Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20051005

Dossier : T-1645-03

Référence : 2005 CF 1364

Ottawa (Ontario), le 5 octobre 2005

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE HENEGHAN                         

ENTRE :

                                                PEACE HILLS TRUST COMPANY

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                             et

BRIAN MOCCASIN, GARY GOPHER (parfois connu sous le nom CARY GOPHER), JONES KATCHEECH, WALTER LEWIS et DON NIGHT,

soit le chef et les conseillers de la Première nation Saulteaux,

et FIRST NATIONS MANAGEMENT SERVICES INC.

                                                                                                                                          défendeurs

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

I.           INTRODUCTION


[1]                Peace Hills Trust Company (la demanderesse) sollicite un contrôle judiciaire, en application de l'article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, R.C.S. 1985, ch. F-7, modifiée, d'une décision du chef et du conseil de la Première nation Saulteaux (le conseil de bande) résultant d'une résolution du conseil de la bande (la RCB contestée) en date du 11 octobre 2001. La RCB prescrivait au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (AINC) et(ou) à First Nations Management Services Inc. (le séquestre-administrateur) de retenir des paiements sur un endettement de plus de 5,3 millions de dollars dus à la demanderesse. Une copie de la RCB en question n'est parvenue à la demanderesse qu'en mai 2004.

[2]                Dans la présente demande de contrôle judiciaire, déposée le 8 septembre 2003, la demanderesse sollicite les réparations suivantes :

[Traduction]

a.              une déclaration attestant que l'adoption par le conseil de bande de la RCB contestée et l'omission constante de ce dernier d'ordonner à AINC ou au séquestre-administrateur de faire des versements à la demanderesse sont contraires à la loi et discriminatoires;

b.              une ordonnance infirmant la RCB contestée;

c.              une ordonnance contraignant le séquestre-administrateur et le conseil de bande à préparer, dans un délai prescrit, un plan de redressement et un plan de réduction de la dette;

d.              une ordonnance nommant un séquestre de la Première nation Saulteaux pour éviter le gaspillage des excédents à l'avenir et pour préserver les autres revenus de la bande;

e.              les dépens de la demande.


II.         CONTEXTE

(i)          Les parties

[3]                La demanderesse, une société de fiducie constituée en vertu de la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt, L.C. 1991, ch. 45, a des bureaux en Saskatchewan et en Alberta. Entièrement détenue par la Nation crie de Samson de Hobbema (Alberta), sa fonction première est de répondre aux besoins financiers des Premières nations du Canada.

[4]                Brian Moccasin, Gary Gopher (également connu sous le nom de « Cary » Gopher), Jones Katcheech, Walter Lewis et Don Night forment le conseil de bande de la Première nation Saulteaux, qui est une bande indienne selon la définition du paragraphe 2(1) de la Loi sur les Indiens, L.R.C. 1985, ch. I-5, modifiée. La Première nation Saulteaux réside à proximité de Cochin (Saskatchewan).

[5]                Le séquestre-administrateur est constitué en société conformément aux lois du Manitoba et a son siège à Kamsack (Saskatchewan). En 1999, il a été nommé séquestre-administrateur de la Première nation Saulteaux en application de l'alinéa 4.3c) de l'entente globale de financement (EGF) conclue entre la Première nation Saulteaux et le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien (le ministre), par suite d'un manquement par cette nation, le 19 avril 1999 ou vers cette date, aux conditions de l'alinéa 4.3c) de l'EGF, qui est ainsi libellé :


4.3 Nonobstant la section 4.2, en cas de manquement du Conseil aux termes de la présente entente, le ministre peut adopter l'une ou l'autre des mesures de redressement suivantes qu'il estimera raisonnablement nécessaires, compte tenu de la nature et de l'importance du manquement.

[. . .]

c) désigner, sur avis au Conseil, un Séquestre-administrateur pour celui-ci;

(ii)        Historique du différend

[6]                L'un des buts déclarés de l'intervention effectuée par AINC sous forme d'une entente de cogestion ou d'une entente d'administration par tierce partie (EATP) est d'aider la Première nation Saulteaux à prendre en main ses problèmes financiers, y compris à préparer un plan pour aborder et régler ces problèmes et pour reprendre le contrôle de ses finances, afin qu'elle puisse recouvrer le droit d'autogérer la prestation des programmes et services essentiels en vertu de l'EGF. Dans le cadre d'une telle entente, AINC verse directement au séquestre-administrateur les fonds affectés à la Première nation Saulteaux pour les programmes et services essentiels; le conseil de bande n'est pas partie à l'EATP et le séquestre-administrateur est nommé par le ministre en exécution de l'EGF.


[7]                Le 7 avril 1993 ou vers cette date, la Première nation Saulteaux a conclu avec le gouvernement du Canada une entente de financement - l'entente sur les droits fonciers issus du Traité de Saulteaux - qui lui permettait entre autres de faire l'acquisition de terres additionnelles (désignées acres manquants) pour la réserve. L'achat des acres manquants était obligatoire; après leur acquisition, il était permis de consacrer les fonds ainsi transférés à d'autres fins utiles à la bande, y compris à l'achat discrétionnaire d'acres supplémentaires.

[8]                La Couronne versait ces fonds tous les ans; l'entente faisait obligation à la Première nation Saulteaux de désigner une institution financière qui agirait à titre de dépositaire des fonds en fiducie. À la suite de la signature, le 7 avril 1993 ou vers cette date, de la convention de fiducie relative aux droits fonciers issus de traités de la bande Saulteaux (la convention de fiducie), la Banque de Nouvelle-Écosse a été nommée en tant qu' « institution » , rôle qu'elle a occupé d'avril 1993 à août 1995. Le 25 août 1995, la demanderesse a été nommée « institution » en substitution de la Banque de Nouvelle-Écosse, fonction qu'elle a conservée jusqu'au 10 mai 1999.

[9]                Durant cette période, la Première nation Saulteaux a présenté plusieurs demandes de prêts à la demanderesse, par le truchement de son conseil de bande, pour des projets, mises en valeur et aménagements au profit de la bande, notamment l'installation du gaz naturel, une clôture entourant la réserve, des installations de loisirs et le logement dans la réserve. Entre le 6 décembre 1995 et le 22 janvier 1999, seize prêts d'une valeur totale de plus de 5,3 millions de dollars ont été consentis à la Première nation Saulteaux, qui a non seulement promis de payer et accusé réception du paiement, mais de plus obtenu l'autorisation dans certains cas de tirer des sommes de fonds particuliers, entre autres des fonds de fiducie. Mais dans chacun de ces cas, selon les documents déposés, il était convenu entre la demanderesse et le conseil de bande que le paiement à partir de ces fonds était assujetti à l'achat d'acres manquants.


[10]            En bout de ligne, la Première nation Saulteaux a effectivement acheté tous les acres manquants le 23 juin 1999, date à laquelle AINC a produit un certificat d'acquisition des acres manquants (Shortfall Acquisition Certificate). La demanderesse avait été remplacée par la Banque des Premières Nations du Canada à titre d'institution visée par la convention de fiducie le 10 mai 1999; à la même date, la demanderesse a transféré les investissements à cette banque.

