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Date : 20060606

Dossier : T-1442-05

Référence : 2006 CF 703

Ottawa (Ontario), le 6 juin 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE RUSSELL

 

ENTRE :

LA SOCIÉTÉ DU MUSÉE CANADIEN DES CIVILISATIONS

demanderesse

et

 

L’ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA (SECTION LOCALE 70396)

défenderesse

et

 

 

LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

 

intervenante

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

INTRODUCTION

 

[1]               La présente demande découle d’une plainte en matière de droits de la personne (la plainte) déposée par l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’AFPC) au mois de mars 2000 à l’encontre de la Société du Musée canadien des civilisations (la SMCC). Dans sa plainte, l’AFPC allègue que le plan d’évaluation des emplois (le Plan) de la SMCC comporte une partialité fondée sur le sexe et qu’il viole les articles 10 et 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H‑6 (la Loi).

 

[2]               Après avoir mené une enquête, et les parties n’étant pas arrivées à un règlement au moyen de la conciliation, la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) a demandé au président du Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal) de procéder à un autre examen de la plainte. Par la suite, au cours d’une conférence de cas que les parties et le Tribunal ont tenue, la Commission a fait savoir qu’elle ne citerait pas à titre de témoin Mme Lois Haignière, l’expert‑conseil qui avait préparé le rapport (le rapport Haignière) sur lequel la Commission s’était fondée en renvoyant au Tribunal la plainte déposée par l’AFPC. La Commission a ajouté qu’elle tentait de retenir les services d’un autre expert.

 

[3]               Le 20 juillet 2005, la Commission a soumis au Tribunal son mémoire, auquel était joint le rapport du nouvel expert de la Commission, Mme Nan Weiner. La Commission a déclaré qu’après avoir examiné les éléments additionnels communiqués par les parties, le nouvel expert avait conclu que le Plan, bien qu’il fasse une différenciation en raison du sexe, ne comportait selon elle aucune partialité importante fondée sur le sexe. La Commission a également déclaré que la preuve n’étayait pas la plainte que l’AFPC avait déposée en vertu de l’article 11 de la Loi. Compte tenu de la nouvelle preuve, la Commission a fait savoir qu’elle ne chercherait pas à obtenir une réparation du Tribunal.

 

[4]               Compte tenu de ces renseignements, la SMCC a conclu que le fondement sur lequel la Commission s’était appuyée pour renvoyer la plainte au Tribunal (c’est‑à‑dire le rapport Haignière) était complètement disparu, de sorte que la Commission devait s’acquitter du devoir public qui lui incombait et mettre fin à l’examen.

 

[5]               Dans la présente demande de contrôle judiciaire, qui a été présentée en vertu des articles 18 et 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7, la SMCC conteste le refus de la Commission de retirer la plainte d’entre les mains du Tribunal. La SMCC sollicite une ordonnance annulant la décision de la Commission et enjoignant à celle‑ci de rejeter la plainte déposée par l’AFPC. Subsidiairement, la SMCC demande à la Cour d’ordonner à la Commission de [Traduction] « s’acquitter d’une façon appropriée de l’obligation légale qui lui incombe de décider si la plainte doit être rejetée compte tenu du fait qu’eu égard aux circonstances, l’examen de la plainte n’est pas justifié ou parce que la plainte est frivole ou vexatoire ».

 

HISTORIQUE

 

[6]               Le 6 mars 2000, l’AFPC a déposé devant la Commission une plainte formelle dans laquelle elle alléguait que le Plan violait les articles 10 et 11 de la Loi. L’article 10 interdit à l’employeur de fixer ou d’appliquer les lignes de conduite susceptibles d’annihiler les chances d’emploi d’un individu pour un motif de distinction illicite. Selon l’article 11, constitue un acte discriminatoire le fait de pratiquer la disparité salariale entre les hommes et les femmes qui exécutent, dans le même établissement, des fonctions équivalentes.

 

[7]               Dans sa plainte, l’AFPC allègue que le Plan comporte une partialité fondée sur le sexe, ce qui entraîne le paiement d’une rémunération insuffisante pour les emplois exercés par des femmes par rapport aux emplois d’une valeur comparable exercés par des hommes. En outre, l’AFPC affirme que le Plan fait une distinction défavorable entre les emplois à prédominance féminine comparativement aux emplois à prédominance masculine.

 

[8]               Après avoir pris l’initiative de la plainte, la Commission a nommé un enquêteur. L’enquête a été suspendue afin de donner aux parties la possibilité d’essayer de régler l’affaire. Un comité mixte syndical‑patronal a été formé au mois d’octobre 2000 en vue d’élaborer un nouveau plan d’évaluation des emplois. Malgré les efforts qu’elles ont déployés, les parties ne sont pas arrivées à s’entendre. La Commission a donc remis en état son enquête formelle au mois de janvier 2003.

 

[9]               Au mois de mars 2003, la Commission a embauché un expert‑conseil de l’extérieur, Mme Lois Haignière, spécialisée en parité salariale, en vue de déterminer s’il existait une partialité fondée sur le sexe dans le Plan et, dans l’affirmative, dans quelle mesure. On a remis à Mme Haignière un certain nombre de documents, notamment un formulaire de plainte de l’AFPC, diverses descriptions de travail, ainsi que des documents se rapportant au système d’évaluation des emplois de la SMCC. Mme Haignière a soumis son rapport à la Commission au mois de juin 2003. Elle a conclu que [Traduction] « selon toute probabilité, le [Plan] est entaché d’une partialité fondée sur le sexe ».

 

[10]           Le 15 septembre 2003, l’enquêteur de la Commission a présenté son rapport, dans lequel il recommandait à la Commission, conformément à l’alinéa 44(3)a) de la Loi, de demander la constitution d’un tribunal des droits de la personne chargé d’examiner plus à fond la plainte déposée par l’AFPC. En arrivant à cette conclusion, l’enquêteur a déclaré ce qui suit :

[Traduction] 46. Compte tenu des constatations de l’expert‑conseil et conformément à l’article 10, il s’avère nécessaire de charger un tribunal de procéder à un examen plus poussé.

 

47.  Selon la décision rendue par le Tribunal et conformément à l’article 11, une analyse relative à l’écart des salaires peut être effectuée, à la suite d’une évaluation des emplois, afin de permettre de déterminer s’il faut rajuster la structure salariale afin d’éliminer les inégalités salariales qui peuvent exister.

 

 

[11]           Après avoir examiné le rapport de l’enquêteur et les réponses données par les parties à l’égard du rapport, la Commission a informé ces dernières, le 9 janvier 2004, qu’elle avait décidé de nommer un conciliateur conformément à l’article 47 de la Loi en vue d’en arriver à un règlement de la plainte. La Commission a également déclaré que, si les parties n’arrivaient pas à un règlement dans un délai de 60 jours, elle renverrait l’affaire au Tribunal étant donné qu’elle avait conclu que, compte tenu des circonstances, un examen plus poussé était justifié.

 

[12]           La conciliation a échoué et la Commission a renvoyé la plainte au Tribunal. La SMCC n’a pas demandé le contrôle judiciaire de la décision concernant le renvoi.

 

[13]           Le 11 mai 2005, le Tribunal a tenu avec les parties une conférence de cas téléphonique au cours de laquelle l’avocat de la Commission a fait savoir que la Commission ne citerait pas Mme Haignière comme témoin parce qu’elle n’était pas disponible, et que la Commission cherchait à avoir recours à un autre expert. La Commission a par la suite retenu les services de Mme Nan Weiner pour qu’elle réévalue le Plan à la lumière de la preuve additionnelle communiquée par les parties.

 

[14]           Pendant la conférence de cas, l’AFPC a également fait savoir qu’elle envisageait de faire appel à son propre expert indépendant pour examiner la question de la partialité fondée sur le sexe existant dans le Plan. Le 13 juillet 2005, l’AFPC a informé le Tribunal qu’elle avait décidé de le faire.

 

[15]           Le 20 juillet 2005, l’avocat de la Commission a envoyé au Tribunal le mémoire de la Commission, auquel était joint le rapport de Mme Weiner. En ce qui concerne la plainte déposée par l’AFPC en vertu de l’article 10 de la Loi, la Commission a déclaré ce qui suit :

[Traduction]  Pendant l’enquête menée sur la présente plainte, la Commission a retenu, au mois de juin 2003, les services d’un expert en évaluation des emplois, Mme Lois Haignière, Ph.D, pour effectuer sa propre analyse. La Commission s’est fondée sur le rapport de Mme Haignière, qui a été communiqué aux deux parties, pour conclure qu’un examen plus poussé était justifié. À la suite d’une communication documentaire complète effectuée par les parties conformément aux règles du Tribunal, la Commission n’a pas pu faire appel à Mme Haignière afin de soumettre un rapport d’expert plus détaillé aux fins de la préparation de l’audience. Mme Haignière ne sera donc pas citée comme témoin pour le compte de la Commission. Toutefois, la Commission a pu retenir les services de Nan Weiner, Ph.D, expert en évaluation des emplois. Après avoir examiné la preuve documentaire fournie par les parties, Mme Weiner a soumis son rapport d’expert dans lequel elle conclut que même si le [Plan] comporte des caractéristiques indiquant une partialité fondée sur le sexe, ces caractéristiques ne sont pas suffisamment importantes pour que le Plan soit sujet à caution. La Commission citera Mme Weiner comme témoin à l’audience.

 

La Commission a également déclaré ne pas être au courant de l’existence de quelque élément de preuve à l’appui de la plainte déposée en vertu de l’article 11 de la Loi. Enfin, la Commission a déclaré que [Traduction] « compte tenu de la preuve mise à sa disposition, [elle] ne cherchera[it] pas à obtenir une réparation pour le moment ».

 

[16]           Par la suite, l’avocat de la SMCC a envoyé à l’avocat de la Commission, le 25 juillet 2005, une lettre dans laquelle il demandait que la Commission [Traduction] « retire immédiatement la plainte qu’elle a renvoyée au Tribunal canadien des droits de la personne ». La SMCC a pris la position selon laquelle, compte tenu du rapport de Mme Weiner, la plainte devait être retirée parce qu’un examen n’était plus justifié ou, subsidiairement, parce que la plainte était [Traduction] « frivole ou vexatoire ». L’avocat de la SMCC, qui n’avait pas reçu de réponse, a téléphoné à l’avocat de la Commission le 12 août 2005. Il n’est pas contesté que, pendant l’appel téléphonique, l’avocat de la Commission a fait savoir que la Commission n’avait pas le pouvoir voulu pour retirer la plainte, et qu’elle pouvait uniquement se désister à titre de partie.

 

[17]           Le 17 août 2005, l’AFPC a soumis son mémoire détaillé, auquel était joint le rapport de son expert, Mme Jeannine David‑McNeil. Mme David‑McNeil a conclu que le Plan était entaché de partialité fondée sur le sexe et qu’il n’était pas conforme à la Loi.

 

[18]           Le 19 août 2005, la SMCC a présenté la demande de contrôle judiciaire ici en cause.

 

[19]           En plus de la présente procédure, la SMCC a soumis deux autres demandes de contrôle judiciaire à l’égard de la plainte. Dans ces demandes, elle conteste les décisions rendues par le Tribunal. Le 19 avril 2005, la SMCC a demandé le contrôle judiciaire de la décision du 21 mars 2005, dans laquelle le Tribunal rejetait la requête que la SMCC avait présentée en vue de faire radier la plainte pour ce qui est de l’article 11 de la Loi (T‑679‑05). Le 10 février 2006, la SMCC a présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision du 13 janvier 2006, dans laquelle le Tribunal rejetait la requête de la SMCC de rejeter la plainte pour le motif que la Commission avait « retiré » le rapport Haignière (T‑249‑06).

 

CONTEXTE LÉGISLATIF

 

[20]           Les dispositions pertinentes de la Loi canadienne sur les droits de la personne et de la Loi sur les Cours fédérales sont jointes à l’Annexe A. Certaines dispositions législatives précises seront au besoin incluses dans les présents motifs pour plus de commodité.

 

ARGUMENTS

 

            LA SMCC

 

[21]           La SMCC soutient avant tout qu’après avoir « retiré » le rapport Haignière, la Commission était également tenue de retirer la plainte parce que le fondement du renvoi devant le Tribunal n’existait plus. La SMCC fait valoir que le rapport Haignière a été incorporé par renvoi dans le rapport de l’enquêteur et qu’il a donc également été inclus dans la décision de la Commission de renvoyer la plainte au Tribunal en vertu de l’article 44 de la Loi. En citant la décision McKeown c. Banque Royale du Canada, [2001] 3 C.F. 139, comme faisant autorité, la SMCC soutient que si le rapport Haignière est écarté, le fondement sur lequel la Commission s’appuie pour renvoyer la plainte au Tribunal est également écarté, et qu’il en va de même pour le pouvoir du Tribunal de statuer sur la plainte.

 

[22]           La SMCC affirme donc qu’en refusant de retirer la plainte, la Commission n’a pas exercé l’obligation légale qui lui incombait. Plus précisément, la SMCC soutient que la Commission a une obligation positive, en vertu de l’article 41, de ne pas statuer sur une affaire qui est « frivole ou vexatoire » et qu’en vertu de l’article 44, la Commission doit rejeter la plainte si elle est convaincue, compte tenu des circonstances, qu’un examen plus poussé n’est pas justifié.

