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Date : 19980716


Dossier : IMM-4666-96

ENTRE :

     ELSA P. PEJE,

     demanderesse,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

    

LE JUGE McDONALD

[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire visant la décision d'un arbitre, en date du 20 mars 1996, de prendre une mesure d'interdiction de séjour à l'encontre de la demanderesse. Avant d'examiner le bien-fondé des arguments développés par les avocats des parties, il convient de régler certaines questions préliminaires. En ce qui concerne l'ordonnance du juge Jerome, en date du 19 décembre 1996, j'estime que l'intention n'était pas de se prononcer sur la question du contrôle judiciaire, cette ordonnance ayant uniquement trait à la requête en réexamen dont la Cour était saisie. Il y a donc lieu d'interpréter cette ordonnance comme accordant simplement une suspension et non pas comme évaluant, quant au fond, le bien-fondé de la demande de contrôle judiciaire. Je précise, en second lieu, que l'avocat de la demanderesse hésitait effectivement à plaider aujourd'hui, étant donné qu'il ne lui avait pas été possible de prendre contact avec sa cliente, mais la Cour lui a tout de même demandé de procéder en tant qu'avocat inscrit au dossier.

[2]      Ayant réglé ces questions d'ordre préliminaire, la Cour entend maintenant se prononcer sur le fond de la demande. Voici les faits qu'il convient de retenir : la demanderesse est entrée au Canada le 27 septembre 1990 en tant que visiteur dans le cadre du Programme concernant les employés de maison étrangers. Elle a sollicité et reçu une prolongation de l'emploi qu'elle occupait dans le cadre de ce programme. La dernière prolongation dont elle ait bénéficié prenait fin le 15 mars 1995. Au mois de septembre 1994, pour cause de maladie, de malchance et du fait que le ministre avait, à plusieurs reprises, refusé de lui délivrer un permis de travail ou de lui fournir des conseils, la demanderesse s'est trouvée dans l'obligation de recourir à l'aide sociale. Le 20 décembre 1994, la demanderesse a fait l'objet d'un rapport au titre des alinéas 27(2)a) et 19(1)b) de la Loi sur l'immigration la désignant comme membre d'une catégorie non admissible vu l'existence de motifs raisonnables de croire que les personnes en question n'ont pas la capacité ou la volonté présente ou future de subvenir à leurs besoins. Le 4 juillet 1995, conformément aux alinéas 27(2)e) et 26(1)c), la demanderesse a également été désignée comme une personne qui est entrée au Canada en qualité de visiteur et qui y demeure après avoir perdu cette qualité. La demanderesse s'est vu notifier la tenue d'une enquête. La demanderesse a vu rejeter, le 22 décembre 1994, sa demande de résidence permanente dans le cadre du programme concernant les aides familiaux résidants. Il n'a pas été fait appel de cette décision. Par lettre en date du 16 février 1995, la demanderesse, alors qu'elle était encore considérée comme visiteur, a appris que sa demande de permis de travail avait été rejetée étant donné qu'elle faisait l'objet d'une enquête d'immigration. L'enquête a débuté le 4 juillet 1995, étant à quatre reprises reportée à une date ultérieure. L'enquête devait permettre de dire si la demanderesse appartenait effectivement à l'une des catégories décrites aux alinéas 27(2)a), 19(1)b) et 27(2)e) de la Loi sur l'immigration. Au cours de l'enquête, la demanderesse a reconnu qu'elle recevait de l'aide sociale et qu'elle avait vécu au Canada sans interruption depuis l'expiration de son dernier permis de travail. Conformément au paragraphe 37(7) de la Loi, l'arbitre a pris, à l'encontre de la demanderesse, une mesure d'interdiction de séjour. La demanderesse estime que l'arbitre aurait dû tenir compte du fait que le ministre avait manqué de l'aider dans le cadre du Programme concernant les employés de maison étrangers et aurait dû, cela étant, refuser de prendre à son encontre une mesure d'interdiction de séjour.

