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Date : 20201030


Dossier : IMM-2947-19

Référence : 2020 CF 1018

[traduction française]

Ottawa (Ontario), le 30 octobre 2020

En présence de monsieur le juge McHaffie

ENTRE :

ROSEMARY AGBONMHERE CALEB

OSELUOLE EMMANUELLA CALEB

ERONMHOSELE PRINCE MOSES CALEB

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Rosemary Caleb et deux de ses enfants ont demandé la résidence permanente au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire, après que leur demande d’asile eut été rejetée : voir Caleb c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 384. Dans la présente demande, ils contestent le rejet de leur demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Ils soutiennent que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a utilisé une approche inappropriée à l’égard de l’appréciation des difficultés auxquelles ils seraient exposés s’ils étaient renvoyés au Nigeria, et qu’il a omis d’apprécier convenablement l’intérêt supérieur des enfants (l’ISE).

[2]  Je conclus que la décision de l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire était raisonnable. L’appréciation des difficultés effectuée par l’agent était convenablement prospective et prenait en compte raisonnablement la situation personnelle de la famille Caleb. Je ne conclus pas que les renvois de l’agent au fait que la famille Caleb n’a pas été exposée à des activités criminelles ou à de la discrimination, quand ils sont interprétés à la lumière de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire de la famille Caleb, démontrent que celui‑ci a indûment imposé une obligation d’établir un risque personnalisé, ainsi que le prétend la famille Caleb. Je ne conclus pas non plus que l’agent a pondéré indûment le niveau de scolarité et l’expérience de travail de Mme Caleb en excluant d’autres éléments de preuve ou facteurs pertinents, comme le soutient la famille Caleb.

[3]  En ce qui concerne l’analyse de l’ISE, je ne suis pas convaincu que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a omis, de façon déraisonnable, d’apprécier l’intérêt supérieur des enfants ou a limité son analyse à des critères de difficultés particuliers. L’agent a plutôt pris en compte les facteurs relatifs à l’ISE présentés par la famille Caleb et les a pris en considération avec d’autres facteurs d’ordre humanitaire, mais a conclu que sa situation dans son ensemble ne justifiait pas la prise de mesures spéciales pour des motifs d’ordre humanitaire. Il était loisible à l’agent de tirer cette conclusion eu égard aux éléments de preuve, et les motifs de décision de l’agent montrent que celui-ci a effectué l’analyse voulue de façon raisonnable.

[4]  La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

II.  Questions en litige et norme de contrôle

[5]  La famille Caleb a présenté une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire au titre du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. La demande était fondée sur trois grands aspects de la situation de la famille : les difficultés auxquelles celle-ci serait exposée si elle devait retourner au Nigeria; l’intérêt supérieur des quatre enfants de la famille, dont deux sont des citoyens canadiens; et l’établissement de la famille au Canada. Dans la présente demande de contrôle judiciaire, la famille Caleb conteste le rejet de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire par l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire en se fondant sur la façon dont il a traité les deux premiers éléments et elle soulève les questions qui suivent :

  1. L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a-t-il commis une erreur dans l’approche adoptée pour l’analyse des difficultés en tant que facteur d’ordre humanitaire?

  2. L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a-t-il commis une erreur dans son appréciation de l’intérêt supérieur des enfants en tant que facteur d’ordre humanitaire?

[6]  Les parties conviennent que les décisions relatives aux demandes fondées sur des motifs d’ordre humanitaire sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable : Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 au para 44; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 16 et 17 et 23 à 25.

[7]  Une cour de révision qui effectue un contrôle selon la norme de la décision raisonnable entreprend son analyse en examinant les motifs donnés avec « une attention respectueuse » et en cherchant à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur : Vavilov au para 84. La Cour doit établir si la décision est raisonnable à la fois sur le plan du résultat et sur celui du processus, au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur elle : Vavilov aux para 87 et 99. Une décision raisonnable est une décision qui possède les caractéristiques de la justification, de la transparence et de l’intelligibilité pour l’individu qui en fait l’objet, reflétant « une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle » lorsqu’elle est lue dans son ensemble et qui tient compte du dossier dont disposait le décideur et des observations des parties : Vavilov aux para 81, 85, 91, 94 à 96, 99, 127 et 128.