 

[23]           À l’appui de cet argument, la SMCC cite les motifs énoncés par le Tribunal canadien des droits de la personne dans la décision Kamani c. Société canadienne des postes, 1993 23 CHRR D/98, et elle se fonde d’une façon toute particulière sur les paragraphes 27, 28 et 30, où le président du Tribunal, Sidney Lederman, a dit ce qui suit :

[27]  Il est malheureux que ces allégations graves aient pesé sur M. Bruce et sur la Société pendant les cinq dernières années.  Un examen rapide de l'affaire aurait permis de conclure qu'aucun des motifs de distinction illicite prévus dans la Loi canadienne sur les droits de la personne n'a joué un rôle dans le congédiement de la plaignante.  La Commission n'a même pas réussi à établir à l'audience un cas prima facie de discrimination ni quoi que ce soit qui s'y rapproche.  Pourquoi cette affaire n'a-t-elle pas été rejetée soit par la Commission soit à une étape ultérieure par l'avocate de la Commission au moment de la préparation de l'audience?

[28]  En vertu de l'alinéa 41d) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Commission a l'obligation positive de ne pas statuer sur une plainte si elle estime que celle-ci est irrecevable parce qu'elle est frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi.  Sur réception du rapport de l'enquêteur, la Commission a l'obligation impérative en vertu de l'alinéa 44(3)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne de rejeter la plainte si elle est convaincue soit que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l'examen de celle-ci n'est pas justifié, soit que la plainte doit être rejetée pour l'un des motifs énoncés aux alinéas 41c) à e).

[...]

 

[30]   Un examen rapide et approprié de la preuve en l'espèce aurait dû permettre de conclure qu'il n'y avait aucun motif raisonnable de renvoyer cette affaire devant un tribunal.  De plus, l'obligation pour la Commission d'analyser minutieusement la preuve ne prend pas fin avec l'examen du rapport de l'enquêteur.  En effet, la Commission doit continuer d'examiner si une audience devant un tribunal est justifiée. [Non souligné dans l’original.]

 

[24]           À l’appui de la conclusion selon laquelle il existe une obligation continue, le président, dans la décision Kamani, a cité la décision Nimako c. Canadian National Hotels (1987), 8 C.H.R.R. D/3985, dans laquelle la commission d’enquête de l’Ontario a dit ce qui suit, à la page D/4007, paragraphe 31711 :

[Traduction]   [...] il me semble qu'il peut devenir évident pour la Commission, à un certain stade d'une audience, que la plainte est en réalité frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi.  Le cas échéant (et je ne veux pas dire que c'était le cas en l'espèce), je devrais penser qu'il serait possible pour la Commission d'exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par l'alinéa 33(1)b) du Code de 1981 dans de telles circonstances. Le pouvoir discrétionnaire « de ne pas traiter la plainte » comporte sûrement celui de la retirer à n'importe quelle étape, sous réserve du droit du plaignant de faire réexaminer cette décision et sous réserve de l'approbation de la commission d'enquête chargée de connaître de l'affaire. Par exemple, si la mauvaise foi du plaignant ne devient évidente pour la Commission qu'une fois que l'audience a commencé, la Commission n'est certes pas tenue de poursuivre inexorablement ce qu'elle considère être une demande spécieuse. 

[Non souligné dans l’original.]

 

Dans la décision Kamani, le président Lederman a ensuite dit que la Commission possède des pouvoirs extraordinaires, qu’elle doit exercer de manière responsable dans l’intérêt public. En outre, étant donné que le « simple fait qu’une allégation de discrimination raciale soit soulevée », soit le motif sur lequel la plainte était fondée dans l’affaire dont il était saisi, était nuisible et portait atteinte à la réputation du particulier, le président a conclu que « la Commission [était] tenue d’examiner avec soin à toutes les étapes du processus la preuve qui don[nait] lieu à une allégation de discrimination raciale ».

 

[25]           La CMCC ajoute que le pouvoir que possède la Commission de retirer une plainte à n’importe quelle étape de la procédure a été confirmé dans les décisions Sehmi c. Canada (Via Rail), [1995] D.C.D.P. 9 (QL), et Canada (Procureur général) c. Grover, 2004 CF 704.

 

[26]           À l’appui de la thèse selon laquelle la Commission est autorisée à retirer une plainte à la suite d’un renvoi et qu’elle a une obligation positive de le faire eu égard aux faits de la présente affaire, la SMCC se fonde avant tout sur une décision dans laquelle une enquête publique avait été entamée en vertu de la Police Act de la Colombie‑Britannique, R.S.B.C. 1996, ch. 367. La SMCC signale les similitudes entre la procédure des plaintes prévue par cette loi et la procédure ici en cause. Dans la décision British Columbia (Police Complaint Commissioner) c. Vancouver (City) Police Department, 2003 B.C.S.C. 279, le juge Goepel a fait les remarques suivantes :

[Traduction] 22. Lorsque le PPC reçoit une demande écrite en vue de la tenue d’une audience publique, il doit organiser l’audience en vertu de l’article 60.1 de la Loi si la demande est faite par un agent de police défendeur et si l’on se proposait de prendre à l’égard de l’agent une mesure disciplinaire ou corrective plus rigoureuse qu’une réprimande verbale, ou encore si le PCC conclut qu’il y a lieu de croire que l’intérêt public exige la tenue d’une audience publique. Conformément au paragraphe 60(4) de la Loi, le PCC peut tenir un audience sans que le plaignant ou le défendeur le demande s’il estime qu’il y a lieu de croire que l’intérêt public l’exige.

 

23.      Selon le paragraphe 60(5) de la Loi, en décidant si l’intérêt public exige la tenue d’une audience publique, le PCC doit tenir compte de tous les facteurs pertinents, notamment de la gravité de la plainte, de la gravité du préjudice que le plaignant aurait censément subi, de la question de savoir s’il existe une possibilité raisonnable que l’audience permette d’arriver à connaître la vérité, de la question de savoir s’il est possible de présenter une cause défendable montrant que l’enquête était viciée, qu’il ne convient pas de prendre les mesures disciplinaires ou correctives envisagées ou que le comité de discipline a interprété le Code d’éthique professionnelle d’une façon erronée, ou encore de la question de savoir s’il faut tenir une audience afin de préserver ou de rétablir la confiance du public dans la procédure des plaintes ou dans les services de police.

 

24.           Si la tenue d’une audience publique est ordonnée, la législation prévoit que celle‑ci est tenue devant un arbitre qui est un juge à la retraite de la Cour provinciale, de la Cour suprême ou de la Cour d’appel. Le paragraphe 61(2) de la Loi autorise le PCC à désigner un avocat qui agira pour le compte de la Commission afin de présenter à l’arbitre la preuve relative aux présumées fautes disciplinaires qui sont à l’origine de la plainte fondée sur la confiance du public. Dans le cadre de l’audience, l’avocat de la Commission peut citer tout témoin qui, à son avis, est en mesure de fournir une preuve pertinente et de produire en preuve tout document, notamment tout document se rattachant à la procédure relative à la plainte, jusqu’à la date de l’audience.

 

25.           Dans le cadre de l’audience publique, l’agent de police défendeur est autorisé à interroger ou à contre‑interroger les témoins (alinéa 64(4)a)). Le plaignant et le défendeur sont autorisés à présenter des conclusions finales, oralement ou par écrit, une fois la preuve soumise (alinéa 64(4)b)), et ils peuvent être représentés par un avocat à ces fins (alinéa 64(4)c)). La Loi ne semble pas conférer aux plaignants le droit d’interroger ou de contre‑interroger les témoins.

 

26.           Le paragraphe 60.1(8) de la Loi accorde à l’arbitre les protections, privilèges et pouvoirs conférés à un commissaire en vertu des articles 12, 15 et 16 de la Inquiry Act, R.S.B.C. 1996, ch. 224.

 

27.           Conformément au paragraphe 61(6) de la Loi, l’arbitre décide si chaque présumée faute disciplinaire invoquée dans la plainte a été prouvée selon la norme civile de preuve. L’arbitre peut imposer toute mesure disciplinaire ou corrective qui aurait pu être imposée par le comité de discipline, ou il peut confirmer les mesures disciplinaires ou correctives que le comité de discipline a initialement proposées, prendre des mesures plus sévères ou atténuer les mesures imposées.

 

28.           Un appel portant sur une question de droit peut être interjeté devant la Cour d’appel avec l’autorisation de celle‑ci, à l’encontre de la décision rendue par un arbitre en vertu du paragraphe 61(6) de la Loi. Les erreurs techniques quant à la forme, l’omission de déposer ou de donner des avis dans le délai imparti et les autres erreurs procédurales mineures n’influent pas sur la compétence et ne peuvent pas donner lieu à un appel devant la Cour d’appel pour quelque motif que ce soit, à moins que l’erreur n’ait empêché une détermination équitable des questions litigieuses lors de l’audience publique.

 

[...]

 

87.           La charge du PCC a été créée en vue d’assurer une supervision civile efficace sur les questions de discipline mettant en cause les services de police. La législation confère au PCC de larges pouvoirs en vue de s’acquitter de ce mandat, notamment le droit de tenir une audience publique lorsqu’il conclut qu’il est dans l’intérêt public de le faire. Une audience peut être tenue, et ce, quel que soit l’avis du comité de discipline qui a enquêté sur l’affaire, de l’agent de police défendeur ou du plaignant qui peut avoir retiré la plainte. D’un autre côté, la législation autorise également le PCC à refuser, indépendamment des voeux du plaignant, d’ordonner la tenue d’une audience publique s’il ne considère pas qu’il est dans l’intérêt public de procéder à une telle audience.

 

88.           La question précise dont je suis saisi est de savoir si, une fois qu’il a entamé l’audience publique, le PCC perd tout pouvoir d’y mettre fin en l’absence du consentement du plaignant ou de l’arbitre. Je ne le crois pas. En toute déférence pour les décisions des arbitres de Villiers et Murphy, je ne crois pas que leur nomination à titre d’arbitres leur permette d’agir dans l’intérêt public. En effet, les arbitres sont nommés afin d’exercer les fonctions précises prévues par la Loi. Ces fonctions se limitent à décider si la présumée faute disciplinaire invoquée dans la plainte a été prouvée selon la norme civile de preuve. Cette tâche ne confère pas à l’arbitre la compétence voulue pour décider si la procédure, une fois entamée, se poursuivra.

 

89.           Le PCC a été désigné en vue de protéger l’intérêt public. Il s’agit d’un agent indépendant de l’assemblée législative. Conformément à la législation, il incombe au PCC de déterminer ce qui est dans l’intérêt public. Je conclus que le PCC possède les pouvoirs accessoires nécessaires afin de retirer un avis d’audience publique une fois qu’il a été décidé d’en délivrer un. Un tel pouvoir existe par déduction nécessaire, compte tenu du libellé de la Loi, de sa structure et de son objet.

 

90.           C’est le PCC qui décide de prime abord si une audience publique sera tenue. C’est le PCC qui retient les services de l’avocat de la Commission et qui donne des instructions à celui‑ci. C’est l’avocat de la Commission, conformément au paragraphe 61(2) de la Loi, qui présente à l’arbitre la preuve relative aux présumées fautes disciplinaires. L’analogie que le requérant a établie avec le rôle de l’avocat du ministère public est juste.

 

91.           Si le PCC n’est pas autorisé à mettre fin à l’audience publique, il s’agit alors de savoir comment il est possible de mettre fin à une telle audience si, par suite d’un changement de circonstances, il n’est plus dans l’intérêt public de la tenir. Je ne souscris pas à la conclusion tirée par l’arbitre Murphy, à savoir qu’une fois qu’il a été décidé de tenir une audience publique, cette audience prend son propre essor. Il doit y avoir quelqu’un qui est chargé d’une façon continue de décider si, compte tenu du changement de circonstances, il convient de procéder à l’audience.

 

92.      À coup sûr, cette personne ne peut pas être le plaignant, puisque celui‑ci n’est pas autorisé à décider en tout premier lieu s’il faut tenir une audience publique et qu’il ne possède que des droits restreints dans le cadre de cette audience, si elle est tenue. De même, avec égards, je ne crois pas que l’arbitre, qui a été nommé afin de mener une audience, soit en mesure de décider si la cessation de cette audience servira l’intérêt public. L’arbitre ne possède pas les éléments de preuve ou le mandat législatif nécessaires pour prendre une telle décision.

 

93.      Comme il en a été fait mention dans les diverses décisions citées par le requérant, la règle générale veut que, si la partie qui demande la tenue d’une audience se désiste, rien ne permette la tenue de l’audience et que le tribunal n’ait pas compétence pour poursuivre sa tâche. Il est à mon avis possible de faire une distinction à l’égard de la décision Hanson, soit la seule décision contraire qui a été citée. En effet, dans la décision Hanson, la cour, en se fondant sur la législation invoquée devant elle, a statué que le tribunal est le protecteur de l’intérêt public et qu’il doit lui-même décider si le retrait de la plainte nuit à l’intérêt public. En vertu de la Loi, le PCC est le protecteur de l’intérêt public. Il incombe au PCC de décider si l’audience doit se poursuivre. Quant aux audiences demandées par un agent de police, c’est à celui‑ci qu’il appartient en tout premier lieu de décider si l’audience doit se poursuivre. Toutefois, il ne peut être mis fin à l’audience demandée par un agent de police qu’avec le consentement du PCC parce que, en pareil cas, le PCC possède un droit indépendant d’entamer une audience publique. Il n’est pas nécessaire d’obtenir le consentement de l’arbitre avant de retirer l’avis d’audience.

 

94.      Par conséquent, je me prononce en faveur du requérant et j’accorde la réparation qu’il a sollicitée. La décision que l’arbitre Murphy a rendue le 28 octobre 2002, à savoir que le PCC n’est pas autorisé à retirer unilatéralement un avis d’audience publique, est annulée; il en va de même pour l’ordonnance de l’arbitre Murphy prévoyant que l’audience se poursuivra. J’interdis en outre à l’arbitre Murphy de tenir l’audience.

