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Date : 20060214

Dossier : IMM-2414-05

Référence : 2006 CF 162

Ottawa (Ontario), le 14 février 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE SHORE

ENTRE :

JAWAD KAWTHARANI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

INTRODUCTION

[1]                Les motifs d'une décision sont adéquats lorsqu'ils sont clairs, précis et intelligibles. Leur logique inhérente permet de saisir les points en litige soulevés par la preuve.

LA PROCÉDURE JUDICIAIRE

[2]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire, aux termes du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR), d'une décision d'un agent de l'immigration (l'agent CH), rendue le 4 avril 2005, qui rejetait la demande d'exemption pour considérations humanitaires (demande CH) que le demandeur avait présentée pour pouvoir déposer une demande de résidence permanente à partir du Canada.

HISTORIQUE

[3]                Le demandeur, M. Jawad Kawtharani, a 38 ans et est originaire du Liban. Il a quitté le Liban en septembre 1997 et est arrivé au Canada en septembre 1998. Il a alors déposé une demande d'asile, qui a été rejeté le 17 juin 1999.

[4]                M. Kawtharani a ensuite déposé une demande CH en mai 2002, qui a été rejetée en septembre 2003. Il a déposé une deuxième demande CH en décembre 2003, qui a été rejeté le 4 avril 2005. C'est cette décision qui fait l'objet du présent contrôle.

[5]                Malgré le rejet de sa demande d'asile, M. Kawtharani est resté au Canada depuis 1998 et y est maintenant établi.

LA DÉCISION FAISANT L'OBJET DU CONTRÔLE JUDICIAIRE

[6]                L'agent CH a conclu que, même si M. Kawtharani a montré un certain degré d'établissement au Canada, il n'a pas prouvé qu'il ferait face à de grandes difficultés s'il devait déposer une demande de résidence permanente de l'extérieur du Canada. L'agent CH n'était pas convaincu qu'il existait suffisamment de considérations humanitaires pour exempter M. Kawtharani des exigences réglementaires d'obtention d'un visa.

[7]                M. Kawtharani est un homme de 38 ans originaire du Liban qui est arrivé au Canada en septembre 1998. Il a déposé des demandes d'asiles dans plusieurs pays, qui ont toutes été rejetées. Il a eu la possibilité de déposer une demande d'asile au Canada, qui a aussi été rejetée. La demande CH précédente de M. Kawtharani, déposée en mai 2002, a été rejetée en septembre 2003. De plus, selon la décision faisant l'objet du présent contrôle judiciaire, M. Kawtharani n'a pas présenté de preuves suffisantes qu'il serait exposé personnellement à un risque s'il retournait au Liban pour justifier une évaluation des risques.

[8]                Une grande partie de la famille de M. Kawtharani se trouve au Liban. Sa famille réside dans la région sud de Tefahta, région où il résidait lui-même avant d'arriver au Canada. Il est un citoyen du Liban, où il a vécu, travaillé et étudié en tant qu'adulte. M. Kawtharani parle l'arabe et connaît bien les coutumes et procédures locales. La décision faisant l'objet du contrôle judiciaire précise que les membres de la famille de M. Kawtharani sont en mesure de lui offrir un soutien affectif, sinon un soutien financier.

[9]                Selon le dossier de M. Kawtharani, il s'est fait des amis au Canada et y a aussi acquis une expérience professionnelle. Il est important de noter que M. Kawtharani est resté au Canada pendant cinq ans, malgré le fait que sa demande d'asile ait été rejetée. La conclusion de la décision faisant l'objet du présent contrôle judiciaire était que M. Kawtharani ne ferait pas face à des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives s'il devait quitter le Canada et déposer une demande de visa d'immigration de l'extérieur du Canada, de la façon habituelle. La demande de dérogation au paragraphe 11(1) de la LIPR est rejetée.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[10]            Les questions en litige en l'espèce sont les suivantes :

1.       L'agent CH a-t-il omis d'observer les règles d'équité procédurale en ne présentant pas suffisamment de motifs pour appuyer sa décision selon laquelle M. Kawtharani n'était pas suffisamment établi au Canada?

2.       L'agent CH a-t-il omis d'évaluer l'élément de risque du point de vue de grandes difficultés?

3.       L'agent CH a-t-il mal compris la preuve au sujet du degré des difficultés auxquelles M. Kawtharani ferait face à son retour au Liban, ou a-t-il omis d'en tenir compte?

