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Date : 19990803


Dossier : T-798-99



ENTRE :

     TIGNEY TECHNOLOGY INCORPORATED,

     demanderesse,

     et

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     défenderesse.




     MOTIFS DE L"ORDONNANCE


LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE


[1]      Les présents motifs se rapportent à une ordonnance concernant la requête en radiation déposée par la défenderesse le 3 juillet 1999, rendue en vertu de la règle 47, qui prévoit que la Cour peut exercer ses pouvoirs discrétionnaires de sa propre initiative.

[2]      La demande de Tigney Technology Incorporated (Tigney) soulève un point intéressant et de portée plutôt limitée au sujet de la question de savoir si une nouvelle cotisation peut être établie en application de la Loi sur l"accise.

[3]      La Couronne demande, par requête, que la demande de Tigney soit radiée parce qu"il y a prescription. Au lieu de déposer un dossier de réponse comme l"exige la règle 365, Tigney a déposé un document appelé dossier de demande, qui, en plus de porter sur la réclamation dans l"ensemble, traite expressément de l"allégation de prescription. Je renvoie ici aux pages 40 à 42, qui se trouvent dans le mémoire des faits et du droit et qui exposent ce qui est peut-être une cause défendable suivant Krause c. Canada (1999), 236 N.R. 317 (C.A.F.), à savoir qu"aucun délai de prescription ne s"applique si la réparation demandée est un jugement déclaratoire. Dans son mémoire des faits et du droit, Tigney demande subsidiairement une prorogation de délai.

[4]      Au lieu de répondre dans le délai imparti, la Couronne a écrit au greffe une lettre dans laquelle elle mentionnait que le dossier de demande déposé par Tigney n"indiquait pas qu"il était déposé en réponse à la requête, et qu"il avait été signifié et déposé une fois le délai expiré. Dans sa lettre, la Couronne demandait plus de temps pour déposer sa réponse aux documents produits par Tigney, la permission de déposer d"autres affidavits et une prorogation du délai dans lequel elle devait déposer et signifier son dossier en réponse à la demande principale.

[5]      Comme je l"ai dit, les documents déposés par Tigney exposent, bien que d"une manière inhabituelle, la thèse de celle-ci sur la question de la prescription et sur une demande de prorogation de délai. Je n"ai pas l"intention de refuser à Tigney la possibilité de faire valoir ses prétentions devant la Cour simplement parce que son avocate ne s"est pas donné la peine de consulter les Règles et de s"y conformer. Cependant, je ne vois aucune raison d"accorder une prorogation du délai dans lequel la défenderesse peut déposer une réponse ou de permettre à la défenderesse de déposer d"autres affidavits. Je fais ce commentaire en particulier parce que les parties devraient se concentrer sur l"audience elle-même, et non sur une procédure sommaire de radiation. Je vais reformuler l'exposé détaillé que j"ai fait dans l"affaire Alcorn c. Le Commissaire du Service correctionnel (1998), 156 F.T.R. 235.

[6]      La plupart des avis de demande ne devraient pas être l"objet de requêtes en radiation : ils devraient plutôt être contestés dans le cadre d"une instruction approfondie. C"est ce que le juge Muldoon a fait vertement savoir aux défendeurs dans l"affaire Hassan c. Canada , [1998] F.T.R. 264, en leur disant de se préparer à l"audience et non pas de compter sur une procédure sommaire de radiation. À cet égard, il a fait référence à différentes décisions, notamment l"arrêt David Bull Laboratories c. Pharmacia Inc. (1995), 176 N.R 48 (C.A.F.), où il est dit :

[...] le moyen direct et approprié par lequel la partie intimée devrait contester un avis de requête introductive d"instance qu"elle estime sans fondement consiste à comparaître et à faire valoir ses prétentions à l"audition de la requête même.                                  [à la page 52]

Le juge Strayer a évidemment laissé la question en suspens de sorte que la demande pût être radiée si celle-ci était manifestement irrégulière au point de n"avoir aucune chance d"être accueillie (ibid , aux pages 54 et 55).


[7]      En l"espèce, il ne s"agit pas d"un cas très exceptionnel auquel le juge Strayer faisait allusion à la page 55 de l"arrêt David Bull . La demande n"est pas " manifestement irrégulière au point de n"avoir aucune chance d"être accueillie " (ibid. ) car la thèse de Tigney concernant la prescription est une " question en litige discutable ", selon l"expression employée par le juge Strayer (ibid. ).

[8]      En outre, invoquer la prescription n"est pas suffisant pour entraîner la radiation d"une déclaration dans le cas d"une action, la procédure appropriée étant de soumettre la question comme une question de droit avant l"instruction (voir, par exemple, BMG Music Canada Inc. c. Vugiatzakis et autre (1996), 67 C.P.R. (3d) 27, aux pages 33 et 34). Comme je l"ai souligné dans la décision Alcorn (précitée, à la page 242), le même principe devrait s"appliquer à un avis de requête introductif d"instance : la prescription est une question qui devrait être débattue à fond devant un juge à l"audition de la demande.

[9]      Finalement, l"acte de procédure ne devrait pas être radié sans qu"il y ait eu autorisation de le modifier. En l"espèce, la demande porte sur un point intéressant et de portée limitée qui devrait et peut être assez facilement tranché. Une telle demande ne devrait pas être radiée si une modification peut la corriger. En l"espèce, si l"avocate de Tigney a tort et qu"il y a prescription, il est dans l"intérêt de la justice de permettre que la demande soit modifiée de façon qu"elle indique qu"une prorogation de délai est demandée directement ou de façon subsidiaire selon ce que Tigney décidera, et cette modification ne cause aucun préjudice à la défenderesse.

[10]      La requête présentée par la défenderesse afin d"obtenir la radiation de l"avis de demande est refusée. L"ordonnance prévoira en conséquence d"autres mesures de réparation nécessaires.

[11]      J"aurais pu adjuger les dépens en faveur de Tigney, mais j"ai décidé de ne pas le faire parce que cette dernière n"a pas suivi la procédure habituelle pour répondre à une requête. En fait, l"approche non orthodoxe de Tigney a plutôt compliqué la situation pour la défenderesse. Cette situation peut être rectifiée, et elle l"est effectivement, par l"adjudication des dépens à la défenderesse, d"un montant de 250 $ payable immédiatement. L"avocate de Tigney devrait, dans les affaires qu"elle aura à plaider devant la Cour dans l"avenir, prendre le temps de se familiariser avec les règles et la procédure de la Cour.


                             (Signé) " John A. Hargrave "

                                 Protonotaire

Vancouver (Colombie-Britannique),

le 3 août 1999


Traduction certifiée conforme :

Richard Jacques, LL. L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


NO DU GREFFE :                      T-798-99             

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Tigney Technology Incorporated

                             c. Sa Majesté la Reine

        

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE

                                    


ONT COMPARU :

Requête examinée sur la foi des prétentions écrites en vertu de la règle 369


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Priscilla Kennedy

Parlee McLaws                          pour la demanderesse

Edmonton (Alberta)

Morris A. Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                  pour la défenderesse

Deborah Horowitz


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