 

L’AFPC et la Commission

 

[27]           L’AFPC et la Commission sont dans l’ensemble d’accord quant aux arguments invoqués au sujet de la compétence de la Commission de prendre les mesures demandées par la SMCC ainsi qu’au sujet du rôle de la Commission devant le Tribunal. La Commission, en sa qualité d’intervenante dans la présente demande de contrôle judiciaire, a limité ses arguments à son rôle institutionnel dans la procédure applicable aux droits de la personne et s’est contentée de verser ces arguments au dossier dans la demande ici en cause.

 

[28]           L’AFPC prend la position selon laquelle la demande de la SMCC doit être rejetée parce que la compétence de la Cour, conformément aux articles 18 et 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, n’est pas déclenchée. En vertu de ces dispositions, une partie peut demander à la Cour d’examiner la décision d’un « office fédéral ». L’AFPC soutient qu’une fois que la Commission a renvoyé l’affaire au Tribunal et que le Tribunal a entamé l’examen, la Commission a perdu sa compétence à l’égard de la plainte à titre de « décideur administratif ». Par conséquent, lorsque la Commission a pris une décision au sujet du retrait de la plainte de l’AFPC, elle ne l’a pas prise en sa qualité d’« office fédéral ».

 

[29]           Même si la Commission a pris une décision qui était susceptible de révision par la Cour, l’AFPC et la Commission soutiennent toutes deux que la Commission n’a pas compétence pour retirer la plainte une fois que celle‑ci a été renvoyée au Tribunal. À ce stade, la Commission peut uniquement se désister à titre de partie à l’instance. Les deux parties signalent les deux rôles distincts que la Commission a à l’égard d’une plainte fondée sur les droits de la personne. Initialement, la Commission agit à titre d’organisme chargé de procéder à un examen préalable, ou elle a une fonction de contrôle, afin de décider si la plainte doit être renvoyée au Tribunal ou si elle doit être rejetée : voir les articles 41 à 44 de la Loi. Si la plainte est renvoyée au Tribunal, le rôle de la Commission consiste alors à participer à titre de partie à la procédure du Tribunal et à soumettre des arguments compatibles avec ce qui, à son avis, est l’intérêt public dans ce cas‑là : voir l’article 51 de la Loi.

 

[30]           En ce qui concerne la première étape, la Commission dit que, sur réception du rapport d’enquête, elle doit décider, conformément à l’article 44, si l’affaire doit être renvoyée à un conciliateur ou au Tribunal ou si elle doit être rejetée. La Commission ne renverra pas une plainte au Tribunal si elle est convaincue, entre autres motifs, que le plaignant devrait épuiser les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement de griefs qui lui sont normalement ouverts (alinéa 44(2)a)), que la plainte est frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi (sous‑alinéa 44(3)a)(ii)), ou encore que compte tenu des circonstances relatives à la plainte, un examen plus poussé de celle‑ci n’est pas justifié (alinéa 44(3)b)). La Commission fait remarquer que, conformément au paragraphe 49(1), elle peut demander au Tribunal d’entamer un autre examen de la plainte sans mener d’abord une enquête.

 

[31]           L’AFPC et la Commission soutiennent toutes deux que les tribunaux ont confirmé que le rôle de la Commission à cette étape initiale consiste à exercer une « fonction d’examen préalable ». Dans l’arrêt Bell c. Canada (Commission des droits de la personne), [1996] 3 R.C.S. 854 (également répertorié sous l’intitulé Cooper c. Canada (Commission des droits de la personne)), la Cour suprême du Canada a dit ce qui suit au paragraphe 53 :

La Commission n’est pas un organisme décisionnel; cette fonction est remplie par les tribunaux constitués en vertu de la Loi. Lorsqu’elle détermine si une plainte devrait être déférée à un tribunal, la Commission procède à un examen préalable assez semblable à celui qu’un juge effectue à une enquête préliminaire. Il ne lui appartient pas de juger si la plainte est fondée. Son rôle consiste plutôt à déterminer si, aux termes des dispositions de la Loi et eu égard à l’ensemble des faits, il est justifié de tenir une enquête. L’aspect principal de ce rôle est alors de vérifier s’il existe une preuve suffisante. [...]

 

[32]           L’AFPC affirme que la Commission a satisfait à son obligation légale en décidant qu’il existait suffisamment d’éléments de preuve pour justifier le renvoi au Tribunal ainsi qu’à l’obligation qui lui incombait sur le plan de l’équité procédurale, en menant une enquête neutre approfondie sur la plainte.

 

[33]           Quant à la deuxième étape du traitement d’une plainte en matière de droits de la personne, l’AFPC fait remarquer qu’en vertu de la Loi, le Tribunal assume une compétence décisionnelle sur la plainte : voir le paragraphe 49(2). L’AFPC et la Commission font toutes deux valoir qu’à ce stade, la Commission n’agit plus à titre d’« office fédéral », mais qu’elle devient plutôt partie à l’examen, avec les parties : voir le paragraphe 50(1) de la Loi. La Commission cite l’arrêt Bell Canada c. Association canadienne des employés de téléphone, [2003] 1 R.C.S. 884, dans lequel la Cour suprême du Canada a dit ce qui suit à la page 903 :

Lorsque la Commission comparaît devant le Tribunal, elle n’est pas dans une situation différente de tout représentant du gouvernement qui comparaît devant un tribunal ou un organisme administratif.

 

[34]           L’AFPC affirme qu’en sa qualité de partie, la Commission a le droit de déterminer l’attitude qu’elle adoptera à l’audience afin de s’acquitter de son mandat en matière d’intérêt public, ce qui comprend le droit de se désister en tant que partie. Toutefois, la Commission n’a pas le droit de retirer la plainte elle‑même.

 

[35]           L’AFPC et la Commission font valoir que, devant le Tribunal, le rôle de la Commission est distinct de celui du plaignant. À l’appui de leur position, elles citent l’arrêt McKenzie Forest Products Inc. c. Ontario Human Rights Commission et al. (2000), 48 O.R. (3d) 150, dans lequel la Cour d’appel de l’Ontario a dit ce qui suit aux paragraphes 33 et 34 :

[Traduction] Je suis d’accord avec l’appelante pour dire qu’une fois que la Commission a exercé le pouvoir discrétionnaire qu’elle possède de renvoyer une plainte à la commission d’enquête, le rôle de la Commission change d’une façon fondamentale. La Commission n’agit plus comme organisme exerçant une fonction d’enquête et d’examen préalable, mais elle devient partie à l’instance. À ce stade, c’est à la commission d’enquête qu’il revient de régler la plainte.

 

Bien entendu, il incombe à la Commission de faire valoir ce qu’elle considère comme étant l’intérêt public et, ce faisant, la Commission peut également faire valoir les intérêts du plaignant. Cependant, le rôle dévolu à la Commission à titre de partie à l’instance ne peut déroger au statut indépendant conféré à un plaignant.

 

[36]           L’AFPC et la Commission font en outre remarquer que la conclusion tirée dans l’arrêt  McKenzie Forest Products selon laquelle le plaignant a devant le Tribunal un statut indépendant de celui de la Commission a été adoptée par le Tribunal canadien des droits de la personne dans la décision Premakumar c. Air Canada, [2002] D.C.D.P. no 17 (QL), dans laquelle la présidente Anne Mactavish a dit ce qui suit sur ce point, aux paragraphes 27 et 28 :

Dans l’arrêt McKenzie, la Cour d’appel de l’Ontario a statué que le plaignant avait le droit de faire instruire sa plainte en toute indépendance, même si la Commission s’était désistée du dossier. La Cour d’appel a conclu en ce sens et ce, malgré les dispositions du Code des droits de la personne de l’Ontario attribuant à la Commission la responsabilité de se saisir de la cause. [Renvoi omis.] Le texte de la Loi canadienne sur les droits de la personne ne contient aucune disposition au même effet. Compte tenu de la différence ainsi relevée au niveau du libellé de ces deux textes de loi, les commentaires de la Cour d’appel de l’Ontario au sujet du statut indépendant conféré à un plaignant me semblent d’autant plus pertinents à la description du statut d’un plaignant aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

 

Par conséquent, j’en arrive à la conclusion que la Commission et le plaignant ont des rôles distincts devant le Tribunal en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.  Le rôle incombant à la Commission est de faire valoir ce qu’elle considère comme étant l’intérêt public, alors que le rôle du plaignant est tout simplement de faire valoir ses propres intérêts. L’avocat de la Commission ne représente pas un plaignant.

 

[37]           L’AFPC et la Commission font remarquer que même si les remarques incidentes qui ont été faites dans les décisions Kamani et Sehmi – les décisions du Tribunal citées par la SMCC – peuvent être considérées comme disant que la Commission est autorisée à retirer une plainte pendant l’audience tenue par le Tribunal, elles ne sont pas conformes au libellé et à l’économie générale de la Loi. En outre, l’AFPC et la Commission font observer que ces décisions ont été rendues avant que la Cour d’appel de l’Ontario ne se soit prononcée dans l’affaire McKenzie Forest Products.

 

[38]           L’AFPC affirme également, en citant la décision Shepherd c. Ontario Corp. 1110494 (2000), 38 C.H.R.R. D/284 rendue par la commission d’enquête de l’Ontario, qu’une fois qu’il a assumé sa compétence à l’égard d’une plainte, le Tribunal est obligé de procéder à un examen. L’AFPC déclare que, cela étant, le fondement de la décision de la Commission de renvoyer la plainte n’a rien à avoir avec la compétence du Tribunal de statuer au fond sur la plainte de l’AFPC.

 

[39]           Quoi qu’il en soit, en ce qui concerne le fondement des arguments invoqués par la SMCC dans la présente demande de contrôle judiciaire, la Commission déclare que la prétention de la SMCC selon laquelle elle a retiré le rapport Haignière est erronée. La Commission affirme qu’il ressort clairement de la transcription de la conférence de cas du 11 mai 2005 que l’avocat de la Commission n’a jamais dit que la Commission retirait le rapport Haignière; la Commission a plutôt simplement dit qu’elle ne citerait pas Mme Haignière comme témoin devant le Tribunal.

 

LES POINTS LITIGIEUX

 

[40]           J’ai examiné les arguments des parties et je conclus que les questions soulevées dans la présente demande de contrôle judiciaire sont les suivantes :

 

1.         La Cour a-t-elle compétence pour examiner la présente demande de contrôle judiciaire?

 

2.      La Commission a‑t‑elle le pouvoir ou a‑t‑elle l’obligation de retirer une plainte déposée en matière de droits de la personne une fois qu’elle a renvoyé l’affaire au Tribunal?

 

3.      Dans l’affirmative, la Commission a‑t‑elle commis une erreur en refusant de retirer la plainte de l’AFPC compte tenu des circonstances de l’espèce?

 

LA NORME DE CONTRÔLE

 

[41]           À mon avis, les première et deuxième questions sont essentiellement des questions de compétence et d’interprétation de la loi. Il est généralement reconnu que de telles questions de droit doivent être examinées selon la norme de la décision correcte : voir par exemple Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404. Comme je l’expliquerai ci‑dessous dans les présents motifs, la troisième question est de savoir si la Commission a réellement retiré le rapport Haignière. Cela étant, je suis d’avis qu’aucune norme de contrôle n’est applicable; la Cour doit simplement décider si, eu égard aux faits, le rapport Haignière a été « retiré ».

 

ANALYSE

1.         La Cour a-t-elle compétence pour examiner la présente demande de contrôle judiciaire?

[42]           En tant que question préliminaire, l’AFPC et la Commission soutiennent que la Cour n’a pas compétence pour entendre la présente demande de contrôle judiciaire, et ce, pour deux raisons. En premier lieu, l’AFPC prend la position selon laquelle aucune « décision » n’a été prise par la Commission et que la SMCC ne dispose donc d’aucun recours devant la Cour. L’AFPC fait valoir que, pendant la conférence de cas du 11 mai 2005, dans le mémoire de la Commission en date du 20 juillet 2005, ou pendant la conversation téléphonique qu’il a eue avec l’avocat de la SMCC le 12 août 2005, l’avocat de la Commission n’a pas fait de commentaires qui puissent constituer une décision prise par la Commission. En second lieu, l’AFPC et la Commission font toutes deux valoir que la compétence de la Cour n’est de toute façon pas déclenchée parce que la Commission n’agissait pas en sa qualité d’« office fédéral ».

 

[43]           Je suis d’accord avec l’AFPC pour dire qu’il est plutôt difficile de discerner la « décision » contestée dans la présente espèce. Dans son avis de demande, la SMCC déclare contester la décision de la Commission en date du 20 juillet 2005 [Traduction] « conformément à laquelle la CCDP a refusé de retirer une plainte devant le Tribunal canadien des droits de la personne ». Or, la seule communication datée du 20 juillet 2005 qui a été versée au dossier est le mémoire de la Commission. Or, l’examen du mémoire de cas permet difficilement de voir comment quelque chose, dans le document, pourrait constituer une décision de la nature d’un « refus de retirer » la plainte déposée par l’AFPC. De fait, les seules « décisions » mentionnées à l’égard de l’audience tenue par le Tribunal sont que la Commission ne citerait pas Mme Haignière comme témoin, qu’elle envisageait de citer Mme Weiner comme témoin, et qu’elle ne cherchait pas à obtenir une réparation pour le moment.

 

[44]           Comme il en a ci‑dessus été fait mention, à la suite de la présentation du mémoire de la Commission, l’avocat de la SMCC, Me David Sherriff‑Scott, et l’avocat qui représentait alors la Commission, Me Patrick O’Rourke, ont eu des communications au sujet du retrait de la plainte. Lors d’une conversation téléphonique qui a eu lieu le 12 août 2005, Me O’Rourke aurait censément fait savoir que la Commission n’était pas autorisée à retirer la plainte. Le contenu de la communication n’est pas contesté, mais le seul élément de preuve des déclarations attribuées à Me O’Rourke figure dans l’affidavit de Me Sherriff‑Scott. Même si je reconnais que Me O’Rourke a fait de tels commentaires au sujet de la position prise par la Commission à l’égard du retrait de la plainte, je ne suis pas convaincu que ces commentaires constituent une « décision » de la Commission.

