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Date : 19990505


Dossier : T-477-98

OTTAWA (ONTARIO), LE MERCREDI 5 MAI 1999

EN PRÉSENCE CE MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX

ENTRE :

     JOHN E. CANNING LTD.,

     demanderesse,

     - et -

     TRIPAP INC.,

     défenderesse.

        

     T-110-98

ENTRE :

     McKEIL MARINE LIMITED,

     demanderesse,

     - et -

     JOHN E. CANNING LTD.,

     défenderesse,

     - et -

     TRIPAP INC.,

     mise en cause.

    


     O R D O N N A N C E

     VU la requête écrite présentée sur le fondement des règles 105 et 369 des Règles de la Cour fédérale (1998) afin que la Cour ordonne la réunion ou l'instruction conjointe de la présente instance et de celle engagée devant la Cour fédérale par McKeil Marine Limited ("McKeil") et dont le nE de dossier est T-110-98, ou la suspension de l'instance engagée par McKeil jusqu'à ce qu'une décision soit rendue à l'égard de la présente action ou de celle intentée en Cour supérieure du Québec par Tripap Inc. (dossier nE 400-05-001814-988);

     LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT:

     Pour les motifs rendus, la requête de Canning visant la réunion des instances T-477-98 et T-110-98 et le sursis à l'instance est rejetée dans sa totalité, et les dépens sont adjugés à McKeil quelle que soit l'issue de la cause.

     "François Lemieux"

    

     J U G E

Traduction certifiée conforme

Claire Vallée, LL.B.


Date : 19990505


Dossier : T-477-98

ENTRE :

     JOHN E. CANNING LTD.,

     demanderesse,

     - et -

     TRIPAP INC.,

     défenderesse.

     T-110-98

ENTRE :

     McKEIL MARINE LIMITED,

     demanderesse,

     - et -

     JOHN E. CANNING LTD.,

     défenderesse,

     - et -

     TRIPAP INC.,

     mise en cause.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX:

[1]      La demanderesse, John E. Canning Ltd. ("Canning") a présenté par écrit, dans le dossier T-477-98, une requête fondée sur la règle 369 des Règles de la Cour fédérale (1998) , DORS/98-106 afin que la Cour ordonne, en application de la règle 105, que l'instance T-477-98 à laquelle Tripap Inc. ("Tripap") est partie défenderesse et l'instance T-110-98 dans le cadre de laquelle McKeil Marine Ltd. ("McKeil") est demanderesse, Canning est défenderesse et Tripap est mise en cause par Canning soient réunies ou instruites conjointement.

[2]      Subsidiairement, Canning demande à la Cour de surseoir à l'instance engagée par McKeil (T-110-98) jusqu'à ce qu'une décision soit rendue à l'égard de l'action intentée par Canning (T-477-98) ou de l'action intentée en Cour supérieure du Québec par Tripap contre Canning.

[3]      Voici le texte de la règle 105 des Règles de la Cour fédérale (1998):


105. La Cour peut ordonner, à l'égard de deux ou plusieurs instances

     a) qu'elles soient réunies, instruites conjointement ou instruites successivement;
     b) qu'il soit sursis à une instance jusqu'à ce qu'une décision soit rendue à l'égard d'une autre instance;
     c) que l'une d'elles fasse l'objet d'une demande reconventionnelle ou d'un appel incident dans une autre instance.

105. The Court may order, in respect of two or more proceedings,

     (a) that they be consolidated, heard together or heard one immediately after the other;
     (b) that one proceeding be stayed until another proceeding is determined; or
     (c) that one of the proceedings be asserted as a counterclaim or cross-appeal in another proceeding.

LES INSTANCES

a)      Contexte

[4]      Canning achète et vend du bois dans la province de l'Île-du-Prince-Édouard.

[5]      McKeil est un transporteur maritime public.

[6]      Tripap fabrique du papier journal dans ses installations de Trois-Rivières, au Québec.

[7]      En mars 1997, Canning a conclu un contrat pluriannuel de fourniture de bois à Tripap (le "contrat de fourniture de bois").

