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Date : 20050831

 

Dossier : T-1187-04

 

Référence : 2005 CF 1190

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), ce 31e jour d’août 2005

 

En présence de monsieur le juge Mosley 

 

 

ENTRE :

 

AREA TWENTY THREE SNOW CRAB FISHER’S ASSOCIATION,

une société constituée en vertu des lois de la province de la Nouvelle-Écosse;

PREMIÈRE NATION MI’KMAQ DE MILLBROOK, Truro (Nouvelle-Écosse);

GORDON MACDONALD, Sydney (Cap-Breton); ADRIAN GLOADE,

Première nation Mi’kmaq de Millbrook; TIMOTHY BAGNELL,

Louisbourg (Cap-Breton); JASON CARTER, Sydney (Cap-Breton);

PAUL K. CORMIER, New Waterford (Cap-Breton); GARY DRAKE,

Louisbourg (Cap-Breton); GARY HATCHER, Gabarus (Cap-Breton);

GEORGE LEMOINE, Sydney (Cap-Breton); GRAHAM MACCUSPIC,

Grand River (Cap-Breton); ROBERT MACLEAN, Louisbourg,

(Cap-Breton); ARTHUR HUTT, Louisbourg (Cap-Breton);

RALPH RAFUSE, Fourchu (Cap-Breton); JOHN HUGH CAMPBELL,

Louisbourg (Cap-Breton); JAMES R. DEVRIES, Louisbourg,

(Cap-Breton); DANNY MUNDEN, Glace Bay (Cap-Breton);

DWAYNE STUART (Cap-Breton); ERIC TRIMM, Louisbourg

(Cap-Breton), et ROBERT TRUCKAIT, Glace Bay (Cap-Breton)

 

  demandeurs

  et

 

 

  PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et

MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS

 

  défendeurs

 

 

 


  MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

  • [1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision par laquelle le ministre des Pêches et des Océans (le « ministre ») a annoncé, le 20 mai 2004, une réduction de l’ordre de 10 % du total autorisé des captures (« TAC ») du crabe des neiges dans l’est de la Nouvelle-Écosse. Les activités d’exploitation visées sont concentrées dans cinq zones de pêche du crabe (les « ZPC 20 à 24 ») entre Cape North et Halifax. La présente demande touche uniquement la ZPC 23.

  • [2] Les demandeurs sont des titulaires de longue date de permis de pêche dans la ZPC 23, et font partie à ce titre de la « flottille permanente ». Ensemble, ils contestent la décision du ministre concernant le partage de la réduction de 10 % du TAC entre leurs captures et celles de la « flottille temporaire ». Les demandeurs contestent de surcroît l’imposition de conditions de permis leur interdisant de pêcher dans toutes les parties de la ZPC 23, et particulièrement dans le secteur appelé la « bordure de la déclivité » (slope edge).

  • [3] Les demandeurs ont introduit la présente demande pour obtenir l’annulation de la décision et des ordonnances de mandamus enjoignant au ministre de respecter ses décisions discrétionnaires précédentes eu égard à l’attribution des quotas de captures des prises et au partage de la zone de pêche. L’audition de la demande a eu lieu en mai 2005, longtemps après la fermeture de la pêche du crabe des neiges en 2004. Le contexte de la demande sera exposé en détail pour expliquer en quoi les demandeurs s’estiment lésés par la décision du ministre. J’ai néanmoins conclu que la demande avait dorénavant un caractère théorique et que la réparation demandée ne pouvait être accordée, pour les motifs exposés ci-dessous.

 

 

 


Contexte

 

Plans intégrés de gestion des pêches

 

  • [4] Ces dernières années, le ministère des Pêches et des Océans (« MPO ») a fait la promotion du principe de cogestion auprès des membres des pêches réglementées. Parmi les outils proposés à l’appui de cette approche se trouvent les plans intégrés de gestion des pêches (« PIGP »), décrits en janvier 1999 dans un document intitulé « Lignes directrices et cadre de mise en œuvre de la démarche de cogestion ».

  • [5] En 2000, un PIGP triennal a été établi pour l’ensemble des ZPC de l’est de la Nouvelle-Écosse. Le PIGP prévoyait notamment que les patrons d’exploitation historiques ne devaient pas empêcher les membres de la flottille permanente de pêcher dans une quelconque partie de leurs ZPC respectives.

  • [6] En 2002-2003, des pourparlers ont été engagés avec l’industrie de la pêche en vue d’élaborer un PIGP à long terme, mais aucun consensus n’a été atteint et le ministre a annoncé en 2003 que le PIGP de 2000 à 2002 serait reconduit pour une autre année. Les discussions ont de nouveau achoppé en 2004, et une nouvelle reconduction d’une année s’est ensuivie.