 

[45]           À l’appui de la position selon laquelle aucune décision n’a été prise par la Commission, l’AFPC cite la décision Fuchs c. Canada, [1997] 129 F.T.R. 168. Dans cette affaire‑là, le demandeur avait contesté la « décision » d’un agent de perception du ministère du Revenu national. La décision contestée figurait censément dans des commentaires qui avaient été faits lors d’une conversation téléphonique entre l’agent de perception et l’avocat du demandeur, dans laquelle l’agent avait indiqué que le ministère n’avait aucun pouvoir discrétionnaire en vertu de la loi pour faire ce que le demandeur lui demandait au sujet de son compte fiscal. Le juge Max Teitelbaum a statué que, même si une décision pouvait être communiquée par n’importe quel moyen, y compris par téléphone, les commentaires de l’agent ne constituaient pas une « décision ». Au paragraphe 15, le juge Teitelbaum a dit ce qui suit :

Ce que le requérant appelle décision dans ce recours en contrôle judiciaire n'est que l'opinion exprimée par un agent de perception au cours d'une conversation téléphonique manifestement générale au sujet du recouvrement de l'argent dû au titre de l'impôt sur le revenu.

 

Je tiens à ajouter que, dans la décision Fuchs, le juge Teitelbaum a conclu qu’il était certain que l’agent de perception agissait en sa qualité de représentant du ministre et que toute décision que l’agent pouvait avoir prise était donc une décision prise par le ministre.

 

[46]           En l’espèce, je suis porté à croire qu’il n’y a rien dans le dossier qui indique que la Commission a pris une « décision », et encore moins qu’elle a communiqué cette décision à la SMCC. Plus précisément, en ce qui concerne les commentaires que Me O’Rourke a faits à Me Sherriff‑Scott, je ne crois pas qu’ils constituent une « décision » de la Commission de refuser de retirer la plainte. Je considère plutôt les commentaires de Me O’Rourke comme l’expression d’un avis juridique au sujet de la « qualité pour agir » de la Commission dans le contexte législatif pertinent. Quoi qu’il en soit, contrairement à ce qui était le cas dans l’affaire Fuchs, on peut ici se demander si Me O’Rourke, agissant en sa qualité d’avocat de la Commission, peut être considéré comme un « représentant » de la Commission, qui prend une « décision » attribuable à la Commission, et par conséquent une décision liant la Commission, pour les besoins d’une demande de contrôle judiciaire.

 

[47]           Cela dit, l’absence de « décision » ne fait pas obstacle à une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu de la Loi sur les Cours fédérales. L’article 18.1 confère à la Cour fédérale la compétence voulue pour accorder une réparation à une personne touchée par « l’objet de la demande » dans laquelle un office fédéral est en cause. Plus précisément, le paragraphe 18.1(3) prévoit que la Cour peut accorder une réparation dans des cas autres qu’une décision.

 

18. (3) Sur présentation d'une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale peut :

a) ordonner à l’office fédéral en cause d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis ou refusé d’accomplir ou dont il a retardé l’exécution de manière déraisonnable;

b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu’elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l’office fédéral.

18. (3) On an application for judicial review, the Federal Court may

( a) order a federal board, commission or other tribunal to do any act or thing it has unlawfully failed or refused to do or has unreasonably delayed in doing; or

( b) declare invalid or unlawful, or quash, set aside or set aside and refer back for determination in accordance with such directions as it considers to be appropriate, prohibit or restrain, a decision, order, act or proceeding of a federal board, commission or other tribunal.

 

[48]           Dans la décision Markevich c. Canada, [1999] 3 C.F. 28 (1re inst.), au paragraphe 11, le juge John Evans a expliqué l’étendue des questions qui peuvent à juste titre être soulevées devant la Cour dans le cadre d’un contrôle judiciaire :

Il me semble que les matières sujettes à contrôle judiciaire sont prévues au paragraphe 18.1(3), aux termes duquel la Section de première instance, saisie du recours, peut ordonner à l’office fédéral concerné d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis ou refusé d’accomplir, ou déclarer nul ou illégal, renvoyer pour jugement, ou prohiber ou restreindre « toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l’office fédéral ». Les mots « procédure ou tout autre acte » ont clairement une portée générale et peuvent comprendre une grande diversité d’actions administratives qui ne sont pas pour autant des « décisions ou ordonnances », par exemple les règlements, rapports ou recommandations relevant de pouvoirs légaux, les énoncés de politique, lignes directrices et guides, ou l’une quelconque des formes multiples que peut prendre l’action administrative dans la prestation d’un programme public par un organisme public : voir Krause c. Canada, [[1999] 2 C.F. 476 (C.A.)].

 

La Cour a statué, dans de nombreuses autres décisions, qu’une grande diversité d’actions administratives relèvent de la compétence de la Cour fédérale, notamment Gestion Complexe Cousineau (1989) Inc. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux), [1995] 2 C.F. 694; Morneault c. Canada (Procureur général), [2001] 1 C.F. 30 (C.A.), et Larny Holdings (exploitant une entreprise du nom de Quickie Convenience Stores) c. Canada (Ministre de la Santé), [2003] 1 C.F. 541 (1re inst.).

 

[49]           En l’espèce, la SMCC demande essentiellement le contrôle judiciaire de l’« inaction » de la Commission – c’est‑à‑dire du refus de la Commission de retirer la plainte déposée par l’AFPC dont le Tribunal a été saisi. L’alinéa 18.1(4)a) de la Loi sur les Cours fédérales permet à la Cour de prendre les mesures prévues au paragraphe 18.1(3) si elle est convaincue que l’office fédéral « a refusé d’exercer sa compétence ». Par conséquent, en ce qui concerne le premier argument invoqué par l’AFPC, il importe peu que la Commission ait pris une « décision » pour que la Cour ait compétence sur la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[50]           J’examinerai maintenant le deuxième argument invoqué par l’AFPC et par la Commission, à savoir que la Cour n’a pas compétence à l’égard de la présente demande parce que, pendant la période pertinente, la Commission n’agissait pas à titre d’« office fédéral ». Il n’est pas contesté que, pour être susceptible de révision en vertu de l’article 18.1, une affaire doit émaner d’un office fédéral. L’article 2 de la Loi sur les Cours fédérales définit l’office fédéral comme suit :

« office fédéral » Conseil, bureau, commission ou autre organisme, ou personne ou groupe de personnes, ayant, exerçant ou censé exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale ou par une ordonnance prise en vertu d’une prérogative royale, à l’exclusion de la Cour canadienne de l’impôt et ses juges, d’un organisme constitué sous le régime d’une loi provinciale ou d’une personne ou d’un groupe de personnes nommées aux termes d’une loi provinciale ou de l’article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867.

“federal board, commission or other tribunal” means any body or any person or persons having, exercising or purporting to exercise jurisdiction or powers conferred by or under an Act of Parliament or by or under an order made pursuant to a prerogative of the Crown, other than any such body constituted or established by or under a law of a province or any such person or persons appointed under or in accordance with a law of a province or under section 96 of the Constitution Act, 1867;

 

L’article 2 exige qu’afin d’être admissible en tant que question pouvant faire l’objet d’un contrôle judiciaire, la mesure administrative contestée soit un acte ou une procédure d’un organisme ou d’une personne « ayant, exerçant ou censé exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale ».

 

[51]           L’AFPC et la Commission affirment toutes deux que la Commission, une fois qu’elle a renvoyé une plainte au Tribunal, n’exerce plus les fonctions d’un décideur administratif à l’égard de cette plainte. La Commission devient plutôt simplement l’une des parties à la procédure du Tribunal. Cela étant, l’AFPC et la Commission soutiennent que lorsqu’elle prend une décision à titre de partie devant le Tribunal, la Commission ne prend pas cette décision en sa qualité d’« office fédéral ». Il s’ensuit donc que les décisions, actions ou inactions de la Commission ne sont pas assujetties au contrôle judiciaire de la Cour fédérale.

 

[52]           De son côté, la SMCC prend essentiellement la position selon laquelle même si la Commission est une partie devant le Tribunal, elle est encore tenue d’« effectuer un examen préalable » des plaintes conformément aux articles 41 et 44 de la Loi, pendant que se déroulent les procédures engagées devant le Tribunal. Cela étant, la Commission agit à titre d’office fédéral si elle refuse de s’acquitter de ces obligations légales.

 

[53]           En général, je suis d’accord avec l’AFPC et la Commission, lorsqu’elles décrivent le statut de la Commission devant le Tribunal comme étant celui d’une partie. Le paragraphe 50(1) de la Loi désigne clairement la Commission comme étant l’une des parties à la procédure engagée devant le Tribunal :

 

50. (1) Le membre instructeur, après avis conforme à la Commission, aux parties et, à son appréciation, à tout intéressé, instruit la plainte pour laquelle il a été désigné; il donne à ceux-ci la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter, en personne ou par l’intermédiaire d’un avocat, des éléments de preuve ainsi que leurs observations.

50. (1) After due notice to the Commission, the complainant, the person against whom the complaint was made and, at the discretion of the member or panel conducting the inquiry, any other interested party, the member or panel shall inquire into the complaint and shall give all parties to whom notice has been given a full and ample opportunity, in person or through counsel, to appear at the inquiry, present evidence and make representations.

 

En outre, il est clair que la Loi vise à conférer au Tribunal une compétence sur la plainte une fois que la Commission a demandé à celui‑ci d’instruire la plainte. Le paragraphe 49(2) de la Loi prévoit que, sur réception d’un renvoi de la Commission, le Tribunal désigne un membre pour instruire la plainte. En outre, les articles 50 et 52 à 54 énoncent les pouvoirs du Tribunal lorsqu’il instruit une plainte et lorsqu’il décide du bien‑fondé de la plainte. Ainsi, en vertu du paragraphe 50(2), le Tribunal est autorisé à trancher les questions de droit et les questions de fait dans les affaires dont il est saisi.

 

[54]           Toutefois, la question dont la Cour est saisie ne se rapporte pas à la conduite de la Commission en sa qualité de partie à l’audience tenue par le Tribunal, mais plutôt à l’obligation de la Commission à l’égard de sa fonction d’examen préalable. Selon la SMCC, la Commission continue à exercer cette fonction même après qu’une procédure a été entamée devant le Tribunal. La question préliminaire est donc de savoir si, sur ce point, la Commission agit à titre d’office fédéral. Selon Donald Brown et le juge Evans dans l’ouvrage intitulé Judicial Review of Administrative Action in Canada (Toronto : Canvasback Publishing, 1998, édition à feuilles mobiles), cité dans Larny, précité, paragraphe 26, la question déterminante ne se rapporte pas au type précis de pouvoir qui est exercé, mais simplement à la question de savoir si la Commission tire son pouvoir d’une loi fédérale :

[TraductionEn fin de compte, la source de la compétence d’un tribunal – et non pas la nature du pouvoir exercé ou de l’office l’exerçant – est le premier facteur déterminant quant à savoir s’il fait partie de la définition [de l’office fédéral]. Le test consiste à chercher à savoir si l’office détient les pouvoirs en vertu d’une loi fédérale ou d’une ordonnance prise en vertu d’une prérogative de la Couronne fédérale.

 

La source de la fonction d’examen préalable de la Commission émane clairement de la Loi, en particulier des articles 40 à 44. Si, comme la SMCC l’allègue, la Commission est tenue de retirer la plainte de l’AFPC, et si elle a refusé ou omis de le faire, il me semble que la Commission doit agir en sa qualité d’« office fédéral ».

 

[55]           Je note que, même lorsque la Commission a le rôle d’une partie, son pouvoir est néanmoins régi par la Loi. L’article 51 prévoit que, au moyen de sa participation à l’audience tenue par le Tribunal, la Commission doit promouvoir l’intérêt public.

 

51. En comparaissant devant le membre instructeur et en présentant ses éléments de preuve et ses observations, la Commission adopte l’attitude la plus proche, à son avis, de l’intérêt public, compte tenu de la nature de la plainte.

51. In appearing at a hearing, presenting evidence and making representations, the Commission shall adopt such position as, in its opinion, is in the public interest having regard to the nature of the complaint.

 

[56]           Bref, je suis d’avis que la demande de contrôle judiciaire présentée par la SMCC n’est pas écartée selon cette question préliminaire – c’est‑à‑dire que je conclus que la Cour a compétence pour entendre la présente demande. Toutefois, afin d’obtenir la réparation sollicitée, la SMCC doit néanmoins établir que la Commission a le pouvoir et qu’elle avait une obligation légale ou une obligation juridique de retirer la plainte de l’AFPC compte tenu des circonstances de la présente espèce.

 

2.      La Commission a‑t‑elle le pouvoir ou a‑t‑elle l’obligation de retirer une plainte déposée en matière de droits de la personne une fois qu’elle a renvoyé l’affaire au Tribunal?

 

[57]           Pour que la Cour accorde une réparation à la SMCC en ordonnant à la Commission de retirer d’entre les mains du Tribunal la plainte que l’AFPC a déposée, ou d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour le faire, la SMCC doit d’abord démontrer que la Commission est tenue de le faire, en vertu de la Loi et de la jurisprudence, compte tenu des circonstances. Comme il en a été fait mention, la SMCC affirme que le pouvoir requis est conféré aux articles 41 et 44 de la Loi et que l’obligation de retirer la plainte est étayée par la décision rendue par le Tribunal dans l’affaire Kamani et dans les autres décisions susmentionnées. L’AFPC et la Commission rétorquent, en citant les décisions McKenzie Forest Products et Premakumar, que la Commission n’est pas autorisée à retirer unilatéralement une plainte dont le Tribunal a été saisi étant donné que le plaignant a un statut indépendant de celui de la Commission.

