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Date : 20001208

Dossier : IMM-5905-99

Ottawa (Ontario), le 8 décembre 2000

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                               NARINDER DEV SHARMA

                                                                                                 demandeur

                                                    - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                  défendeur

           MOTIFS D'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE PELLETIER

[1]    Le demandeur, M. Narinder Dev Sharma, a demandé le contrôle judiciaire de la décision, datée du 30 septembre 1999, dans laquelle l'agente des visas Carolyn Wallace a rejeté la demande de visa qu'il avait présentée dans le cadre de la catégorie des parents aidés.


[2]    Le demandeur s'est vu offrir un emploi de direction par un membre de sa famille chez Sammy's Carpets, une entreprise que possèdent la belle-soeur du demandeur et son époux. L'offre d'emploi a été soumis à la Section des entreprises familiales de Citoyenneté et Immigration, à Vancouver, et il a été approuvé le 21 juillet 1998. Le 22 septembre 1999, l'agente des visas a eu une entrevue avec le demandeur.

[3]    Le demandeur a été apprécié conformément au paragraphe 8(1) du Règlement sur l'immigration de 1978 (le Règlement), au regard des exigences applicables à la profession de directeur des ventes [CNP 0621] que décrit la Classification nationale des professions. L'agente des visas a accordé le nombre de points d'appréciation suivant au demandeur :

Âge                                              08

Facteur professionnel                  00

FÉF/PPS                                     05

Expérience                                  00

Emploi réservé              00

Facteur démographique             08

Études                                        15

Langue                           02

Personnalité                                 04

Total                                                  42

[4]    Le demandeur a obtenu 42 points au total. Or, l'alinéa 10(1)b) du Règlement prévoit que le demandeur doit obtenir au moins 65 points d'appréciation, conformément au paragraphe 8(1) du Règlement, pour être admissible à obtenir un visa d'immigrant dans le cadre de la catégorie des parents aidés. Comme le demandeur n'a pas obtenu le nombre de points requis, l'agente des visas a rejeté sa demande.


[5]                 Les documents du ministère qu'on utilisait à l'époque prévoyaient les exigences applicables en matière d' « emploi réservé » aux termes de l'annexe I du Règlement. Voici ces exigences :

1)          les liens qui unissent l'immigrant éventuel au propriétaire ou à l'exploitant de l'entreprise au Canada doivent correspondre à ceux visés dans la définition de « parents aidés » figurant dans le Règlement sur l'immigration de 1978;

2)          l'offre d'emploi faite par l'entreprise est réelle et offre des perspectives raisonnables de continuité;

3)          le salaire et les conditions de travail correspondent à ceux normalement en vigueur dans la profession et dans la région où se trouve l'entreprise familiale;

4)          l'entreprise doit être viable depuis au moins un an;

5)          le choix d'un parent pour ce poste est logique et sensé en raison de l'une des caractéristiques de l'emploi;

6)          compte tenu de ses antécédents professionnels et de ses aptitudes, l'immigrant éventuel peut démontrer qu'il est en mesure d'occuper le poste avec succès.

[6]                 Appliquant ces critères à la situation du demandeur, l'agente des visas a fait l'appréciation suivante :

[TRADUCTION] ... Vous ne possédez aucune expérience directement liée à cet emploi, et j'ai conclu que vous ne possédiez pas les aptitudes ou la formation nécessaires en vue d'occuper un tel emploi. À l'entrevue, vous n'avez pas établi que vous aviez la motivation, l'esprit d'initiative et l'ingéniosité qu'aurait normalement une personne occupant un emploi semblable à celui qu'on vous a offert au sein de l'entreprise familiale.

...

Vous avez dit vous-même que vous n'aviez pas d'expérience relative à un poste de supervision d'autres individus...


[7]                 Compte tenu de sa conclusion que le demandeur ne possédait pas les aptitudes nécessaires en vue d'occuper l'emploi qui lui était réservé, l'agente des visas ne lui a pas accordé de points à ce titre.