[3]      Malgré la plaidoirie talentueuse et convaincante livrée par l'avocat de la demanderesse, la Cour doit, à regret, rejeter sa demande. Je conviens avec l'avocat de la demanderesse que les personnes admises dans le Programme concernant les employés de maison étrangers relèvent d'un régime particulier et que la demanderesse ne semble effectivement pas avoir été équitablement traitée par le ministre. Cela dit, l'arbitre n'était pas à même de se pencher sur des considérations de cet ordre étant donné qu'il lui revient uniquement de dire si la demanderesse appartient à une catégorie non admissible aux termes des alinéas 27(2)a) et 19(1)b) (les personnes dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elles n'ont pas la capacité ou la volonté présente ou future de subvenir à leurs besoins) et si, aux termes des alinéas 27(2)e) et 26(1)c) de la Loi, la demanderesse est entrée au Canada en qualité de visiteur et y demeure après avoir perdu cette qualité. S'il n'appartient pas à l'arbitre de tenir compte, dans le cadre d'une enquête, de motifs d'ordre humanitaire, il ne lui appartient pas non plus de se pencher sur la question de savoir si le ministre a satisfait aux obligations qu'il avait envers la demanderesse au titre du Programme concernant les employés de maison étrangers. Selon l'arrêt rendu par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Green c. Le ministre de l'Emploi et de l'immigration [1984] 1 C.F. 441, à la p. 445 :

     À mon avis, il ressort clairement de l'économie de la Loi sur l'immigration de 1976 et du Règlement (réf. non reprise) que l'arbitre doit procéder à son enquête aussi rapidement que possible dans les circonstances particulières de chaque cas. De même, il ne peut ajourner une enquête qu' " afin de veiller à ce qu'elle soit complète et régulière ". L'arbitre avait à déterminer à l'enquête si le requérant faisait partie des catégories de personnes non admissibles visées aux alinéas 27(2)b) et e) de la Loi sur l'immigration de 1976. Les considérations d'ordre humanitaire pertinentes dans une demande présentée en vertu du paragraphe 115(2) se situent hors de la portée de l'enquête tenue par l'arbitre.         

[4]      Cela étant, il est clair qu'un arbitre n'est pas habilité à dire, dans le cadre de l'enquête, si les dispositions prévues au programme concernant les employés de maison étrangers ont été respectées. Cette question trouve en effet sa place dans le cadre d'un appel interjeté de la décision refusant d'accorder à la demanderesse la résidence permanente dans le cadre du Programme concernant les aides familiaux résidants. La décision en date du 22 décembre 1994 portant refus du statut de résidence permanente sollicitée par la demanderesse aurait ainsi dû être portée en appel, la demanderesse pouvant alors faire valoir ses arguments. La demanderesse ne peut pas, au stade où en est ce dossier, contester une décision qui aurait dû faire l'objet d'un appel, car l'arbitre n'est pas habilité à se prononcer, sur ce volet précis du dossier de la demanderesse, en fonction de considérations d'équité.

[5]      Je comprends tout à fait le point de vue de l'avocat de la demanderesse qui a vaillamment plaidé la cause de sa cliente et qui n'était pas encore inscrit au dossier à l'époque où fut rejetée la demande de résidence permanente déposée par la demanderesse, mais la Cour ne peut lui être en cela d'aucun secours. Il n'en demeure pas moins, en effet, que si la demanderesse avait voulu faire valoir ces arguments, elle devait le faire dans le cadre d'un appel visant la décision lui refusant la résidence permanente.

[6]      La demande de contrôle judiciaire est rejetée.


" F.J. McDonald "


JCA

Toronto (Ontario)

le 16 juillet 1998

Traduction certifiée conforme

Christiane Delon LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA


Date : 19980716


Dossier : IMM-4666-96

Entre :

ELSA P. PEJE,


demanderesse,

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.



MOTIFS DE L'ORDONNANCE


COUR FÉDÉRALE DU CANADA


Avocats et avocats inscrits au dossier

No DU GREFFE :      IMM-4666-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :      ELSA P. PEJE

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

DATE DE L'AUDIENCE :      LE 14 JUILLET 1998

LIEU DE L'AUDIENCE :      TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :      LE JUGE McDONALD, JCA

DATE :      LE 16 JUILLET 1998

ONT COMPARU :

     Me Osborne G. Barnwell

         pour la demanderesse

     Me Diane Dagenais

         pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     

     Ferguson, Barnwell

     Barristers & Solicitors

     502 - 347, Bay Street

     Toronto (Ontario)

     M5H 2R7

         pour la demanderesse

     George Thomson

     Sous-procureur général

     du Canada

         pour le défendeur

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