[11]            Conformément aux obligations du conseil de bande en vertu des contrats de prêt applicables, des RCB irrévocables adoptées pour chaque prêt demandaient à AINC de déposer toutes les sommes à payer dans le compte de la Première nation Saulteaux tenu par la demanderesse. Il était indiqué dans les RCB qu'elles liaient AINC et, dans plusieurs d'entre elles, qu'elles lieraient tout séquestre-administrateur subséquemment nommé par AINC. Les RCB avaient pour but de veiller à ce que des fonds soient versés dans les comptes tenus par la demanderesse, d'où il était entendu que seraient déduits les paiements dus par la Première nation Saulteaux sur ces prêts.


[12]            Outre la convention de fiducie établie en application de l'entente sur les droits fonciers issus du Traité de Saulteaux, la bande a conclu avec le ministre (au nom du gouvernement fédéral) plusieurs EGF dans lesquelles elle s'engageait à assurer à ses membres les programmes et services financés par le gouvernement fédéral. AINC établit la méthode ou le mécanisme à employer pour offrir les programmes et services financés au moyen des crédits affectés par le Parlement et fournis à ces fins à AINC. Ce dernier détermine et fixe les programmes et services particuliers à offrir, ordinairement désignés programmes et services essentiels, qui visent la santé, le logement, l'éducation et le bien-être.

[13]            La structure des EGF et les politiques d'AINC qui les concernent sont établies conformément aux articles 32 et 34 de la Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C. 1985, ch. F-11. Les EGF stipulent qu'un certain financement est versé à la bande pour une période d'un an et que, si l'EGF est résiliée ou s'il existe un excédent, des portions des fonds admissibles excédentaires restants doivent être remboursées au ministre compétent. Les EGF imposent à la bande des conditions régissant la dépense des fonds et la prestation des programmes et services essentiels.

[14]            Comme il l'est indiqué ci-dessus, la Première nation Saulteaux a été soumise à la gestion d'un séquestre-administrateur vers mars 1999 pour manquement à ses obligations en vertu de l'EGF pertinente. La nomination du séquestre-administrateur est entrée en vigueur le 1er avril 1999; depuis lors, des EATP ont été conclues tous les ans entre le ministre et le séquestre-administrateur. Avant 1999, la Première nation Saulteaux avait été mise sous le régime de la cogestion, comme l'exige le ministre en vertu de l'alinéa 4.3b) de l'EGF, pour manquement à l'obligation de ne pas avoir un déficit cumulatif équivalant à plus de huit pour cent des revenus annuels de la bande. L'entente de cogestion a été résiliée en 1999, lors de la nomination du séquestre-administrateur en application de l'alinéa 4.3c) de l'EGF.


[15]            Sous le régime de la gestion par un tiers, AINC fait appel à un séquestre-administrateur dont le rôle se borne à administrer les programmes et services essentiels offerts aux membres de la bande. AINC a rédigé une politique régissant ses interventions à l'égard des programmes et services financés par le gouvernement fédéral (la Politique d'intervention); elle figure à la partie 5 du Guide des politiques et des procédures financières publié par AINC.

[16]            Bien que n'ayant pas de force exécutoire en soi, la Politique d'intervention est largement reproduite dans les conditions des EATP et des EGF et, à presque toutes fins utiles, lie les parties à ces ententes. De plus, l'alinéa 5.1b) de l'EATP de la Première nation Saulteaux pour la période inscrite entre le 1er avril 2003 et le 31 mars 2004 prévoit que le ministre doit « à la demande de l'Administrateur, fournir toute politique de gestion financière, toute information ou toute ligne directrice publiques produites par le Ministre et qui se rapportent au financement prévu dans cette entente. »

[17]            Voici les extraits pertinents de la Politique d'intervention actuelle :

5.0 Définitions

[...]

5.6 Plan de redressement : plan établi par le Conseil et approuvé par le Ministre qui tient compte des décisions et des mesures nécessaires pour remédier à un manquement à une entente de financement.

[...]


5.8 Séquestre-administrateur (administrateur) : tierce partie nommée par le Ministre pour administrer, en totalité ou en partie, les fonds et les obligations du Conseil découlant d'une entente de financement.

6.0 Énoncé de politique

6.1 Le Conseil est responsable de la prestation des programmes et des services visés par l'entente de financement et il doit déployer tous les efforts raisonnables possibles pour s'acquitter de cette responsabilité.

6.2 Les conditions de l'entente de financement précisent les situations qui constituent un manquement aux obligations et les mesures correctives pouvant être prises par le Ministre. Ce dernier intervient en nommant un administrateur afin de protéger les fonds publics, d'assurer la prestation d'un (ou de l'ensemble) des services essentiels ou de respecter l'obligation de rendre compte du Ministre.

6.3 La nomination d'un administrateur est considérée comme une intervention de haut niveau et comme une situation temporaire, pendant que le Conseil règle le problème ayant causé le manquement à son entente de financement, ou qu'il négocie une telle entente [lorsqu'un administrateur est nommé parce que le Conseil n'a pas encore signé d'entente de financement]. Les contrôles exercés par l'administrateur doivent être appliqués conformément au processus établi dans la politique du Ministre sur les interventions.

6.4 Cette politique concerne la nomination d'un administrateur, ce qui constitue la plus haute forme d'intervention dans les affaires d'un Conseil. Elle est conçue de façon à assurer l'uniformité des opérations régionales et à faciliter la mise en place d'un processus continu de surveillance, pour en améliorer l'efficacité. En grande partie, ce niveau d'intervention permet de travailler de façon ordonnée avec le Conseil, par l'entremise de l'administrateur, dans le but de développer ses capacités jusqu'au point où une intervention de l'extérieur n'est plus nécessaire, ou presque. La gestion par un administrateur offre un cadre pour la prise de mesures de redressement et pour l'apport d'aide spécialisée pouvant permettre au Conseil d'améliorer ses capacités et de reprendre la prestation des programmes et services.

Le Ministre s'engage à atteindre cet objectif. Par l'entremise de l'administrateur, il travaillera avec le Conseil, la collectivité et, au besoin, avec des parties de l'extérieur comme des établissements financiers afin de favoriser le retour des responsabilités au Conseil. De plus, le Ministre respectera les principes de la transparence et de la divulgation de l'information. En travaillant ensemble dans le cadre d'une relation respectueuse, l'intervention de gestion par un administrateur devrait permettre de rétablir la stabilité au plan de la prestation des programmes et des services.

[...]

11.4 Établissement du plan

[...]


11.4.3 L'administrateur établira un plan de réduction de la dette comprenant au moins :

a)                      une liste suffisamment ancienne des comptes débiteurs et des comptes à payer, et la liste de toutes les dettes du Conseil [...]

b)                     un calendrier proposé de remboursement de la dette faisant état des montants exigibles, des conditions et des obligations relatives aux paiements, de la source des fonds qui seront utilisés pour réduire la dette, ainsi que des conditions de la renégociation de la dette que l'administrateur recommande [. . .] Les facteurs et les circonstances entourant la dette doivent être pris en considération pour que les créanciers soient traités de manière juste et équitable [. . .]                     

c)                      des réunions projetées avec le Conseil et ses créanciers pour faciliter les discussions sur le remboursement et la renégociation de la dette.