III.  Analyse

A.  L’analyse des difficultés effectuée par l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire était raisonnable

[8]  Dans sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, la famille Caleb a prétendu qu’elle serait exposée à de graves difficultés si elle devait retourner au Nigeria. Elle a mis en lumière des conditions défavorables au Nigeria en ce qui concerne i) la situation économique, y compris la discrimination fondée sur le sexe dans les domaines de l’emploi et des professions; ii) la criminalité et la sécurité; et iii) les conflits militaires et l’instabilité. L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a pris en compte chacune de ces préoccupations dans ses motifs, en utilisant comme titres de rubrique les catégories de difficultés énoncées par la famille Caleb. Pour chaque rubrique, l’agent a pris en compte la preuve relative à la situation dans le pays ainsi que la situation personnelle de la famille et pondéré le facteur selon son appréciation de la preuve.

[9]  La famille Caleb présente deux grands arguments relativement à l’approche adoptée par l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire à l’égard de l’appréciation des difficultés. En premier lieu, elle fait valoir que l’agent l’a obligée à présenter des éléments de preuve directs indiquant qu’elle avait été victime de discrimination ou d’actes de violence par le passé, contrairement à la jurisprudence sur l’appréciation des motifs d’ordre humanitaire. En second lieu, elle soutient que l’agent a insisté indûment sur le niveau de scolarité de Mme Caleb et sur un emploi que celle-ci avait occupé pendant une courte période, et a utilisé ces éléments pour écarter ou rejeter le moindre risque de difficulté, problème qui entache aussi, d’après elle, l’analyse de l’ISE. J’estime qu’aucun de ces arguments ne saurait être retenu après une lecture objective des motifs de l’agent.

1)  L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire n’a pas exigé indûment des demandeurs qu’ils fassent état de difficultés personnelles

[10]  Comme le souligne la famille Caleb, la prise en compte des difficultés dans une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire diffère de l’appréciation de la crainte de persécution ou du risque auquel est exposé un demandeur d’asile aux termes des articles 96 et 97 de la LIPR, même si les faits se rapportant à la détermination du statut de réfugié peuvent aussi être pertinents dans une appréciation des motifs d’ordre humanitaire : Kanthasamy aux para 50 et 51; Miyir c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 73 aux para 18 à 21. L’appréciation des motifs d’ordre humanitaire doit prendre en compte tous les facteurs pertinents dans leur ensemble afin d’établir si la situation est de nature à inciter une personne raisonnable d’une société civilisée à soulager les malheurs d’une autre personne, dans la mesure où ses malheurs justifient la prise de mesures spéciales : Kanthasamy aux para 13 à 21, 25 et 28 à 31; LIPR, art. 25(1).

[11]  Dans l’arrêt Kanthasamy, la Cour suprême du Canada a souligné qu’un demandeur qui fait valoir des motifs d’ordre humanitaire n’a pas à démontrer qu’il a été personnellement touché ou ciblé par des conditions défavorables dans le pays : Kanthasamy aux para 52 à 56; Isesele c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 222 au para 16. De la même façon, et contrairement à une appréciation effectuée aux termes de l’article 97, les éléments de preuve montrant un risque auquel est exposée toute la population dans le pays d’origine peuvent quand même être pertinents dans une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire : Diabate c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 129 aux para 32 et 33; Miyir aux para 21, 29 et 30.

[12]  La famille Caleb soutient que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a commis l’erreur d’exiger qu’elle démontre que Mme Caleb avait personnellement souffert de discrimination afin que cet élément soit considéré comme un facteur s’inscrivant dans les conditions défavorables dans le pays militant en faveur de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. La famille Caleb invoque l’extrait qui suit des motifs de l’agent qui fait suite à une analyse des éléments de preuve relatifs aux conditions économiques défavorables et à la discrimination fondée sur le sexe dans l’emploi au Nigeria :

[traduction]

En ce qui concerne le profil particulier des demandeurs, je constate que la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire montre que la demanderesse principale a obtenu un diplôme de l’Université Ambrose Alli en administration des affaires. Ses antécédents de travail comprennent un emploi au consulat général du Nigeria au Cameroun d’août 2006 à juillet 2007. De juillet 2010 à mars 2016, elle a travaillé à son compte dans le domaine de la vente. Dans ses observations, la demanderesse principale écrit que ce travail consistait à vendre de menus objets à partir de son domicile. Pourtant, selon son niveau de scolarité et l’emploi qu’elle avait occupé au consulat général, j’estime qu’elle possède des titres de compétences solides susceptibles de l’aider à se trouver un emploi. Bien que son expérience antérieure dans le domaine de la vente consistait à vendre de menus objets personnels, je ne suis pas convaincu qu’elle a présenté suffisamment d’éléments de preuve quant aux facteurs qui l’ont amenée à se contenter de vendre de menus objets et quant à la question de savoir si des perspectives d’emploi dans d’autres domaines lui ont été refusées à cause de facteurs économiques ou discriminatoires.

