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Date : 20000925


Dossier : IMM-2366-00


ENTRE :


     JIANPING ZHU

     demandeur

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur


     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE

[1]      Le demandeur, qui a eu gain de cause dans cette requête écrite, a l'autorisation de déposer des affidavits supplémentaires en vue de parfaire sa demande, de façon à ajouter des documents de l'ambassade du Canada, à Manille, qui auraient dû faire partie du dossier du tribunal. Les deux parties bénéficient donc des prorogations de délai en résultant.

[2]      Les faits sont passablement simples. Je retiens la preuve qui a été présentée pour le compte du demandeur, à savoir qu'une trousse complète de documents relatifs à la demande de M. Zhu, en sa qualité d'investisseur immigrant, a été transmise à l'ambassade du Canada, à Manille, mais que lorsqu'est venu le temps de contre-interroger l'agent des visas, ce qui a été fait par téléphone, environ la moitié des documents qui auraient dû faire partie du dossier du tribunal n'étaient pas devant l'agent des visas.

[3]      Par suite de la présentation de la requête dans laquelle le demandeur a eu gain de cause, les considérations habituelles qui s'appliquent à la règle 312, qui permet le dépôt d'affidavits supplémentaires, si l'intérêt de la justice l'exige et si cela aide la Cour à rendre une décision définitive, entrent en ligne de compte. Le demandeur doit également satisfaire à la règle 84(2), selon laquelle un affidavit supplémentaire de documents ne peut être déposé, à la suite d'un contre-interrogatoire, que sur autorisation, soit un aspect qui a été examiné dans la décision Ruggles c. Fording Coal Ltd. (décision inédite du 5 mai 1999, dossier T-1948-95). Le critère qui s'applique en ce qui concerne la règle 84(2) exige l'examen et l'appréciation de trois éléments :

  1. .      L'information comprise dans l'affidavit était-elle disponible avant le contre-interrogatoire en question?
  2. .      Les faits établis par l'affidavit supplémentaire sont-ils pertinents au litige?
  3. .      Le dépôt de l'affidavit supplémentaire peut-il causer un préjudice grave aux autres parties?

[4]      Tout compte fait, je reconnais que les documents que le demandeur cherche maintenant à faire inclure afin de compléter le dossier qui aurait dû être mis à la disposition du tribunal et de l'auteur de l'affidavit du défendeur, s'ils étaient contenus dans un affidavit supplémentaire, serviraient l'intérêt de la justice et aideraient la Cour à rendre une décision définitive. Toutefois, cela ne constitue qu'une partie de ce dont je dois tenir compte et je reviens ici à l'appréciation des trois éléments énoncés dans la décision Ruggles, des éléments tirés de la décision que Monsieur le juge Dubé a rendue dans l'affaire Côté c. Canada (décision inédite du 27 mai 1992, dossier T-1206-89, ACF no 469).

[5]      En ce qui concerne le premier élément du critère, la question de savoir si l'information comprise dans l'affidavit était disponible avant le contre-interrogatoire, de sorte que l'auteur de l'affidavit du défendeur pourrait être contre-interrogé à ce sujet, l'avocat du demandeur, à Vancouver, n'a clairement pas eu la possibilité de se rendre compte qu'il manquait la moitié du dossier, qui aurait dû se trouver à l'ambassade, à Manille. En outre, l'agent des visas ne voulait pas examiner le reste des documents qui, comme je l'ai conclu, auraient dû être inclus dans le dossier du défendeur. Cela répond d'une façon complète au premier élément du critère.

[6]      Deuxièmement, il y a la question de la pertinence des documents supplémentaires. Le défendeur dit que l'affidavit supplémentaire serait [TRADUCTION] « [...] probablement fort peu pertinent » . Subsidiairement, l'avocat du demandeur a présenté une preuve raisonnable montrant que ces documents sont dans une certaine mesure pertinents. J'aimerais ajouter que les documents manquants sont des documents demandés par le défendeur dans ce qui constitue une liste de contrôle type que l'investisseur immigrant devrait fournir, d'autant plus s'il est représenté par un avocat chevronné. Tout compte fait, le deuxième élément est présent.