11.4.4 Lorsque le Conseil ne dispose pas d'un plan de redressement (PR) efficace ou qu'il ne possède aucun PR, l'administrateur établira un PR avec l'aide du Conseil, si cela est possible. Ce plan doit comprendre toutes les exigences prévues aux sections 3.0 et 4.0 de l'Annexe A de la Politique d'intervention et doit être conçu de manière à imposer au Conseil certaines méthodes financières, certaines méthodes de gestion et d'administration, et certaines méthodes de gestion du personnel. Ce plan fournira un cadre qui aidera le Conseil à rétablir sa capacité de prestation des programmes et des services. En plus, il déterminera le calendrier et le contenu recommandés des rapports que l'administrateur doit présenter pour exposer en détail au Ministre les progrès réalisés par le Conseil en vertu du plan de redressement (PR) recommandé.

[...]

11.5 Responsabilité liée au remboursement de la dette

11.5.1 L'administrateur doit indiquer clairement aux créanciers que ni lui ni le Ministre n'est responsable du remboursement de la dette au Conseil et que le remboursement de cette dette n'oblige pas le Ministre ou la Couronne à payer toute dette actuelle ou future du Conseil, ou à en accepter la responsabilité.

L'EATP de 2003-2004 contient en outre les dispositions suivantes :

6.3 Plan de gestion, plan de réduction de la dette et plan de redressement

6.3.1 L'Administrateur doit examiner les registres et dossiers du Conseil, informer de sa nomination comme administrateur l'établissement financier où le Conseil a obtenu ses principales facilités de crédit, évaluer les méthodes de gestion et les méthodes financières du Conseil et, dans les soixante (60) jours suivant la date de la signature de l'entente ou, si les soixante (60) jours ne suffisent pas, à une autre date convenue par écrit par les parties, soumettre à l'approbation du Ministre :


[...]

b)              Un plan de réduction de la dette comprenant :

(I)             une liste suffisamment ancienne des comptes à recevoir et des comptes à payer, et la liste de toutes les dettes ou tous les éléments de passif des opérations générales du Conseil. [...]

[...]

c)              un plan de redressement destiné à être signé par le Conseil afin d'aider ce dernier à élaborer des méthodes dans les domaines de la gestion, des finances, de l'administration et du personnel, notamment en ce qui concerne la formation nécessaire, afin d'améliorer les capacités du Conseil en matière financière et de faire en sorte que celui-ci soit à nouveau capable de dispenser les programmes et les services, ou si le Conseil est assujetti à un plan de redressement, une analyse de ce plan et des recommandations sur les changements qui, selon l'administrateur, permettraient de mieux mettre en oeuvre les objectifs ci-dessus;

[...]

[18]            À la suite de la nomination du séquestre-administrateur, la demanderesse a été informée à plusieurs réunions que la situation globale de la bande, y compris de ses finances, faisait l'objet d'une évaluation et qu'une réunion se tiendrait en temps utile pour discuter des propositions et des choix offerts. Le 31 mai 2000, le séquestre-administrateur a informé la demanderesse que le chef de la Première nation Saulteaux à l'époque, Fred Gopher, lui avait donné instruction de ne pas négocier ou de ne pas payer le prêt en souffrance avant d'avoir reçu un rapport de l'investigateur financier engagé par la bande pour vérifier ces opérations.


[19]            Les avocats du conseil de bande ont informé la demanderesse, à une réunion tenue le 23 novembre 2000, que la Première nation Saulteaux cesserait tout versement à la demanderesse à l'égard du prêt contesté jusqu'à l'issue d'une poursuite que le fiduciaire entendait entamer. La teneur de cette discussion fut confirmée par une lettre en date du 27 novembre 2000, signée par le président-directeur général de la demanderesse. Le 15 mai 2001, les fiduciaires de l'entente sur les droits fonciers issus du Traité de Saulteaux ont intenté une action à la demanderesse devant la Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan, alléguant que la demanderesse avait contrevenu à ses obligations fiduciaires, en tant qu'institution financière en vertu de la convention de fiducie, en structurant le prêt de sorte que les paiements soient effectués à partir des montants en fiducie.

[20]            Vers mai 2000, le séquestre-administrateur a reçu instruction verbale de ne payer à la demanderesse aucune portion des prêts en souffrance. Le 24 mai 2001, le séquestre-administrateur a informé la demanderesse que le conseil de bande avait décidé d'attendre l'issue de la poursuite intentée par les fiduciaires avant de rembourser les prêts.


[21]            Par la suite, le 19 décembre 2001, la demanderesse a intenté une action à la Première nation Saulteaux pour obtenir par jugement le montant du prêt impayé dû par la bande. En réponse, le conseil de bande a déposé, le 1er février 2002, une défense et une demande reconventionnelle. Le juge de première instance a rejeté la demande de jugement sommaire de la demanderesse; toutefois, cette décision a été infirmée par la Cour d'appel de la Saskatchewan, par un arrêt rendu le 17 février 2005 et publié dans (2005), 257 Sask. R. 115, qui a décidé d'inscrire un jugement sommaire au montant demandé, plus intérêts et dépens. Le 18 avril 2005, la Première nation Saulteaux a déposé une demande d'autorisation d'appel devant la Cour suprême du Canada, qui a rejeté la présente demande le 8 septembre 2005 (Bulletin de la C.S.C., 2005, p. 1182; [2005] C.S.C.R. no 171 (QL)). Le jugement de la Cour d'appel de la Saskatchewan demeure valable.

[22]            Le directeur général régional de la région de la Saskatchewan (AINC) a informé la demanderesse de ce qui suit, par lettre en date du 1er novembre 2001 :

[traduction] Le Ministère et le séquestre-administrateur ont reçu des instructions écrites de la Première nation Saulteaux, sous forme d'une résolution du conseil de bande (RCB), nous ordonnant expressément de retenir tout paiement du prêt à Peace Hills Trust en attendant l'issue des poursuites intentées à l'encontre de Peace Hills par la fiducie des droits fonciers issus des traités de la Première nation Saulteaux. Cette RCB interdit au Ministère de donner ordre à notre séquestre-administrateur de commencer à établir et de régulariser des modalités de remboursement du prêt avec Peace Hills Trust, puisque nous agirions ainsi sans l'aval de la Première nation Saulteaux.

[23]            Une copie de la RCB mentionnée dans cette lettre, qui fait l'objet de la présente demande, a été remise à la demanderesse en mai 2004. Voici son contenu au complet :

[traduction] ATTENDU que, selon les états financiers vérifiés de la Première nation Saulteaux au 31 mars 1999, les comptes débiteurs s'élevaient à 157 487 $ et les comptes créditeurs à 646 554 $, donnant lieu à des comptes créditeurs nets de 489 067 $.