Même si j’accepte l’inégalité entre les hommes et les femmes dans le marché du travail nigérian, en raison des diplômes particuliers que détient la demanderesse, j’accorde moins de poids à l’affirmation selon laquelle elle aurait de la difficulté à trouver un emploi et qu’elle devrait vivre dans la pauvreté. De plus, son époux à l’étranger a des compétences professionnelles recherchées en raison de ses connaissances dans le domaine des technologies de l’information.

[Non souligné dans l’original.]

[13]  La famille Caleb soutient que le passage souligné de l’extrait précédent montre que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a exigé la présentation d’éléments de preuve directs montrant que Mme Caleb avait été victime de discrimination économique par le passé et que l’agent a écarté les éléments de preuve quant à la situation dans le pays relatifs à la discrimination, par conséquent. Je ne suis pas d’accord, pour trois raisons.

[14]  En premier lieu, il ressort de ma lecture des motifs de l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire que ceux-ci se rapportaient essentiellement aux conséquences futures probables pour la famille Caleb des conditions économiques défavorables au Nigeria. En appréciant ces difficultés possibles, l’agent a pris en compte le niveau de scolarité et l’expérience de travail de Mme Caleb, lesquels, d’après lui, augmentaient ses chances de trouver un emploi dans l’avenir. Il a aussi tenu compte du fait que l’expérience de travail de Mme Caleb se limitait essentiellement à la vente de menus objets, malgré son diplôme en administration des affaires. Manifestement, si la situation économique ou la discrimination au Nigeria avaient auparavant empêché Mme Caleb de décrocher un emploi dans son domaine malgré son niveau de scolarité, il s’agirait d’éléments de preuve pertinents puisqu’ils auraient pu influer sur la conclusion de l’agent selon laquelle le niveau de scolarité et l’expérience de travail de Mme Caleb atténuaient certains des risques de difficultés ressortant des éléments de preuve relatifs à la situation dans le pays. L’agent a souligné, toutefois, qu’il n’y avait pas de preuve que c’était la raison pour laquelle Mme Caleb n’avait pas pu trouver un travail par le passé. À mon avis, l’agent n’« oblige » pas Mme Caleb à avoir subi de la discrimination par le passé. L’agent a plutôt tout simplement reconnu la pertinence potentielle de tels éléments de preuve et a souligné que ceux-ci n’étaient pas présents dans le cas de Mme Caleb. Comme l’a souligné la Cour, la preuve de ce qui est survenu dans le passé peut être un indicateur pertinent de ce que l’avenir nous réserve : Trach c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 747 au para 23. Tant qu’il ne s’agit pas d’une condition pour la prise de mesures spéciales pour des motifs d’ordre humanitaire, il n’est pas déraisonnable qu’un agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire prenne en compte les difficultés et la discrimination vécues par le passé ou souligne que de telles expériences ne font pas partie du profil du demandeur.

[15]  En deuxième lieu, l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire n’a pas rejeté les préoccupations quant aux difficultés économiques et à la discrimination fondée sur le sexe, ainsi que le soutient la famille Caleb. Au contraire, l’agent a affirmé qu’il [traduction] « accept[ait] les éléments de preuve objectifs présentés au nom des demandeurs se rapportant à la pauvreté, au taux de chômage élevé et à la discrimination fondée sur le sexe au Nigeria ». Dans l’extrait reproduit précédemment, il aussi conclu qu’il [traduction] « accept[ait] l’inégalité entre les hommes et les femmes dans le marché du travail nigérian », mais qu’il avait accordé « moins de poids à l’affirmation selon laquelle [Mme Caleb] aurait de la difficulté à trouver un emploi et qu’elle devrait vivre dans la pauvreté » en raison de son niveau de scolarité particulier [non souligné dans l’original]. J’estime que ce ne sont pas des conclusions déraisonnables. Il est loisible à un agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire d’apprécier les éléments de preuve relatifs à la situation dans le pays et de conclure que les préoccupations soulevées par un demandeur peuvent être exacerbées ou atténuées par des facteurs comme la scolarité. Cela est particulièrement vrai lorsque, comme en l’espèce, les éléments de preuve relatifs à la situation dans le pays soulignent expressément que le niveau de scolarité contribuait à la marginalisation des femmes dans le marché du travail.

