Sivasway au 5, Greystone Wall, appartement 1711, où il pourra passer la nuit.

     Durant sa période de liberté, Suresh doit respecter l'ordre et la paix, et se conduire comme il convient.

     Il devra rester dans un rayon de 50 kilomètres de la ville de Toronto, et ne pas s'en éloigner sans la permission du CIC.

     Il lui est interdit de communiquer, directement ou indirectement, sauf par l'intermédiaire de Mlle Jackman ou des employés de cette dernière (ses secrétaire, auxiliaire parajuridique ou étudiant stagiaire) et ce uniquement aux fins de préparation pour la procédure judiciaire ou en vue de trouver un pays tiers d'accueil, avec l'un quelconque des dirigeants ou employés du WTM, ou avec des groupes affiliés comme WTA Montréal, ETA B.C. Vancouver, WTCC Ottawa, ou avec l'un quelconque des dirigeants ou employés du FACT ou du PESC; il lui est aussi interdit de visiter, pour quelque raison que ce soit, les bureaux de ces organisations.

     Il lui est interdit de communiquer, directement ou indirectement, sauf par l'intermédiaire de son avocat, avec des membres, dirigeants, représentants, porte-parole, coordonnateurs des LTTE, y compris les individus ayant un lien, quel qu'il soit, avec des bureaux des LTTE à l'extérieur du Canada, tels le Centre d'information tamoul à Londres (Angleterre), le Secrétariat international des LTTE à Londres (Angleterre) ou Paris (France), ou dans tout autre pays.

     Il lui est interdit de prendre part, directement ou indirectement, à quelque activité que ce soit, ce qui s'entend également des protestations publiques, manifestations ou rassemblements de quelque genre que ce soit et pour quelque cause que ce soit, que cette activité ait un rapport ou non avec les LTTE, le WTM, WTA Montréal, ETA B.C. Vancouver ou WTCC Ottawa.

     Suresh remettra aux autorités de l'immigration du Canada son passeport et tous autres titres de voyage pendant sa période de liberté.

     Si Suresh s'engage par écrit à se conformer à ces conditions pendant sa période de liberté, il sera remis en liberté.

     Je signerai une ordonnance portant sa remise en liberté une fois remplies les conditions ci-dessus, lesquelles comprennent bien entendu le dépôt du cautionnement en argent comptant et l'engagement de l'immeuble à titre de sûreté.

     J'ai ici un exemplaire de ces conditions, qui ne sont peut-être pas formulées exactement de la même façon que celles que je viens d'énumérer. Je tiens à le donner tout particulièrement à Mlle Jackman, et à vous aussi, M. Vaillancourt, pour que vous puissiez commencer immédiatement, si vous voulez, à veiller à ce que ces conditions soient remplies.

     Voici une autre raison pour laquelle j'ai décidé de remettre M. Suresh en liberté : bien que j'aie conclu qu'il y a raisonnablement lieu de croire que les LTTE forment une organisation terroriste, il n'y a eu aucune preuve d'actes de terrorisme qu'ils auraient commis au Canada. Ce que je veux dire par là, c'est que je n'ai été saisi d'aucune preuve d'atteinte à la sécurité nationale ou à celle de personnes au Canada. J'estime donc qu'il est raisonnable de remettre M. Suresh en liberté, mais avec des conditions strictes.

     Mlle JACKMAN : Monsieur le juge, pourrais-je faire deux observations au sujet de l'ordonnance? Pourriez-vous reformuler la condition relative aux passeport et autres titres de voyage en ajoutant la réserve " le cas échéant ", parce qu'il n'en a pas. Il ne faut pas que les autorités le gardent en détention faute par lui de produire quelque chose qu'il n'a pas.

     SA SEIGNEURIE : Puisque vous me dites qu'il n'a aucun titre de voyage, il n'a pas à en remettre un, et c'est ce que le sténographe est en train de consigner. Monsieur Vaillancourt, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

     M. VAILLANCOURT : Non, monsieur le juge.

     Mlle JACKMAN : Ce qui me préoccupe aussi, c'est le cautionnement de 40 000 $, et vous avez dit à ce sujet jusqu'à ce qu'il soit renvoyé hors du Canada. Cela signifie que vous présumez qu'il succombera dans son recours. S'il a gain de cause, la Cour pourra "

     SA SEIGNEURIE : Alors tout ce que vous aurez à faire, c'est d'introduire une requête en restitution de l'argent. S'il a gain de cause et est autorisé à demeurer légalement au Canada, alors tout ce que vous aurez à faire, c'est d'introduire en son nom une requête, qui me sera soumise bien entendu. Je "

     Mlle JACKMAN : Oui, et vous ordonnerez la restitution. Je voulais juste un éclaircissement.

     SA SEIGNEURIE : S'il a la permission légale de demeurer au Canada.

     Mlle JACKMAN : Oui, évidemment. J'ai de l'espoir.

     SA SEIGNEURIE : Avez-vous un exemplaire de ces conditions?

     Mlle JACKMAN : Oui, monsieur le juge.

     M. VAILLANCOURT : Non, et j'aimerais certainement en avoir un exemplaire.

     SA SEIGNEURIE : Avez-vous d'autres questions?

     Mlle JACKMAN : Pour ce qui est de l'engagement de mon client, est-ce que je dois tirer une copie de ces conditions et faire signer l'acceptation dessus, ou est-ce que "

     SA SEIGNEURIE : Quand nous aurons la transcription officielle, je vérifierai si elle est fidèle. Il se peut que j'y apporte quelques petites modifications, après quoi vous pourrez en avoir un exemplaire. Vous pourrez le rapporter avec l'acceptation de votre client, ou bien "

     Mlle JACKMAN : C'est parfait, merci, monsieur le juge.

     SA SEIGNEURIE : Monsieur Vaillancourt, est-ce que vous avez d'autres questions?

     M. VAILLANCOURT : Non, monsieur le juge.

     SA SEIGNEURIE : Merci.

L'audience est levée à 14 h 50.

Transcription certifiée correcte

Moira Freshwater, sténographe

             [NOTE MANUSCRITE] Ci-dessus les motifs de la décision que j'ai rendue sur la requête en remise en liberté, introduite par le requérant en application du paragraphe 40.1(8) de la Loi sur l'immigration.

     Signé : Max M. Teitelbaum

     ________________________________

     Juge

Traduction certifiée conforme,



Laurier Parenteau, LL. L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER




NUMÉRO DU GREFFE :          DES-3-95

INTITULÉ DE LA CAUSE :      AFFAIRE intéressant une attestation délivrée en application de l'article 40.1 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi)
                     ET une demande de remise en liberté faite en application du paragraphe 40.1(8) de la Loi

                     Au sujet de :

                     Manickavasagam Suresh


DATE DE L'AUDIENCE :      19 mars 1998


LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)


MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE TEITELBAUM


LE :                      20 mars 1998




ONT COMPARU :



Mlle Barbara Jackman              pour Manickavasagam Suresh


M. Normand Vaillancourt              pour le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le Solliciteur général du Canada


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :



Mlle Barbara Jackman              pour Manickavasagam Suresh

Jackman, Waldman and Associates

Avocats

281 avenue Eglington est

Toronto (Ontario)

M6E 3K5



M. George Thomson

Sous-procureur général du Canada

pour le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le Solliciteur général du Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.