ATTENDU que, selon les états financiers vérifiés de la Première nation Saulteaux au 31 mars 2001, l'excédent de fonctionnement accumulé dans les programmes financés par AINC et administrés par le séquestre-administrateur s'élèvent à 548 586 $.

IL EST RÉSOLU que 489 067 $ de cet excédent accumulé doivent être imputés aux comptes créditeurs en souffrance au 31 mars 1999 et que les 58 979 $ restants doivent être déposés dans un compte sécurisé portant intérêt jusqu'au règlement de l'action en justice avec Peace Hills Trust.

IL EST EN OUTRE RÉSOLU de faire les paiements suivants à McDiarmid Lumber à partir des fonds d'exploitation, selon le calendrier des paiements ci-dessous, afin de rembourser le compte selon ce qui a été convenu :


Le 31 mars 2000      =              100 000 $

Avril 2001                =              80 000 $

Avril 2002                =              80 000 $

[24]            La demanderesse n'a assisté à aucune réunion avec le séquestre-administrateur ou le conseil de bande en vue de préparer un plan de réduction de la dette ou un plan de redressement. La Première nation Saulteaux n'a fait aucun versement sur les prêts en souffrance depuis le début de la gestion par un tiers en 1999, exception faite de paiements mensuels qu'elle continue à acquitter sur un prêt de logement dans la réserve dont le ministre garantit le paiement.

(iii)       La preuve

[25]            Dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, la demanderesse a produit l'affidavit de M. David Boisvert, fait sous serment le 15 août 2003. M. Boisvert est le directeur régional de la demanderesse pour la région du Nord de la Saskatchewan, y compris Saskatoon et une superficie englobant environ les deux tiers du Nord de la province.

[26]            Le conseil de bande défendeur a déposé un affidavit signé par Gary Gopher le 31 octobre 2003. Membre du conseil de bande, M. Gopher a reçu l'autorisation du chef Brian Moccasin, par une lettre datée du 27 octobre 2003, de témoigner au nom du conseil de bande.

[27]            Le séquestre-administrateur défendeur a produit l'affidavit signé par Peter Chartrand le 30 octobre 2003. M. Chartrand est l'unique administrateur et actionnaire de First Nations Management Services Inc. Il est en fait le séquestre-administrateur nommé par le ministre pour assurer des services aux membres de la Première nation Saulteaux.

[28]            M. Chartrand, M. Gopher et M. Boisvert ont été contre-interrogés au sujet de leurs affidavits (les transcriptions de ces contre-interrogatoires figurent dans le dossier). D'autres éléments de preuve ont été également produits, sous forme de réponses à des questions soulevées lors des contre-interrogatoires.

[29]            La preuve demandée à M. Boisvert consiste en des détails sur le contenu des différents prêts en souffrance, sur la procédure employée pour nommer un séquestre-administrateur et sur la nature du différend occasionné par le non-paiement de la dette de la Première nation Saulteaux envers la demanderesse. Il témoigne que le solde impayé, en date de son affidavit, s'élevait en tout à 5 321 771,44 $, soit 4 271 053,30 $ pour le principal et 1 050 718,14 $ pour les intérêts échus. Il ajoute que, depuis la date de délivrance du certificat d'acquisition des acres manquants par les Saulteaux, au moins 4 424 738,44 $ ont été payés à la fiducie; si le paiement de 1999 avait été effectué conformément aux pratiques antérieures, le total se serait élevé à 5 530 923,05 $.


[30]            M. Boisvert fonde sa réponse sur une copie des états financiers, jointe à son affidavit à titre de pièce, de la Première nation Saulteaux et de la Auski Land Corporation, entreprise constituée en vertu des lois de la Saskatchewan et détenue (directement ou indirectement) par la bande par l'intermédiaire de la fiducie. Il fait observer que la bande a affiché des surplus en 2000, en 2001 et en 2002 sous le contrôle du séquestre-administrateur, selon l'état financier pour la période qui a pris fin le 31 mars 2002. Une augmentation des comptes débiteurs du conseil de bande et des membres de la bande a été récemment constatée. Il ressort aussi des états financiers que des paiements sont effectués à d'autres créanciers de la Première nation Saulteaux.

[31]            La demanderesse prétend qu'elle n'a jamais consenti à la révocation des RCB précédentes; elle conteste l'autorité, le pouvoir et la compétence du conseil de bande pour adopter la RCB contestée ou pour prendre toute mesure clairement destinée à détourner les fonds offerts à la Première nation Saulteaux en vue d'autres utilisations incompatibles avec les RCB précédentes. La demanderesse conteste en outre le refus du conseil de bande de négocier avec le séquestre-administrateur et la demanderesse en vue de préparer un plan de redressement et un plan de réduction de la dette. Enfin, elle conteste que le conseil de bande puisse agir au mépris total des engagements légaux et contraignants pris par ses prédécesseurs à l'égard du remboursement des prêts.


[32]            Le conseil de bande défendeur soutient que la légalité des prêts est en question, de même que leurs effets sur la situation financière de la Première nation Saulteaux. Il s'appuie à cet égard sur l'affidavit de M. Gopher, y compris les pièces qui y sont jointes. M. Gopher explique une difficulté, à savoir qu'une RCB ne peut être prise qu'en présence d'un quorum d'au moins quatre personnes; or certaines des RCB irrévocables précitées sont le fait d'un groupe de seulement trois conseillers. M. Gopher donne une description minutieuse des litiges en cours relativement au différend entre les parties, notamment de la poursuite intentée à la demanderesse par les fiduciaires, et de la défense et de la demande reconventionnelle produites en réponse à la requête en jugement sommaire de la demanderesse. M. Gopher signale que des accusations criminelles de fraude et d'abus de confiance ont été portées contre les personnes qui siégeaient au conseil de bande à l'époque des opérations de prêt.

[33]            M. Gopher ajoute que la nomination d'un séquestre-administrateur est attribuable en grande partie aux actes frauduleux commis par d'anciens membres du conseil de bande et à la dette contestée contractée par ces membres en faveur de la demanderesse. En réponse à M. Boisvert, qui soutient qu'il aurait fallu consulter la demanderesse concernant la RCB contestée, M. Gopher fait observer que des conseils de bande nouvellement élus adoptent souvent des modifications des politiques sur la gouvernance et les affaires commerciales. Il n'est jamais arrivé, dans son expérience, qu'un non-membre de la bande participe aux décisions prises par le conseil de bande, y compris la signature d'une RCB.


[34]            M. Gopher indique en outre que plus de quatre-vingt-dix pour cent (90 %) des revenus de la Première nation Saulteaux lui sont versés par le gouvernement fédéral et que ces fonds, en application des articles 89 et 90 de la Loi sur les Indiens, précitée, sont spécifiquement protégés contre la saisie par des non-Indiens; toute entente relative à ces fonds est nulle à moins d'être conclue entre les membres d'une bande ou entre une bande et l'un de ses membres.

