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Date : 20060207

Dossier : IMM-1067-05

Référence : 2006 CF 140

Ottawa (Ontario), le 7 février 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY

ENTRE :

GLORIA EMPERATRIZ HERRERA BORJA

ELICIO FIGUEROA FIGUEROA

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]                Mme Gloria Herrera Borja est entrée au Canada en provenance de l'Équateur en 1998. Son époux est venu la rejoindre l'année suivante. Mme Herrera Borja affirme craindre être persécutée par un groupe appelé les Combattants populaires si elle retourne en Équateur. Les Combattants populaires s'opposent au parti politique dont est membre Mme Herrera Borja depuis 1979.   

[2]                Un agent d'immigration a analysé le risque de persécution auquel serait exposée Mme Herrera Borja si elle retournait en Équateur et a conclu qu'elle n'avait pas droit à l'asile au Canada parce que sa crainte n'était pas fondée sur un des motifs d'asile reconnus. En outre, l'agent a conclu qu'elle pouvait obtenir la protection de l'État en Équateur si elle en avait besoin. Mme Herrera Borja affirme que l'agent a commis une erreur grave en analysant les risques et me demande d'ordonner la tenue d'un nouvel examen par un autre agent. Je conviens que l'agent a commis une erreur et, en conséquence, j'accueille la présente demande de contrôle judiciaire.

I. Question

[3]                L'agent a-t-il commis une erreur en concluant que la crainte de Mme Herrera Borja n'était pas liée à l'un des motifs pour accorder l'asile énoncés à l'article 96 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR)?

II. Analyse

[4]                Les parties ne s'entendent pas sur la question de la norme de contrôle applicable à l'affaire qui m'est soumise, à savoir s'il s'agit de la « décision raisonnable » ou de la « décision manifestement déraisonnable » . Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de trancher cette question, car la décision de l'agent est susceptible de contrôle, peu importe à la norme de contrôle judiciaire appliquée.

[5]                Il est clair que l'agent a compris que la crainte éprouvée par Mme Herrera Borja découlait de ses activités politiques. Dans ses motifs, l'agent a affirmé que Mme Herrera Borja [traduction] « craint les menaces que lui ont faites des membres d'un groupe subversif qui voulait qu'elle abandonne son parti politique pour joindre leurs rangs et qui l'ont ensuite battue » . Cependant, ailleurs dans ses motifs, l'agent a conclu qu'elle n'avait [traduction] « pas établi de lien entre sa crainte de persécution en Équateur et un des motifs énoncés à l'article 96 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés » .

[6]                L'agent a conclu que Mme Herrera Borja n'était pas visée par la définition de personne ayant la qualité de réfugié. Cependant, l'article 96 de la LIPR (voir l'annexe) désigne la persécution politique comme un motif d'accorder l'asile et la demande de Mme Herrera Borja était clairement fondée sur ses allégeances politiques. Je ne vois aucun fondement à la conclusion de l'agent selon laquelle la crainte de Mme Herrera Borja n'était pas liée à l'un des motifs d'asile reconnus.   

[7]                Le défendeur a avancé que l'erreur de l'agent ne devrait pas être prise en compte en raison de son autre conclusion, c'est-à-dire que Mme Herrera Borja pourrait obtenir la protection de l'État en Équateur. Dans les circonstances, étant donné que l'agent n'a pas réussi à juger l'élément fondamental de la demande de Mme Herrera Borja, je ne suis pas convaincu qu'il a tenu compte de la situation particulière de Mme Herrera Borja dans sa conclusion au sujet de la protection de l'État. Dans de nombreux cas, bien sûr, la conclusion sur l'existence ou non de la protection de l'État constitue un motif indépendant de confirmer une décision d'accorder ou non l'asile. Cependant, ce n'est pas le cas dans les affaires où, comme en l'espèce, il existe un souci réel qu'une erreur ailleurs dans l'analyse du décideur ait pu influer sur la conclusion portant sur la protection de l'État.    

[8]                En conséquence, je dois accueillir la présente demande de contrôle judiciaire et ordonner la tenue d'un nouvel examen des risques par un agent différent. Ni l'une ni l'autre des parties n'a proposé de question de portée générale à certifier et aucune n'est énoncée.

JUGEMENT

            LA COUR ORDONNE :

1.                             La demande de contrôle judiciaire est accueillie et un nouvel examen des risques effectué par un agent différent sera tenu;

2.                             Aucune question de portée générale n'est énoncée.

« James W. O'Reilly »

Juge

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross


Annexe

Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

Immigration and Refugee Protection Act, S.C. 2001, c. 27

Définition de « réfugié »

Convention refugee

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention - le réfugié - la personne qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

b) soit, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-1067-05

INTITULÉ :                                                    GLORIA EMPERATRIZ HERRERA BORJA

ET AL.

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 12 JANVIER 2006

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                           LE JUGE O'REILLY

DATE DES MOTIFS :                                   LE 7 FÉVRIER 2006

COMPARUTIONS :

                                                                        D. Clifford Luyt             POUR LES DEMANDEURS

Anshumala Juyal                                                POUR LE DÉFENDEUR

                                                                             

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

                                                                        Waldman & Associates            POUR LES DEMANDEURS

Toronto (Ontario)

John H. Sims, c.r.                                              POUR LE DÉFENDEUR

Toronto (Ontario)                                             

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