  • [7] Sous la rubrique « Formule de partage », il était notamment stipulé au PIGP de la ZPC 23 :

 

 

 


[traduction]
Aux fins de l’élaboration d’un plan de gestion pluriannuel, des négociations ont eu lieu entre les pêcheurs des ZPC 23 et 24, des représentants des titulaires de permis temporaires et le MPO en vue de conclure des ententes de partage. Les éléments pris en compte durant les travaux d’élaboration du plan sont les suivants : [...]

 

 

– La viabilité des flottilles à long terme est primordiale.

 

 

– Les patrons d’exploitation historiques ne doivent pas restreindre les activités de la flottille permanente.

 

 

– La flottille permanente a le droit de pêcher partout dans la ZPC.

 

 

Malgré les nombreuses discussions, aucune formule de partage convenant à toutes les parties n’a fait consensus. Le Ministère a par conséquent retenu la formule de partage suivante, qui concilie les besoins de la flottille permanente avec la nécessité de soutenir les communautés économiquement touchées sur le plan économique.

 

 

 

Niveau de quota

 

 

 

Partage

 

 

 

 

 

Perm. / Temp.

 

Niveau 1

 

Jusqu’au seuil

 

100 / 0

 

Niveau 2

 

Du seuil à 1 500 t

 

50 / 50

 

Niveau 3

 

1 500 à 2 000

 

40 / 60

 

Niveau 4

 

2 000 à 2 500

 

30 / 70

 

Niveau 5

 

2 500 à 3 000

 

20 / 80

 

Niveau 6

 

3 000

 

10 / 90

 

 

 

 

Relevés scientifiques et zone en bordure de la déclivité

 

  • [8] En 1997, la flottille permanente a commencé à faire des relevés annuels au chalut dans le cadre d’une étude du stock de crabes des neiges. En 1998 et 1999, au vu des résultats de ces relevés, le partage temporaire de la pêche du crabe des neiges dans l’est de la Nouvelle-Écosse a été autorisé, ce qui a favorisé l’arrivée de nouveaux titulaires de permis temporaires. En 2004-2005, on dénombrait 326 titulaires de permis temporaires.

  • [9] En 2000, de pair avec l’industrie, le MPO a entrepris de faire des relevés aux casiers pour avoir une idée de la répartition du crabe en bordure de la déclivité. L’étude s’est poursuivie en 2001 et en 2002 avec un certain nombre de pêcheurs à qui on avait octroyé des permis expérimentaux les autorisant à pêcher en bordure de la déclivité. En 2003, les relevés au chalut ont été étendus afin de réaliser des évaluations scientifiques dans le secteur en bordure de la déclivité de la ZPC 23.

  • [10] Dans la même annonce que celle où il était question de la réduction de 10 % du TAC, parue le 20 mai 2004, le ministre annonçait la poursuite des relevés aux casiers entamés en 2001 en bordure de la déclivité. Toutefois, l’annonce ne faisait aucune allusion aux incidences sur les droits des pêcheurs dans le secteur en bordure de la déclivité.


 

 

 

Total admissible de captures

 

  • [11] En 2000, une quantité de base de 800 tonnes a été allouée à la flottille permanente dans le TAC. Au-delà de cette quantité de base, la part du TAC allouée à la flottille temporaire augmentait proportionnellement au TAC, jusqu’à concurrence de la limite fixée (3 000 tonnes en 2000). Une proportion de 90 % du TAC, ou neuf livres sur un quota de dix livres, était allouée à la flottille temporaire. De 2000 à 2004, le TAC fixé dépassait la limite au-delà de laquelle une proportion de 90 % était allouée à la flottille temporaire.

  • [12] En 2002, le ministre a racheté 13 des permis de la flottille temporaire et créé 13 nouveaux permis permanents réservés à des membres d’une Première Nation (par suite de l’arrêt Marshall de la Cour suprême), portant ainsi le nombre de titulaires de permis de la flottille permanente de 24 à 37, soit une hausse de 54 %. Il n’y a eu aucun échange avec les membres de la flottille permanente eu égard à l’incidence d’une augmentation du nombre de permis sur le TAC qui lui était alloué.

  • [13] En mars 2004, le ministre a déclaré que la formule de partage entre les flottilles permanente et temporaire resterait la même qu’en 2003.

  • [14] L’annonce du 20 mai 2004 indiquait une réduction de 10 % du TAC par rapport aux niveaux de 2003, ce qui équivalait à 477 tonnes environ. Le ministre annonçait également une nouvelle reconduction du PIGP de 2000 pour la saison 2004, ainsi que l’imposition de nouvelles conditions rattachées aux permis de pêche du crabe, lesquelles interdisaient l’exploitation en bordure de la déclivité dans la ZPC 23 afin de ne pas perturber les relevés aux casiers dans ce secteur.