[8]                 L'agente des visas ne lui a pas non plus accordé de points au titre de l' « expérience » . Le paragraphe 11(1) du Règlement prévoit qu'un visa ne peut être délivré à la personne qui n'obtient pas de points d'appréciation au titre de l'expérience, à moins que cette personne ait un emploi réservé et que l'agente des visas soit convaincue qu'elle est en mesure d'occuper cet emploi. Or, comme l'agente des visas n'a pas accordé de points d'appréciation au demandeur au titre de l'expérience, et comme elle a conclu qu'il ne possédait pas les aptitudes requises pour occuper l'emploi qui lui était réservé au Canada, la demande ne pouvait être accueillie.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES

[9]                 Voici les dispositions législatives et réglementaires qui s'appliquent à la présente demande :



Règlement sur l'immigration de 1978

10. (1) Sous réserve des paragraphes (1.1) et (1.2) et de l'article 11, lorsqu'un parent aidé présente une demande de visa d'immigrant, l'agent des visas peut lui en délivrer un ainsi qu'aux personnes à sa charge qui l'accompagnent si les conditions suivantes sont réunies :a) le parent aidé et les personnes à sa charge, qu'elles l'accompagnent ou non, ne font pas partie d'une catégorie de personnes non admissibles et satisfont aux exigences de la Loi et du présent règlement;

b) dans le cas du parent aidé qui entend résider au Canada ailleurs qu'au Québec, sur la base de l'appréciation visée à l'article 8, le parent aidé obtient au moins 65 points d'appréciation;

11. (1) Sous réserve des paragraphes (3) et (5), l'agent des visas ne peut délivrer un visa d'immigrant selon les paragraphes 9(1) ou 10(1) ou (1.1) à l'immigrant qui est apprécié suivant les facteurs énumérés à la colonne I de l'annexe I et qui n'obtient aucun point d'appréciation pour le facteur visé à l'article 3 de cette annexe, à moins que l'immigrant :

a) n'ait un emploi réservé au Canada et ne possède une attestation écrite de l'employeur éventuel confirmant qu'il est disposé à engager une personne inexpérimentée pour occuper ce poste, et que l'agent des visas ne soit convaincu que l'intéressé accomplira le travail voulu sans avoir nécessairement de l'expérience; ou

b) ne possède les compétences voulues pour exercer un emploi dans une profession désignée, et ne soit disposé à le faire.

Immigration Regulations, 1978

10. (1) Subject to subsections (1.1) and (1.2) and section 11, where an assisted relative makes an application for an immigrant visa, a visa officer may issue an immigrant visa to the assisted relative and accompanying dependants of the assisted relative if

(a) he and his dependants, whether accompanying dependants or not, are not members of any inadmissible class and otherwise meet the requirements of the Act and these Regulations;

(b) in the case of an assisted relative who intends to reside in a place other than the Province of Quebec, on the basis of an assessment made in accordance with section 8, the assisted relative is awarded at least 65 units of assessment; and...

11. (1) Subject to subsections (3) and (5), a visa officer shall not issue an immigrant visa pursuant to subsection 9(1) or 10(1) or (1.1) to an immigrant who is assessed on the basis of factors listed in column I of Schedule I and is not awarded any units of assessment for the factor set out in item 3 thereof unless the immigrant

(a) has arranged employment in Canada and has a written statement from the proposed employer verifying that he is willing to employ an inexperienced person in the position in which the person is to be employed, and the visa officer is satisfied that the person can perform the work required without experience; or

(b) is qualified for and is prepared to engage in employment in a designated occupation.


11(2) Sous réserve des paragraphes (3) et (4), l'agent des visas ne délivre un visa en vertu des articles 9 ou 10 à un immigrant autre qu'un entrepreneur, un investisseur, un candidat d'une province ou un travailleur autonome, que si l'immigrant :

a) a obtenu au moins un point d'appréciation pour le facteur visé à l'article 4 de la colonne I de l'annexe I;

b) a un emploi réservé au Canada; ou

c) est disposé à exercer une profession désignée.

(2) Subject to subsections (3) and (4), a visa officer shall not issue an immigrant visa pursuant to section 9 or 10 to an immigrant other than an entrepreneur, an investor, a provincial nominee or a self-employed person unless

(a) the units of assessment awarded to that immigrant include at least one unit of assessment for the factor set out in item 4 of Column I of Schedule I;

(b) the immigrant has arranged employment in Canada; or

(c) the immigrant is prepared to engage in employment in a designated occupation.



[10]            Il ressort d'un examen de ces dispositions que l'admission d'un parent aidé au Canada est facilitée dans la mesure où on réduit de 70 à 65 le nombre de points d'appréciation qu'un demandeur doit obtenir aux termes de l'annexe I (alinéa 10(1)b) du Règlement). Le demandeur qui a un emploi réservé peut éviter l'effet de la disposition selon laquelle il doit obtenir au moins un point au titre des articles 3 et 4 de l'annexe I (paragraphes 11(1) et (2) du Règlement) pourvu que l'agente des visas soit convaincue que le demandeur peut occuper l'emploi qui lui est réservé.

