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Date : 20001110


Dossiers : T-2529-88 et T-2214-90



ENTRE :

     ARCORP INVESTMENTS LTD.,

     demanderesse,

     - et -

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     défenderesse.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX


INTRODUCTION


[1]      Arcorp Investments Ltd. (Arcorp), société de placement et de gestion, interjette appel, en vertu du paragraphe 172(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la Loi), à l'encontre des nouvelles cotisations établies par le ministre du Revenu national (le ministre) pour les années d'imposition 1984, 1985 et 1986.

[2]      Le ministre a reclassé comme revenu d'entreprise des sommes présentées comme gains en capital qui avaient été gagnées par Arcorp à l'occasion de la disposition de titres de son portefeuille au cours des années d'imposition 1984 et 1985. La nouvelle cotisation de 1986 touche une diminution de l'impôt en main remboursable au titre de dividendes. Les parties conviennent que la validité de la nouvelle cotisation de 1986 est fonction de la qualification comme gains en capital ou comme revenu d'entreprise.

[3]      Selon la position d'Arcorp en appel, les opérations sur titres exécutées au cours de ces années ont été correctement imputées au capital et n'avaient pas un caractère commercial. Selon la position du ministre, Arcorp faisait le commerce de valeurs mobilières.

[4]      Cependant, Arcorp a une position de repli, prétendant qu'elle devrait avoir le bénéfice du choix à vie en faveur des gains en capital exercé selon le paragraphe 39(4) de la Loi. Ce paragraphe prévoit que, sous réserve d'une exception pour les commerçants et courtiers en valeurs mobilières, le contribuable peut choisir que chaque disposition de titres canadiens soit réputée être une disposition de bien en immobilisation.

[5]      Le ministre, de son côté, fait valoir qu'Arcorp n'a pas exercé son choix valablement et que, de toute façon, elle est inadmissible à exercer un tel choix, parce qu'elle est visée par l'exception couvrant les commerçants ou courtiers en valeurs mobilières prévue au paragraphe 39(5) de la Loi.


        

LES FAITS

[6]      Arcorp est une société par actions constituée selon les lois de la Colombie-Britannique et elle était, à l'époque des faits, une société privée au sens du paragraphe 89(1) de la Loi. À l'époque des faits, son seul actionnaire était Robert L. Hodgkinson, employé comme vendeur de titres à commission par Canarim Investment Corp., courtier en valeurs mobilières inscrit en Colombie-Britannique.

[7]      Dans ses déclarations de revenus des années d'imposition de 1980 à 1986, Arcorp a déclaré ses gains en capital nets provenant de la disposition de « titres canadiens » au sens du paragraphe 39(6) de la Loi et par conséquent, pour ces années d'imposition, elle n'a inclus comme gains en capital imposables que la moitié des gains en capital nets indiqués dans ses déclarations de revenu. Elle n'a pas non plus déclaré comme revenu les gains nets provenant de ses opérations sur titres.

[8]      Le ministre a établi une nouvelle cotisation pour les années d'imposition 1984 et 1985 en augmentant le revenu d'Arcorp de 296 297 $ pour l'année d'imposition 1984 et de 158 096 $ pour l'année d'imposition 1985, sur le fondement que les gains tirés par Arcorp de la vente de titres en 1984 et en 1985 constituaient un revenu d'entreprise et non des gains en capital, comme elle les avait déclarés. Arcorp s'est opposée à ces cotisations.

[9]      Ainsi qu'il a déjà été indiqué, le ministre a établi une nouvelle cotisation pour l'année d'imposition 1986, refusant le remboursement au titre de dividendes demandé par Arcorp. Le ministre fondait son refus sur le fait que les gains provenant de la disposition de titres canadiens par Arcorp dans les années d'imposition 1984 et 1985 constituaient un revenu d'entreprise et que, par conséquent, Arcorp n'avait pas de crédit d'impôt en main remboursable au titre de dividendes à la fin de l'année d'imposition 1986. Arcorp s'est opposée à la nouvelle cotisation.

[10]      Le ministre a confirmé les nouvelles cotisations et Arcorp a alors interjeté appel auprès de la Cour.