ANALYSE

La norme de contrôle

[11]            La norme de contrôle générale pour les décisions des agents d'immigration portant sur des demandes CH est la décision raisonnable simpliciter. (Baker; Adu)1

[12]            Cependant, la considération du caractère suffisant des motifs soulève une question d'équité procédurale. Pour les questions d'équité procédurale, la norme de contrôle appropriée est la décision correcte. (Adu, précité, au paragraphe 9) (Fetherson)2

Le régime légal

[13]            En vertu du paragraphe 11(1) de la LIPR, une personne doit déposer une demande de résidence permanente de l'extérieur du Canada.

11.       (1) L'étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l'agent les visa et autres documents requis par règlement, lesquels sont délivrés sur preuve, à la suite d'un contrôle, qu'il n'est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

11.       (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document shall be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

[14]            Cependant, conformément à l'article 25 de la LIPR, le ministre a le pouvoir discrétionnaire de faciliter l'admission d'une personne au Canada, ou de l'exempter de tout critère ou obligation prévu par la LIPR, s'il est convaincu qu'une telle exemption ou facilitation devrait être accordée en raison de l'existence de considérations humanitaires.

25.       (1) Le ministre doit, sur demande d'un étranger interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, de sa propre initiative, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s'il estime que des circonstances d'ordre humanitaire relatives à l'étranger - compte tenu de l'intérêt supérieur de l'enfant directement touché - ou l'intérêt public le justifient.

25.       (1) The Minister shall, upon request of a foreign national who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on the Minister's own initiative, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

[15]            Le processus de décision pour les demandes CH est tout à fait discrétionnaire et sert à déterminer si l'octroi d'une exemption est justifié. Par conséquent, le rejet d'une demande CH n'enlève aucun droit au demandeur. (Jasim)3

[16]            Il revenait à M. Kawtharani de prouver que les difficultés auxquelles il ferait face, s'il devait déposer sa demande de résidence permanente de l'extérieur du pays, seraient inhabituelles, injustifiées ou excessives. Les difficultés inhérentes au fait de quitter le Canada ne sont pas suffisantes. (Irimie)4

[17]            L'agent d'immigration peut tenir compte de nombreux facteurs lorsqu'il examine une demande CH. La Cour a déjà mentionné qu'un agent d'immigration a le droit de tenir compte, entre autres choses, de la façon dont le demandeur est entré et est resté au Canada, et si le demandeur possède un emploi ou a des parents dans son pays d'origine. Aucun facteur pris individuellement ne peut avoir un effet déterminant sur le résultat d'une demande particulière5.

[18]            Dans les cas où une personne n'a pas le droit de rester au Canada, et qu'elle le fait sans qu'il existe de circonstances indépendantes de sa volonté, la Cour conclut que cette personne ne devrait pas être récompensée pour avoir accumulé du temps au Canada. (Chau)6

Le caractère adéquat des motifs

[19]            Les motifs d'une décision sont adéquats lorsqu'ils sont clairs, précis et intelligibles, et lorsqu'ils précisent les raisons pour lesquelles une décision a été prise. Des motifs adéquats doivent permettre de saisir les points en litige soulevés par la preuve. Ils ne devraient pas être examinés à la loupe. (Mehterian;Medina)7

[20]            Le processus de prise de décision pour une demande CH nécessite l'examen de nombreux facteurs différents (tels qu'ils sont déterminés par la preuve présentée à l'agent CH) et l'appréciation de ces facteurs combinés. Comme aucun facteur pris individuellement ne peut avoir un effet déterminant sur le résultat, des motifs adéquats portant sur un seul facteur ne devraient pas permettre de tirer une conclusion finale au sujet d'une demande. Par exemple, l'évaluation de l'établissement dans les motifs ne peut pas, en elle-même, expliquer le dénouement d'une demande. Cette décision finale ne peut être tirée que lorsque l'agent CH a examiné et apprécié tous les facteurs pertinents.

[21]            Dans ses motifs, l'agent CH énonce clairement que M. Kawtharani fait preuve d'un certain établissement au Canada. Cependant, l'établissement n'est pas évalué sur la base de réussite/échec, et ce n'est pas le seul facteur qui doit être évalué. Par conséquent, les motifs de l'agent CH reflètent correctement une évaluation de tous les facteurs pertinents combinés. Plus particulièrement, l'agent CH note que M. Kawtharani ne s'était pas établi à un point tel qu'il ne pouvait pas déposer sa demande de résidence permanente de la façon habituelle. L'agent CH a noté que, bien que les preuves présentées par M. Kawtharani comprenaient des lettres de recommandation attestant de son attitude positive à l'égard du travail et de son caractère intègre, les documents fournis au sujet de son établissement ne prouvaient pas que le demandeur était incapable de se trouver un emploi et un logement à l'extérieur du Canada.