  • [15] Le ministre a partagé la réduction du TAC prévue en 2004 selon des proportions de 39 % pour la flottille permanente et de 61 % pour la flottille temporaire. Selon les demandeurs, comme une proportion de 90 % du TAC au-delà de la limite de 3 000 tonnes est allouée à la flottille temporaire, celle-ci devrait absorber une proportion équivalente de la réduction. Les défendeurs répliquent qu’un partage de la réduction à raison de 39 et de 61 % équivaut à un partage à raison de 10 et de 90 % rajusté pour tenir compte de la délivrance de 13 nouveaux permis de pêche permanents à des membres d’une Première Nation.

  • [16] À l’audience, la Cour a été informée que l’effet concret de ce partage de la réduction avait été une perte de 26 000 $ environ de la valeur des captures pour chaque demandeur.

 

 

 

 

 

 

 

La norme de contrôle

 

  • [17] Tel que l’établit la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 1 RCS 982, au paragraphe 26, la détermination de la norme de contrôle applicable doit être centrée sur la mesure dans laquelle le législateur souhaitait assujettir la décision administrative en cause à un contrôle judiciaire.

  • [18] Le pouvoir discrétionnaire octroyé au ministre à l’égard des permis de pêche découle de l’article 7 de la Loi sur les pêches, L.R.C. 1985, ch. F-14. L’article 7 dispose que :

 

7. (1) Subject to subsection (2), the Minister may, in his absolute discretion, wherever the exclusive right of fishing does not already exist by law, issue or authorize to be issued leases and licences for fisheries or fishing, wherever situated or carried on. [...]

 

 

___________________________

 

 

7. (1) En l’absence d’exclusivité du droit de pêche conférée par la loi, le ministre peut, à discrétion, octroyer des baux et permis de pêche ainsi que des licences d’exploitation de pêcheries -- ou en permettre l’octroi --, indépendamment du lieu de l’exploitation ou de l’activité de pêche. [...]

 

 

 


  • [19] Le libellé de l’article 7 n’impose aucune restriction à l’exercice du pouvoir discrétionnaire ministériel. La version anglaise de la disposition précise même que le pouvoir discrétionnaire du ministre est « absolu » (absolute), ce qui à mes yeux est révélateur de l’intention du législateur d’exiger de la Cour qu’elle fasse preuve d’une grande retenue envers les décisions du ministre. Le ministre a l’expertise nécessaire lorsqu’il s’agit de délivrer des permis de pêche : Tucker c. Canada (Ministre des pêches et des océans) (2000), 197 FTR 66 (1re inst.).

  • [20] Les attributions du ministre englobent la gestion et la conservation des pêches. Dans l’arrêt Comeau’s Sea Foods Ltd. c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [1997] 1 R.C.S. 12, au paragraphe 37, le juge Major affirme ce qui suit :

 

Cette interprétation de la portée du pouvoir discrétionnaire du Ministre est conforme à la politique globale de la Loi sur les pêches. Les ressources halieutiques du Canada sont un bien commun qui appartient à tous les Canadiens. En vertu de la Loi sur les pêches, le ministre a l’obligation de gérer, conserver et développer les pêches au nom des Canadiens et dans l’intérêt public (art. 43). Les permis sont un outil dans l’arsenal de pouvoirs que la Loi sur les pêches confère au ministre pour gérer les pêches. Ils permettent de restreindre l’accès à la pêche commerciale, de limiter le nombre de pêcheurs et de navires et d’imposer des restrictions quant aux engins de pêche utilisés et à d’autres aspects de la pêche commerciale.

 

 

 

  • [21] Des considérations polycentriques obligent le ministre à tenir compte d’une grande diversité d’intérêts avant de prendre une décision, à l’inverse de celles où le gouvernement serait l’unique adversaire d’un particulier. Par surcroît, la décision relative à la délivrance d’un permis de pêche ne revêt pas une importance jurisprudentielle.

  • [22] Pour toutes ces considérations, il semble que la norme de contrôle applicable à l’exercice de la discrétion ministérielle en application de l’article 7 de la Loi sur les pêches est celle de la norme de la décision manifestement déraisonnable. Dans l’arrêt Voice Construction Ltd. c. Construction & General Workers’ Union, Local 92, [2004] 1 R.C.S. 609, au paragraphe 18, la Cour suprême a affirmé que, pour qu’elle soit manifestement déraisonnable, la décision doit être clairement erronée, au point où « il doit s’agir d’une décision frôlant l’absurde ».

  • [23] Les défendeurs soutiennent par ailleurs que puisque la décision relève de la discrétion ministérielle, le principe énoncé dans Maple Lodge Farms c. Gouvernement du Canada, [1982] 2 RCS 2, à la page 3, devrait s’appliquer, à savoir qu’une décision stratégique rendue par un ministre ne devrait pas être susceptible de contrôle à moins qu’elle soit entachée de mauvaise foi, qu’elle aille à l’encontre des principes de justice naturelle (si la loi l’exige), et que les demandeurs puissent démontrer qu’elle repose sur des considérations étrangères.