[11]      Il a été convenu entre les parties qu'Arcorp n'était à aucun moment inscrite pour exercer l'activité de commerçant ou de courtier en valeurs mobilières en vertu d'une loi sur les valeurs mobilières et qu'Arcorp n'a jamais acheté ou vendu de titres pour le compte de tiers.

        

ANALYSE

     1)      Question 1 -- gains en capital ou revenu

[12]      La définition du terme « entreprise » dans la Loi avait, dans les années d'imposition pertinentes d'Arcorp, la formulation suivante :

« entreprise » Sont compris parmi les entreprises les professions, métiers, commerces, industries ou activités de quelque genre que ce soit et, sauf pour l'application de l'alinéa 18(2)c), les projets comportant un risque ou les affaires de caractère commercial, à l'exclusion toutefois d'une charge ou d'un emploi.

[13]      Pour trancher la question concernant la qualification du produit des opérations sur titres d'Arcorp comme gains en capital ou comme revenu, il s'agit d'appliquer les principes suivants :

     1)      La qualification du gain réalisé par le propriétaire de titres comme gain en capital ou comme revenu dépend du point de savoir si le gain est une simple réalisation ou une modification d'un placement (auquel cas il s'agit d'un gain en capital) ou si le gain est plutôt attribuable à ce qui constitue véritablement l'exploitation d'une entreprise (auquel cas il s'agit d'un revenu). Voir Californian Copper Syndicate v. Harris (1904), 5 T.C. 159, que cite en l'approuvant le juge Martland dans l'arrêt Irrigation Industries Ltd. v. M.N.R. 62 D.T.C. 1131 (C.S.C.);
     2)      Le juge Cattanach dans l'affaire Admiral Investments Ltd. c. M.N.R., [1967] 2 R.C.É. 308, à la page 319, a formulé le principe de la façon suivante :
[TRADUCTION] Ce qu'il faut considérer c'est ce que l'appelante faisait, si l'on veut poser la question dans les termes du Lord président Clyde dans l'affaire C.I.R. c. Livingston et al. (11 T.C. 538, à la page 542):
... les opérations impliquées (dans les transactions de la compagnie) sont-elles de même nature et menées de la même façon que celles qui caractérisent le commerce ordinaire d'une même catégorie d'entreprise.
     3)      La question de savoir si une série d'opérations produit soit un gain ou une perte de capital, soit un bénéfice ou une perte d'exploitation constitue une question de fait, qu'il faut trancher en tenant compte de toutes les circonstances de l'espèce (voir Wellington Hotel Holdings Ltd. c. M.N.R., 73 DTC 5391 à la page 5396, le juge Urie (tel était alors son titre));

    

     4)      L'objet de la société n'est pas pertinent pour décider cette question. Le juge Locke s'est exprimé en ces termes dans l'arrêt Sutton Lumber and Trading Company Limited v. M.N.R., [1953] 2 R.C.S. 77:
[TRADUCTION] La question à trancher n'est pas de savoir quelles activités ou quel commerce la société aurait pu exercer en vertu de son acte constitutif mais plutôt quelle était l'activité qu'elle a exercée en fait. Pour trancher cette question, il faut examiner les faits avec soin.
     5)      « Il faut accorder plus de poids à la façon d'agir du contribuable qu'au témoignage oral des dirigeants de la société lorsqu'il s'agit d'établir l'intention de la société dans une situation où il y un conflit particulier entre les deux. » Cette position a été formulée par le juge Heald à la page 5518 dans l'affaire Canada Permanent Mortgage Corporation v. M.N.R., 71 D.T.C. 5509.

[14]      Dans ce contexte, la question à trancher est de savoir si les opérations sur titres d'Arcorp au cours de 1984 et 1985 comportent les caractéristiques d'opérations ordinaires sur titres. Pour trancher cette question, il ne s'agit pas de déterminer si une opération particulière effectuée par Arcorp constitue un projet comportant un risque ou une affaire de caractère commercial, notion qui s'applique habituellement à des opérations isolées. C'est plutôt l'ensemble des activités du contribuable qu'il faut prendre en compte.