[11]            L'objectif du programme des entreprises familiales vise à faciliter la réunion des familles. Il vise à fournir une occasion à un citoyen ou résident permanent du Canada de faire venir un membre de sa famille au pays en démontrant qu'il est plus logique d'employer un membre de la famille que d'utiliser les pratiques habituelles de recrutement pour trouver un employé. Ce sera habituellement le cas lorsque l'emploi exige qu'il existe un lien de confiance entre les membres de la famille, une exigence qui n'est pas facile à satisfaire en embauchant des personnes qui n'appartiennent pas à la famille.

[12]            Le demandeur s'est plaint du fait que l'agente des visas n'a pas tenu compte de ces facteurs. Il soutient que l'agente des visas a appliqué un critère qui va à l'encontre du programme des entreprises familiales.


L'ANALYSE

[13]            Le demandeur fait valoir que l'agente des visas a commis certaines erreurs en particulier.

Les aptitudes linguistiques

[14]            À l'entrevue, l'agente des visas a conclu que le demandeur avait du mal à communiquer des renseignements de base. L'agente des visas a ensuite dit qu'elle avait des réserves quant à la capacité du demandeur de diriger un commerce de tapis; le demandeur a répondu que 90 p. 100 de la clientèle parlait le hindi ou le punjabi. Invité à expliquer comment il traiterait avec des sous-contractants ou des représentants qui parlent anglais, il a répondu qu'il apprendrait immédiatement l'anglais. À l'entrevue, l'agente des visas a informé le demandeur qu'elle considérait qu'il parlait l'anglais « avec difficulté » .

[15]            Le demandeur soutient que l'agente des visas n'aurait pas dû introduire les aptitudes linguistiques dans son appréciation de la question de savoir s'il était en mesure d'occuper le poste en question au Canada. Le demandeur fait valoir qu'il s'agit d'un double comptage, ce qui constitue une erreur de droit.


[16]            À mon avis, l'agente des visas n'a pas tenu compte des aptitudes linguistiques du demandeur à deux reprises. Il paraît établi en droit que les aptitudes linguistiques peuvent être appréciées relativement à la capacité du demandeur de s'établir en exerçant la profession qu'il envisage (Hanna c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1997] A.C.F. no 51; Stefan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et l'Immigration), [1995] A.C.F. no 1793, (1995), 35 Imm. L.R. (2d) 21.

L'appréciation de la capacité d'occuper l'emploi

[17]            L'emploi réservé du demandeur était celui de directeur des ventes d'un commerce de tapis que possédait sa belle-soeur. L'agente des visas a conclu que le demandeur n'avait pas d'expérience en tant que directeur des ventes [CNP 0621]. Elle est parvenue à cette conclusion après avoir tenu compte du fait que le demandeur avait travaillé à son propre compte d'août 1976 à juin 1997 en tant que propriétaire de deux petites entreprises. L'agente des visas a souligné que le demandeur exploitait ces deux entreprises au même lieu physique et qu'il n'avait pas d'employés. L'agente des visas a également considéré l'emploi actuel de vendeur qu'il occupait au sein d'une entreprise appelée Indo American Marketing Co. et souligné qu'il n'était pas responsable de la supervision d'employés ni de la gestion de l'entreprise.


[18]            Le demandeur soutient que l'agente des visas n'a pas convenablement apprécié l'expérience qu'il avait accumulée grâce à ses entreprises, « Narindra Watch House » et « Narindera Bakery » . Il fait valoir que ces entreprises l'amenaient à faire de la planification, diriger l'exploitation, prendre des décisions quant aux marchandises qui devaient être vendues et établir des budgets. Bien que cela soit peut-être vrai, il ressort de la description qu'il a fournie de ces entreprises qu'elles s'apparentaient davantage à des kiosques qu'à des entreprises de plusieurs employés.