  • [24] En l’espèce, les demandeurs soutiennent que la décision du ministre n’est pas vraiment motivée par une politique, mais plutôt par des impératifs d’exploitation, et que le critère établi dans l’arrêt Maple Lodge Farms ne s’y applique donc pas. Les demandeurs estiment que les PIGP et les accords connexes de projet conjoint constituent des interventions du ministre qui concernent l’exploitation de la ressource, et que le contrôle de ses décisions concernant le partage de la réduction du TAC et la restriction de l’accès à la bordure de la déclivité devrait se faire sur une base plus large.

  • [25] Je ne suis pas convaincu que la décision de réduire le TAC pour la saison 2004-2005 et la formule de partage de cette réduction entre les flottilles permanente et temporaire n’était pas liée à une politique. Conséquemment, pour que la Cour puisse examiner la décision sur le fond, les demandeurs doivent établir que le ministre a agi de mauvaise foi, qu’il les a privés de leur droit à l’équité procédurale, ou qu’il s’est fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères. Il appert que la décision relative à l’accès à la bordure de la déclivité visait à protéger les activités de relevés aux casiers dans ce secteur. À mon avis, elle est susceptible de contrôle selon la norme de la décision manifestement déraisonnable. Cependant, pour les raisons exposées ci-après, la décision revêt un caractère théorique et je ne ferai pas l’analyse de son fondement ici.

 


 

 

 


 

 

 

 

La question du caractère théorique

 

  • [26] À titre préliminaire, les défendeurs allèguent que la doctrine relative au caractère théorique commande aux tribunaux de trancher seulement les litiges actuels qui ont des conséquences sur les droits des parties, sauf si c’est dans l’intérêt de la justice : Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 RCS 342. La Cour doit se fonder sur trois critères pour déterminer si elle doit ou non exercer son pouvoir discrétionnaire d’entendre une cause théorique : 1) l’existence d’un contexte contradictoire; 2) la nécessité d’économiser les ressources judiciaires et 3) la conscience que doivent avoir les tribunaux de leur fonction juridictionnelle dans notre structure politique. Selon les défendeurs, aucune de ces exceptions ne s’applique en l’espèce.

 

Analyse

 


  • [27] La réparation sollicitée dans la demande soumise à la Cour comprend des ordonnances en annulation de la décision ministérielle de mai 2004 et de l’imposition de conditions de permis restreignant l’accès à la bordure de la déclivité, ainsi que des ordonnances de mandamus enjoignant au ministre de se conformer aux modalités du PIGP portant sur l’accès et le partage du TAC.

  • [28] Tel qu’il a déjà été mentionné, la saison 2004-2005 était fermée au moment de l’audition de la présente demande. Dans sa plaidoirie, l’avocat des demandeurs a admis qu’une ordonnance de mandamus n’avait plus de raison d’être. Il a toutefois fait valoir qu’il restait approprié pour la Cour de rendre des jugements déclaratoires fondés sur une analyse de la décision de 2004 afin de guider le ministre lorsqu’il sera appelé à exercer son pouvoir discrétionnaire à l’avenir.

  • [29] L’avocat des défendeurs a pour sa part fait observer que cela reviendrait à inviter la Cour à se prononcer sur des questions présentées par les demandeurs afin qu’ils puissent éventuellement appliquer le jugement rendu à une hypothétique situation analogue, ce qui serait l’équivalent d’un renvoi privé. Étant donné qu’aucun jugement déclaratoire n’a été demandé en réparation dans l’avis de demande, il n’y a pas lieu d’accorder pareille réparation : alinéa 301e) des Règles; Schut c. Canada (Procureur Général), (2000), 186 FTR 212 (1re inst.).

  • [30] Dans l’arrêt Borowski, précité, le juge s’exprime comme suit aux paragraphes 15 et 16 :

 

 

 

La doctrine relative au caractère théorique est un des aspects du principe ou de la pratique générale voulant qu’un tribunal peut refuser de juger une affaire qui ne soulève qu’une question hypothétique ou abstraite. Le principe général s’applique quand la décision du tribunal n’aura pas pour effet de résoudre un litige qui a, ou peut avoir, des conséquences sur les droits des parties. Si la décision du tribunal ne doit avoir aucun effet pratique sur ces droits, le tribunal refuse de juger l’affaire. Cet élément essentiel doit être présent non seulement quand l’action ou les procédures sont engagées, mais aussi au moment où le tribunal doit rendre une décision. En conséquence, si, après l’introduction de l’action ou des procédures, surviennent des événements qui modifient les rapports des parties entre elles de sorte qu’il ne reste plus de litige actuel qui puisse modifier les droits des parties, la cause est considérée comme théorique. Le principe ou la pratique général s’applique aux litiges devenus théoriques à moins que le tribunal n’exerce son pouvoir discrétionnaire de ne pas l’appliquer. J’examinerai plus loin les facteurs dont le tribunal tient compte pour décider d’exercer ou non ce pouvoir discrétionnaire.