[15]      Dans l'arrêt Sa Majesté la Reine c. Vancouver Art Metal Works Ltd., [1993] 2 C.F. 179 (C.A.F.), où il s'agissait de déterminer si le contribuable était un commerçant ou un courtier en valeurs mobilières, le juge Létourneau a fait observer, à la page 187 :

     La question de savoir si une série d'actes équivaut à l'exploitation d'un commerce ou d'une entreprise constitue toutefois une question de fait. Chaque cas sera jugé selon les faits qui lui sont propres. Il est évident que les facteurs tels que la fréquence des opérations, le temps pendant lequel les valeurs ont été conservées, (pour réaliser un bénéfice rapide ou pour en faire un placement à long terme, par exemple), l'intention d'acheter pour revendre à profit, la nature et la quantité des valeurs mobilières détenues ou qui font l'objet de l'opération, le temps consacré à l'activité en question, sont tous des facteurs pertinents et qui aident à déterminer si une personne exerce un commerce ou une entreprise de courtage.

[16]      Durant l'exercice 1984 d'Arcorp, 1) son actif se composait presque exclusivement de titres négociables ayant une valeur marchande de 1 138 163 $ à la fin de l'exercice; 2) elle a acheté ou vendu 1 595 735 actions de 32 sociétés du secteur des ressources naturelles (mines, pétrole et gaz) négociées sur le Vancouver Stock Exchange (VSE), pour un produit de disposition de 1 445 037,43 $ et un gain net de 592 594,79 $.

[17]      Durant l'exercice 1985 d'Arcorp, 1) son actif se composait encore presque exclusivement de titres négociables ayant une valeur marchande de 474 658 $ à la fin de l'exercice; 2) elle a négocié environ 900 000 actions de 24 sociétés du secteur des ressources naturelles (dont un certain nombre qui faisaient partie de son portefeuille à la fin de l'exercice 1984), pour un produit de disposition de 1 009 092,72 $ et un gain net de 316 192 $.

[18]      Les titres et les opérations effectuées sur ceux-ci par Arcorp présentaient les caractéristiques suivantes :

     1)      le nombre d'actions détenues par Arcorp dans chacune des sociétés du secteur des ressources naturelles était considérable : par exemple, en 1984, Arcorp détenait plus de 100 000 actions dans six sociétés du secteur des ressources naturelles;
     2)      pour la plupart, ces actions étaient des actions cotées en cents, très spéculatives, souvent souscrites par M. Hodgkinson dans le cadre de placements privés, dans l'attente de l'inscription à la cote du VSE;
     3)      l'âme dirigeante d'Arcorp était M. Hodgkinson, lequel, ainsi qu'il a déjà été indiqué, était employé, à l'époque des faits, comme vendeur de titres à commission par Canarim Investment Corp. (Canarim), courtier en valeurs mobilières inscrit auprès de qui Arcorp avait un compte; en outre, dans certains cas, Canarim participait au placement ou à l'appel public à l'épargne de sociétés dont Arcorp avait souscrit des actions dans le cadre d'un placement privé;
     4)      les opérations sur titres étaient fréquentes. En 1985, Arcorp a enregistré quelque 460 opérations, soit une moyenne de plus de 38 par mois. En 1984, le nombre d'opérations était du même ordre;
     5)      dans la plupart des cas, Arcorp ne gardait pas les actions en portefeuille pour une durée très longue (moins d'un an). Dans les cas où elle a conservé les titres pour des périodes plus longues, il semble que c'est parce qu'elle ne pouvait les vendre en raison de sa situation d'initié ou parce que des restrictions sur la négociation étaient en place lorsque les actions qui avaient fait l'objet d'un placement privé donnaient lieu à un appel public à l'épargne ou étaient inscrites à la cote du VSE;
     6)      les opérations sur titres pouvaient se faire rapidement et de façon intensive : les achats d'actions s'effectuaient sur plusieurs jours au cours d'une période courte et, à certaines occasions, en plus d'une opération par jour (jusqu'à quatre opérations par jour sur les actions d'une société);
     7)      dans plusieurs cas, les opérations sur les titres d'une société comprenaient à la fois des achats et des ventes au cours d'un même mois.