[16]  Je conviens avec la famille Caleb qu’il aurait été déraisonnable que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire rejette toute préoccupation relative à des difficultés économiques ou à de la discrimination ou qu’il suppose que Mme Caleb était totalement à l’abri de telles préoccupations uniquement en raison de son diplôme ou de l’absence d’éléments de preuve montrant qu’elle avait déjà subi de la discrimination. Toutefois, ce n’est pas ce que l’agent a fait. L’agent a tout simplement fait savoir qu’il avait accordé [traduction] « moins de poids » aux préoccupations quant aux difficultés professionnelles futures, étant donné le niveau de scolarité de Mme Caleb. C’était une approche raisonnable relativement à la démarche de pondération discrétionnaire que doit effectuer l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire et à l’égard de laquelle la Cour doit faire preuve de déférence : Sivalingam c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1185 au para 7.

[17]  En troisième lieu, l’appréciation de la situation économique au Nigeria et, plus particulièrement, des préoccupations relatives à la discrimination fondée sur le sexe effectuée par l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire doit être prise en compte dans le contexte des observations formulées par la famille Caleb dans sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire : Vavilov aux para 94, 127 et 128. Parmi les observations assez détaillées formulées par la famille Caleb au sujet de la situation économique et des autres difficultés au Nigeria, celles se rapportant à la discrimination fondée sur le sexe se limitaient à l’affirmation selon laquelle [traduction] « [l]es femmes ont des taux de chômage particulièrement plus élevés que les hommes. Pour cette raison, si Rosemary doit quitter le Canada, la situation économique de sa famille et la sienne diminuerait puisqu’elle aurait de la difficulté à trouver du travail en raison de la discrimination répandue contre les femmes ». Cette affirmation était suivie d’un renvoi à un extrait des éléments de preuve relatifs à la situation dans le pays en ce qui a trait à la discrimination fondée sur le sexe dans l’emploi. Étant donné que la seule observation formulée par la famille Caleb sur la discrimination était qu’il serait difficile pour Mme Caleb de trouver du travail en raison de la discrimination répandue contre les femmes, il était raisonnable que l’agent apprécie les éléments de preuve, y compris les éléments de preuve personnels, quant à la question de savoir si cette discrimination avait eu une incidence sur l’emploi occupé par Mme Caleb par le passé.  

[18]  De plus, la famille Caleb soutient que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a, de la même façon, exigé qu’ils aient été victimes de violence par le passé et a introduit une obligation de produire des éléments de preuve d’un risque personnalisé ou de difficultés à l’égard de ce facteur. Elle souligne l’extrait qui suit des motifs de l’agent, qui fait suite à une analyse exhaustive des éléments de preuve sur la situation dans le pays relativement à la criminalité et à la violence :

[traduction]

En ce qui concerne la situation particulière des demandeurs, ceux-ci ont habité à Abuja avant d’arriver au Canada. Il y a peu d’éléments de preuve dignes de foi qui démontrent qu’ils ont été victimes d’un quelconque acte criminel. En fait, cette appréciation est prospective, mais j’estime qu’il n’y a pas assez d’éléments de preuve démontrant que les demandeurs ne pouvaient pas demander d’être protégés dans une région comme Abjua [sic]. De plus, le ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni, dans ses conseils sur les voyages à l’étranger, affirme que les grandes villes demeurent à risque, à l’exception d’Abuja.

Pour ce qui est de l’affirmation selon laquelle les demandeurs seraient exposés à un risque personnalisé en raison du temps qu’ils ont passé dans un pays étranger, je ne suis pas convaincu que suffisamment d’éléments de preuve objectifs ont été présentés pour démontrer que les personnes qui retournent au Nigeria, plus particulièrement à Abuja, sont exposées à des risques accrus.

À la lumière de l’information énoncée plus haut, j’ai accordé un poids modéré aux préoccupations se rapportant à la criminalité et à la sécurité au Nigeria. J’estime, évidemment, que la sécurité est plus grande au Canada.

[Non souligné dans l’original.]

[19]  La famille Caleb soutient que cet extrait montre que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire lui a en fait reproché de ne pas avoir montré qu’elle avait été victime d’actes criminels par le passé, et que l’agent a indûment appliqué des principes relatifs à une protection de l’État adéquate relevant de l’appréciation du statut de réfugié à l’analyse des motifs d’ordre humanitaire.