[8]      En avril 1997, Canning a conclu avec McKeil un contrat distinct d'affrètement pour le transport de son bois jusqu'aux installations de Tripap à Trois-Rivières pendant des périodes d'expédition allant jusqu'en 2001 (le "contrat de transport").

[9]      Après quelques mois d'exécution du contrat, les choses se sont gâtées. Les deux contrats ont été résiliés pour diverses raisons. Le contrat de fourniture de bois a été résilié par Tripap en juin 1997, et le contrat de transport l'a été en décembre 1997 par Canning. D'où les deux actions intentées devant la Cour et la Cour supérieure du Québec.

b)      L'action de McKeil (T-110-98)

[10]      McKeil a engagé la première instance en produisant une déclaration au greffe de la Cour et en constituant Canning partie défenderesse. Dans sa déclaration datée du 23 janvier 1998, McKeil allègue la résiliation illégale du contrat de transport par Canning et l'inexécution contractuelle consistant en l'omission de Canning, en 1997, d'offrir le transport des quantités minimales de bois stipulées dans le contrat.

[11]      Canning a déposé une défense et une demande reconventionnelle. Bien qu'elle reconnaisse l'existence du contrat de transport de bois, Canning en interprète la teneur et la portée différemment et elle conteste le calcul du tarif marchandises sur lequel se fondent les dommages-intérêts réclamés par McKeil. De façon plus cruciale, Canning allègue que McKeil a manqué à ses obligations contractuelles ou a refusé d'exécuter le contrat en ne fournissant pas de barge à temps ou en omettant par ailleurs de s'acquitter de ses obligations contractuelles, de sorte que Canning pouvait résilier le contrat en décembre 1997. Subsidiairement, Canning prétend que lorsque McKeil et elle ont conclu le contrat, McKeil savait que Canning serait en mesure de respecter le contrat tant que Tripap s'acquitterait de ses obligations envers Canning. Comme Tripap a manqué à son obligation contractuelle d'acheter le bois de Canning, il est devenu impossible d'exécuter le contrat de transport.

[12]      Dans sa demande reconventionnelle contre McKeil, Canning répète essentiellement ses allégations en défense et demande des dommages-intérêts spéciaux pour rupture de contrat ou refus d'exécuter.

[13]      McKeil a contesté toutes les allégations de Canning, a nié les manquements et a invoqué le cas fortuit à titre subsidiaire.

[14]      Le 23 mars 1993, Canning a signifié à Tripap un avis de mise en cause auquel étaient joints à titre d'annexe A, un exemplaire de la déclaration de McKeil et, à titre d'annexe B, la déclaration de Canning visant Tripap et dans laquelle elle allègue l'existence du contrat de fourniture de bois, la conclusion du contrat de transport à la connaissance de Tripap et avec son assentiment, la résiliation illégale du contrat de fourniture de bois par Tripap et l'impossibilité consécutive d'exécuter le contrat de transport, l'obligation de Tripap, dans les circonstances, de dédommager Canning en totalité ou en partie quant aux dommages-intérêts que la Cour pourrait lui ordonner de verser à McKeil dans le cadre de l'action.

[15]      Le 16 juin 1998, dans la défense qu'elle a produite en qualité de mise en cause relativement à la déclaration de McKeil, Tripap prétend essentiellement n'avoir pas été au courant des allégations de McKeil visant Canning et ne pas avoir été partie au contrat conclu avec McKeil.

[16]      Le 16 juin 1998, Tripap a produit à titre de mise en cause une défense dans laquelle elle nie les allégations de Canning ou soutient n'avoir pas été au courant de ces allégations, et elle nie toute participation aux relations d'affaires entre Canning et McKeil. Elle ajoute que, en février 1998, elle a intenté contre Canning, devant la Cour supérieure du Québec, une action dans laquelle elle allègue la rétention illégale d'avances contractuelles se chiffrant à 545 527,00 $, versées en application du contrat de fourniture de bois pour l'obtention de remises et dont elle demande la restitution.

c)      L'action de Canning (T-477-98)

[17]      Le 23 mars 1998, Canning a produit au greffe de la Cour une déclaration visant Tripap. Ses prétentions sont simples. Elle allègue le contrat pluriannuel de fourniture de bois signé par Tripap et elle en mars 1997, la résiliation illégale de ce contrat par Tripap le 9 juin 1997, les pertes importantes qui en ont résulté et le préjudice subi, notamment la perte de ventes et de bénéfices, l'atteinte à la réputation et l'engagement de dépenses substantielles, entre autres pour l'obtention d'une barge et de matériel.