[19]            La norme de contrôle qu'il convient d'appliquer aux décisions des agents des visas à l'étranger est celle de la décision raisonnable simpliciter. Voir Gupta c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1099, (2000), 6 Imm. L.R. (3d) 231 (juge Gibson). Certaines des tâches qu'énumère le no 0621 de la CNP comprennent la gestion d'un personnel, l'élaboration de stratégies de marketing, et l'embauche et la surveillance d'un personnel. L'agente des visas a examiné la question de savoir si l'expérience du demandeur était pertinente en ce qui concerne ces tâches, et elle a conclu qu'elle ne l'était pas. L'agente des visas a exposé son raisonnement à la page 7 de ses notes CAIPS :

[TRADUCTION] Le demandeur n'a pas d'expérience de gestion ni de supervision. Son expérience porte principalement sur l'exploitation d'une petite boutique de vente et réparation de montres et sur la vente de produits de boulangerie déjà faits. Ce n'est que récemment qu'il a commencé à vendre des tapis. Son expérience de la vente de tapis est limitée, et il se peut qu'elle ne soit pas entièrement pertinente en ce qui concerne le poste, qu'il doit occuper au Canada, de directeur des ventes et peut-être d'exploitant de son propre magasin.


[20]            Je suis d'avis que l'appréciation de l'agente des visas ne peut être considérée comme déraisonnable.

La personnalité

[21]            À l'entrevue, l'agente des visas a posé des questions de fait au demandeur concernant la géographie canadienne, la somme d'argent qu'il gagnerait, et l'employabilité de son épouse. Selon le demandeur, ce type de questions était très peu lié, voire aucunement, à sa capacité d'adaptation, sa motivation, son esprit d'initiative, son ingéniosité et d'autres qualités similaires devant être considérées au titre du facteur de la personnalité.

[22]            La portée du pouvoir discrétionnaire de l'agent des visas qui apprécie la personnalité d'un individu a été établie par le juge Simpson dans Khan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 35 Imm. L.R. (2d) 298, où elle a dit, à la page 301:

Or, à moins de pouvoir conclure que l'agente a exercé irrégulièrement son pouvoir discrétionnaire en ne tenant pas compte de facteurs pertinents ou en accordant trop d'importance à certains facteurs particuliers ou en agissant d'une façon inéquitable, je ne suis pas en mesure de mettre en doute l'exercice de son pouvoir discrétionnaire.


[23]            L'agente des visas a examiné la motivation et l'ingéniosité du demandeur en lui posant des questions sur le Canada. L'agente des visas a souligné que le demandeur répondait souvent qu'il apprendrait ce qu'il devait savoir après son arrivée au Canada. Il n'est pas rare que les agents des visas tiennent compte des mesures que les demandeurs ont prises en vue de se préparer à venir au Canada en tant qu'indicateurs de leur esprit d'initiative ou ingéniosité. En l'espèce, le demandeur paraît s'être très peu préparé à mener une nouvelle vie au Canada. L'appréciation que l'agente des visas a faite de l'esprit d'initiative, la motivation et l'ingéniosité du demandeur n'était pas déraisonnable.

Le nombre minimal de points d'appréciation

[24]            Toutefois, il existe une raison plus fondamentale pour laquelle le demandeur n'a pas satisfait aux exigences de l'article 10 du Règlement. La personne qui présente une demande dans le cadre du programme des parents aidés doit obtenir au moins 65 points selon le système de classement prévu à l'annexe I du Règlement. Le demandeur est avantagé à cet égard car il obtient dix points d'appréciation au titre de l'emploi réservé, pourvu que l'agent des visas soit convaincu qu'il peut occuper l'emploi en question. En l'espèce, le demandeur a obtenu 42 points au total, ne recevant pas de point au titre de l'emploi réservé étant donné que l'agente des visas était d'avis qu'il n'était pas en mesure d'occuper l'emploi qui lui était réservé.


[25]            Des neuf facteurs qu'il convient d'examiner en vertu de l'annexe I, l'âge, les études, la préparation professionnelle spécifique, le facteur de la demande dans la profession et le facteur démographique sont tous des facteurs objectifs dans la mesure où le nombre de points qu'il convient d'accorder au demandeur à ce titre est déjà prévu, ou encore il exige l'application d'une formule à certains faits afin d'en arriver au nombre de points à accorder. En l'espèce, 36 points d'appréciation ont été accordés au demandeur à l'égard de ces cinq facteurs. Or, pour être admissible, le demandeur devait obtenir 29 points de plus au titre de la langue, l'emploi réservé, l'expérience et la personnalité. Bien qu'on s'objecte au fait de considérer les capacités linguistiques sous la rubrique de la personnalité, le nombre de points accordés au demandeur au titre de sa connaissance de l'anglais n'a pas véritablement été contesté. Les autres facteurs sont l'expérience (nombre maximal de points 8), l'emploi réservé (nombre maximal de points 10) et la personnalité (nombre maximal de points 10). Si le demandeur avait obtenu le nombre maximal de points à l'égard de chacune de ces catégories, il aurait obtenu un point de plus que le nombre minimal de points requis, soit 65.