[20]  Toutefois, l’examen de cet extrait dans le contexte des observations formulées par la famille Caleb montre encore que celui-ci était directement dans la lignée des arguments avancés par la famille Caleb. Cette dernière avait initialement demandé l’asile, affirmant que la famille de M. Caleb avait insisté pour que leurs filles subissent la mutilation génitale féminine (la MGF) et l’avait harcelée et menacée lorsqu’elle avait refusé d’obtempérer : Caleb aux para 6 à 11. Cette demande d’asile a été rejetée en raison d’un manque de crédibilité et de l’absence de crainte subjective : Caleb aux para 3 et 12 à 15. Dans sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, la famille Caleb a réitéré sa crainte que les filles soient soumises à la MGF et à des menaces de la part de la famille de M. Caleb. Dans son analyse de [traduction] « la criminalité et la sécurité au Nigeria », la famille Caleb a renvoyé à des éléments de preuve sur la situation dans le pays concernant l’inefficacité et la corruption des services de police au Nigeria, puis a formulé l’observation qui suit :

[traduction]

Nous soumettons que les éléments de preuve présentés plus haut étayent la préoccupation de la demanderesse principale selon laquelle sa famille et elle ne recevront pas la protection de la police/de l’État contre la famille [de M. Caleb], ses menaces et ses attaques.

[21]  Dans ce contexte, il est évident que la première partie de l’extrait des motifs de l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire reproduit plus haut répond directement à cette observation. En premier lieu, il y est conclu qu'il n'y avait pas d’élément de preuve digne de foi montrant que la famille Caleb avait été victime d’un quelconque acte criminel, étant donné le rejet par la Section d’appel des réfugiés du récit relatif aux attaques perpétrées par la famille de M. Caleb. En second lieu, il y est conclu que les éléments de preuve n’étayaient pas l’affirmation de la famille Caleb selon laquelle elle ne pourrait pas recevoir la protection de la police. L’agent n’a pas exigé la présentation d’éléments de preuve voulant que la famille ait été victime d’attaques criminelles ni appliqué des principes relatifs à une protection de l’État adéquate; il a tout simplement répondu directement aux arguments soulevés par la famille Caleb. Cette conclusion est renforcée par le fait que le paragraphe suivant des motifs cité plus haut répondait directement aux observations formulées par la famille Caleb immédiatement après dans la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, qui se rapportaient aux risques auxquels sont exposées les personnes qui retournent au Nigeria.

[22]  Après avoir formulé ces observations dans sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, la famille Caleb ne peut pas maintenant soutenir qu’il était déraisonnable que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire ait abordé les observations et y ait répondu. À vrai dire, le fait d’y avoir répondu est un signe que la décision est raisonnable : Vavilov aux para 127 et 128.

[23]  Contrairement à ce que prétend la famille Caleb dans ses observations, l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a procédé à l’appréciation [traduction] « prospective » voulue et n’a pas rejeté les éléments de preuve sur la situation dans le pays concernant la criminalité et la sécurité parce que la famille Caleb n’avait pas démontré qu’elle avait été victime d’actes criminels par le passé. L’agent a plutôt apprécié l’information dans son ensemble dans le contexte des observations formulées par la famille Caleb et il a accordé un [traduction] « poids modéré » aux préoccupations relatives à la criminalité et à la sécurité au Nigeria. Cela n’était pas déraisonnable.

2)  L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire n’a pas privilégié indûment certains éléments de preuve

[24]  La famille Caleb soulève une seconde préoccupation quant aux motifs reproduits précédemment au paragraphe [12]. Elle soutient que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a indûment insisté sur le niveau de scolarité et sur l’expérience de travail de Mme Caleb en faisant abstraction des autres éléments de preuve et sans tenir compte de la nature générale de l’allégation de la famille Caleb. Je ne puis souscrire à cette affirmation.

[25]  L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a souligné que Mme Caleb est diplômée de l’Université Ambrose Alli, où elle a étudié en administration des affaires. L’expérience de travail de Mme Caleb comprenait une affectation de dix mois au consulat général du Nigeria au Cameroun en 2006-2007, affectation qu’elle avait obtenue avec l’aide d’un oncle. Elle a quitté cet emploi pour rentrer au Nigeria à la demande de M. Caleb, qu’elle avait épousé peu avant. À l’exception de cette affectation, l’expérience de travail de Mme Caleb consistait en la vente de vêtements et de menus objets à partir de son domicile. L’époux de Mme Caleb est aussi instruit et a reçu une formation dans le domaine des technologies de l’information, dans lequel il a occupé un emploi, même si cet emploi ne s’est pas avéré stable au cours des dernières années.