[18]      Après quelques escarmouches initiales, le 23 novembre 1998, Tripap a donné suite à l'instance engagée par Canning en déposant une défense et une demande reconventionnelle dans laquelle, à l'exclusion de tout aveu, elle soutient que la Cour n'a pas compétence pour connaître de l'affaire.

[19]      Dans sa défense, Tripap conteste l'interprétation du contrat par Canning, allègue la légalité de la résiliation du contrat, remet en question l'étendue du préjudice, allègue la non-limitation de celui-ci et l'absence de justification des dépenses d'affrètement d'une barge.

[20]      Tripap a ensuite demandé à la Cour de déclarer qu'elle n'était pas compétente pour connaître de l'action intentée par Canning. À cette fin, elle a fait valoir la nature du contrat intervenu entre Canning et elle, les conditions du contrat, l'action intentée par McKeil (dossier T-110-98), les allégations et la demande reconventionnelle de Canning et l'instance engagée devant la Cour supérieure du Québec.

[21]      Dans le cas où la Cour conclurait qu'elle a compétence, Tripap a produit une demande reconventionnelle dans laquelle elle demande essentiellement la restitution des avances consenties à Canning comme elle le fait dans l'instance engagée devant la Cour supérieure du Québec.

ARGUMENTATION

[22]      À l'appui de sa requête pour réunion d'instances et sursis à l'instance, Canning fait valoir que les actions soulèvent des questions de droit et de fait identiques, car elles se fondent sur des prétentions qui découlent d'accords relatifs au transport maritime de bois et le montant des dommages-intérêts réclamés par Canning à Tripap comprennent celui des dommages-intérêts que McKeil réclame à Canning. Canning fait valoir que les témoins seront essentiellement les mêmes dans l'une et l'autre des instances.

[23]      McKeil s'oppose à la requête de Canning parce qu'elle n'est partie ni à l'action de Canning devant la Cour ni à l'action de Tripap devant la Cour supérieure du Québec. Son seul lien avec ces affaires réside dans le fait que ses barges devaient servir au transport du bois de Canning jusqu'aux installations de Tripap; il n'y a pas d'identité des questions de droit, des questions de fait, de la nature des prétentions, des causes d'action et du règlement ultime du différend qui oppose les parties. McKeil estime que la réunion d'instances ferait en sorte que l'interrogatoire préalable et l'instruction durent plus longtemps et coûtent plus cher. En ce qui concerne le sursis à son action jusqu'à ce qu'une décision soit rendue à l'égard des actions de Canning et de Tripap, McKeil soutient que cette mesure lui porterait préjudice. McKeil propose que la mise en cause de Tripap par Canning dans le cadre de son action soit dissociée de celle-ci et réunie à l'action de Canning, de telle sorte que les droits et les obligations de Canning et de Tripap puissent être circonscrits dans le cadre d'une seule action.

[24]      En réponse, Canning fonde son argumentation sur l'identité des questions de droit et de fait en ce qui concerne, dans le cas du contrat de fourniture de bois, a) les déclarations et les incitations de McKeil, dans le cas du contrat de transport, b) la connaissance et l'assentiment de Tripap et dans le cas des deux contrats en général, c) la participation en toute connaissance de cause des parties à une entreprise commune. Canning a aussi fait valoir des arguments contre la dissociation de sa mise en cause de Tripap et sa réunion à son action.

[25]      En réponse à la requête en réunion d'instances et sursis à l'instance formulée par Canning, Tripap a lié sa position à cet égard à sa contestation de la compétence de la Cour dans le cadre de l'action de Canning.

