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Date : 19980505


Dossier : T-528-98


OTTAWA (ONTARIO), LE MARDI 5 MAI 1998

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ROTHSTEIN

ENTRE :

     ROBIN GILES BRANT OU FREE FLOW GAS BAR,

                                                  demandeur,

     - et -


SA MAJESTÉ LA REINE,

     défenderesse.


     O R D O N N A N C E


     L'injonction interlocutoire est refusée.

                                 Marshall Rothstein     
                            
                                 J U G E


Traduction certifiée conforme


Laurier Parenteau, LL.L.




Date : 19980505


Dossier : T-528-98


ENTRE :


     ROBIN GILES BRANT OU FREE FLOW GAS BAR,

     demandeur,


     - et -



SA MAJESTÉ LA REINE,

     défenderesse.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE ROTHSTEIN :


[1]      Le demandeur présente une demande d'injonction interlocutoire visant à interdire au ministre du Revenu national de prendre des mesures de recouvrement au regard de la taxe fédérale sur les produits et services (" TPS ") que le demandeur a négligé de verser depuis 1991.

[2] Le demandeur, un Indien inscrit, est propriétaire d'un poste d'essence sur le territoire de la première nation de Tyendinaga Mohawk. Il vend de l'essence aux Indiens et aux non-Indiens. Le ministre prétend que le demandeur doit payer la TPS pour les ventes aux non-Indiens. Pour sa part, le demandeur soutient ne pas être tenu de remettre la TPS au ministre en invoquant l'existence de droits ancestraux, de droits issus de traités, l'article 87 de la Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), ch. I-5, et ses modifications, et la possibilité d'autres sources. L'avis de cotisation et l'opposition qui a suivi dans cette affaire sont des questions qui seront instruites par la Cour canadienne de l'impôt.

[3] Non seulement le demandeur n'a jamais versé de TPS au ministre, il ne s'est pas inscrit et n'a produit aucune déclaration aux fins de TPS. En octobre 1997, le ministre évaluait à 484 000 $ le montant de TPS en souffrance pour la période du 1er janvier 1991 au 30 juin 1996. Des mesures de recouvrement ont donc été prises et le compte bancaire du demandeur situé à l'extérieur de la réserve a été saisi. Le ministre a également pris des mesures pour saisir les ristournes de taxe sur l'essence payables au demandeur par le ministre des Finances de l'Ontario.1

[4] Selon le demandeur, un certain nombre de questions sérieuses sont soulevées par les procédures devant la Cour. La défenderesse reconnaît l'importance de certaines de ces questions. Par exemple, les fonds saisis par le ministre étaient-ils situés " à l'extérieur " ou " à l'intérieur " de la réserve et sont-ils protégés de la saisie en vertu du paragraphe 89(1) de la Loi sur les Indiens . Je suis d'accord avec le demandeur. Il existe au moins une question sérieuse dans la présente affaire et peut-être même davantage.

[5] Concernant l'existence d'un préjudice irréparable, le demandeur admet que la viabilité de son poste d'essence ne dépend pas du remboursement des fonds saisis par le ministre. Pour ce motif, une injonction mandatoire pour obtenir un tel remboursement n'est pas fondée.

[6] Toutefois, le demandeur affirme que si les saisies de ristournes de taxe sur le carburant de l'Ontario ne cessent pas, le poste d'essence devra bientôt fermer. La ristourne est de 0,14 $ le litre pour un prix de vente variant entre 0,55 $ et 0,58 $ le litre. Les ventes effectuées aux Indiens inscrits qui ont droit à une exemption de taxe représentent 50 p. 100 du chiffre d'affaires du demandeur.

[7] Cependant, aucun registre financier fiable a été déposé au cours des procédure; d'ailleurs il a été établi que le demandeur ne tient pas de tels registres. Et malgré la preuve du demandeur selon laquelle le poste d'essence est interfinancé par d'autres entreprises familiales, il n'existe aucune donnée bancaire pour prouver les transferts de fonds en provenance de ces autres sources. À cet égard, la preuve du demandeur est nettement insuffisante. De plus, la défenderesse a démontré que les prix de vente au détail du demandeur sont très près de ceux de ses concurrents. Le fait pour le demandeur de ne pas remettre la TPS alors que ses prix se rapprochent de ceux demandés par ses concurrents sur le marché rend douteuse son affirmation suivant laquelle il subit un préjudice irréparable.

[8] Même si le demandeur réussissait à prouver l'existence d'un préjudice irréparable, la prépondérance des inconvénients joue en faveur de la défenderesse. Le demandeur a essentiellement refusé sa collaboration à la défenderesse en ce qui concerne les remises de TPS depuis 1994. Pour refuser de collaborer (sous réserve d'une décision sur la question de la responsabilité), il s'est fondé sur un règlement de la Bande de Tyendinaga qui interdit de verser des taxes à un gouvernement étranger, en l'occurrence, le gouvernement du Canada. Pourtant, cela ne l'empêchait pas de verser des retenues à la source pour le compte de ses employés aux fins de l'impôt sur le revenu, de l'assurance-chômage et du Régime de pensions du Canada. Le demandeur n'agi pas de façon cohérente. Il a recours au règlement pour ce qui a trait à la T.P.S. alors qu'il paie d'autres taxes. Pire encore, après la mesure de saisie prise par le ministre, le demandeur a cessé de remettre des retenues à la source à Revenu Canada au nom de ses employés même s'il était au courant qu'une partie de ses fonds provenait des employés et que ces fonds sont grevés d'une fiducie. Rien n'indique que la défenderesse a agi d'une manière arbitraire ou oppressive. La prépondérance des inconvénients penche en faveur de la défenderesse.

[9] L 'injonction interlocutoire est refusée. Les parties se sont entendues pour demander la détermination accélérée d'une question préliminaire de droit qui pourrait déterminer le droit du ministre de saisir certains fonds, une affaire qui ne doit pas être différée.

                                 Marshall Rothstein     
                            
                                 J U G E


OTTAWA (ONTARIO)

LE 5 MAI 1998





Traduction certifiée conforme


Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER



DOSSIER :                      T-528-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :          ROBIN GILES BRANT OU FREE FLOW
                         GAS BAR c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :              LE 24 AVRIL 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE ROTHSTEIN

EN DATE DU :                  5 MAI 1998

COMPARUTIONS :

MICHAEL SHERRY              POUR LE DEMANDEUR
WENDY LINDEN                  POUR LA DÉFENDERESSE

GORDON BOURGARD


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

MICHAEL SHERRY              POUR LA DÉFENDERESSE

BARRISTER & SOLICITOR

1203 MISSISSAUGA ROAD

MISSISSAUGA (ONTARIO)

L5H 2J1


GEORGE THOMSON              POUR LE DÉFENDEUR

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL

DU CANADA

__________________

     1      Les Indiens inscrits ne sont pas tenus de payer la taxe provinciale sur l'essence achetée au demandeur même si ce dernier ne jouit pas d'une exemption de taxe lorqu'il achète l'essence en vrac. Toutefois, le demandeur peut demander une ristourne au gouvernement de l'Ontario pour les taxes payées sur l'essence vendue aux Indiens inscrits.

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