[26]  L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a renvoyé au niveau de scolarité et à l’expérience de travail des parents à trois endroits dans sa décision : une fois quand il a examiné les allégations relatives aux difficultés (l’extrait reproduit au paragraphe [12]), et deux fois dans son analyse de l’intérêt supérieur des enfants Caleb (la première, en appréciant les perspectives d’éducation, soulignant que les parents pourraient assurer [traduction] « une base solide à leurs enfants »; et la seconde, en soulignant que les soins de santé privés [traduction] « pourraient aussi être une option »). Dans chaque cas, l’agent a considéré que le profil de Mme Caleb et de son époux au chapitre de la scolarité et de l’emploi était susceptible d’atténuer certaines des préoccupations soulevées par la famille Caleb au sujet de la situation au Nigeria.

[27]  En examinant les motifs dans leur ensemble, il m’est impossible de conclure que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a indûment ou à mauvais escient insisté sur le niveau de scolarité et l’expérience de travail de Mme Caleb ou qu’il s’est servi de cet élément pour laisser de côté des éléments de preuve sur la situation dans le pays ou d’autres aspects du récit de la famille Caleb. La prise en compte de la situation personnelle d’un demandeur d’asile, y compris d’éléments comme son niveau de scolarité et son expérience de travail, dans l’appréciation de la mesure dans laquelle celui-ci serait exposé à des difficultés à son retour dans son pays n’est pas déraisonnable dans l’analyse des motifs d’ordre humanitaire. C’est en fait un aspect essentiel d’une telle appréciation.

[28]  Comme il est mentionné précédemment, je conviens qu’il serait déraisonnable de supposer que le fait d’avoir un diplôme universitaire était la solution magique qui mettrait le demandeur à l’abri de tous les types de conditions défavorables dans le pays. Contrairement à ce qu’affirme la famille Caleb dans ses observations toutefois, je n’interprète pas les motifs de l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire comme laissant croire qu’il estime que la famille Caleb [traduction] « échappera aux conditions économiques extrêmement précaires au Nigeria et à la discrimination fondée sur le sexe en raison du niveau de scolarité ». L’agent a plutôt pris en compte cet argument parmi d’autres facteurs dans l’appréciation de la question de savoir si des motifs d’ordre humanitaire justifiaient la prise des mesures spéciales demandées. Il a accordé un certain poids aux diverses difficultés relevées dans les éléments de preuve sur la situation dans le pays, mais un poids moindre à ce qui aurait été attendu si la famille Caleb n’avait pas ce niveau de scolarité et d’expérience de travail. Les arguments avancés par la famille Caleb équivalent en fait à une observation selon laquelle l’agent aurait dû accorder moins de poids à son niveau de scolarité et à son expérience de travail, ou aurait dû conclure que les conditions économiques représentaient un facteur plus important en sa faveur qu’il ne l’a fait. Il ne revient pas à la Cour d’apprécier à nouveau les éléments de preuve dans un contrôle judiciaire, si tant est que la démarche de pondération a été effectuée de façon raisonnable : Vavilov au para 125. Je conclus, en l’espèce, que ce fut bel et bien le cas.

B.  L’analyse de l’intérêt supérieur des enfants effectuée par l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire était raisonnable

[29]  La demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire présentée par la famille Caleb mettait en lumière l’intérêt supérieur des quatre enfants Caleb : un frère et une sœur plus âgés qui sont des citoyens du Nigeria, et des jumelles plus jeunes qui sont nées au Canada. Un certain nombre d’observations étaient soulevées dans la demande relativement à l’intérêt supérieur des enfants, soulignant leur réussite et leur établissement au Canada, et les conséquences néfastes pour eux si la famille devait retourner au Nigeria. Ce dernier élément comprenait les systèmes d’éducation et de santé rudimentaires, les risques du travail des enfants, les minces perspectives d’emploi pour les jeunes, et les risques de violence découlant de l’enlèvement et du trafic d’enfants, de la MGF, et de l’organisation terroriste Boko Haram. L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a pris en compte ces facteurs, en les pondérant par rapport à la situation au Nigeria, tout en concluant qu’il y avait peu d’éléments de preuve montrant un risque d’enlèvement, de travail des enfants, ou de menaces de la part de Boko Haram.