ANALYSE

a)      La réunion d'instances

[26]      La réunion de deux actions est habituellement ordonnée lorsque les questions soulevées par les allégations dans les deux instances sont suffisamment familières ou semblables pour que soient respectés les critères que sont l'intérêt général de la justice, sa bonne administration et l'intérêt véritable des parties.

[27]      La réunion d'instances vise généralement à éviter la multiplication des instances et à assurer le déroulement rapide et à moindre coût des instances engagées. Pour déterminer s'il y a lieu ou non d'ordonner la réunion des instances, la Cour tient compte des facteurs suivants : l'identité des parties et des questions de droit et de fait, la similitude des causes d'action, le caractère parallèle de la preuve et la probabilité que l'issue d'une affaire permette de régler l'autre (voir Eli Lilly and Co. c. Apotex Inc. et Eli Lilly and Co. c. Apotex Inc., 55 C.P.R. (3d) 429, et Mon-Oil Ltd. c. Canada (1989), 27 F.T.R. 50).

[28]      À mon avis, Canning n'a pas établi l'opportunité de réunir les deux instances; aucune des conditions préalables à la réunion d"instances n'est respectée quant aux deux actions.

[29]      McKeil n"est pas partie à l"action intentée par Canning contre Tripap.

[30]      Il n"y a pas d"identité substantielle des questions de fait et de droit soulevées dans les deux actions. Dans son action, McKeil allègue la rupture du contrat de transport conclu avec Canning. En défense et en demande reconventionnelle, Canning soulève des questions de droit concernant la portée du contrat, sa durée, le calcul du préjudice, le refus d"exécution, la rupture et l"impossibilité d"exécution. En réponse, McKeil invoque le cas fortuit. L"action de Canning contre Tripap soulève des questions tout à fait différentes. Elle porte sur la fourniture de bois à Tripap, elle met l"accent sur la prétendue résiliation illégale du contrat par Tripap et sur le préjudice subi par Canning.

[31]      Vu cette disparité des questions de droit et de fait, les interrogatoires préalables et l"instruction ne sauraient être simplifiés par la réunion des instances. Le règlement de l"action de Canning n"emportera pas celui de l"action de McKeil non plus que de l"action de Tripap. Au contraire, la réunion des instances est susceptible de prolonger et d"embrouiller l"instruction des deux actions.

[32]      Canning prétend que des questions identiques sont soulevées relativement aux déclarations de McKeil qui l"ont incitée à conclure avec Tripap le contrat de fourniture de bois, à l"assentiment donné par Tripap à la conclusion du contrat de transport et à la connaissance qu'avaient toutes les parties de l"existence des deux contrats.

[33]      La réunion d"instances n"est justifiée que s"il y a identité substantielle des questions de droit et de fait et des redressements demandés. Les déclarations que McKeil auraient faites à Canning au sujet de Tripap se rapportent au contrat de fourniture de bois, et non au contrat de transport. L"assentiment de Tripap vise le contrat de transport, et non le contrat de fourniture de bois. Les déclarations distinctes qu"auraient faites McKeil et Canning se rapportent à des actions distinctes.

[34]      Dans sa requête, Canning demande à la Cour d"ordonner que les deux actions soient instruites conjointement ou, peut-être, successivement. Je partage l"avis du juge Rothstein, exprimé dans l"affaire Eli Lilly and Co. , précitée, selon lequel il convient de se pencher sur l"opportunité d"une telle ordonnance lorsque les parties ont atteint l"étape de la mise au rôle. Par ailleurs, Tripap a demandé que l"action de Canning soit rejetée pour le motif que la Cour n"a pas compétence. La requête de Tripap est toujours pendante.

[35]      En réponse à la requête de Canning, McKeil a préconisé la dissociation de la mise en cause de Tripap par Canning dans le cadre de l"action de McKeil et sa réunion à l"action intentée par Canning contre Tripap.

[36]      La dissociation est possible en application de la règle 106 lorsque l"audition de deux causes d"action ou plus dans une même instance compliquerait indûment ou retarderait le déroulement de celle-ci ou porterait préjudice à une partie.