 

La démarche suivie dans des affaires récentes comporte une analyse en deux temps. En premier, il faut se demander si le différend concret et tangible a disparu et si la question est devenue purement théorique. En deuxième lieu, si la réponse à la première question est affirmative, le tribunal décide s’il doit exercer son pouvoir discrétionnaire et entendre l’affaire. La jurisprudence n’indique pas toujours très clairement si le mot "théorique" (moot) s’applique aux affaires qui ne comportent pas de litige concret ou s’il s’applique seulement à celles de ces affaires que le tribunal refuse d’entendre. Pour être précis, je considère qu’une affaire est "théorique" si elle ne répond pas au critère du "litige actuel". Un tribunal peut de toute façon choisir de juger une question théorique s’il estime que les circonstances le justifient.

 

 

 

 

  • [31] En l’espèce, j’estime qu’il n’existe pas de litige actuel qui peut avoir des conséquences sur les droits des demandeurs pour ce qui est de la saison de pêche 2004-2005. La cause est donc théorique. Il me reste maintenant à déterminer si la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire d’entendre les questions soulevées par les demandeurs même si elles sont devenues théoriques.

  • [32] La décision de restreindre l’accès à la bordure de la déclivité a été prise, semble-t-il, pour protéger les activités de relevés aux casiers menées en 2004 pour évaluer la vigueur du stock dans ce secteur. Rien dans le dossier de preuve mis à ma disposition n’indique que les relevés aux casiers devaient se poursuivre la ou les saisons suivantes. Je n’ai rien non plus sous les yeux qui m’indique que les restrictions de permis qui interdisent l’accès à la bordure de la déclivité seront maintenues pour cette raison particulière ou d’autres raisons. Je conclus par conséquent que les critères exposés par le juge Sopinka pour justifier l’audition d’une cause théorique ne sont pas remplis. Il n’y a pas pour que la Cour d’exercer son pouvoir discrétionnaire d’examiner les conditions de permis restreignant l’accès à la bordure de la déclivité puisque l’éventuelle survenue d’un litige à cet égard s’avère purement théorique.

  • [33] Il est toutefois envisageable que la même formule de partage de la réduction du quota soit appliquée au cours des années suivantes, à moins que les parties parviennent à s’entendre sur un nouveau PIGP. Le ministre étant d’avis que la nouvelle formule de partage découle logiquement de la formule prévue au PIGP qui a été reconduite les deux années précédentes, il apparaît peu probable qu’il la change, à moins que de nouveaux permis permanents soient créés. En ce sens, je dois reconnaître un certain mérite à l’argument des demandeurs selon lequel il subsiste un contexte contradictoire opposant les parties et que celui-ci doit être examiné.

  • [34] Au paragraphe 34 de l’arrêt Borowski, précité, le juge Sopinka souligne que l’influence du facteur de l’économie des ressources judiciaires sur la décision de ne pas entendre une cause théorique sera jaugée au vu des circonstances particulières d’une affaire, qui parfois justifient d’utiliser ces ressources limitées. Je suis sensible à l’argument des demandeurs selon lequel les exigences du processus de contrôle judiciaire font en sorte qu’il est quasiment inévitable qu’une demande liée aux quotas de pêche du crabe pour une année donnée soit théorique au moment où elle est entendue. À cause de leur nature, les questions soulevées par les demandeurs en l’espèce risquent de ne jamais être examinées si la Cour refuse de les entendre.

  • [35] Je considère par conséquent qu’il est pertinent, sans égard à ma conclusion quant au caractère théorique de la demande, de déterminer si la décision de partager la réduction du TAC selon des proportions de 39 et de 61 % repose sur des fondements erronés.

 

 

 

 

 


Les demandeurs pouvaient-ils légitimement s’attendre à ce que le partage se fasse selon les mêmes proportions qu’en 2004?

 

  • [36] Selon ce que le personnel du MPO avait laissé entendre avant l’annonce de la décision contestée, les demandeurs pouvaient raisonnablement s’attendre, selon eux, à ce que le PIGP soit maintenu pour la saison de pêche 2004 et à ce que la formule de partage à raison de 10 et 90 % soit appliquée à une réduction du TAC. Cette déduction découle de ce que leur auraient dit des membres importants du personnel du MPO, qui ont une influence certaine sur la plupart des décisions touchant la pêche du crabe des neiges dans l’est de la Nouvelle-Écosse. Suivant le principe enseigné dans l’arrêt Carltona (Carltona Ltd. v. Commissioners of Works, [1943] 2 All E.R. 560 [C.A.]), ces fonctionnaires doivent être considérés comme les porte-parole du ministre.