[22]            Les motifs de la décision en l'espèce sont différents de ceux exposés dans l'affaire Adu, précitée, qui a été citée par l'avocat de M. Kawtharani. Dans cette affaire, seuls des facteurs favorables avaient été mentionnés, sans qu'il y ait d'explication appuyant la décision défavorable qui s'était ensuivie. En l'espèce, l'agent CH a noté plusieurs facteurs (y compris la décision du demandeur de rester au Canada pendant cinq ans après le rejet de sa demande d'asile, la famille du demandeur qui est toujours au Liban, les connaissances du demandeur au sujet du Liban et le manque de preuve attestant que le demandeur serait incapable de se trouver un emploi et un logement au Liban) qui appuyaient la conclusion que M. Kawtharani ne ferait pas face à des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives si une exemption pour des considérations humanitaires lui était refusée.

[23]            Contrairement aux allégations de M. Kawtharani, les motifs comprennent plusieurs références à la situation personnelle du demandeur et portent clairement sur sa demande CH. Il n'y a aucune erreur susceptible de révision par rapport au caractère adéquat des motifs de l'agent CH.

L'évaluation des risques

[24]            M. Kawtharani allègue que l'agent CH aurait dû évaluer les risques, dans le contexte des difficultés, auxquels il ferait face s'il retournait au Liban. M. Kawtharani soutient que l'agent CH a commis une erreur en omettant de faire cette évaluation.

[25]            L'agent CH n'a pas à évaluer les risques dans le cadre d'une demande CH. Il ne s'agit pas d'un facteur à évaluer. La demande CH n'est pas un examen des risques avant renvoi (ERAR), il ne s'agit donc pas d'une évaluation des risques auxquels le demandeur pourrait faire face.

[26]            Dans Sherzady c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)8, il est mentionné que, bien qu'un agent d'ERAR puisse évaluer des facteurs CH dans certains cas, il n'a pas à tenir compte de ces facteurs dans le contexte d'un ERAR. Il existe deux processus distincts auxquels un demandeur peut avoir recours : la demande d'ERAR et la demande CH. Chaque processus possède ses propres critères et facteurs particuliers qui doivent être examinés par un agent. Dans le même ordre d'idées, il a été conclu dans l'affaire Zolotareva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)9, qu'un agent d'ERAR peut avoir la compétence d'effectuer une évaluation CH pour l'application du paragraphe 25(1) de la LIPR, si cette tâche lui a été déléguée de façon adéquate par le ministre.

[27]            La Directives 5 de Citoyenneté et Immigration pour le traitement des demandes au Canada, chapitre IP 5 : Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d'ordre humanitaire, à l'article 13.3, énonce qu'un agent CH doit évaluer uniquement les facteurs qui ne portent pas sur le risque dans le contexte d'une demande CH. Lorsque cette évaluation est terminée, s'il n'existe pas assez de raisons pour accueillir la demande et que le demandeur a mentionné des risques en particulier, il est possible de tenir un ERAR à la suite de l'évaluation CH, en tenant compte de la jurisprudence et des réserves qui y sont exprimées, tel qu'expliqué ci-dessous.

[28]            Dans Babilly c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)10, le juge John A. O'Keefe a examiné la directive IP 5 afin de déterminer le rôle d'un agent CH. Il mentionne que lorsqu'un agent CH a conclu qu'il n'existait pas suffisamment de raisons d'ordre humanitaire pour accueillir la demande, l'agent doit envoyer une demande d'évaluation des risques à un agent d'ERAR. Dans le cas où un agent CH omet d'envoyer cette demande, il déroge à son obligation en matière d'équité procédurale.

Le demandeur soutient que le décideur CH a manqué à l'obligation d'équité procédurale qu'il avait envers lui en ne déférant pas sa demande à un agent ERAR pour examen du risque et en ne lui écrivant pas pour lui demander de fournir des renseignements additionnels sur le risque personnalisé invoqué dans sa demande CH.

Les Directives IP5 prescrivent que si, après l'évaluation des facteurs CH autres que le risque, le décideur CH estime que les motifs sont non suffisants par eux-mêmes pour justifier l'approbation de la demande CH, la demande est expédiée pour examen du risque à un agent ERAR (section 13.4). En l'espèce, la demande n'a pas été déférée à un agent ERAR.