[37]      Vu les faits dont est issue la requête en réunion d'instances de Canning, il est pour l"instant inapproprié d"ordonner la dissociation et ce, pour les motifs suivants. Premièrement, la dissociation est demandée à titre subsidiaire par rapport à l"opposition de McKeil à la requête en réunion d"instances de Canning, et j"ai refusé de faire droit à cette requête. Deuxièmement, il est préférable d"examiner l"opportunité d"ordonner la dissociation une fois que les interrogatoires préalables ont eu lieu et que l"audition des actions peut débuter. Troisièmement, sans m"appuyer sur ce point pour rendre ma décision, je suis d"avis que McKeil aurait dû demander une ordonnance de dissociation dans le cadre d"une requête distincte, et non en réponse à la requête en réunion d"instances de Canning.

b) Le sursis à l"instance

[38]      Canning demande qu"il soit sursis à l"instance engagée par McKeil jusqu"à ce qu"une décision soit rendue à l'égard de l'action intentée par Canning devant la Cour ou de l"action intentée par Tripap en Cour supérieure du Québec, ou les deux.

[39]      Les arguments formulés par Canning sont essentiellement les mêmes que ceux invoqués à l"appui de sa requête en réunion d"instances fondée sur la règle 105.

[40]      La requête en sursis présentée par Canning emporte l"application du paragraphe 50(1) de la Loi sur la Cour fédérale , dont voici le libellé :


50. (1) La Cour a le pouvoir discrétionnaire de suspendre les procédures dans toute affaire_:

     a) au motif que la demande est en instance devant un autre tribunal;
     b) lorsque, pour quelque autre raison, l'intérêt de la justice l'exige.

50. (1) The Court may, in its discretion, stay proceedings in any cause or matter,

     (a) on the ground that the claim is being proceeded with in another court or jurisdiction; or
     (b) where for any other reason it is in the interest of justice that the proceedings be stayed.
a)      Sursis à l"instance engagée par McKeil jusqu"à ce qu"une décision soit rendue à l'égard de l"action intentée par Canning devant la Cour

[41]      Le critère applicable à ce genre de sursis a été énoncé par le juge Wetston dans Compulife Software Inc. c. Compuoffice Software Inc. (1997), 143 F.T.R. 19, où il dit ce qui suit aux pages 22 et 23 :

                      Il est de jurisprudence constante qu'une suspension d'instance ne peut être accordée que si l'on peut démontrer : (1) que la poursuite de l'action causerait un préjudice ou une injustice au défendeur, et non de simples inconvénients ou frais supplémentaires; (2) que la suspension ne serait pas injuste pour le demandeur. C'est à celui qui demande la suspension qu'il incombe de démontrer que ces conditions sont réunies                 
                      La Cour n'accorde une suspension d'instance en vertu du paragraphe 50(1) de la Loi sur la Cour fédérale, dans l'exercice son pouvoir discrétionnaire, que dans les cas les plus patents. Pour déterminer si le fait d'accorder une suspension causerait une injustice au demandeur ou au requérant, la Cour répugne à limiter tout droit de recours, sauf s'il y a un risque que deux tribunaux différents rendent prochainement une décision sur la même question                 

[42]      Les motifs du juge Wetston dans Compulife Software Inc., précité, s"appuient sur des décisions antérieures de la Cour, notamment Mon-Oil Limited c. Canada, précitée, dans laquelle le juge Cullen fait sien le critère dégagé par le juge Reed dans l"action T-266-88 :

                 Le requérant doit également démontrer que la suspension ne causerait pas d"injustice ou de préjudice importants à l"intimé. Comme on peut le constater, les principes pertinents n"exigent pas simplement l"application du critère de la prépondérance des inconvénients. Aussi, le fardeau du requérant est-il plus lourd.                 