 

[58]           Il me semble que la prétention de la SMCC s’oppose ici au principe du functus officio. Dans l’arrêt Chandler c. Alberta Association of Architects, [1989] 2 R.C.S. 848, la Cour suprême du Canada a statué que la notion de functus officio s’applique aux décisions prises par des décideurs administratifs. À la page 861, la Cour suprême a dit ce qui suit :

En règle générale, lorsqu’un tel tribunal a statué définitivement sur une question dont il était saisi conformément à sa loi habilitante, il ne peut revenir sur sa décision simplement parce qu’il a changé d’avis, parce qu’il a commis une erreur dans le cadre de sa compétence, ou parce que les circonstances ont changé. Il ne peut le faire que si la loi le lui permet ou s’il y a eu un lapsus ou une erreur au sens des exceptions énoncées dans l’arrêt Paper Machinery Ltd. v. J. O. Ross Engineering Corp., [[1934] S.C.R. 186 – c’est‑à‑dire lorsqu’il y avait une erreur dans l’expression de l’intention manifeste de la cour.]

 

Par conséquent, eu égard aux faits ici en cause, afin d’empêcher l’application du principe du functus officio, la SMCC doit démontrer que la Commission possède clairement un pouvoir légal de retirer la plainte une fois que celle‑ci a été renvoyée. Comme je l’expliquerai ci‑dessous, je ne crois pas qu’un tel pouvoir puisse se trouver dans le libellé ou dans l’économie de la Loi, ou encore dans les décisions faisant autorité citées par la CMCC.

 

[59]           Il peut être utile de réitérer ce que je comprends des décisions prises par la Commission lorsqu’elle exerce la fonction d’examen préalable prévue par les dispositions législatives figurant aux articles 40 à 44 de la Loi. Premièrement, la Commission a pris l’initiative de la plainte en vertu du paragraphe 40(3). En décidant que la plainte n’était pas visée par les exceptions énoncées à l’article 41, la Commission a examiné la plainte en menant une enquête en vertu de l’article 43 de la Loi. Après avoir reçu le rapport d’enquête, la Commission a décidé, conformément à l’alinéa 44(3)a), de nommer un conciliateur et de demander ensuite que le Tribunal entame un examen à la suite de l’échec de la conciliation.

 

[60]           Comme la description qui précède permet de le constater, la décision finale de la Commission était celle qui a été prise conformément à l’article 44 de la Loi. Sous réserve d’un contrôle judiciaire entraînant l’annulation de cette décision, ou d’un pouvoir légal permettant à la Commission de réexaminer sa décision, la Commission est à mon avis dessaisie de l’affaire lorsqu’il s’agit de prendre une décision dans l’exécution des fonctions d’examen préalable prévues par la Loi. Comme il en a ci‑dessus été fait mention, la SMCC n’a pas demandé le contrôle judiciaire de la décision de la Commission de renvoyer la plainte au Tribunal. En outre, dans la présente demande de contrôle judiciaire, la SMCC ne signale pas de disposition législative permettant à la Commission de revenir sur la décision qu’elle a prise en vertu du paragraphe 44(3), et je ne puis constater aucune telle disposition dans la Loi. En somme, je suis d’avis que le principe du functus officio et l’absence de pouvoir légal de réexaminer une décision concernant le renvoi va à l’encontre de la prétention de la SMCC selon laquelle la Commission aurait essentiellement dû déterminer encore une fois après le renvoi s’il existait suffisamment d’éléments de preuve pour justifier la poursuite de l’examen par le Tribunal, compte tenu des commentaires que la Commission a formulés dans son mémoire. Je conclus également que le principe du functus officio et l’absence de pouvoir légal clair permettant le réexamen de la décision concernant le renvoi sape l’idée selon laquelle la Commission a une obligation continue de procéder à un examen préalable des plaintes après le renvoi.

 

[61]           En plus de cette difficulté fondamentale que suscite la position avancée par la SMCC, je conclus également que le libellé et l’économie de la Loi vont à l’encontre de l’assertion de la SMCC selon laquelle la Commission possède un pouvoir continu l’autorisant à retirer une plainte qui a été renvoyée au Tribunal, et je ne crois pas que les décisions citées par la SMCC étayent d’une façon convaincante l’existence d’un tel pouvoir.

 

[62]           Dans la décision Kamani, après avoir décidé que la plainte devait être rejetée au fond, le président Lederman a fait des commentaires sous le titre « Le rôle de la Commission dans l’appréciation de la plainte ». De toute évidence, le président voulait critiquer la Commission pour avoir omis d’exercer avec diligence sa fonction d’examen préalable ou pour avoir poursuivi la plainte à l’audience même s’il n’existait « pas la moindre preuve » à l’appui de la plainte. Dans la décision Kamani, le président a dit que, si la Commission s’était acquittée de sa tâche d’une façon adéquate en examinant au préalable la plainte, l’affaire n’aurait pas été renvoyée au Tribunal. Le président a également contesté la décision de la Commission de poursuivre l’affaire « jusqu’au bout », même après que l’avocate de la Commission eut reconnu qu’il n’y avait pas grand‑chose à l’appui de la plainte. Tel était le contexte dans lequel le président a fait remarquer que la Commission « doit continuer d’examiner si une audience devant un tribunal est justifiée ».

 

[63]           Avec égards, je ne suis pas d’accord avec le président Lederman lorsqu’il dit que la Loi prévoit qu’une fois que le Tribunal a été saisi de l’affaire, la Commission a une obligation continue d’évaluer ou de réévaluer si la preuve continue à être « suffisante » pour étayer le « renvoi » au Tribunal, à moins qu’il n’ait voulu dire qu’en sa qualité de partie à l’examen, la Commission est tenue, dans l’intérêt public, d’évaluer de façon continue si elle doit adopter le même point de vue à l’égard d’une plainte dont le Tribunal a été saisi que celui qu’elle a adopté en procédant au renvoi. Toutefois, je reconnais certes que le président faisait face à une situation vraiment frustrante, ce qui l’a amené à faire ces remarques. À mon avis, un certain nombre de faits cruciaux caractérisent l’analyse effectuée par le président Lederman et permettent de distinguer l’affaire Kamani de la présente affaire.

 

[64]           Premièrement, malgré les commentaires qu’il a formulés au sujet de l’obligation continue de la Commission, le président n’a pas expressément expliqué de quelle façon, en vertu de l’économie de la Loi, le « caractère continu » de cette obligation est prescrit. Le président fait simplement mention des dispositions régissant la fonction d’examen préalable assignée à la Commission aux articles 41 à 44. Le président signale qu’il n’y a rien dans le libellé de ces dispositions qui maintienne les pouvoirs de la Commission quant à l’examen préalable une fois que la Commission a décidé de rejeter la plainte ou de la renvoyer au Tribunal. En outre, je remarque que, dans la décision Kamani, le Tribunal lui‑même s’est prononcé sur le bien‑fondé de la plainte. En fait, le Tribunal n’a pas « renvoyé l’affaire » à la Commission pour que celle‑ci réévalue si la preuve était suffisante pour justifier le renvoi, ce qui aurait eu pour effet de régler la plainte au fond. Le fait que le Tribunal a statué sur l’affaire est conforme au pouvoir décisionnel conféré par la Loi ainsi qu’à la jurisprudence. Dans l’arrêt Bell Canada c. Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, [1999] 1 C.F. 113 (C.A.), paragraphe 37, le juge Décary a signalé comme suit le rôle indépendant du Tribunal :

[...] il incombe à ce tribunal d’examiner le bien‑fondé des plaintes, et le tribunal ne sera lié d’aucune façon par l’interprétation que l’enquêteur a donnée à l’article 11 et que la Commission a vraisemblablement adoptée.

 

Comme l’AFPC le soutient, c’est au Tribunal, et non à la Commission, qu’il incombe en vertu de la Loi de statuer au fond sur la plainte.

 

[65]           Deuxièmement, le président Ledermen a dit, dans la décision Kamani, qu’« il aurait dû être clair qu’il n’y avait aucune preuve permettant d’étayer la plainte ». Par conséquent, il aurait dû être évident aux yeux de la Commission qu’aucun autre examen n’était justifié. Dans une autre décision citée par la SMCC, la décision Sehmi précitée, le Tribunal a également conclu qu’il n’existait aucune preuve justifiant le renvoi de la plainte au Tribunal. En l’espèce, il n’est pas possible d’arriver à une conclusion au sujet du « caractère évident » de la preuve. Indépendamment du fait que le Tribunal a à sa disposition des milliers de pages de preuve documentaire – et notamment deux rapports dans lesquels les experts sont arrivés à des conclusions différentes – les parties ont également l’intention de soumettre une preuve au moyen de dépositions présentées par des témoins et du contre‑interrogatoire de ces témoins. Comme le tribunal l’a fait dans les décisions Kamani et Sehmi, le Tribunal devra éventuellement dans ce cas‑ci examiner et soupeser la preuve mise à sa disposition. Même si, en fin de compte, le Tribunal conclut que la plainte de l’AFPC n’est pas justifiée, cela ne discrédite pas la conclusion de la Commission selon laquelle il existait suffisamment d’éléments de preuve justifiant le renvoi de l’affaire au Tribunal. En outre, je tiens à répéter qu’après que la Commission eut décidé de renvoyer la plainte au Tribunal, la SMCC n’a pas demandé le contrôle judiciaire de cette décision. Je tiens également à faire remarquer qu’il n’y a rien dans la preuve qui me montre que la plainte était ou est « frivole ou vexatoire ».

 

[66]           Troisièmement, et ce qui est à mon avis fort important, dans la décision Kamani, le président Lederman s’est fondé sur la décision rendue par la commission d’enquête dans l’affaire Nimako, précitée, dans laquelle une plainte avait été déposée en vertu du Code des droits de la personne de l’Ontario. Comme l’a dit le président Lederman, la commission d’enquête avait conclu que le pouvoir discrétionnaire conféré à la Commission sur les droits de la personne à l’alinéa 33(1)b) du Code de l’Ontario comprenait le pouvoir discrétionnaire de retirer la plainte « à n’importe quelle étape de la procédure ». Je suis d’accord avec l’AFPC et la Commission pour dire que l’arrêt McKenzie Forest Products, précité, écartait fondamentalement une telle interprétation des dispositions législatives pertinentes. Dans cet arrêt, la Cour d’appel de l’Ontario a expressément examiné le rôle de la Commission pendant la procédure engagée devant la commission d’enquête ainsi que la compétence de la commission d’enquête, et elle a tiré les quatre conclusions suivantes :

 

1)        Le plaignant a en sa qualité de partie devant la commission d’enquête un statut indépendant de celui de la Commission;

 

2)        Une fois que la Commission a renvoyé la plainte devant la commission d’enquête, le rôle de la Commission change d’une façon fondamentale. La Commission n’agit plus à titre d’organisme chargé de l’examen préalable, mais elle prend part aux procédures, et la commission d’enquête devient responsable du règlement de la plainte;

 

3)        La commission d’enquête est un tribunal autonome indépendant de la Commission; et

 

4)        La commission d’enquête ne perd pas la compétence qu’elle possède de poursuivre l’audition de la plainte lorsque la Commission décide de ne pas continuer à participer aux procédures.

 

À mon avis, la décision que la commission d’enquête a rendue dans l’affaire Nimako n’est pas conforme à la décision rendue par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire McKenzie Forest Products et, cela étant, elle ne peut pas être suivie.

 

[67]           Dans la décision Premakumar, précitée, la présidente Mactavish s’est fondée sur l’arrêt McKenzie Forest Products de la Cour d’appel de l’Ontario en faisant des commentaires au sujet de la relation existant entre la Commission et le plaignant lorsque le tribunal est saisi de la plainte. Je souscris à la conclusion de la présidente Mactavish selon laquelle la Commission ne représente pas les plaignants devant le Tribunal et que les plaignants possèdent eux‑mêmes un droit indépendant de promouvoir leurs intérêts. Le rôle qui est dévolu à la Commission devant le Tribunal en vertu de la Loi ne consiste pas à faire valoir la plainte, mais plutôt à représenter les intérêts du public. Dans certains cas, la position prise par la Commission peut être la même que celle du plaignant; dans d’autres cas, la Commission peut prendre une position s’opposant à celle du plaignant – il semble qu’il en soit probablement ainsi en l’espèce. En outre, comme elle l’affirme dans la présente demande de contrôle judiciaire, la Commission peut fort bien décider que sa participation à l’audience tenue par le Tribunal ne servirait à rien sur le plan de l’intérêt public, et par conséquent il se peut qu’elle ne comparaisse pas en tant que partie. Même si la Commission se désistait elle‑même en tant que partie à la présente instance, l’AFPC pourrait continuer, et elle a déclaré qu’elle continuerait, à aller de l’avant avec sa plainte. En outre, comme le soutiennent l’AFPC et la Commission, le fait de conclure que la Commission peut unilatéralement retirer la plainte porterait clairement atteinte au droit de l’AFPC de faire valoir ses propres intérêts à titre de partie devant le Tribunal. À mon avis, contrairement à la façon dont le président Lederman a caractérisé la chose dans la décision Kamani, la présente plainte a été déposée par l’AFPC et non par la Commission.