[30]  La famille Caleb soutient que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a adopté la mauvaise approche à l’égard de l’analyse de l’ISE. Elle affirme que l’agent a omis de définir ce qui serait dans l’intérêt supérieur des enfants et de voir quel résultat (demeurer au Canada ou retourner au Nigeria) aurait le plus d’incidence sur l’ISE. De plus, elle prétend que l’agent s’est fondé sur la prémisse que la demande reposant sur des motifs d’ordre humanitaire serait rejetée, et a tout simplement conclu qu’aucune des difficultés qui en résulterait ne serait insurmontable, analyse que la Cour a considérée comme étant déraisonnable : Sivalingam au para 17.

[31]  J’estime qu’il n’était pas déraisonnable que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire n’ait pas affirmé expressément que l’ISE serait mieux servi si la famille demeurait au Canada. Comme l’a statué la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Hawthorne, un agent « peut être [réputé] savoir que la vie au Canada peut offrir à un enfant un éventail de possibilités » : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Hawthorne, 2002 CAF 475 au para 5. En l’espèce, l’agent a fait un certain nombre d’affirmations comparant la situation au Nigeria à celle au Canada dans des domaines comme l’éducation et les soins de santé, reconnaissant implicitement que le fait de demeurer au Canada serait dans l’intérêt supérieur des enfants, et appréciant la mesure dans laquelle cet intérêt supérieur pourrait être affecté par l’autre option, soit le renvoi au Nigeria.

[32]  À cet égard, il est, encore, révélateur de prendre en compte les motifs de l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire à la lumière des observations sur l’ISE formulées par la famille Caleb. Un nombre important de ces observations concernaient, de façon raisonnable, les conséquences défavorables pour les enfants d’un renvoi au Nigeria. L’agent a pris en compte et a abordé les observations. Pour cette raison, il est indéfendable de soutenir qu’il était déraisonnable que l’agent effectue une appréciation portant sur les conséquences défavorables du renvoi. À cet égard, contrairement à la décision Patousia invoquée par la famille Caleb, l’agent n’a pas clos sa décision par la question de savoir si les difficultés pour les enfants au Nigeria justifiaient une dispense fondée sur des considérations d’ordre humanitaire et ne s’est pas fondé sur cette question : Patousia c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 876 aux para 54 à 56.

[33]  Je ne vois non plus aucune raison d’interpréter les motifs de l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire comme étant fondés sur une prémisse quant à telle issue ou telle autre. L’agent a plutôt apprécié les conséquences des divers facteurs défavorables au Nigeria qui ont été soulevés par la famille Caleb dans ses observations et leur a accordé un poids selon son appréciation des éléments de preuve.

[34]  Je ne considère pas non plus que le renvoi au niveau de scolarité des parents par l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire dénote une conclusion selon laquelle les enfants ne seraient pas touchés par un déménagement au Nigeria ou que cette scolarisation [traduction] « empêcherait en quelque sorte les enfants d’être exposés aux conditions socio-économiques misérables au Nigeria », comme le soutient la famille Caleb. L’agent a plutôt, comme il est analysé précédemment, reconnu les conditions défavorables qui existent au Nigeria, mais a en même temps souligné que la situation personnelle des parents pourrait atténuer — et non pas éliminer — l’incidence de ces conditions. Nous sommes loin de la prémisse imputée à l’agent par la famille Caleb, soit que le diplôme universitaire de Mme Caleb était un rempart contre toutes les difficultés possibles au Nigeria.

[35]  Le fait de conclure que l’incidence d’un renvoi sur un enfant en particulier pourrait être réduite d’une certaine façon par des facteurs particuliers ne signifie pas en soi que cette incidence a été écartée de façon inappropriée ou que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a indûment introduit un seuil minimum de difficultés. C’est plutôt se montrer sensible au fait que l’incidence de la situation défavorable dans le pays variera selon la situation personnelle de la famille et apprécier la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire dans le contexte particulier des demandeurs. C’est l’appréciation requise par le paragraphe 25(1), qui exige l’étude du « cas de [l’]étranger » et « des considérations d’ordre humanitaire relatives à l’étranger ».