[19]      L'application des principes définis plus haut aux opérations sur titres d'Arcorp en 1984 et 1985 me conduit à conclure, sans hésitation, que le bénéfice net ainsi réalisé par Arcorp doit être considéré comme un revenu tiré par Arcorp de l'exercice de l'activité de commerçant ou de courtier en valeurs mobilières, parce que ses opérations sont de même nature et sont menées de la même façon que celles qui caractérisent le commerce ordinaire d'une même catégorie d'entreprise.

[20]      La présente affaire offre une grande similarité avec l'affaire Gairdner Securities Ltd. v. M.N.R., [1954] C.T.C. 24 (C.S.C.), dans laquelle l'appelante était devenue une société personnelle et avait adopté un mode de négociation semblable à celui décrit plus haut. Aux pages 26 et 27, le juge Rand a fait observer :

     [TRADUCTION] Ces opérations complémentaires d'achat et de vente, à première vue, présentent le caractère d'une façon d'agir visant à réaliser un profit comme résultat ultime... mais on prétend que toutes ces opérations ne sont que de simples modifications de placements, au sens strict, par opposition au commerce des valeurs mobilières, et qu'elles produisent des gains ou des pertes en capital.
     Il n'est pas nécessaire de s'attarder sur cette prétention. Les placements, au sens invoqué, visent d'abord le maintien d'un rendement annuel sous forme de dividendes ou d'intérêts. Des substitutions de titres ont lieu, mais elles visent cet objectif fondamental et y sont subordonnées. D'après les faits établis, il n'y a pas le moindre doute, à mon avis, qu'il n'y avait pas un tel objectif prédominant en l'espèce.

[21]      J'ai pris en considération le témoignage de M. Hodgkinson, qui a indiqué au moins trois facteurs ayant contrecarré les plans d'Arcorp de conserver ces titres comme placements à long terme :

     1)      ses placements personnels dans des immeubles à appartements et dans des centres commerciaux se sont révélés désastreux, exigeant des mises de fonds considérables;
     2)      de même, le règlement financier découlant de la rupture de son mariage exigeait des liquidités;
     3)      l'achat en 1984 d'une maison coûteuse.

[22]      Les explications de M. Hodgkinson ne me persuadent pas que l'objectif prédominant des opérations d'Arcorp en 1984 et 1985 n'était pas de réaliser des bénéfices au moyen des opérations sur les titres plutôt que de voir dans ces titres des placements à long terme qui produiraient des intérêts et des dividendes. À vrai dire, son besoin désespéré d'argent explique pourquoi Arcorp, dont il était l'âme dirigeante, avait recours à des opérations fréquentes d'achat et de vente de titres pour réaliser des bénéfices, donc en vue d'obtenir un revenu. En outre, le témoignage de M. Hodgkinson n'explique pas pourquoi, durant ces années, Arcorp effectuait souvent des achats de titres et ne se contentait pas de liquider des titres pour répondre aux besoins d'argent de son unique actionnaire.


     2)      Question 2 -- Arcorp a-t-elle exercé un choix selon le paragraphe 39(4) de la Loi?

[23]      Le paragraphe 39(4) de la Loi, édicté en 1977, prévoit la possibilité pour le contribuable d'exercer un choix aux termes duquel les gains ou les pertes réalisés sur des titres canadiens sont traités comme des gains ou des pertes en capital.

[24]      La question qui se pose en l'espèce est de savoir si Arcorp a bien exercé un tel choix en 1980 lorsqu'elle a produit sa déclaration de revenus, du fait que, entre 1977 et 1983, il n'y avait pas de formulaire particulier prescrit que le contribuable devait utiliser pour exercer ce choix. Ce formulaire (T-123) était disponible en 1982, mais n'est devenu prescrit qu'en mars 1983.

[25]      L'avocat du ministre fait valoir que la demanderesse n'a pas exercé un choix valable lorsqu'elle a déposé sa déclaration de revenus des sociétés pour l'année d'imposition 1980, parce qu'il n'y avait aucune indication claire, jointe à sa déclaration, du fait qu'elle exerçait un choix. Il invoque la décision du juge Joyal dans l'affaire Hawkins c. Sa Majesté la Reine (1991), 51 F.T.R. 216 : pour qu'un choix soit valablement exercé selon l'article 44 de la Loi de l'impôt sur le revenu, il faut qu'une lettre soit jointe à la déclaration.