 

[68]           En résumé, je suis d’avis que la décision Kamani n’énonce pas correctement le droit en ce qui concerne le rôle et les obligations légales de la Commission lorsque le Tribunal est saisi d’une plainte. À coup sûr, je ne suis pas en désaccord avec le président Lederman lorsqu’il prie la Commission d’exercer avec diligence et d’une façon exhaustive sa fonction d’examen préalable. De fait, c’est ce qu’exige l’obligation qui incombe à la Commission sur le plan de l’équité procédurale : voir Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 2 C.F. 574 (1re inst.), conf. par (1996), 20 N.R. 383 (C.A.F.). Toutefois, le mécanisme approprié pour remédier à une décision censément erronée découlant de la fonction d’examen préalable de la Commission consiste à procéder à un contrôle judiciaire de cette décision; il ne s’agit pas de permettre à la Commission de revenir sur sa décision de renvoyer une plainte après que le Tribunal a été saisi de l’affaire ou d’obliger la Commission à revenir sur sa décision. La décision que la Commission a prise conformément au paragraphe 44(3), comme il en a ci‑dessus été fait mention, est une décision définitive pour ce qui est du renvoi, et ce, même si (et je crois que c’est ce à quoi songeait le président Lederman) la Commission doit continuellement évaluer sa position à titre de partie aux procédures engagées devant le Tribunal, et même si cela peut vouloir dire que la Commission adoptera une position différente de celle qu’elle prenait au moment du renvoi.

 

[69]           La SMCC cite également la décision Grover, précitée, de la Cour fédérale à l’appui de la thèse selon laquelle [Traduction] « la Commission a parfaitement le droit de changer d’idée et d’examiner à nouveau la plainte ». Je ne puis absolument pas voir comment la décision Grover aide la SMCC lorsqu’elle prétend qu’en l’espèce, la Commission était obligée de retirer la plainte. Le juge Sean Harrington cite la décision Kamani dans ses motifs, mais le contexte de l’affaire Grover était fort différent de celui qui existait dans ce cas‑là. Les faits de l’affaire Grover sont plutôt compliqués; en effet, il s’agissait de quatre plaintes distinctes fondées sur la discrimination raciale. Initialement, après avoir mené enquête sur trois plaintes, la Commission a renvoyé une plainte au Tribunal et en a rejeté deux. Le plaignant, M. Grover, a demandé le contrôle judiciaire des décisions de la Commission de rejeter ses plaintes. La Cour a accueilli sa demande pour le motif qu’aucune entrevue n’avait été tenue avec un témoin crucial. Au moment où la Cour a rendu sa décision, M. Grover avait déposé sa quatrième plainte. Lors du réexamen, même si les témoins niaient les allégations de M. Grover et sans achever l’enquête sur la quatrième plainte, la Commission a décidé que les quatre plaintes de M. Grover devaient être renvoyées au Tribunal. L’employeur a ensuite demandé le contrôle judiciaire de la décision de la Commission, de sorte que le juge Harrington a été saisi de l’affaire. À mon avis, il est possible de faire une distinction entre la décision Grover d’une part et la décision Kamani et la présente espèce d’autre part en se fondant simplement sur le fait que le juge Harrington était saisi d’une demande de contrôle judiciaire de la décision prise par la Commission conformément au paragraphe 44(3) de la Loi.

 

[70]           Enfin, j’aimerais commenter le fait que la SMCC s’appuie sur la décision British Columbia (Police Complaint Commissioner) c. Vancouver (City) Police Department. Dans cette décision‑là, la Cour suprême de la Colombie‑Britannique a statué que le commissaire aux plaintes contre la police était autorisé à retirer unilatéralement un avis d’audience publique – relativement à une plainte fondée sur la confiance du public – même si les plaignants s’opposaient à ce retrait. Le juge Goepel a conclu qu’en vertu de la Police Act, le commissaire aux plaintes contre la police possédait le pouvoir discrétionnaire voulu pour décider si l’intérêt public exigeait la tenue d’une enquête publique et que ce pouvoir discrétionnaire était continu. Cela étant, le commissaire aux plaintes contre la police était autorisé à entamer unilatéralement une audience publique ainsi qu’à mettre unilatéralement fin à pareille audience si l’intérêt public l’exigeait. Je suis d’accord avec l’AFPC pour dire qu’il est possible de faire une distinction entre cette affaire‑là et la présente espèce, en particulier parce que le régime légal qui s’applique aux plaintes déposées contre la police est différent du régime législatif qui est ici en cause dans la présente demande de contrôle judiciaire. En vertu de la Police Act, le commissaire aux plaintes contre la police est obligé de tenir en tout temps compte de l’intérêt public en décidant si une enquête est justifiée ou si elle continue à l’être. Par contre, aucune disposition de la Loi n’exige que la Commission prenne des décisions fondées sur l’intérêt public sauf, comme le prescrit l’article 51, à l’égard des observations qu’elle présente à l’audience tenue par le Tribunal. En outre, une audience publique tenue selon la procédure des plaintes déposées contre la police en Colombie‑Britannique n’est pas un concours entre un agent de police et un plaignant, même si elle comporte certains éléments de la procédure accusatoire. En outre, dans une telle procédure, le plaignant ne fait pas face à une décision portant sur ses droits légaux ou sur ses obligations légales. Dans une plainte en matière de droits de la personne fondée sur la Loi, il y a clairement des parties qui s’opposent les unes aux autres, et les droits du plaignant sont en cause. Enfin, comme le juge Goepel l’a fait remarquer, c’est l’avocat du commissaire aux plaintes déposées contre la police, et non le plaignant, qui est chargé de présenter la cause à l’arbitre; essentiellement, l’avocat de la commission a presque un rôle de poursuivant. Comme il en a ci‑dessus été fait mention, dans les procédures engagées devant le Tribunal en vertu de la Loi, le plaignant maintient un statut indépendant de celui de la Commission. Compte tenu des différences susmentionnées, je ne crois pas que le pouvoir du commissaire aux plaintes déposées contre la police en Colombie‑Britannique soit analogue à celui que possède la Commission en vertu de la Loi.

 

[71]           Bref, je suis d’accord avec l’AFPC et la Commission pour dire qu’en vertu de la Loi, la Commission n’est pas légalement autorisée à retirer unilatéralement une plainte dont le Tribunal est saisi, et qu’elle n’a pas non plus l’obligation de le faire. Étant donné qu’il n’existe aucune disposition législative enjoignant à la Commission de prendre les mesures demandées par la SMCC, je suis d’avis que la Cour ne peut pas accorder la réparation sollicitée par la SMCC dans la présente demande.

 

3.         La Commission a‑t‑elle commis une erreur en ne retirant pas la plainte de l’AFPC compte tenu des circonstances de l’espèce?

[72]           La conclusion que j’ai tirée est déterminante, mais j’examinerai néanmoins cette dernière question. Comme il en a ci‑dessus été fait mention, ce qui sous‑tend toute la demande de contrôle judiciaire de la SMCC, c’est l’assertion selon laquelle la Commission a retiré le rapport Haignière. À mon avis, cette assertion ne correspond pas aux faits.

 

[73]           J’ai examiné le dossier mis à la disposition de la Cour et je conclus que la SMCC a décrit d’une façon erronée le motif sous‑tendant la décision de la Commission de ne pas citer Mme Haignière comme témoin à l’audience tenue par le Tribunal. Dans son exposé des faits et du droit, la SMCC cite un extrait de la transcription de la conférence téléphonique du 11 mai 2005 au cours de laquelle l’avocat de la Commission, Me O’Rourke, aurait dit : [Traduction] « [...] pour des raisons sur lesquelles je ne puis réellement m’arrêter maintenant la Commission ne citera pas Lois Haignière. Il y a des problèmes de disponibilité [...]. » Dans son exposé, la SMCC dit ensuite qu’il n’y avait pas de problème de disponibilité et que [Traduction] « Mme Haignière était disponible et pouvait être citée ».

 

[74]           Selon la façon dont je comprends la situation, la question de la disponibilité pour la Commission ne consistait pas à savoir si Mme Haignière avait le temps de comparaître à l’audience tenue par le Tribunal. Il s’agissait plutôt de savoir si Mme Haignière était disponible – compte tenu de son horaire et des frais pour la Commission – pour examiner la quantité énorme de documents additionnels communiqués par les parties en vertu des règles du Tribunal, et pour réviser son rapport en conséquence et au besoin sa conclusion. Il ressort du dossier que la Commission n’a pas réussi à retenir les services de Mme Haignière pour une tâche aussi importante. Comme Me O’Rourke l’a dit pendant la conférence téléphonique, la Commission demandait une prorogation de huit semaines afin de faire appel à un autre expert. Les commentaires de Me O’Rourke sont plutôt vagues, mais je déduis qu’il donnait à entendre que la Commission devait trouver un autre expert afin d’examiner les documents additionnels et de rédiger un rapport fondé sur la preuve documentaire dont disposait alors le Tribunal. C’est en fait ce qui s’est produit.

 

[75]           La raison pour laquelle la Commission a décidé de ne pas citer Mme Haignière comme témoin devant le Tribunal est clairement énoncée dans le mémoire de la Commission, qui a été soumis au Tribunal le 20 juillet 2005. Dans le passage que la SMCC a cité dans la présente demande de contrôle judiciaire, l’avocat de la Commission a déclaré ce qui suit :

[Traduction] [...] À la suite de la communication documentaire complète effectuée par les parties conformément aux règles du Tribunal, la Commission n’a pas pu retenir les services de Mme Haignière afin de soumettre un rapport d’expert plus détaillé aux fins de la préparation de l’audience. Par conséquent, Mme Haignière ne sera pas citée comme témoin pour le compte de la Commission. [...]

 

[76]           Il est clair à mes yeux que la Commission a été mise dans une situation où elle devait faire appel à un autre expert parce que la SMCC avait communiqué – comme l’a dit l’avocat de la SMCC au cours de la conférence téléphonique du 11 mai 2005 – [Traduction] « des milliers de pages de documents ». Comme il en a ci‑dessus été fait mention, l’AFPC a également conclu qu’il était nécessaire, ou prudent, de faire appel à son propre expert afin de préparer un rapport fondé sur tous les éléments dont disposait le Tribunal.

 

[77]           Je ne puis constater aucune mauvaise intention de la part de la Commission lorsqu’elle a décidé de ne pas citer Mme Haignière comme témoin. De fait, le témoignage de Mme Haignière n’est peut‑être même pas pertinent, étant donné que des renseignements additionnels ont été communiqués à la suite de la présentation de son rapport, et qu’ils pouvaient avoir une incidence sur l’avis qu’elle avait exprimé au sujet du bien‑fondé de la plainte. Quoi qu’il en soit, il n’y a rien dans le dossier qui indique que la Commission ait retiré le rapport de Mme Haignière. En outre, aucun élément de preuve ne donne à entendre que la Commission ait conclu que le rapport Haignière n’était pas digne de foi ou que les conclusions de Mme Haignière étaient erronées, compte tenu des éléments dont elle disposait – c’est‑à‑dire que rien ne montre que la Commission cessait de se fonder sur le rapport Haignière en décidant de renvoyer la plainte de l’AFPC devant le Tribunal. En l’absence d’une preuve contraire, je conclus que le rapport Haignière forme encore le fondement de la décision de la Commission de demander la constitution d’un tribunal et fait encore partie du dossier de la preuve mis à la disposition du Tribunal.

 

[78]           Comme dernier commentaire, j’aimerais faire remarquer que la SMCC n’a jamais – même pas dans la présente demande de contrôle judiciaire – contesté la validité du rapport Haignière. Comme la SMCC le soutient, la Commission a essentiellement incorporé le rapport Haignière dans sa conclusion, selon laquelle compte tenu des circonstances, il était justifié pour le Tribunal de procéder à un examen plus poussé de la plainte. Si la SMCC avait été d’avis que le rapport Haignière comportait des lacunes, de sorte que la décision de la Commission de renvoyer la plainte de l’AFPC devant le Tribunal était viciée, il lui était certes loisible de demander à la Cour de procéder à un contrôle judiciaire de cette décision. Toutefois, la SMCC n’a pas présenté une telle demande. À mon avis, la SMCC demande maintenant en fait à la Cour de réexaminer la décision que la Commission a prise le 9 janvier 2004, de renvoyer la plainte de l’AFPC compte tenu de [Traduction] « nouveaux éléments de preuve » – c’est‑à‑dire d’éléments de preuve dont la Commission ne disposait pas lorsqu’elle a décidé de renvoyer la plainte.

 

CONCLUSION

 

[79]           Pour les motifs susmentionnés, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée, les dépens étant adjugés à l’AFPC et à la Commission.

 

 

ORDONNANCE

 

 

 

LA COUR ORDONNE :

 

 

1.         La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

 

2.         Les dépens sont adjugés à la défenderesse et à l’intervenante.

 

 

 

  « James Russell »

 


Juge

Traduction certifiée conforme

Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B.

 


ANNEXE « A »

 

 

 

LOI CANADIENNE SUR LES

DROITS DE LA PERSONNE

L.R. (1985), ch. H-6

 

OBJET

2. La présente loi a pour objet de compléter la législation canadienne en donnant effet, dans le champ de compétence du Parlement du Canada, au principe suivant : le droit de tous les individus, dans la mesure compatible avec leurs devoirs et obligations au sein de la société, à l’égalité des chances d’épanouissement et à la prise de mesures visant à la satisfaction de leurs besoins, indépendamment des considérations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, la déficience ou l’état de personne graciée.

 

 

 

MOTIFS DE DISTINCTIONS ILLICITE

3. (1) Pour l’application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, l’état de personne graciée ou la déficience.

(2) Une distinction fondée sur la grossesse ou l’accouchement est réputée être fondée sur le sexe.