[43]      La requête de Canning ne satisfait pas au critère applicable au sursis à l"instance engagée par McKeil devant la Cour jusqu"à ce qu"une décision soit rendue à l'égard de son action devant notre Cour. Tout d"abord, la requête de Canning est essentiellement le reflet fidèle de sa requête en réunion d"instances, qui n"a pas été accueillie. Deuxièmement, vu l"absence d"identité des deux actions, je ne vois aucun risque que des décisions contradictoires soient rendues. Troisièmement, et ce facteur importe davantage, un sursis causerait un préjudice important à McKeil.

b)      Sursis à l"instance engagée par McKeil jusqu"à ce que l"action de Tripap en Cour supérieure du Québec soit entendue

[44]      La requête présentée par Canning pour qu"il soit sursis à l"instance engagée par McKeil jusqu"à ce qu"une décision soit rendue à l'égard de l"action de Tripap en Cour supérieure du Québec ne peut être accueillie. Pour que l"alinéa 50(1)a ) de la Loi sur la Cour fédérale s"applique, l"action de McKeil devant la Cour doit être identique ou très semblable, quant à ses éléments essentiels, à l"action de Tripap en Cour supérieure du Québec (voir Fruit of the Loom Inc. c. Chateau Lingerie Mfg. Co. Ltd. (1984), 79 C.P.R. (2d) 274). Ce n"est manifestement pas le cas en l"espèce. McKeil n"est pas partie à l"action de Tripap, et l"instance engagée par McKeil devant notre Cour contre Canning diffère fondamentalement de celle engagée par Tripap contre Canning en Cour supérieure du Québec.

[45]      Pour que l"alinéa 50(1)b ) s"applique, l"intérêt de la justice doit exiger qu"il soit sursis à l"instance. J"ai déjà analysé la question relativement à la demande présentée par Canning pour qu"il soit sursis à l"instance engagée par McKeil devant la Cour. Un préjudice important serait infligé à McKeil, et le droit de recours de cette dernière devant la Cour serait indûment limité.

[46]      Pour ces motifs, la requête en réunion d"instances et en sursis à l"instance présentée par Canning est rejetée en totalité, et les dépens sont adjugés à McKeil quelle que soit l"issue de la cause.

     "François Lemieux"

    

     J U G E

OTTAWA (ONTARIO)

5 MAI 1999

Traduction certifiée conforme

Claire Vallée, LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE : T-110-98

INTITULÉ DE LA CAUSE : MCKEIL MARINE LIMITED c. JOHN E. CANNING LTD. et TRIPAP INC.

REQUÊTE FONDÉE SUR LA RÈGLE 369 ET DATÉE DU 3 DÉCEMBRE 1998

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU JUGE LEMIEUX en date du 5 mai 1999.

ONT COMPARU :

Me RUI M. FERNANDES                  POUR LA DEMANDERESSE
Me R. WAYNE MYLES                  POUR LA DÉFENDERESSE
Me PATRICE BOUDREAU                  POUR LA MISE EN CAUSE

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

FERNANDES, HEARN, THEALL              POUR LA DEMANDERESSE

TORONTO (ONTARIO)

BENSON MYLES                      POUR LA DÉFENDERESSE

ST. JOHN"S (TERRE-NEUVE)

JOLI-COEUR, LACASSE, LEMIEUX,          POUR LA MISE EN CAUSE

SIMARD, ST-PIERRE

TROIS-RIVIÈRES (QUÉBEC)


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE : T-447-98

INTITULÉ DE LA CAUSE : JOHN E. CANNING LTD. c. TRIPAP INC.

REQUÊTE FONDÉE SUR LA RÈGLE 369 et DATÉE DU 3 DÉCEMBRE 1998

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU JUGE LEMIEUX en date du 5 mai 1999.

ONT COMPARU :

Me R. WAYNE MYLES                  POUR LA DEMANDERESSE
Me PATRICE BOUDREAU              POUR LA DÉFENDERESSE

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

BENSON MYLES                      POUR LA DEMANDERESSE

ST. JOHN"S (TERRE-NEUVE)

JOLI-COEUR, LACASSE, LEMIEUX,          POUR LA DÉFENDERESSE

SIMARD, ST-PIERRE

TROIS-RIVIÈRES (QUÉBEC)

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