...

Vu les faits, je suis d'avis qu'il y a eu manquement à l'obligation d'équité procédurale. Le décideur CH a omis d'obtenir du demandeur des précisions sur le risque personnalisé qu'il alléguait, et il n'a pas déféré l'affaire à un agent ERAR pour évaluation du risque. L'évaluation en bonne et due forme ne pouvait être faite qu'après une demande de précisions sur l'allégation de risque personnalisé, ainsi qu'il est indiqué dans les Directives IP5.

[29]            L'agent CH a évalué la preuve et a conclu qu'il n'y avait pas suffisamment de raisons d'ordre humanitaire pour accueillir la demande de M. Kawtharani. Après avoir tiré cette conclusion, l'agent CH n'a pas fait parvenir la demande de M. Kawtharani à un agent d'ERAR pour une évaluation des risques; cependant, il n'avait pas à le faire, parce que M. Kawtharani n'avait pas allégué que sa vie serait menacée ou qu'il serait torturé ou traité de façon cruelle et inusitée, mais qu'il ferait plutôt face à des difficultés. Par conséquent, l'agent CH n'a pas commis une erreur en ne faisant pas parvenir la demande à un agent d'ERAR pour l'évaluation des risques. Il n'y a eu aucune violation de l'équité procédurale.

L'évaluation des difficultés

[30]            Il ne fait aucun doute que l'agent CH n'a pas l'obligation de mentionner tous les éléments de preuve qui lui ont été présentés. (Sidhu; Rodriguez) 1[1]

[31]            Dans ses motifs, l'agent CH énumère les observations de M. Kawtharani. En réponse à ces observations, l'agent CH a tiré des conclusions au sujet de la situation à laquelle M. Kawtharani ferait face s'il retournait au Liban. En fonction de ces conclusions, il était raisonnable de la part de l'agent CH de décider que M. Kawtharani ne ferait pas face à des difficultés inhabituelles, inusitées ou excessives s'il devait présenter une demande de résidence permanente de l'extérieur du Canada.

[32]            Le degré d'établissement d'un demandeur n'a pas un effet déterminant sur une demande CH (Klais)12. Il s'agit seulement d'un des facteurs à évaluer. L'agent CH reconnaît effectivement que M. Kawtharani s'est établi dans une certaine mesure au Canada; cependant, cet établissement ne signifie pas qu'il existe automatiquement suffisamment de raisons d'ordre humanitaire pour accueillir la demande de M. Kawtharani. L'agent CH doit effectuer une évaluation complète de tous les facteurs pertinents avant de prendre une décision.

[33]            Dans Dhillon c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)13, la Cour a examiné les directives du ministre au sujet des décisions CH :

Les décisions prises par les agents d'immigration aux termes du paragraphe 25(1) de la Loi sont encadrées par des lignes directrices émises par le ministre. Ces lignes directrices énoncent en partie ce qui suit :

Il incombe au demandeur de prouver au décideur que son cas particulier est tel que la difficulté de devoir obtenir un visa de résident permanent de l'extérieur du Canada serait :

(i)                    soit inhabituelle et injustifiée;

(ii)                  soit excessive.

Le demandeur peut exposer les faits qu'il juge pertinents, quels qu'ils soient.

[...]

Toute décision CH favorable est une mesure d'exception en réponse à des circonstances particulières. Elle est plus complexe et plus subjective que la plupart des autres décisions d'immigration, parce que l'agent utilise son pouvoir discrétionnaire d'évaluer les circonstances personnelles du demandeur.

[...]

On appelle difficulté inhabituelle et injustifiée :

-               la difficulté (de devoir demander un visa de résident permanent hors du Canada) à laquelle le demandeur s'exposerait serait, dans la plupart des cas, inhabituelle ou, en d'autres termes, une difficulté non prévue à la Loi ou à son Règlement;

-                la difficulté (de devoir demander un visa de résident permanent hors du Canada) à laquelle le demandeur s'exposerait serait, dans la plupart des cas, le résultat de circonstances échappant au contrôle de cette personne.

[...]

Des motifs d'ordre humanitaire peuvent exister dans des cas n'étant pas considérés comme « inusités ou injustifiés » , mais dont la difficulté (de présenter une demande de visa de résident permanent à l'extérieur du Canada) aurait des répercussions disproportionnées pour le demandeur, compte tenu des circonstances qui lui sont propres.