[26]            La difficulté tient du fait que le demandeur est incapable d'obtenir de points au titre de l'expérience vu que le facteur de la demande dans la profession qu'il entend exercer ne donne lieu à aucun point d'appréciation. Selon l'article 3 de l'annexe I, le nombre de points accordés au demandeur au titre de l'expérience varie en fonction du nombre de points qu'il obtient au titre de la demande dans la profession qu'il entend exercer. Or, aucune disposition ne permet d'accorder de points au titre de l'expérience lorsque le demandeur n'obtient aucun point à l'égard de la demande dans la profession. En conséquence, le demandeur qui n'obtient aucun point au titre de la demande dans la profession n'aura forcément aucun point à l'égard de son expérience. La présente demande était donc vouée à l'échec dès le départ étant donné que même si le demandeur avait obtenu le nombre maximal de points au titre de la personnalité (10) et de l'emploi réservé (10), il n'aurait pas obtenu au total le nombre minimal de points, soit 65.

[27]            Dans cette mesure, l'appréciation que l'agente des visas a faite de la capacité du demandeur d'occuper l'emploi en question était donc théorique étant donné que ce dernier n'aurait pas été admissible à entrer au Canada même s'il avait été établi qu'il pouvait effectivement occuper l'emploi, car il n'avait pas obtenu au total 65 points d'appréciation.

[28]            Or, l'avocat du demandeur soutient que cette analyse va complètement à l'encontre de l'objectif du programme concernant les entreprises familiales. En l'espèce, l'épouse du demandeur n'a aucune famille en Inde. Le demandeur s'est vu offrir un emploi dans une entreprise familiale où l'importance de ses lacunes, s'il en est, serait amoindrie par d'autres membres de la famille. Soutenir qu'il doit être en mesure de gérer l'entreprise de la même façon qu'un étranger le ferait ne tient pas compte de la réalité de la situation. L'agente des visas aurait dû exercer son pouvoir discrétionnaire de façon à atteindre l'objectif du programme concernant les entreprises familiales.


[29]            Les observations de l'avocat sont fondées dans une certaine mesure, mais elles constituent au fond un argument que le programme doit être administré de façon plus libérale que ce que la loi prévoit. Or, l'exigence selon laquelle le parent aidé doit obtenir 65 points d'appréciation est une indication que bien que le législateur fût disposé à favoriser la réunion des familles, il a décidé de conserver dans une grande mesure les mêmes exigences que celles qui sont imposées aux éventuels immigrants tout à fait indépendants. Le fait que dix points d'appréciation soient accordés à l'éventuel immigrant au titre de l'emploi réservé est nuancé par l'exigence selon laquelle celui-ci doit être en mesure de convaincre l'agent des visas qu'il est capable d'occuper l'emploi en question. L'argument de l'avocat est une tentative visant à miner cette exigence en laissant entendre qu'il devrait être facile de convaincre l'agent des visas, vu l'objectif que vise le programme. Il se peut bien que certains agents des visas soient plus faciles à convaincre que d'autres, mais lorsqu'un agent des visas applique des critères rationnels de façon raisonnable, la Cour s'abstiendra d'intervenir.

[30]            En conséquence, il n'existe aucune raison d'intervenir à l'égard de la façon dont l'agente des visas a exercé son pouvoir discrétionnaire.


ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire de la décision de Carolyn Wallace datée du 30 septembre 1999 est rejetée.

         « J.D. Denis Pelletier »          

juge                         

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                              IMM-5905-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                 Narinder Dev Sharma c. Le ministre de la                                                             Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                    le 10 mai 2000

MOTIFS D'ORDONNANCE ET ORDONNANCE RENDUS PAR M. LE JUGE PELLETIER

EN DATE DU :                                       8 décembre 2000

ONT COMPARU :                                


M. Guberman et

Mme M. Joseph                                                                POUR LE DEMANDEUR

Mme C. Le Riche                                                              POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Guberman et

Mme M. Joseph                                                                POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)                                                               POUR LE DÉFENDEUR

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