[35]            De son côté, le séquestre-administrateur défendeur s'appuie sur l'affidavit de M. Chartrand pour décrire les conditions des EATP pertinentes entre le ministre et le séquestre-administrateur. Les EATP prévoient que le financement doit être consacré aux fins décrites dans les EGF, y compris à des usages généraux comme les suivants : études d'impact sur l'environnement et appels d'offres à cet égard; services fonciers et fiduciaires; éducation; aide sociale; soins à domicile; régimes de prestations; fonctionnement et entretien des infrastructures; logement; paiement des employés essentiels de la bande et prestation des services administratifs.

[36]            M. Chartrand déclare qu'aucune des sommes versées au séquestre-administrateur - en gros, le financement versé par AINC en vue d'assurer la prestation des programmes et services essentiels - n'a jamais été due à la bande ou à une autre entité, y compris à la demanderesse. Tout excédent disponible à la fin de chaque exercice peut être consacré aux dettes contractées par la bande. AINC a son mot à dire dans la détermination des dettes éventuelles à rembourser, dettes qui sont le plus souvent liées à des programmes. M. Chartrand témoigne en outre que tous les créanciers de la bande ont été remboursés, exception faite de la demanderesse, qui est le seul créancier envers qui on allègue une dette non opérationnelle.

[37]            M. Chartrand ajoute que le plan de redressement proposé par AINC a été mis en application à l'époque de la nomination du séquestre-administrateur en 1999. Il a commencé par dire que ce plan n'avait jamais été montré à la demanderesse mais, en contre-interrogatoire, il a nuancé ses propos et révélé qu'il n'existe pas de plan de redressement formel; au début de chaque exercice, en réalité, AINC fixe des cibles de gestion des finances de la bande que le séquestre-administrateur s'efforce d'atteindre. M. Chartrand déclare que la Première nation Saulteaux n'a pas signé une EGF depuis son arrivée; il ajoute qu'AINC ne lui a pas à ce jour donné instruction de préparer un plan de réduction de la dette ou un plan de redressement.

[38]            De surcroît, aucun accord contractuel entre le séquestre-administrateur et AINC n'oblige le premier à respecter une RCB éventuellement adoptée par le conseil de bande; son rôle consiste à assurer la prestation des programmes et, dans la mesure du possible, à créer un excédent pour rembourser les dettes. Il répond de ses actes devant le gouvernement du Canada et non la Première nation Saulteaux. En réponse à une question soulevée en contre-interrogatoire, M. Chartrand déclare qu'il n'a jamais reçu une copie de la RCB contestée ni une instruction écrite lui enjoignant de retenir le paiement du prêt à la demanderesse; le conseil de bande l'a informé verbalement, en mai ou en juin 2001, de retenir ces paiements.

[39]            En réponse à une autre question soulevée, M. Chartrand indique que le surplus accumulé entre le 1er avril 1999 et le 31 mars 2003 s'élevait à 1 111 557 $, dont environ 984 293 $ ont été dépensés au profit de la Première nation Saulteaux.


III.       QUESTIONS

[40]            Les questions suivantes sont soulevées et traitées dans la présente demande de contrôle judiciaire :

(1)        Les délais de présentation d'une demande de contrôle judiciaire prévus à l'article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, précitée, sont-ils applicables et, dans l'affirmative, la Cour devrait-elle proroger le délai prévu pour introduire la présente demande?

(2)        Le conseil de bande et le séquestre-administrateur sont-ils chacun « un office fédéral » dont les actes sont susceptibles de contrôle judiciaire devant la Cour?

(3)        Le mandamus et la nomination d'un syndic sont-ils des recours possibles?

(4)        La demanderesse a-t-elle qualité pour introduire la présente demande de contrôle judiciaire?

(5)        Aurait-il fallu qu'AINC se constitue partie à l'espèce?


IV.       DISCUSSION ET DÉCISION

(i)         Délai de présentation

[41]            Le paragraphe 18.1(2) prévoit que les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours « qui suivent la première communication » , par l'office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou « à la partie concernée » ; il prévoit aussi que ce délai peut être prorogé avant ou après l'expiration de ces trente jours.

[42]            La demanderesse invoque l'arrêt Atlantic Coast Scallop Fishermen's Assn. c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans) (1995), 189 N.R. 220 (C.A.F.) pour faire valoir que le paragraphe 18.1(2) exige du tribunal lui-même qu'il accomplisse un acte positif quelconque pour communiquer sa décision aux parties directement touchées. Elle soutient qu'elle n'a pas reçu une copie de la RCB contestée et que, par conséquent, les trente jours n'ont pas commencé avant la date de présentation de la demande de contrôle judiciaire.


[43]            Il est certain que la demanderesse n'a pas reçu copie de la RCB contestée avant mai 2004. La présente demande a été déposée le 8 septembre 2003. Mais il semble toutefois établi qu'elle a été informée, dès le 31 mai 2000, du fond de la position de la bande concernant le non-paiement des prêts en souffrance (voir l'affidavit de Peter Chartrand). De même, il ne fait aucun doute que la demanderesse avait reçu, au 1er novembre 2001, un avis écrit d'AINC l'informant que la Première nation Saulteaux avait adopté une RCB qui précisait que les versements à la demanderesse sur le prêt seraient retenus en attendant l'issue des poursuites intentées à la demanderesse par la fiducie établie en application de l'entente sur les droits fonciers issus du Traité de Saulteaux.

[44]            Selon moi, ce préavis était suffisant pour avertir la demanderesse qu'une décision qui aurait des incidences sur le paiement des prêts en souffrance avait été prise. La lettre datée du 1er novembre 2001 émanait d'AINC - une source manifestement immédiate, voire finale, de financement pour les Premières nations Saulteaux.

[45]            La demanderesse allègue aussi que le conseil de bande n'a pris aucune mesure active pour faire connaître sa décision de retenir tout paiement sur les prêts en souffrance. La demanderesse admet qu'elle avait connaissance de la RCB contestée en novembre 2001, mais qu'après l'envoi de la lettre d'AINC elle n'a reçu copie de ce document qu'en mai 2004.

[46]            La demanderesse fait aussi valoir, dans la demande de contrôle judiciaire, qu'elle recherche davantage que la révision et l'annulation de la RCB contestée.


[47]            Le conseil de bande défendeur et le séquestre-administrateur défendeur allèguent tous deux que la demande a été introduite après le délai de trente jours; le conseil de bande défendeur soutient que la demanderesse n'a pas satisfait aux critères admis pour qu'une prorogation lui soit accordée, conformément à l'arrêt Canada (Procureur général) c. Hennelly (1999), 244 N.R. 399 (C.A.F.), à savoir qu'elle a manifesté une intention constante de poursuivre sa demande, que sa demande est fondée, que le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du délai et qu'il existe une explication raisonnable justifiant le délai.

[48]            Le conseil de bande défendeur allègue que la demanderesse n'a ni établi une intention constante de poursuivre sa demande de contrôle judiciaire, ni offert une explication raisonnable justifiant le délai. Il soutient en outre que la demande n'est pas fondée, puisque la relation entre les parties est commerciale et strictement une question de droit privé.