  • [37] Il semble que le ministre et son personnel ont été cohérents dans leurs échanges avec la flottille permanente au cours des cinq premiers mois de 2004, soit juste avant l’annonce de la décision, le 20 mai 2004. Dans un communiqué de presse publié le 25 mars 2004, le ministre affirmait que les arrangements existants seraient reconduits pour une autre année. Les demandeurs prétendent que le 26 février, dans le cadre d’une réunion, un fonctionnaire du MPO leur aurait indiqué que le PIGP de 2000 serait vraisemblablement reconduit pour une autre année. De nouveau, lors d’une réunion tenue les 23 et 24 mars 2004, on leur aurait dit que le PIGP de 2000 serait probablement reconduit, et que la formule de partage selon des proportions de 90 et de 10 % serait appliquée pour une autre année [Je souligne.].

  • [38] Les demandeurs estiment que les pourparlers entre les parties peuvent donner naissance à une entente ou un engagement de consulter. En l’espèce, des pourparlers entre le ministre et les demandeurs ont eu lieu chaque année au cours de laquelle le PIGP 2000 a été appliqué, et notamment lors des réunions des 23 et 24 mars 2004 sur l’état du stock, ainsi que celles du 19 avril 2004 sur les relevés scientifiques aux casiers en bordure de la déclivité durant la saison 2004. Seule la décision de modifier la formule n’a pas fait l’objet de consultations de la part du ministre et de ses fonctionnaires.

  • [39] Les demandeurs soutiennent que le ministre avait l’obligation minimale de consulter l’industrie de la pêche, comme il l’avait fait jusque-là, avant de modifier la formule de partage de la réduction : Assoc. des résidents du vieux St-Boniface c. Winnipeg (Ville), [1990] 3 RCS 1170.

  • [40] Les défendeurs répliquent que la décision en cause est liée à une politique, et que les propos tenus par les fonctionnaires du Ministère n’ont pas force exécutoire et ne lient pas le ministre. La décision relève d’un pouvoir discrétionnaire, elle est de l’ordre d’un acte législatif et susceptible de contrôle uniquement par voie de certiorari, pour des motifs inhérents à l’observation de la loi ou à l’obligation de bonne foi. Essentiellement, les décisions liées à des politiques constituent des directives qui ne sont pas exécutoires par le public. L’intention du législateur était de laisser beaucoup de latitude au ministre en matière décisionnelle, et de limiter l’ingérence des tribunaux à celles de ses décisions qui débordent nettement la compétence qui lui est dévolue par la Loi sur les pêches. La Cour doit se garder de remettre en question le jugement du ministre s’il a fondé sa décision sur des facteurs essentiellement pertinents : Tucker c. Canada (2000), 197 F.T.R. 66 (CF).

  • [41] La doctrine relative aux attentes légitimes est le prolongement des règles de justice naturelle et d’équité procédurale. Voici les propos de la Cour suprême à ce sujet au paragraphe 74 de l’arrêt Vieux St-Boniface :

 

 


 

 

 


Il accorde à une personne touchée par la décision d’un fonctionnaire public la possibilité de présenter des observations dans des circonstances où, autrement, elle n’aurait pas cette possibilité. La cour supplée à l’omission dans un cas où, par sa conduite, un fonctionnaire public a fait croire à quelqu’un qu’on ne toucherait pas à ses droits sans le consulter.

 

 

 

  • [42] Malgré ce qu’en disent les demandeurs, le PIGP annuel ne me semble pas être le fruit des consultations continues entre le MPO et les parties visées, mais plutôt une solution de repli ou choisie par défaut. N’ayant pas réussi à obtenir de consensus sur un nouveau PIGP, le ministre a décidé unilatéralement de reconduire l’ancien. À mon avis, le ministre aurait pu décider, en toute légitimité, de ne pas reconduire le PIGP et d’établir un nouveau cadre stratégique. Le PIGP n’aurait pas été reconduit année après année si le MPO et l’industrie avaient pu s’entendre sur un nouveau PIGP. Quoi qu’il en soit, le PIGP ne lie pas les parties.

  • [43] Comme c’était le cas dans Atlantic Coast Scallop Fisherman’s Association v. Canada (1996), 116 F.T.R. 81 (1re inst.), il n’y a pas eu d’entente ou d’engagement de conserver exactement les mêmes conditions du PIGP. Le communiqué de presse du 25 mars 2004 ne constituait ni une entente ni un engagement, pas plus que les déclarations faites de vive voix par des fonctionnaires.

  • [44] Je ne doute aucunement que les demandeurs auraient contesté la formule de partage de la réduction s’ils avaient été consultés avant que la décision soit prise à cet égard. Cependant, cette décision n’avait aucune incidence sur leurs droits. Les demandeurs n’avaient pas le droit d’exiger que le permis de pêche délivré en 2004 pour la ZPC 23 soit assorti de conditions en tous points semblables à celles de leurs permis précédents. Un permis de pêche donne simplement le privilège de participer à la pêche pendant la durée de validité du permis : Radil Bros. Fishing Co. c. Canada (Directeur Général Régional du Ministère des Pêches et Océans, Région du Pacifique) (2000), 197 FTR 169 (1re inst.).