 

 

ACTES DISCRIMINATOIRES

 

Lignes de conduites discriminatoires

10. Constitue un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif de distinction illicite et s'il est susceptible d'annihiler les chances d'emploi ou d'avancement d'un individu ou d'une catégorie d'individus, le fait, pour l'employeur, l'association patronale ou l'organisation syndicale :

a) de fixer ou d'appliquer des lignes de conduite;

b) de conclure des ententes touchant le recrutement, les mises en rapport, l'engagement, les promotions, la formation, l'apprentissage, les mutations ou tout autre aspect d'un emploi présent ou éventuel.

 

 

 

Disparité salariale discriminatoire

11. (1) Constitue un acte discriminatoire le fait pour l’employeur d’instaurer ou de pratiquer la disparité salariale entre les hommes et les femmes qui exécutent, dans le même établissement, des fonctions équivalentes.

(2) Le critère permettant d’établir l’équivalence des fonctions exécutées par des salariés dans le même établissement est le dosage de qualifications, d’efforts et de responsabilités nécessaire pour leur exécution, compte tenu des conditions de travail.

(3) Les établissements distincts qu’un employeur aménage ou maintient dans le but principal de justifier une disparité salariale entre hommes et femmes sont réputés, pour l’application du présent article, ne constituer qu’un seul et même établissement.

(4) Ne constitue pas un acte discriminatoire au sens du paragraphe (1) la disparité salariale entre hommes et femmes fondée sur un facteur reconnu comme raisonnable par une ordonnance de la Commission canadienne des droits de la personne en vertu du paragraphe 27(2).

 

(5) Des considérations fondées sur le sexe ne sauraient motiver la disparité salariale.

(6) Il est interdit à l’employeur de procéder à des diminutions salariales pour mettre fin aux actes discriminatoires visés au présent article.

(7) Pour l’application du présent article, « salaire » s’entend de toute forme de rémunération payable à un individu en contrepartie de son travail et, notamment :

a) des traitements, commissions, indemnités de vacances ou de licenciement et des primes;

b) de la juste valeur des prestations en repas, loyers, logement et hébergement;

c) des rétributions en nature;

d) des cotisations de l’employeur aux caisses ou régimes de pension, aux régimes d’assurance contre l’invalidité prolongée et aux régimes d’assurance-maladie de toute nature;

e) des autres avantages reçus directement ou indirectement de l’employeur.

 

 

LA COMMISSION

 

Plaintes

40. (1) Sous réserve des paragraphes (5) et (7), un individu ou un groupe d’individus ayant des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis un acte discriminatoire peut déposer une plainte devant la Commission en la forme acceptable pour cette dernière.

(2) La Commission peut assujettir la recevabilité d’une plainte au consentement préalable de l’individu présenté comme la victime de l’acte discriminatoire.

 

 

(3) La Commission peut prendre l’initiative de la plainte dans les cas où elle a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis un acte discriminatoire.

 

(3.1) La Commission ne peut prendre l’initiative d’une plainte qui serait fondée sur des renseignements qu’elle aurait obtenus dans le cadre de l’application de la Loi sur l’équité en matière d’emploi.

(4) En cas de dépôt, conjoint ou distinct, par plusieurs individus ou groupes de plaintes dénonçant la perpétration par une personne donnée d’actes discriminatoires ou d’une série d’actes discriminatoires de même nature, la Commission peut, pour l’application de la présente partie, joindre celles qui, à son avis, soulèvent pour l’essentiel les mêmes questions de fait et de droit et demander au président du Tribunal d’ordonner, conformément à l’article 49, une instruction commune.

[...]

 

Irrecevabilité

41. (1) Sous réserve de l’article 40, la Commission statue sur toute plainte dont elle est saisie à moins qu’elle estime celle-ci irrecevable pour un des motifs suivants :

a) la victime présumée de l’acte discriminatoire devrait épuiser d’abord les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

b) la plainte pourrait avantageusement être instruite, dans un premier temps ou à toutes les étapes, selon des procédures prévues par une autre loi fédérale;

 

c) la plainte n’est pas de sa compétence;

 

d) la plainte est frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi;

e) la plainte a été déposée après l’expiration d’un délai d’un an après le dernier des faits sur lesquels elle est fondée, ou de tout délai supérieur que la Commission estime indiqué dans les circonstances.

(2) La Commission peut refuser d’examiner une plainte de discrimination fondée sur l’alinéa 10a) et dirigée contre un employeur si elle estime que l’objet de la plainte est traité de façon adéquate dans le plan d’équité en matière d’emploi que l’employeur prépare en conformité avec l’article 10 de la Loi sur l’équité en matière d’emploi.

(3) Au présent article, « employeur » désigne toute personne ou organisation chargée de l’exécution des obligations de l’employeur prévues par la Loi sur l’équité en matière d’emploi.

 

Avis

42. (1) Sous réserve du paragraphe (2), la Commission motive par écrit sa décision auprès du plaignant dans les cas où elle décide que la plainte est irrecevable.

 

(2) Avant de décider qu’une plainte est irrecevable pour le motif que les recours ou procédures mentionnés à l’alinéa 41a) n’ont pas été épuisés, la Commission s’assure que le défaut est exclusivement imputable au plaignant.

 

 

Enquête

43. (1) La Commission peut charger une personne, appelée, dans la présente loi, « l’enquêteur », d’enquêter sur une plainte.

(2) L’enquêteur doit respecter la procédure d’enquête prévue aux règlements pris en vertu du paragraphe (4).

[...]

 

 

Rapport de l’enquêteur

44. (1) L’enquêteur présente son rapport à la Commission le plus tôt possible après la fin de l’enquête.

 

(2) La Commission renvoie le plaignant à l’autorité compétente dans les cas où, sur réception du rapport, elle est convaincue, selon le cas :

a) que le plaignant devrait épuiser les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

b) que la plainte pourrait avantageusement être instruite, dans un premier temps ou à toutes les étapes, selon des procédures prévues par une autre loi fédérale.

 

 

(3) Sur réception du rapport d’enquête prévu au paragraphe (1), la Commission :

a) peut demander au président du Tribunal de désigner, en application de l’article 49, un membre pour instruire la plainte visée par le rapport, si elle est convaincue :

(i) d’une part, que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci est justifié,

(ii) d’autre part, qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la plainte en application du paragraphe (2) ni de la rejeter aux termes des alinéas 41c) à e);

 

b) rejette la plainte, si elle est convaincue :

 

(i) soit que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci n’est pas justifié,

 

(ii) soit que la plainte doit être rejetée pour l’un des motifs énoncés aux alinéas 41c) à e).

 

(4) Après réception du rapport, la Commission :

 

a) informe par écrit les parties à la plainte de la décision qu’elle a prise en vertu des paragraphes (2) ou (3);

 

b) peut informer toute autre personne, de la manière qu’elle juge indiquée, de la décision qu’elle a prise en vertu des paragraphes (2) ou (3).

 

Nomination d’un conciliateur

47. (1) Sous réserve du paragraphe (2), la Commission peut charger un conciliateur d’en arriver à un règlement de la plainte, soit dès le dépôt de celle-ci, soit ultérieurement dans l’un des cas suivants :

a) l’enquête ne mène pas à un règlement;

b) la plainte n’est pas renvoyée ni rejetée en vertu des paragraphes 44(2) ou (3) ou des alinéas 45(2)a) ou 46(2)a);

c) la plainte n’est pas réglée après réception par les parties de l’avis prévu au paragraphe 44(4).

 

 

 

 

(2) Pour une plainte donnée, les fonctions d’enquêteur et de conciliateur sont incompatibles.

 

 

(3) Les renseignements recueillis par le conciliateur sont confidentiels et ne peuvent être divulgués sans le consentement de la personne qui les a fournis.

 

 

LA TRIBUNAL

 

Instructions des plaintes

49. (1) La Commission peut, à toute étape postérieure au dépôt de la plainte, demander au président du Tribunal de désigner un membre pour instruire la plainte, si elle est convaincue, compte tenu des circonstances relatives à celle-ci, que l’instruction est justifiée.

 

(2) Sur réception de la demande, le président désigne un membre pour instruire la plainte. Il peut, s’il estime que la difficulté de l’affaire le justifie, désigner trois membres, auxquels dès lors les articles 50 à 58 s’appliquent.

[...]

 

 

 

Conduite des instructions

50. (1) Le membre instructeur, après avis conforme à la Commission, aux parties et, à son appréciation, à tout intéressé, instruit la plainte pour laquelle il a été désigné; il donne à ceux-ci la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter, en personne ou par l’intermédiaire d’un avocat, des éléments de preuve ainsi que leurs observations.

 

(2) Il tranche les questions de droit et les questions de fait dans les affaires dont il est saisi en vertu de la présente partie.

 

(3) Pour la tenue de ses audiences, le membre instructeur a le pouvoir :

a) d’assigner et de contraindre les témoins à comparaître, à déposer verbalement ou par écrit sous la foi du serment et à produire les pièces qu’il juge indispensables à l’examen complet de la plainte, au même titre qu’une cour supérieure d’archives;

 

b) de faire prêter serment;

c) de recevoir, sous réserve des paragraphes (4) et (5), des éléments de preuve ou des renseignements par déclaration verbale ou écrite sous serment ou par tout autre moyen qu’il estime indiqué, indépendamment de leur admissibilité devant un tribunal judiciaire;

d) de modifier les délais prévus par les règles de pratique;

 

e) de trancher toute question de procédure ou de preuve.

 

(4) Il ne peut admettre en preuve les éléments qui, dans le droit de la preuve, sont confidentiels devant les tribunaux judiciaires.

[...]

 

Obligation de la Commission

51. En comparaissant devant le membre instructeur et en présentant ses éléments de preuve et ses observations, la Commission adopte l’attitude la plus proche, à son avis, de l’intérêt public, compte tenu de la nature de la plainte.

 

Décisions de la Tribunal

53. (1) À l’issue de l’instruction, le membre instructeur rejette la plainte qu’il juge non fondée.

 

 

(2) À l’issue de l’instruction, le membre instructeur qui juge la plainte fondée, peut, sous réserve de l’article 54, ordonner, selon les circonstances, à la personne trouvée coupable d’un acte discriminatoire :

 

 

 

a) de mettre fin à l’acte et de prendre, en consultation avec la Commission relativement à leurs objectifs généraux, des mesures de redressement ou des mesures destinées à prévenir des actes semblables, notamment :

 

(i) d’adopter un programme, un plan ou un arrangement visés au paragraphe 16(1),

(ii) de présenter une demande d’approbation et de mettre en oeuvre un programme prévus à l’article 17;

 

b) d’accorder à la victime, dès que les circonstances le permettent, les droits, chances ou avantages dont l’acte l’a privée;

 

c) d’indemniser la victime de la totalité, ou de la fraction des pertes de salaire et des dépenses entraînées par l’acte;

 

 

d) d’indemniser la victime de la totalité, ou de la fraction des frais supplémentaires occasionnés par le recours à d’autres biens, services, installations ou moyens d’hébergement, et des dépenses entraînées par l’acte;

e) d’indemniser jusqu’à concurrence de 20 000 $ la victime qui a souffert un préjudice moral.

[...]

CANADIAN HUMAN RIGHT ACT

R.S. 1985, c. H-6

 

 

PURPOSE

2. The purpose of this Act is to extend the laws in Canada to give effect, within the purview of matters coming within the legislative authority of Parliament, to the principle that all individuals should have an opportunity equal with other individuals to make for themselves the lives that they are able and wish to have and to have their needs accommodated, consistent with their duties and obligations as members of society, without being hindered in or prevented from doing so by discriminatory practices based on race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability or conviction for an offence for which a pardon has been granted.

 

PROHIBITED GROUNDS

3. (1) For all purposes of this Act, the prohibited grounds of discrimination are race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability and conviction for which a pardon has been granted.

 

(2) Where the ground of discrimination is pregnancy or child-birth, the discrimination shall be deemed to be on the ground of sex.

 

DICRIMINATORY PRACTICES

 

Discriminatory Policy and Practices

10. It is a discriminatory practice for an employer, employee organization or employer organization

 

 

 

(a) to establish or pursue a policy or practice, or

(b) to enter into an agreement affecting recruitment, referral, hiring, promotion, training, apprenticeship, transfer or any other matter relating to employment or prospective employment, that deprives or tends to deprive an individual or class of individuals of any employment opportunities on a prohibited ground of discrimination.

 

Equal Wages

11. (1) It is a discriminatory practice for an employer to establish or maintain differences in wages between male and female employees employed in the same establishment who are performing work of equal value.

(2) In assessing the value of work performed by employees employed in the same establishment, the criterion to be applied is the composite of the skill, effort and responsibility required in the performance of the work and the conditions under which the work is performed.

(3) Separate establishments established or maintained by an employer solely or principally for the purpose of establishing or maintaining differences in wages between male and female employees shall be deemed for the purposes of this section to be the same establishment.

(4) Notwithstanding subsection (1), it is not a discriminatory practice to pay to male and female employees different wages if the difference is based on a factor prescribed by guidelines, issued by the Canadian Human Rights Commission pursuant to subsection 27(2), to be a reasonable factor that justifies the difference.

(5) For greater certainty, sex does not constitute a reasonable factor justifying a difference in wages.

(6) An employer shall not reduce wages in order to eliminate a discriminatory practice described in this section.

 

(7) For the purposes of this section, “wages” means any form of remuneration payable for work performed by an individual and includes

(a) salaries, commissions, vacation pay, dismissal wages and bonuses;

(b) reasonable value for board, rent, housing and lodging;

 

(c) payments in kind;

(d) employer contributions to pension funds or plans, long-term disability plans and all forms of health insurance plans; and

 

(e) any other advantage received directly or indirectly from the individual’s employer.

 

 

THE COMMISSION

 

Complaints

40. (1) Subject to subsections (5) and (7), any individual or group of individuals having reasonable grounds for believing that a person is engaging or has engaged in a discriminatory practice may file with the Commission a complaint in a form acceptable to the Commission.