[36]  Toutefois, je conviens avec la famille Caleb que l’une des observations de l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire sur les taux d’alphabétisation n’est guère défendable. Après avoir affirmé que le taux d’alphabétisation au Nigeria est [TRADUCTION] « catastrophiquement faible, avec une moyenne de 59,6 % dont seulement 49,7 % pour les femmes », l’agent a souligné que les statistiques quant à l’alphabétisation variaient à l’intérieur du pays et qu’un rapport de l’UNESCO datant de 2012 [TRADUCTION] « montre que le taux d’alphabétisation à Abuja [où la famille Caleb retournerait vraisemblablement] s’établissait à 62 %, ce qui est supérieur à la moyenne nationale ». Bien que cela puisse être exact dans les faits, je conviens avec la famille Caleb que la différence entre un taux d’alphabétisation de 59,6 % et un taux d’alphabétisation de 62 % est si faible que cette considération est sans importance. Toutefois, il s’agissait d’un seul élément de l’appréciation de la question, qui reconnaissait aussi la scolarité et l’expérience de travail des parents comme étant des circonstances assurant [traduction] « une base solide à leurs enfants ». Je ne peux donc pas conclure qu’une simple comparaison des taux d’alphabétisation rend la décision dans son ensemble déraisonnable. En conclure ainsi équivaudrait à se lancer à tort dans le type de « chasse au trésor [...] à la recherche d’une erreur » contre lequel la Cour suprême du Canada a à maintes reprises mis en garde : Vavilov au para 102. Cela semble plutôt être « une erreur mineure » dans le raisonnement qui ne devrait pas amener la Cour à annuler la décision : Vavilov au para 100.

[37]  De plus, la famille Caleb soutient que l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a omis de prendre en compte le fait que trois des enfants Caleb sont des filles et d’en analyser l’incidence sur les conséquences néfastes auxquelles celles-ci pourraient être exposées au Nigeria, particulièrement en ce qui concerne l’éducation et l’emploi. Même si je conviens que la discrimination fondée sur le sexe constitue un aspect pertinent et important de l’analyse de l’ISE quand il est soulevé, je ne puis blâmer l’agent de ne pas avoir examiné une préoccupation que la famille Caleb n’a pas soulevée dans ses observations. En dépit du fait que la famille Caleb a formulé des observations exhaustives sur l’intérêt supérieur des quatre enfants, ses observations sur la discrimination fondée sur le sexe et sur la violence fondée sur le sexe se sont limitées i) à un renvoi à des statistiques différentielles sur les taux d’alphabétisation et de fréquentation scolaire; ii) aux risques posés par l’organisation terroriste Boko Haram; iii) à un renvoi aux enlèvements et au trafic sexuel; iv) au risque que les filles subissent la MGF. L’agent a abordé chacun de ces facteurs dans ses motifs.

[38]  De façon générale, je suis convaincu que les motifs de l’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire montrent que l’intérêt supérieur des enfants Caleb a été bien identifié et défini, et a été examiné avec beaucoup d’attention : Hawthorne au para 32, citant l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Legault, 2002 CAF 125 aux para 12 et 31. Il serait manifestement dans l’intérêt supérieur des enfants Caleb de demeurer au Canada, comme c’est le cas pour la majorité, sinon la totalité, des demandeurs qui invoquent des motifs d’ordre humanitaire : Osorio Diaz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 373 au para 29, citant la décision Landazuri Moreno c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 481 aux para 36 et 37. Toutefois, ce seul élément n’est pas un facteur déterminant dans l’issue d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire : Landazuri Moreno au para 36. En l’espèce, l’agent a effectué une appréciation raisonnable des facteurs relatifs à l’ISE présentés par la famille Caleb, conformément aux principes établis dans la jurisprudence.

IV.  Conclusion

[39]  L’agent chargé de l’examen des motifs d’ordre humanitaire a pris en compte chacun des éléments présentés par la famille Caleb dans sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, et a relevé des éléments favorables dans la demande, mais, en dernière analyse, n’était pas convaincu qu’il y avait suffisamment d’éléments de preuve pour justifier que la demande soit accueillie. La décision de l’agent était justifiée, transparente et intelligible, et il ne revient pas à la Cour d’apprécier à nouveau la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire ou de lui substituer sa propre décision en l’absence de « lacunes graves » : Vavilov aux para 15, 86, 99 et 100. Je conclus que la décision de l’agent ne comportait pas de telles lacunes en l’espèce.

[40]  La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée. Aucune partie n’a proposé de question à certifier. Je conviens que l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-2947-19

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Nicholas McHaffie »

Juge

Traduction certifiée conforme

Isabelle Mathieu


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2947-19

 

INTITULÉ :

ROSEMARY AGBONMHERE CALEB ET AL c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

le 23 Janvier 2020

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

le juge MCHAFFIE

 

DATE DES MOTIFS :

Le 30 octobre 2020

 

COMPARUTIONS :

Natalie Domazet

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Lorne McClenaghan

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mamann, Sandaluk & Kingwell LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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