[34]            L'évaluation des difficultés effectuée par l'agent CH est conforme à ces directives. L'agent a examiné tous les éléments de preuve qui lui ont été présentés avant de prendre une décision. La preuve ne l'a pas convaincu que M. Kawtharani ferait face à des difficultés inhabituelles, inusitées ou excessives s'il devait présenter une demande de résidence permanente de l'extérieur du Canada. Il n'est pas inhabituel ou inattendu qu'une personne qui s'est établie au Canada subisse des difficultés si elle doit déposer une demande de résidence permanente de l'extérieur du Canada. M. Kawtharani est resté pendant cinq ans après que sa demande d'asile eut été rejetée. Même s'il est maintenant établi au Canada, il ne peut pas s'attendre à ce que ce fait seul lui permette d'être exempté des exigences habituelles.

[35]            De plus, la plupart des éléments de preuve sur lesquels M. Kawtharani s'est appuyé pour soutenir qu'il ne trouverait pas d'emploi au Liban et qu'il serait condamné à la pauvreté n'étaient pas à jour. Bien que ces éléments illustrent peut-être la période précédant le départ de M. Kawtharani du Liban en septembre 1997, leur valeur est douteuse pour l'évaluation de la situation à laquelle le demandeur ferait face actuellement au Liban s'il devait y retourner.

CONCLUSION

[36]            L'agent CH n'a pas dérogé à son obligation en matière d'équité procédurale en n'exposant pas des motifs adéquats au sujet de l'établissement insuffisant de M. Kawtharani au Canada. L'agent a exposé des motifs adéquats permettant à M. Kawtharani de comprendre sa décision.

[37]            Il n'y a eu aucune violation de l'équité procédurale de la part de l'agent CH parce qu'il n'a pas renvoyé l'affaire à un agent d'ERAR pour l'évaluation des risques. Ce renvoi n'était pas nécessaire parce que M. Kawtharani n'avait pas prétendu que sa vie serait menacée ou qu'il serait torturé ou traité de façon cruelle et inusitée.

[38]            De plus, la décision que M. Kawtharani ne ferait pas face à des difficultés inhabituelles, inusitées ou excessives s'il devait déposer sa demande de résidence permanente de l'extérieur du Canada n'était pas une décision déraisonnable. L'agent CH a examiné tous les éléments de preuve pertinents et la décision était appuyée correctement par la preuve.

[39]            Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée, parce qu'il n'y a aucune raison d'infirmer la décision de l'agent CH.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.          La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

2.          Aucune question n'est certifiée.

« Michel M.J. Shore »

JUGE

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice



COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                        IMM-2414-05

INTITULÉ :                                       JAWAD KAWTHARANI

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :               Le 30 janvier 2006

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       Le juge Shore

DATE DES MOTIFS :                      Le 14 février 2006

COMPARUTIONS :

Chantal Desloges                                   POUR LE DEMANDEUR

Bernard Assan                                       POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

GREEN AND SPIEGEL                       POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

JOHN H. SIMS c.r.                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-ministre de la Justice

Sous-procureur général



[1] Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, [1999] A.C.S. no 39, au paragraphe 62; Adu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2005] A.C.F. no 693 (QL), 2005 CF 565, au paragraphe 7.

2 (Canada) Procureur général c. Fethertson, ○12005] A.C.F. no 544 (QL), 2005 CAF 111.

3 Jasim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] A.C.F. no 1290 (QL), 2003 CF 1017.

4 Irimie c. Canada(Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1906 (QL).

5 Legault c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] A.C.F. no 457 (QL), 2002 CAF 125, aux paragraphes 62 et 63; Pasteanu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 955 (QL), 2001 CFPI 608, au paragraphe 16.

6 Chau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] A.C.F. no 199 (QL), 2002 CFPI 107, aux paragraphes 15 et 16.

7 Mehterian c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] A.C.F. no 545 (C.A.) (QL); Medina c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1990] A.C.F. no 926 (C.A.) (QL).

8 [2005] A.C.F. no 638 (QL), 2005 CF 516.

9[2003] A.C.F. no 1596 (QL), 2003 CF 1274, au paragraphe 18.

10[2004] A.C.F. no 1771 (QL), 2004 CF 1469, aux paragraphes 21, 22 et 27.

11 Sidhu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 741 (QL), aux paragraphes 15 et 16; Rodriguez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 664 (QL), 2001 CFPI 414, au paragraphe 18.

12 Klais c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2004] A.C.F. no 965 (QL), 2004 CF 785, au paragraphe 11.

13[2005] A.C.F. no 1336 (QL), 2005 CF 1067, au paragraphe 15.

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