[26]      Dans son argumentation, l'avocat du ministre a relevé que l'article 44 de la Loi avait une formulation identique à celle du paragraphe 39(4), soit « si le contribuable fait un choix, en vertu du présent paragraphe, dans sa déclaration de revenu produite en vertu de la présente partie » .

[27]      De son côté, l'avocat d'Arcorp a rappelé la réponse du ministre sur les engagements donnés à l'interrogatoire préalable, à savoir que la pratique administrative du ministère, dans le cas où aucun formulaire n'avait été prescrit, était d'accepter la méthode utilisée dans la déclaration comme l'indication du choix exercé par le contribuable selon les diverses dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[28]      À mon avis, la décision Hawkins, précitée, n'est pas pertinente par rapport aux faits de l'espèce, parce que, dans cette affaire, le Bulletin d'interprétation publié par le ministère établissait clairement que le choix selon l'article 44 de la Loi devait prendre la forme d'une lettre jointe à la déclaration de revenus. Or, les Bulletins d'interprétation qu'on m'a cités ne contenaient pas de directive semblable à l'égard du choix selon le paragraphe 39(4).

[29]      Selon la preuve, Arcorp a commencé à déclarer le produit de ses opérations sur titres comme des gains en capital en 1980 et elle a continué de procéder ainsi, notamment dans les années d'imposition 1984 à 1986.

[30]      Puisque ce choix à vie était exprimé dans sa déclaration, en conformité avec la pratique du ministère, je conclus qu'Arcorp a effectivement exercé un choix selon le paragraphe 39(4) lorsqu'elle a produit sa déclaration de revenus de 1980 et que ce choix avait effet pour les années d'imposition ultérieures.



     3)      Question 3 -- Arcorp avait-elle le droit d'exercer un choix?

[31]      Le paragraphe 39(4) de la Loi comporte des exceptions, prévues au paragraphe 39(5); la première de ces exceptions vise le commerçant ou courtier en valeurs mobilières.

[32]      La conclusion à laquelle j'en suis venu sur la question 1 a pour effet de trancher la question 3 et cela est confirmé par l'arrêt de la Cour d'appel fédérale Vancouver Art Metal Works, précité.

[33]      La question soumise à la Cour d'appel fédérale était la suivante :

     Les mots « un commerçant ou un courtier en valeurs mobilières » au paragraphe 39(5) de la Loi de l'impôt sur le revenu désignent-ils seulement la personne inscrite auprès d'une instance de réglementation ou autorisée par celle-ci à acheter et à vendre des valeurs mobilières, ou la personne qui, dans le cours normal des affaires, achète et vend des valeurs mobilières pour le compte d'autrui, ou leur sens est-il assez large pour embrasser tout autre que la personne engagée dans un projet comportant un risque ou une affaire de caractère commercial?

[34]      Le juge Létourneau a conclu qu'il fallait donner aux mots « un commerçant ou un courtier » leur sens courant. Ces termes désignent habituellement celui qui fait le commerce des marchandises, qui achète et vend ou dont l'entreprise est le commerce. De l'avis du juge Létourneau, il ne faisait aucun doute que le contribuable dont la profession ou l'entreprise consiste à acheter et à vendre des valeurs mobilières est un commerçant ou un courtier en valeurs mobilières au sens de l'alinéa 39(5)a) de la Loi.

[35]      Le juge Létourneau a conclu dans les termes suivants :

     En adoptant les paragraphes 39(4) et 39(5), le législateur n'avait, selon moi, nullement l'intention de permettre au contribuable, dont l'entreprise ou la profession consiste à acheter et à vendre des valeurs mobilières, de convertir ses revenus ou ses pertes d'entreprise en gains ou pertes en capital comme peut le faire un simple investisseur engagé dans un projet comportant un risque de caractère commercial. En outre, à mon humble avis, limiter l'étendue de l'exception aux commerçants et aux courtiers inscrits ou autorisés conformément aux conclusions du juge de première instance aurait d'étranges conséquences. Le contribuable dont l'entreprise consiste à faire le commerce des valeurs mobilières pourrait faire le choix prévu au paragraphe 39(4), convertir son revenu en gains en capital et échapper à l'exception visant les courtiers non parce qu'il n'en est pas un, mais simplement parce qu'il n'est ni inscrit ni autorisé comme l'exigent les instances de réglementation.