[49]            Le séquestre-administrateur défendeur prétend en outre que la demande dépasse les délais impartis, puisqu'AINC a communiqué à la demanderesse la décision de retenir les paiements sur les prêts; il admet toutefois que cette décision a été prise par le conseil de bande, qui n'a pas communiqué directement avec la demanderesse. Mais il soutient que la nature du lien entre AINC et le conseil de bande est suffisant pour enlever toute pertinence à la question de savoir laquelle des deux parties a informé la demanderesse du contenu de la RCB contestée.

[50]            De surcroît, le séquestre-administrateur défendeur fait valoir que la demanderesse n'a pas justifié le retard dans l'introduction de la présente demande.

[51]            Je souscris aux prétentions globales des défendeurs sur la question des délais d'introduction de la présente demande. Dans la décision Skycharter Ltd. c. Canada (Ministre des Transports) (1997), 125 F.T.R. 307 (C.F. 1re inst.), la Cour a refusé d'accorder la prorogation sollicitée par une demanderesse qui n'avait pas reçu un exemplaire d'un bail qu'elle contestait. La Cour a statué que la demanderesse disposait de trente jours à partir du moment où elle avait été informée au sujet du bail, et qu'attendre d'obtenir tous les détails n'est pas une raison suffisante pour accorder une prorogation du délai de trente jours.

[52]            Je suis convaincue que la demanderesse a introduit la présente demande après la date limite réglementaire. La question suivante consiste à déterminer s'il convient de proroger le délai, ce qui nécessite une analyse des facteurs discrétionnaires énoncés dans Hennelly, précitée, aux pages 399 et 400 :

Le critère approprié est de savoir si le demandeur a démontré :

1. une intention constante de poursuivre sa demande;

2. que la demande est bien-fondé [sic];

3. que le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du délai; et

4. qu'il existe une explication raisonnable justifiant le délai.

[53]            Je ne suis pas persuadée que la demanderesse a satisfait au premier, au deuxième ou au quatrième critères.


[54]            Je suis convaincue qu'en novembre 2001 ou avant, la demanderesse savait que le conseil de bande défendeur avait pris une mesure formelle concernant le non-paiement des prêts à la demanderesse. Après analyse des facteurs discutés dans Skycharter, précitée, j'estime que l'avis écrit adressé à la demanderesse par AINC devait suffire à inciter la demanderesse à agir si elle entendait exercer le recours d'un contrôle judiciaire.

[55]            Plus fondamentalement, toutefois, je ne suis pas convaincue du bien-fondé de la présente demande. Le but essentiel de la demande de la demanderesse est de recouvrer le paiement de ses prêts en souffrance. Le recours qu'elle souhaite est un mandamus qui forcerait la nomination d'un syndic et la mise en application d'un plan de redressement et d'un plan de réduction de la dette, afin que des arrangements soient pris pour que des sommes lui soient versées.

[56]            L'objet de la demande est la RCB contestée, et son but est de recouvrer une créance. À mon avis, nous sommes ici devant un problème de contrat et de dette, qui ne se prête pas à un contrôle judiciaire. Cette demande est peu ou pas fondée.

[57]            Dans le même ordre d'idées, la demanderesse n'a pas prouvé à ma satisfaction qu'il existe une justification raisonnable du retard dans l'introduction de la présente demande.

(ii)        Possibilité de présenter une demande de contrôle

[58]            La demande de contrôle judiciaire a pour objet la RCB contestée en date du 11 octobre 2001. La RCB traite de la retenue du paiement de certains prêts consentis au conseil de bande défendeur par la demanderesse.


[59]            La jurisprudence de la Cour a constamment reconnu qu'un conseil de bande indien qui exerce les pouvoirs que lui confère la Loi sur les Indiens, précitée, est un « office fédéral » au sens de l'article 2 de la Loi sur les Cours fédérales, précitée. À cet égard, je renvoie aux décisions Frank c. Bottle, [1994] 2 C.N.L.R. 45 (1993), 65 F.T.R. 89 (C.F. 1re inst.); Bigstone c. Big Eagle, [1993] 1 C.N.L.R. 25 (1992), 52 F.T.R. 109 (C.F. 1re inst.); Jock c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), [1991] 2 C.F. 355; Gabriel c. Canatonquin, [1980] 2 C.F. 792.

[60]            Une RCB peut être assimilée à une décision ou une ordonnance d'un office fédéral (Medeiros c. Première nation Ginoogaming (2001), 213 F.T.R. 221 (C.F. 1re inst.)), mais il ne s'ensuit pas que toute RCB relève de la compétence de la Cour à des fins de contrôle judiciaire en application du paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée, qui est libellé comme suit :


(3) Sur présentation d'une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale peut_ :

a) ordonner à l'office fédéral en cause d'accomplir tout acte qu'il a illégalement omis ou refusé d'accomplir ou dont il a retardé l'exécution de manière déraisonnable;

b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu'elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l'office fédéral.                                                                              

18.1(3) On an application for judicial review, the Federal Court may

(a) order a federal board, commission or other tribunal to do any act or thing it has unlawfully failed or refused to do or has unreasonably delayed in doing; or

(b) declare invalid or unlawful, or quash, set aside or set aside and refer back for determination in accordance with such directions as it considers to be appropriate, prohibit or restrain, a decision, order, act or proceeding of a federal board, commission or other tribunal.



[61]            La RCB contestée concerne une opération entre la demanderesse et la Première nation Saulteaux portant sur des contrats de prêt commerciaux conclus en Saskatchewan. Cette opération relève du droit privé et n'a rien à voir avec l'intérêt public. Je souscris aux arguments du conseil de bande défendeur, c'est-à-dire qu'il faut s'abstenir d'appliquer les principes du droit administratif au règlement de ce qui est au fond une question de droit commercial, et je renvoie à cet égard à la décision Socanav Inc. c. Northwest Territories (Commissioner) (1993), 16 Admin. L.R. (2d) 266 (C.S.T.N.-O.).

[62]            En l'espèce, je conclus que la RCB contestée ne peut faire l'objet d'un contrôle judiciaire, puisqu'elle est sans lien avec l'exercice du pouvoir accordé par la Loi sur les Indiens, précitée et ne relève pas de la compétence d'origine législative de la Cour. Nous sommes en présence d'une question contractuelle; dans la mesure où la demanderesse sollicite un recours, elle ne peut l'obtenir par la voie d'un contrôle judiciaire.

[63]            La présente demande de contrôle judiciaire concerne également le séquestre-administrateur, car elle s'adresse à lui, en vue d'obtenir le recours discrétionnaire offert par le mandamus. Trois questions se posent. La demande a-t-elle été présentée dans les délais prescrits? Le séquestre-administrateur est-il un « office fédéral » au sens de l'article 2 de la Loi sur les Cours fédérales, précitée? Enfin, convient-il d'accorder la voie de recours offerte par un mandamus?