  • [45] À mon avis, la décision de réduire le TAC pour favoriser la préservation du stock et de partager cette réduction relevait de l’entière discrétion du ministre. Il n’avait aucune obligation de consulter les demandeurs avant de la prendre.

  • [46] Dans Canadian Association of Regulated Importers v. Canada (Attorney General), [1994] 2 F.C. 247 (F.C.A.), il a été conclu que les principes de justice naturelle peuvent s’appliquer à des décisions individuelles qui concernent des contingentements, mais qui n’établissent pas de politique à cet égard. Dans cet arrêt, la Cour d’appel reconnaît que le ministre aurait pu être plus prévenant et donner aux demandeurs l’information voulue de même que la possibilité de se faire entendre, mais elle rappelle qu’il n’en avait pas l’obligation. De même, et bien que je convienne qu’il aurait été préférable pour le ministre de tenir des consultations avant de modifier la formule de partage de la réduction du quota, je suis forcé de conclure qu’il n’y était pas tenu.

 

 


 

 

 

Le principe de la préclusion promissoire en droit public s’applique-t-il?

 

  • [47] Les demandeurs affirment que tous les éléments de la préclusion promissoire en droit public sont présents en l’espèce du fait de la confiance qu’ils ont accordée aux garanties sans équivoque du ministre et de son personnel, et du changement de position qui s’est ensuivi à leur propre détriment.

 


 

  • [48] Aucun élément de preuve ne permet de conclure que les pêcheurs visés ont changé leur position à leur détriment après avoir reçu les garanties du ministre. La preuve par affidavit produite par les demandeurs démontre uniquement qu’ils avaient malencontreusement compris que le TAC resterait inchangé, et que la réduction de leur part du quota s’est traduite par des pertes de revenus pour eux. Cependant, il n’existe pas de lien de causalité entre les déclarations initiales et les « pertes » ultérieures. Ainsi, aucune preuve n’indique que les pêcheurs ont signé un contrat ou engagé des dépenses sur la foi de l’ancien arrangement, et que les nouvelles modalités leur ont par la suite occasionné des pertes.

  • [49] Comme l’affirme le juge McKeown au paragraphe 32 de la décision Radil Bros. Fishing Co., précitée, le ministère des Pêches et des Océans « n’a pas d’obligation de fiduciaire ni d’obligation légale de veiller à ce que le permis [...] de la demanderesse lui attribue les prises les plus élevées possible de sorte qu’elle gagne le plus d’argent possible ».

 

 

Le ministre avait-il l’obligation d’agir conformément à l’exercice antérieur de son pouvoir discrétionnaire?

 

  • [50] Les demandeurs allèguent qu’il faut considérer que la décision que le ministre a prise le 20 mai 2004, en l’absence de toute consultation ou négociation avec l’industrie de la pêche, infirme un exercice antérieur de son pouvoir discrétionnaire.

  • [51] Les demandeurs fondent cette allégation sur l’arrêt Centre hospitalier Mont-Sinaï c. Québec (Ministre de la Santé et des Services sociaux), [2001] 2 RCS 281, portant sur un refus du ministre de délivrer un permis. La Cour a tranché que le refus du ministre de délivrer le permis demandé n’infirmait pas validement l’exercice antérieur de son pouvoir discrétionnaire étant donné qu’il avait fondé sa décision sur des considérations et des motifs inappropriés. En l’espèce, les demandeurs soutiennent que la décision du ministre d’appliquer une formule de partage selon des proportions de 39 et 61 % infirme l’exercice antérieur de son pouvoir discrétionnaire de maintenir le partage à raison de 10 et de 90 %, selon l’annonce du 25 mars 2004. L’argument voulant que la formule 39/61 découle logiquement de la formule 10/90 est déraisonnable et irrationnel. Les demandeurs affirment que le rajustement de la formule pour compenser l’octroi de nouveaux permis déroge à l’esprit et à l’intention du PIGP de 2000, et qu’il repose sur des considérations inappropriées.

  • [52] Les défendeurs assimilent cette allégation des demandeurs à une tentative de faire admettre qu’en exerçant son pouvoir discrétionnaire relativement à la formule de partage de la réduction du TAC, le ministre aurait épuisé ses moyens. Les demandeurs invoquent l’arrêt Pacific National Investments Limited c. Victoria (Ville), [2000] 2 RCS 919, qui posait la question de savoir si une clause contractuelle implicite selon laquelle la municipalité pouvait conserver un type de zonage en particulier ou verser des dommages-intérêts constituait une entrave illicite à ses pouvoirs de réglementation discrétionnaires. Dans le cas qui nous occupe, selon les défendeurs, le ministre doit être en mesure de gérer la pêche en élaborant des politiques, en y apportant des modifications ou en y dérogeant si les circonstances le justifient. Le pouvoir discrétionnaire du ministre ne peut être entravé.