(2) If a complaint is made by someone other than the individual who is alleged to be the victim of the discriminatory practice to which the complaint relates, the Commission may refuse to deal with the complaint unless the alleged victim consents thereto.

(3) Where the Commission has reasonable grounds for believing that a person is engaging or has engaged in a discriminatory practice, the Commission may initiate a complaint.

(3.1) No complaint may be initiated under subsection (3) as a result of information obtained by the Commission in the course of the administration of the Employment Equity Act.

 

(4) If complaints are filed jointly or separately by more than one individual or group alleging that a particular person is engaging or has engaged in a discriminatory practice or a series of similar discriminatory practices and the Commission is satisfied that the complaints involve substantially the same issues of fact and law, it may deal with the complaints together under this Part and may request the Chairperson of the Tribunal to institute a single inquiry into the complaints under section 49.

...

 

Commission to Deal with the Complaint

41. (1) Subject to section 40, the Commission shall deal with any complaint filed with it unless in respect of that complaint it appears to the Commission that

(a) the alleged victim of the discriminatory practice to which the complaint relates ought to exhaust grievance or review procedures otherwise reasonably available;

 

(b) the complaint is one that could more appropriately be dealt with, initially or completely, according to a procedure provided for under an Act of Parliament other than this Act;

 

(c) the complaint is beyond the jurisdiction of the Commission;

(d) the complaint is trivial, frivolous, vexatious or made in bad faith; or

(e) the complaint is based on acts or omissions the last of which occurred more than one year, or such longer period of time as the Commission considers appropriate in the circumstances, before receipt of the complaint.

(2) The Commission may decline to deal with a complaint referred to in paragraph 10(a) in respect of an employer where it is of the opinion that the matter has been adequately dealt with in the employer’s employment equity plan prepared pursuant to section 10 of the Employment Equity Act.

(3) In this section, “employer” means a person who or organization that discharges the obligations of an employer under the Employment Equity Act.

 

 

Notice

42. (1) Subject to subsection (2), when the Commission decides not to deal with a complaint, it shall send a written notice of its decision to the complainant setting out the reason for its decision.

(2) Before deciding that a complaint will not be dealt with because a procedure referred to in paragraph 41(a) has not been exhausted, the Commission shall satisfy itself that the failure to exhaust the procedure was attributable to the complainant and not to another.

 

Investigation

43. (1) The Commission may designate a person, in this Part referred to as an "investigator", to investigate a complaint.

(2) An investigator shall investigate a complaint in a manner authorized by regulations made pursuant to subsection (4).

...

 

Investigator’s report

44. (1) An investigator shall, as soon as possible after the conclusion of an investigation, submit to the Commission a report of the findings of the investigation.

(2) If, on receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission is satisfied

 

(a) that the complainant ought to exhaust grievance or review procedures otherwise reasonably available, or

 

(b) that the complaint could more appropriately be dealt with, initially or completely, by means of a procedure provided for under an Act of Parliament other than this Act,

it shall refer the complainant to the appropriate authority.

 

(3) On receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

(a) may request the Chairperson of the Tribunal to institute an inquiry under section 49 into the complaint to which the report relates if the Commission is satisfied

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is warranted, and

(ii) that the complaint to which the report relates should not be referred pursuant to subsection (2) or dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e); or

 

(b) shall dismiss the complaint to which the report relates if it is satisfied

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is not warranted, or

(ii) that the complaint should be dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e).

 

(4) After receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

(a) shall notify in writing the complainant and the person against whom the complaint was made of its action under subsection (2) or (3); and

(b) may, in such manner as it sees fit, notify any other person whom it considers necessary to notify of its action under subsection (2) or (3).

 

Appointment of a Conciliator

47. (1) Subject to subsection (2), the Commission may, on the filing of a complaint, or if the complaint has not been

 

 

(a) settled in the course of investigation by an investigator,

(b) referred or dismissed under subsection 44(2) or (3) or paragraph 45(2)(a) or 46(2)(a), or

(c) settled after receipt by the parties of the notice referred to in subsection 44(4),

appoint a person, in this Part referred to as a "conciliator", for the purpose of attempting to bring about a settlement of the complaint.

 

(2) A person is not eligible to act as a conciliator in respect of a complaint if that person has already acted as an investigator in respect of that complaint.

 

(3) Any information received by a conciliator in the course of attempting to reach a settlement of a complaint is confidential and may not be disclosed except with the consent of the person who gave the information.

 

THE TRIBUNAL

 

Request for an Inquiry

49. (1) At any stage after the filing of a complaint, the Commission may request the Chairperson of the Tribunal to institute an inquiry into the complaint if the Commission is satisfied that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry is warranted.

 

(2) On receipt of a request, the Chairperson shall institute an inquiry by assigning a member of the Tribunal to inquire into the complaint, but the Chairperson may assign a panel of three members if he or she considers that the complexity of the complaint requires the inquiry to be conducted by three members.

...

 

Conduct of Inquiries

50. (1) After due notice to the Commission, the complainant, the person against whom the complaint was made and, at the discretion of the member or panel conducting the inquiry, any other interested party, the member or panel shall inquire into the complaint and shall give all parties to whom notice has been given a full and ample opportunity, in person or through counsel, to appear at the inquiry, present evidence and make representations.

(2) In the course of hearing and determining any matter under inquiry, the member or panel may decide all questions of law or fact necessary to determining the matter.

(3) In relation to a hearing of the inquiry, the member or panel may

(a) in the same manner and to the same extent as a superior court of record, summon and enforce the attendance of witnesses and compel them to give oral or written evidence on oath and to produce any documents and things that the member or panel considers necessary for the full hearing and consideration of the complaint;

(b) administer oaths;

(c) subject to subsections (4) and (5), receive and accept any evidence and other information, whether on oath or by affidavit or otherwise, that the member or panel sees fit, whether or not that evidence or information is or would be admissible in a court of law;

(d) lengthen or shorten any time limit established by the rules of procedure; and

(e) decide any procedural or evidentiary question arising during the hearing.

(4) The member or panel may not admit or accept as evidence anything that would be inadmissible in a court by reason of any privilege under the law of evidence.

...

 

Duty of the Commission

51. In appearing at a hearing, presenting evidence and making representations, the Commission shall adopt such position as, in its opinion, is in the public interest having regard to the nature of the complaint.

 

Determinations by the Tribunal

53. (1) At the conclusion of an inquiry, the member or panel conducting the inquiry shall dismiss the complaint if the member or panel finds that the complaint is not substantiated.

(2) If at the conclusion of the inquiry the member or panel finds that the complaint is substantiated, the member or panel may, subject to section 54, make an order against the person found to be engaging or to have engaged in the discriminatory practice and include in the order any of the following terms that the member or panel considers appropriate:

(a) that the person cease the discriminatory practice and take measures, in consultation with the Commission on the general purposes of the measures, to redress the practice or to prevent the same or a similar practice from occurring in future, including

(i) the adoption of a special program, plan or arrangement referred to in subsection 16(1), or

(ii) making an application for approval and implementing a plan under section 17;

 

(b) that the person make available to the victim of the discriminatory practice, on the first reasonable occasion, the rights, opportunities or privileges that are being or were denied the victim as a result of the practice;

(c) that the person compensate the victim for any or all of the wages that the victim was deprived of and for any expenses incurred by the victim as a result of the discriminatory practice;

(d) that the person compensate the victim for any or all additional costs of obtaining alternative goods, services, facilities or accommodation and for any expenses incurred by the victim as a result of the discriminatory practice; and

(e) that the person compensate the victim, by an amount not exceeding twenty thousand dollars, for any pain and suffering that the victim experienced as a result of the discriminatory practice.

...

 

 

 

 

LOI SUR LES COURS FÉDÉRALES

L.R.C. (1985), ch. F-7

 

2. « office fédéral » Conseil, bureau, commission ou autre organisme, ou personne ou groupe de personnes, ayant, exerçant ou censé exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale ou par une ordonnance prise en vertu d'une prérogative royale, à l'exclusion de la Cour canadienne de l'impôt et ses juges, d'un organisme constitué sous le régime d'une loi provinciale ou d'une personne ou d'un groupe de personnes nommées aux termes d'une loi provinciale ou de l'article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867.

 

18. (1) Sous réserve de l'article 28, la Cour fédérale a compétence exclusive, en première instance, pour :

a) décerner une injonction, un bref de certiorari, de mandamus, de prohibition ou de quo warranto, ou pour rendre un jugement déclaratoire contre tout office fédéral;

 

b) connaître de toute demande de réparation de la nature visée par l’alinéa a), et notamment de toute procédure engagée contre le procureur général du Canada afin d’obtenir réparation de la part d’un office fédéral.

[...]

 

(3) Les recours prévus aux paragraphes (1) ou (2) sont exercés par présentation d’une demande de contrôle judiciaire.

 

18.1 (1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l’objet de la demande.

(2) Les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l'office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou à la partie concernée, ou dans le délai supplémentaire qu'un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l'expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.

 

 

 

(3) Sur présentation d'une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale peut :

a) ordonner à l’office fédéral en cause d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis ou refusé d’accomplir ou dont il a retardé l’exécution de manière déraisonnable;

b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu’elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l’office fédéral.

(4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises si la Cour fédérale est convaincue que l'office fédéral, selon le cas :

a) a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l’exercer;

b) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale ou toute autre procédure qu’il était légalement tenu de respecter;

c) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que celle-ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

e) a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages;

f) a agi de toute autre façon contraire à la loi.

 

(5) La Cour fédérale peut rejeter toute demande de contrôle judiciaire fondée uniquement sur un vice de forme si elle estime qu'en l'occurrence le vice n'entraîne aucun dommage important ni déni de justice et, le cas échéant, valider la décision ou l'ordonnance entachée du vice et donner effet à celle-ci selon les modalités de temps et autres qu'elle estime indiquées.

 

 

FEDERAL COURTS ACT

R.S.C. 1985, c. F-7

 

2. “federal board, commission or other tribunal” means any body, person or persons having, exercising or purporting to exercise jurisdiction or powers conferred by or under an Act of Parliament or by or under an order made pursuant to a prerogative of the Crown, other than the Tax Court of Canada or any of its judges, any such body constituted or established by or under a law of a province or any such person or persons appointed under or in accordance with a law of a province or under section 96 of the Constitution Act, 1867

 

18. (1) Subject to section 28, the Federal Court has exclusive original jurisdiction

(a) to issue an injunction, writ of certiorari, writ of prohibition, writ of mandamus or writ of quo warranto, or grant declaratory relief, against any federal board, commission or other tribunal; and

( b) to hear and determine any application or other proceeding for relief in the nature of relief contemplated by paragraph ( a), including any proceeding brought against the Attorney General of Canada, to obtain relief against a federal board, commission or other tribunal.

...

(3) The remedies provided for in subsections (1) and (2) may be obtained only on an application for judicial review made under section 18.1.

 

18.1 (1) An application for judicial review may be made by the Attorney General of Canada or by anyone directly affected by the matter in respect of which relief is sought.

 

(2) An application for judicial review in respect of a decision or an order of a federal board, commission or other tribunal shall be made within 30 days after the time the decision or order was first communicated by the federal board, commission or other tribunal to the office of the Deputy Attorney General of Canada or to the party directly affected by it, or within any further time that a judge of the Federal Court may fix or allow before or after the end of those 30 days.

 

(3) On an application for judicial review, the Federal Court may

( a) order a federal board, commission or other tribunal to do any act or thing it has unlawfully failed or refused to do or has unreasonably delayed in doing; or

( b) declare invalid or unlawful, or quash, set aside or set aside and refer back for determination in accordance with such directions as it considers to be appropriate, prohibit or restrain, a decision, order, act or proceeding of a federal board, commission or other tribunal.

(4) The Federal Court may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

(a) acted without jurisdiction, acted beyond its jurisdiction or refused to exercise its jurisdiction;

(b) failed to observe a principle of natural justice, procedural fairness or other procedure that it was required by law to observe;

(c) erred in law in making a decision or an order, whether or not the error appears on the face of the record;

 

(d) based its decision or order on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it;

 

(e) acted, or failed to act, by reason of fraud or perjured evidence; or

(f) acted in any other way that was contrary to law.

 

(5) If the sole ground for relief established on an application for judicial review is a defect in form or a technical irregularity, the Federal Court may

(a) refuse the relief if it finds that no substantial wrong or miscarriage of justice has occurred; and

(b) in the case of a defect in form or a technical irregularity in a decision or an order, make an order validating the decision or order, to have effect from any time and on any terms that it considers appropriate.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T-1442-05

 

INTITULÉ :                                                   LA SOCIÉTÉ DU MUSÉE CANADIEN DES CIVILISATIONS

 

                                                                        et

 

                                                                        L’ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA (SECTION LOCALE 70396)

 

                                                                        et

 

                                                                        LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 30 MAI 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :              LE JUGE JAMES RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 6 JUIN 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Lawrence A. Elliot

Mandy E. Moore

 

POUR LA DEMANDERESSE

Andrew J. Raven

Alison M. Dewar

POUR LA DÉFENDERESSE,

L’ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA (SECTION LOCALE 70396)

 

Pam MacEachern

 

POUR L’INTERVENANTE,

LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

 


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Borden Ladner Gervais LLP

Ottawa (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Raven, Allen, Cameron, Ballantyne et Yasbeck LLP

Ottawa (Ontario)

 

 

 

POUR LA DÉFENDERESSE, L’ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA (SECTION LOCALE 70396)

 

Nelligan O’Brien Payne LLP

Ottawa (Ontario)

POUR L’INTERVENANTE,

LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

 

 

 

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