[64]            Sur la question des délais, la demanderesse fait valoir que l'article 18.1 est rédigé en termes larges et vise le contrôle judiciaire de sujets autres qu'une « décision ou une ordonnance » . Dans sa demande, la demanderesse ne se borne pas à demander l'annulation de la RCB contestée, mais veut une ordonnance nommant un syndic et des instructions contraignant celui-ci à surveiller la création et la mise en application du plan de redressement et du plan de réduction de la dette. La demanderesse soutient, invoquant l'arrêt Krause c. Canada, [1999] 2 C.F. 476 (C.A.), que lorsque l'examen porte sur un « objet de la demande » autre qu'une décision ou une ordonnance, le délai de trente jours ne s'applique pas.

[65]            Il est inutile de décider si le délai de trente jours s'applique à la présente demande, puisque je suis persuadée que le séquestre-administrateur n'est pas un « office fédéral » aux fins de la présente demande de contrôle judiciaire. Nommé par AINC, il détient le pouvoir d'administrer les fonds du Ministère pour assurer les programmes et services essentiels dans la réserve. Ainsi, il gère les fonds d'AINC au profit de la Première nation Saulteaux, les fonds excédentaires devant revenir à AINC. Bien qu'il dispose du pouvoir discrétionnaire de consacrer les fonds excédentaires, entre autres, au remboursement des dettes de la bande, il semble que de telles décisions soient prises en bout de ligne par AINC en consultation avec la bande en cause.


[66]            L'obligation légale du séquestre-administrateur est envers la bande qui fait l'objet de la gestion par un tiers tout autant qu'envers AINC et le grand public, compte tenu du fait que le financement d'AINC se compose de fonds publics votés par le Parlement. Il semble que la demanderesse sollicite une ordonnance qui contraindrait le séquestre-administrateur à établir un plan de redressement et un plan de réduction de la dette dans le but d'obtenir le remboursement des prêts accordés à la Première nation Saulteaux.

[67]            J'observe que l'article 11.5.1 de la Politique d'intervention prescrit que le séquestre-administrateur doit indiquer clairement aux créanciers (par exemple la demanderesse) que ni lui ni le ministre n'est obligé de payer toute dette du Conseil, ou d'en accepter la responsabilité. À mon avis, le but recherché par un plan de redressement et un plan de réduction de la dette est compatible avec l'obligation fiduciaire de la Couronne envers la Première nation Saulteaux, puisque le but est de l'aider à reprendre les rênes de ses affaires financières, et non de profiter à des tiers créanciers comme la demanderesse.

[68]            Par conséquent, je conclus que le séquestre-administrateur n'a aucune obligation de respecter une quelconque équité procédurale envers la demanderesse et que l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés en application des EGF et des EATP n'est pas susceptible de révision pour ces motifs.

(iii)       Recours disponibles

[69]            Il faut trancher tout d'abord la question du recours discrétionnaire du mandamus sollicité par la demanderesse. Les conditions pour accorder ce recours sont exposées dans la décision Apotex Inc. c. Canada, [1994] 1 C.F. 742 :


(1) Le mandamus : les principes applicables

Plusieurs conditions fondamentales doivent être respectées avant qu'un mandamus ne puisse être accordé.

[...]

1.              Il doit exister une obligation légale d'agir à caractère public :

[...]

2.              L'obligation doit exister envers le requérant :

[...]

3.              Il existe un droit clair d'obtenir l'exécution de cette obligation, notamment :

a.              le requérant a rempli toutes les conditions préalables donnant naissance à cette obligation;

[...]

b.              il y a eu (i) une demande d'exécution de l'obligation, (ii) un délai raisonnable a été accordé pour permettre de donner suite à la demande à moins que celle-ci n'ait été rejetée sur-le-champ, et (iii) il y a eu refus ultérieur, exprès ou implicite, par exemple un délai déraisonnable;

[...]

4.              Lorsque l'obligation dont on demande l'exécution forcée est discrétionnaire, les règles suivantes s'appliquent :

a) le décideur qui exerce un pouvoir discrétionnaire ne doit pas agir d'une manière qui puisse être qualifiée d' « injuste » , d' « oppressive » ou qui dénote une « irrégularité flagrante » ou la « mauvaise foi » ;

b) un mandamus ne peut être accordé si le pouvoir discrétionnaire du décideur est « illimité » , « absolu » ou « facultatif » ;

c) le décideur qui exerce un pouvoir discrétionnaire « limité » doit agir en se fondant sur des considérations « pertinentes » par opposition à des considérations « non pertinentes » ;

d) un mandamus ne peut être accordé pour orienter l'exercice d'un « pouvoir discrétionnaire limité » dans un sens donné;


e) un mandamus ne peut être accordé que lorsque le pouvoir discrétionnaire du décideur est « épuisé » , c'est-à-dire que le requérant a un droit acquis à l'exécution de l'obligation.

[...]

5.             Le requérant n'a aucun autre recours :

[...]

6.             L'ordonnance sollicitée aura une incidence sur le plan pratique :

[...]

7.             Dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le tribunal estime que, en vertu de l'équité, rien n'empêche d'obtenir le redressement demandé :

[...]

8.             Compte tenu de la « balance des inconvénients » , une ordonnance de mandamus devrait (ou ne devrait pas) être rendue.

[Références omises]

[70]            J'ai déjà conclu que la présente demande de contrôle judiciaire n'est pas fondée et que les actes du séquestre-administrateur ne sont pas susceptibles de révision : il s'ensuit donc que ce recours est rejeté.

[71]               La demanderesse sollicite en outre la nomination d'un syndic. À mon avis, il convient de rejeter ce deuxième recours, puisqu'une telle nomination reviendrait en fait à remplacer le séquestre-administrateur nommé par AINC. La nomination d'un syndic aurait pour seul effet d'autoriser la demanderesse à exécuter de façon indirecte ce qu'il lui est impossible de faire directement, c'est-à-dire se ménager un accès aux fonds en vue de rembourser les prêts en souffrance.


(iv)        Qualité pour agir

[72]            Le séquestre-administrateur a soulevé à l'audience la question de la qualité pour agir, mais elle n'est pas expressément mentionnée dans les observations écrites des parties. Le paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée, dispose qu'une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par « quiconque est directement touché par l'objet de la demande » . Ce libellé est assez large pour reconnaître à la demanderesse qualité pour agir, qu'elle soit ou non « directement touchée » , à condition de satisfaire au critère applicable à la qualité pour agir dans l'intérêt public (Tribus Kwicksutaineuk/Ah-kwa-mish c. Canada (Ministre des pêches et des océans) (2003), 227 F.T.R. 96 (C.F. 1re inst.)).

[73]            La présente demande de contrôle judiciaire n'a pas été introduite par le procureur général du Canada : il faut donc décider si la demanderesse est « directement touchée » par la RCB contestée et, dans la négative, si elle peut prouver qu'elle satisfait au critère applicable pour obtenir qualité pour agir dans l'intérêt public.


[74]            La RCB contestée se borne à dresser l'état des comptes de la Première nation Saulteaux selon les états financiers vérifiés, à assurer le paiement du créancier de la bande (McDiarmid Lumber) et à autoriser le dépôt d'une somme de 58 979 $ dans un compte sécurisé en attendant le règlement du litige avec la demanderesse. Elle ne fait nulle mention de la révocation de RCB existantes ou d'instructions données au séquestre-administrateur ou à AINC de retenir des fonds qui auraient été versés à la demanderesse.