  • [53] Le régime législatif qui s’applique à la présente instance diffère passablement de celui qui s’appliquait à l’arrêt Mount Sinai, précité, et je ne vois pas en quoi il pourrait être utile dans le présent contexte. Je préfère le raisonnement suivi par le juge Major au paragraphe 29 de l’arrêt Comeau’s Sea Foods, précité, où il tient les propos suivants à l’égard du pouvoir discrétionnaire du ministre de révoquer une décision d’annuler une autorisation de délivrer des permis : « Peu importe que le ministre décide initialement d’autoriser la délivrance d’un permis, cette autorisation n’est irrévocable pour aucune des parties tant et aussi longtemps que le permis n’est pas finalement délivré. » [Non souligné dans l’original.]

  • [54] Tant qu’un permis n’a pas été effectivement délivré, le ministre peut décider de ne pas le délivrer ou, encore, de le délivrer en l’assortissant de conditions restrictives. En l’espèce, le ministre n’a pas épuisé son pouvoir discrétionnaire en prenant la décision de reconduire le PIGP pour une autre année.

  • [55] Je conclus en conséquence que la Cour n’a aucun motif de rendre un jugement déclaratoire portant que le ministre a commis une erreur en exerçant son pouvoir discrétionnaire de partager la réduction du total autorisé des prises dans la ZPC 23 pour la saison de pêche 2004.

 

 

 

 

 

 

Dépens

 


  • [56] Les défendeurs soutiennent qu’il y a lieu d’adjuger des dépens calculés selon l’échelle maximale du tarif pour les services des avocats étant donné que les demandeurs ont produit des documents non conformes aux règles de la Cour. Il semble en outre que malgré un avis reçu du greffe à cet effet, l’avocat des demandeurs n’a pas soumis de requête en autorisation de déposer lesdits documents.

  • [57] Pour leur part, les demandeurs font valoir que même s’ils n’obtiennent pas gain de cause, des dépens ne devraient pas être adjugés au bénéfice des défendeurs parce que la diffusion des questions soulevées servait l’intérêt public.

  • [58] Il est indubitable que les demandeurs ont produit un volume excessif de documents. Notamment, il n’était pas nécessaire de soumettre des affidavits pour chacun des 18 demandeurs. De plus, les observations écrites sont inutilement verbeuses et, de ce fait, non conformes aux règles de la Cour quant à la longueur et à la forme. Il s’agit cependant de fautes imputables à l’avocat, qui a été dûment averti de ne pas les reproduire.

  • [59] Des dépens seront donc adjugés aux défendeurs, mais ils seront calculés selon le tarif habituel.

 

 

 

 

 

  ORDONNANCE

 

LA COUR rejette la demande avec dépens en faveur des défendeurs, qui seront calculés selon le tarif habituel.

 

 

 « Richard G. Mosley »

  Juge


  COUR FÉDÉRALE

 

  AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :  T-1187-04

 

INTITULÉ :  AREA TWENTY THREE SNOW CRAB FISHER’S ASSOCIATION, une société constituée en vertu des lois de la province de la Nouvelle-Écosse; PREMIÈRE NATION MI’KMAQ DE MILLBROOK, Truro (Nouvelle-Écosse);

GORDON MACDONALD, Sydney (Cap-Breton); ADRIAN GLOADE, Première Nation Mi’kmaq de Millbrook; TIMOTHY BAGNELL, Louisbourg (Cap-Breton); JASON CARTER, Sydney (Cap-Breton);

PAUL K. CORMIER, New Waterford (Cap-Breton); GARY DRAKE, Louisbourg (Cap-Breton); GARY HATCHER, Gabarus (Cap-Breton);

GEORGE LEMOINE, Sydney (Cap-Breton); GRAHAM MACCUSPIC, Grand River (Cap-Breton); ROBERT MACLEAN, Louisbourg (Cap-Breton); ARTHUR HUTT, Louisbourg (Cap-Breton); RALPH RAFUSE, Fourchu   (Cap-Breton);

JOHN HUGH CAMPBELL, Louisbourg (Cap-Breton); JAMES R. DEVRIES, Louisbourg (Cap-Breton); DANNY MUNDEN, Glace Bay (Cap-Breton); DWAYNE STUART (Cap-Breton); ERIC TRIMM, Louisbourg (Cap-Breton), et ROBERT TRUCKAIT, Glace Bay (Cap-Breton);

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et

MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :  HALIFAX (NOUVELLE-ÉCOSSE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :  LE 4 MAI 2005

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :  LE JUGE MOSLEY

 

DATE DES MOTIFS :  LE 31 AOÛT 2005

 

 

 


COMPARUTIONS :

 

Andrew N. Montgomery  POUR LES DEMANDEURS

James D. Youden

 

Reinhold M. Endres  POUR LES DÉFENDEURS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

ANDREW N. MONTGOMERY  POUR LES DEMANDEURS

JAMES D. YOUDEN

Metcalfe & Company

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

JOHN H. SIMS, c.r.    POUR LES DÉFENDEURS

Sous-procureur général du Canada

Halifax (Nouvelle-Écosse)

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