[7]      Je me demanderai maintenant si l'affidavit supplémentaire pourrait causer un préjudice grave et j'ai ici également tenu compte du retard, car dans un cas comme celui-ci, une partie est généralement tenue de présenter sa meilleure preuve dès qu'il lui est raisonnablement possible de le faire. En l'espèce, le contre-interrogatoire qui a donné lieu à la présentation de la requête a eu lieu le 27 juillet 2000. Pour effectuer une vérification au sujet des documents manquants, le demandeur a ensuite présenté une demande de communication de renseignements; or, aucun des documents manquants n'a été trouvé à la suite des recherches qui ont été effectuées. La requête ici en cause a été présentée le 23 août 2000. La question du retard n'entre pas en ligne de compte.

[8]      Enfin, il y a la question du préjudice. Le défendeur soutient que [TRADUCTION] « le dépôt de l'affidavit supplémentaire pourrait [lui] causer un préjudice grave » (paragraphe 26 de l'argumentation écrite). Il est soutenu qu'il en est ainsi parce que le défendeur a élaboré sa preuve de façon à répondre à celle du demandeur et parce qu'il serait peut-être donc nécessaire de déposer un affidavit supplémentaire de documents et de procéder à un autre contre-interrogatoire. Cela ne cause pas de préjudice, mais occasionne simplement une dépense additionnelle qui, au besoin, pourrait être compensée au moyen des dépens. Le défendeur ajoute que le demandeur ne devrait pas être autorisé à diviser sa preuve : si la preuve a été divisée dans ce cas-ci, c'est selon toute probabilité à cause de la façon dont le bureau du défendeur, à Manille, a géré le dossier. Cela nous amène à la question des dépens.

[9]      Le défendeur sollicite les dépens quelle que soit l'issue de la cause, et ce, immédiatement, y compris les dépens découlant du dépôt d'affidavits supplémentaires et de tout autre contre-interrogatoire portant sur les affidavits, en affirmant fondamentalement qu'à son avis, le demandeur n'aurait pas eu à présenter une requête s'il avait fourni sa meilleure preuve dès qu'il lui était raisonnablement possible de le faire.

[10]      En adoptant cette approche, le défendeur omet de tenir compte de plusieurs points. Premièrement, je suis convaincu, compte tenu de la preuve qui a été présentée pour le compte du demandeur et de la preuve contradictoire en soi que le défendeur a fournie, telle qu'en fait foi la transcription du contre-interrogatoire, que le défendeur, à un moment donné du moins, disposait d'une trousse complète de documents. Deuxièmement, le problème aurait pu être réglé facilement à peu de frais si les avocats s'étaient entendus. Troisièmement, la transcription du contre-interrogatoire du témoin du défendeur indique diverses possibilités, notamment que le témoin peut au mieux s'être trompé ou, en mettant les choses au pis, s'être entêté en refusant de chercher les documents manquants. Le défendeur devra donc verser immédiatement une somme forfaitaire au demandeur, au titre des dépens de la requête, ces dépens s'élevant, compte tenu du tarif de la Cour et des circonstances, à 500 $. Aucune ordonnance spéciale ne sera rendue au sujet des dépens se rapportant aux dépôts et contre-interrogatoires additionnels, ceux-ci devant suivre comme d'habitude l'issue de la cause.





                             John A. Hargrave

                                     Protonotaire


Le 25 septembre 2000

Vancouver (C.-B.)


Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., trad. a.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE LA PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU DOSSIER :                  IMM-2366-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :          JIANPING ZHU

                         c.

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER CONFORMÉMENT À LA RÈGLE 369.


MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU PROTONOTAIRE HARGRAVE EN DATE DU 25 SEPTEMBRE 2000.


ARGUMENTATION ÉCRITE :

Lawrence Wong                  POUR LE DEMANDEUR
Mark Sheardown                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lawrence Wong & Associates          POUR LE DEMANDEUR

Vancouver (C.-B.)

Morris Rosenberg                  POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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