[36]      Comme je l'ai rappelé, sur la question 1, j'ai conclu que les activités sur titres d'Arcorp sont de nature commerciale et présentent un mode de fonctionnement similaire à celui d'un commerçant en valeurs mobilières. Je conclus donc qu'Arcorp était un commerçant en valeurs mobilières au sens de l'alinéa 39(5)a) de la Loi et n'avait pas le droit de faire un choix selon le paragraphe 39(4).

DÉCISION

[37]      L'avocat d'Arcorp a plaidé que, si je devais conclure qu'Arcorp était un commerçant ou un courtier en valeurs mobilières et ne pouvait, de ce fait, se prévaloir du choix selon le paragraphe 39(4), il me faudrait déterminer parmi les opérations sur valeurs mobilières celles qui étaient imputables au revenu et celles qui étaient imputables au capital, parce que le commerçant en valeurs mobilières comme le commerçant en immeubles ou en toute autre marchandise a le droit d'avoir des placements au titre du capital, qu'il faut distinguer des placements au titre du revenu.

[38]      J'estime que l'argument est mal fondé. D'abord, la déclaration d'Arcorp, en date du 2 décembre 1998, n'est pas rédigée sur ce fondement; ensuite, je juge que, de façon globale, toutes les opérations sur titres effectuées par Arcorp en 1984 et 1985 font partie d'un plan d'ensemble visant à réaliser un bénéfice et que les gains en découlant constituaient un revenu.

                        

[39]      Pour tous ces motifs, les deux actions de la demanderesse sont rejetées avec dépens.

     François Lemieux

    

     J U G E


OTTAWA (ONTARIO)

LE 10 NOVEMBRE 2000

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.





Date : 20001110


Dossier : T-2529-88

OTTAWA (ONTARIO), LE VENDREDI 10 NOVEMBRE 2000

EN PRÉSENCE DE :      MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX


ENTRE :

     ARCORP INVESTMENTS LTD.,

     demanderesse,

     - et -

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     défenderesse.




     ORDONNANCE


     Pour les motifs indiqués, l'action de la demanderesse est rejetée, avec dépens.



     François Lemieux

    

     J U G E


Traduction certifiée conforme


Christiane Bélanger, LL.L.





Date : 20001110


Dossier : T-2214-90

OTTAWA (ONTARIO), LE VENDREDI 10 NOVEMBRE 2000

EN PRÉSENCE DE :      MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX


ENTRE :

     ARCORP INVESTMENTS LTD.,

     demanderesse,

     - et -

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     défenderesse.




     ORDONNANCE


     Pour les motifs indiqués, l'action de la demanderesse est rejetée, avec dépens.



     François Lemieux

    

     J U G E

Traduction certifiée conforme


Christiane Bélanger, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


N DU DOSSIER :              T-2529-88
INTITULÉ DE LA CAUSE :      Arcorp Investments Ltd c. Sa Majesté La Reine
LIEU DE L'AUDIENCE :          Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L'AUDIENCE :          le 24 février 2000
                     le 25 février 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX

EN DATE DU :              10 novembre 2000

ONT COMPARU :

Craig C. Sturrock

Thomas A. Bauer                          pour la demanderesse
Linda Bell                              pour la défenderesse

AVOCATS AU DOSSIER :

Thorsteinssons

Vancouver (Colombie-Britannique)                  pour la demanderesse

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada         
Ottawa (Ontario)                          pour la défenderesse

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


N DU DOSSIER :              T-2214-90
INTITULÉ DE LA CAUSE :      Arcorp Investments Ltd c. Sa Majesté La Reine
LIEU DE L'AUDIENCE :          Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L'AUDIENCE :          le 24 février 2000
                     le 25 février 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX

EN DATE DU :              10 novembre 2000

ONT COMPARU :

Craig C. Sturrock

Thomas A. Bauer                          pour la demanderesse
Linda Bell                              pour la défenderesse

AVOCATS AU DOSSIER :

Thorsteinssons

Vancouver (Colombie-Britannique)                  pour la demanderesse

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada         
Ottawa (Ontario)                          pour la défenderesse
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