[75]            À mon avis, la RCB contestée ne touche qu'indirectement la demanderesse. Elle avait tout au plus un intérêt possible dans l'adoption des RCB et la gestion des finances de la bande. Aucun élément de preuve ne démontre que la demanderesse est « directement touchée » par la RCB contestée.

[76]            La demanderesse est-elle « directement touchée » par l'omission du séquestre-administrateur de préparer un plan de redressement et un plan de réduction de la dette? Je ne vois aucune raison de conclure que les actes du séquestre-administrateur ont eu un tel effet, à la lumière de mes observations ci-dessus concernant le rôle du séquestre-administrateur par rapport à AINC.

[77]            La demanderesse répond-elle au critère de qualité pour agir dans l'intérêt public? La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Conseil canadien des Églises c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] 1 R.C.S. 236, établit un critère en trois volets afin de reconnaître la qualité pour agir dans l'intérêt public. La demanderesse doit établir que la question se pose sérieusement, qu'elle a un intérêt véritable dans la question et qu'il n'y a pas d'autre manière raisonnable et efficace de soumettre la question à la cour.


[78]            Dans la décision Kwicksutaineuk, précitée, la Cour a noté que lorsque la demanderesse qui agit dans l'intérêt public n'a pas à prouver que la présumée illégalité d'une décision ou d'un acte administratif a causé ou causera un préjudice pour établir la gravité de la question qui est soulevée, la Cour doit tenir compte de la force générale de la demande aux fins de cette décision.

[79]               Dans Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances) (1998), 157 F.T.R. 123 (C.F. 1re inst.), la Cour s'est exprimée comme suit (au paragraphe 38) concernant le fait de constater qu'il existe une question grave :

Selon un principe juridique qui semble maintenant établi, le caractère sérieux des questions que pose un demandeur agissant dans l'intérêt public comprend tant l'importance des questions soulevées que la probabilité que la demande soit accueillie. Étant donné la nature discrétionnaire de la reconnaissance de la qualité pour agir dans l'intérêt public et le souci de veiller à ce que les ressources publiques limitées ne soient pas dissipées et que d'autres parties n'aient pas à supporter des délais supplémentaires, il semblerait qu'il convienne de prendre en compte le bien-fondé de la demande [références omises].

[80]           Or je ne suis pas convaincue du caractère sérieux de la question qui se pose en l'espèce, pour les motifs exposés ci-dessus. La demanderesse sollicite en fait l'exécution forcée des obligations contractuelles entre elle-même et la Première nation Saulteaux. La Cour d'appel de la Saskatchewan a établi la légalité de ces prêts, et la demande d'autorisation d'appel devant la Cour suprême du Canada a été récemment rejetée.

[81]           J'accepte que la demanderesse est en butte à une « difficulté véritable » , soit le recouvrement de sommes prêtées. Il existe toutefois un autre recours raisonnable et efficace pour donner suite à cet intérêt : intenter une action devant le tribunal compétent.

[82]           J'estime donc, à la lumière de ces conclusions, que la demanderesse n'a pas qualité, selon le paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée, pour introduire la présente demande de contrôle judiciaire.

(v)         Absence d'AINC

[83]           Une dernière question mérite un commentaire, à savoir le fait qu'AINC n'est pas partie à la présente demande.

[84]           Le séquestre-administrateur a mentionné, à titre préliminaire, qu'AINC aurait dû se constituer partie, puisque le recours sollicité par la demanderesse a des incidences directes sur le financement des programmes offerts par AINC à la Première nation Saulteaux par l'intermédiaire de son employé, le séquestre-administrateur. Ce dernier a cité des arguments dont AINC aurait pu se prévaloir concernant la possibilité d'utiliser les fonds des programmes pour garantir la dette due à la demanderesse.

[85]           L'absence d'AINC en qualité de partie est d'autant plus étrange que l'exécution des obligations légales figurait parmi les questions soulevées dans la demande de contrôle judiciaire.

V.         CONCLUSION

[86]           À la lumière des éléments de preuve présentés et des arguments avancés par les parties, la présente demande de contrôle judiciaire, qui sollicite les recours du mandamus et de la nomination d'un syndic, est rejetée. La demanderesse a dépassé le délai prescrit pour obtenir un contrôle judiciaire de la RCB contestée et, en tout état de cause, n'a pas qualité pour contester cette décision. Au surplus, à mon avis, la RCB contestée ne se prête pas à un contrôle judiciaire. Enfin, la demanderesse ne satisfait pas au critère juridique pour obtenir une ordonnance de mandamus.

[87]           La demande de contrôle judiciaire est rejetée, et les dépens sont adjugés aux défendeurs. Comme ces derniers réclament des dépens supplémentaires, les parties présenteront des observations concises sur les dépens. Les défendeurs signifieront et déposeront leurs observations au plus tard le 28 octobre 2005; la demanderesse signifiera et déposera ses observations au plus tard le 10 novembre 2005. Toute réponse des défendeurs doit être signifiée et déposée au plus tard le 17 novembre 2005.


                                        ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est rejetée, les dépens étant adjugés aux défendeurs, et les arguments doivent être déposés conformément aux motifs du jugement.

                                                                                   « E. Heneghan »

                                                                                                     Juge

Traduction certifiée conforme

Michèle Ali


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                             T-1645-03

INTITULÉ :                            PEACE HILLS TRUST COMPANY

                                                                                       demanderesse

- et -

BRIAN MOCCASIN, GARY GOPHER (parfois connu sous le nom CARY GOPHER), JONES KATCHEECH, WALTER LEWIS et DON NIGHT, soit le chef et les conseillers de la Première nation Saulteaux, et FIRST NATIONS MANAGEMENT SERVICES INC.

                                                                                            défendeurs

LIEU DE L'AUDIENCE :      Saskatoon (Saskatchewan)

DATE DE L'AUDIENCE :    Le 4 avril 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       La juge Heneghan

DATE DES MOTIFS :                       Le 5 octobre 2005

COMPARUTIONS :              R. M. Van Beselaere

Peter Bergbusch

                                                                           Pour la demanderesse

Thomas Campbell

                                                            Pour le défendeur, First Nations

                                                                                  Management Inc.

John R. Beckman, c.r.

George A. Green

                                                Pour les défendeurs, le chef et le conseil

                                                            de la Première nation Saulteaux


                                                   - 2 -

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Balfour Moss

#700 - 2103 - 11th Avenue

Regina (Saskatchewan) S4P 4G1

                                                                           Pour la demanderesse

McKercher McKercher & Whitmore LLP

#200 - 374 - Third Avenue South

Saskatoon (Saskatchewan) S7K 1M5

                                                                                                           

                                                Pour les défendeurs, le chef et le conseil

                                                             de la Première nation Saulteaux

Rosowsky & Campbell

445 Second Street, Box 399

Kamsack (Saskatchewan) S0A 1S0

                                                            Pour le défendeur, First Nations

                                                                                  Management Inc.


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.